the sweetest of words
Un grand merci à myositice *étoiles*
Makiaaaang *tears of joy*
– Je dois solliciter l'emprunt de l'un de vos shinobi, Orochimaru informe poliment son sensei.
Sarutobi lève les yeux, écartant la pipe de ses lèvres, et l'espace d'un instant, son regard vacille. L'expression qui en découle danse sur son visage, se glisse à nouveau dans ses pupilles puis disparaît, mais Orochimaru l'a vu, et il sait qu'il ne se trompe pas.
Cela fait un peu plus d'une semaine depuis qu'il a réintégré ce corps âgé de trente-six ans, Danzo frappant à la porte pour lui faire une proposition qui détruirait son futur en tant que ninja de Konoha. Sept jours. Presque rien, honnêtement, particulièrement face aux doutes qui ont la peau dure et aux soupçons d'ores et déjà bien ancrés. Orochimaru en a conscience. Sarutobi a toujours laissé son regard traîner sur lui plus longtemps que sur les autres, le surveillant de près. Tsunade a toujours été franche et brusque, facile à lire. Jiraiya a toujours eu le cœur sur la main et une détermination à toute épreuve. Il peut facilement être rangé dans la catégorie des grandes bouches au grand cœur et au cerveau qui ne peut pas vraiment suivre avec l'un où l'autre. Mais Orochimaru…
Orochimaru est un prodige, une machine à tuer et Sarutobi-sensei est bien conscient qu'il est celui dont il doit le plus se méfier, ce, malgré la fierté qu'il ressent en voyant la part qu'il a jouée dans la montée des échelons de son élève. Sarutobi est sans aucun doute capable à la fois de l'aimer et de le craindre, et ce mélange d'émotions sous-jacent a toujours été inchangé à son égard. Seuls la proportion de ses sentiments et le choix du Sandaime de se concentrer sur le second plutôt que le premier y ont changé quelque chose.
À cette époque-ci, Sarutobi lui porte toujours de l'affection, le voit toujours comme un fils, et Orochimaru n'a aucun scrupule à s'en servir, quelles que soient les inquiétudes de son sensei.
Le silence s'installe entre eux l'espace d'un battement, avant que Sarutobi ne le rompe d'un soupir, expirant un nuage de fumée agréable qui tourbillonne et s'échappe par la fenêtre ouverte pour rejoindre les ténèbres de la nuit tombante.
– Orochimaru, dit-il, son ton quelque part entre une once de lassitude et un brin d'inquiétude. Nous avons déjà parlé de ça par le passé. Je ne peux tolérer aucune expérimentation…
Orochimaru plisse le nez sans parvenir à s'en empêcher - cela fait bien longtemps depuis la dernière fois qu'il a dû se retenir après tout - et les yeux de Sarutobi se plissent légèrement. En voyant ça, Orochimaru lève la main pour mettre un terme à la réprimande avant même qu'elle ne puisse débuter. Il l'a entendue être dirigée à l'attention de Jiraiya à bien assez de reprises pour qu'elle soit encore ancrée dans son esprit, même (pour lui) des dizaines d'années plus tard.
– J'ai d'ores et déjà rendu mon rapport assurant la fermeture de tous mes centres de recherches, rappelle-t-il, et la pensée même le lance imperceptiblement.
Ces laboratoires étaient fabuleux. Tout aussi élégants et sophistiqués que ceux qu'il possédait à Oto, construits selon ses moindres spécifications. Mais à cette époque-là, il vaut mieux retirer cette tentation - et avec elle, les doutes qui pèsent sur lui concernant son statut de loyal shinobi de Konoha. Namikaze Minato a peut-être déjà été nommé comme candidat au poste d'Hokage, mais Orochimaru n'a aucune intention de laisser le passé (futur ?) se répéter, et dans ce but, il tentera au moins de se placer à la meilleure position comme prochain conseiller de celui-ci. Ou même comme une oreille bienveillante avec laquelle on peut partager quelques pensées sur le meilleur chemin à prendre pour le bien du village - à ce stade, il est prêt à faire l'un ou l'autre.
Ses prochaines actions serviront à efficacement nouer des relations de confiance, cela dit, avant toute chose, il doit toujours parvenir à convaincre Sarutobi d'accéder à sa requête.
Mettant de l'ordre dans ses pensées errantes - parce qu'il a l'habitude d'être celui qui décide de chaque détail, et donc est habitué à accepter d'avoir ce petit luxe rien que pour lui - Orochimaru lève les yeux pour rencontrer ceux perçants et immuables de Sarutobi.
– Pas d'expérimentations, répète-t-il tout en laissant Sarutobi lire la véracité de sa déclaration sur son visage.
Il n'a franchement jamais été très doué lorsqu'il s'agit de dissimuler quelque chose à son ancien professeur.
L'assistance de Danzo est la seule raison pour laquelle il y est parvenu la dernière fois, en plus des propres préoccupations de l'Hokage avec l'intronisation de Minato et son départ en retraite.
– En revanche, je souhaiterais quelqu'un de compétent et préférablement, avec une large gamme de compétences. J'ai récemment reçu un renseignement pour le moins… inquiétant d'un informateur dans le nord et me vois obliger d'aller moi-même enquêter, étant donné les circonstances et le statut actuel de la guerre.
Les sourcils de Sarutobi se hausse légèrement au mot « inquiétant », puis il les fronce. Orochimaru n'a jamais été quelqu'un qui a pour habitude d'exagérer ses propos - c'est plutôt le genre de Jiraiya, Orochimaru préfère les euphémismes secs, si on peut dire qu'il a une préférence.
Il perçoit aisément la manière dont Sarutobi pèse chacun de ses mots sur son visage marqué et retient tout juste un soupir de soulagement lorsque la balance penche en sa faveur, bien que ce ne soit pas passé loin. Évidemment, c'est aussi un avantage pour lui que la situation de la Troisième Grande Guerre Ninja évolue aussi rapidement en ce moment même et ainsi que Sarutobi ne puisse pas laisser le moindre éventuel danger lui passer sous le nez.
– Jiraiya ne revient pas du front avant près de quatre jours, est tout ce qu'il déclare cependant.
C'est à vrai dire l'une des raisons pour lesquelles Orochimaru espère pouvoir partir dans la nuit. Toute la semaine passée, Jiraiya s'est accroché à lui comme des rougeurs tenaces dont on n'arriverait pas à se débarrasser, et si Orochimaru n'est pas en soi… mécontent de la tournure des événements, pour le moment ce n'est rien sauf incommodant. Il a besoin de l'aide de quelqu'un qui ne le connaît pas assez bien pour questionner la moindre action qui pourrait paraître… étrange de la part de l'homme qu'il était.
Un léger grognement ramène le regard d'Orochimaru sur son sensei qui l'observe avec amusement, montrant qu'il a deviné abstraitement quelle direction ont prise ses pensées à l'instant.
– Ah, murmure le Sandaime en arquant l'un de ses sourcils et en replaçant sa pipe au coin de ses lèvres dans un sourire légèrement suffisant. Alors, c'est comme ça, mon garçon.
Orochimaru roule les yeux, faisant en sorte que Sarutobi capte son expression même si elle est très subtile, et évite de commenter.
Sarutobi se met doucement à rire, un air chaleureux couvrant rapidement la méfiance persistante qui s'attarde dans ses yeux.
– Je présume que tu as déjà une idée de qui tu voudrais emmener ? demande-t-il, au lieu de poursuivre sur ce terrain-là.
Orochimaru lui en est reconnaissant. Juste un tout petit peu.
(Il lui arrive encore de se réveiller en pensant qu'il a rêvé tout ça. Il se réveille en pensant que Sasuke est mort en défendant Naruto et son équipe. Que Jiraiya est tombé il y a plusieurs mois, que le corps en pièces de Tsunade refroidie encore à même le sol, qu'Orochimaru lui-même s'est fait avoir, l'épée de Kusanagi envoyant des vagues de douleur dans son torse tandis qu'elle le cloue sur le sol comme une pauvre charogne. Et voir Jiraiya insistant pour qu'il reste dans son appartement directement après de telles pensées est… comment dire…
Il n'est pas quelqu'un qui tombe facilement dans le sentimentalisme, et ne l'a jamais été. Mais il semble tout simplement que Jiraiya arrive à le pousser dans cette direction, peu importe à quel point il tente de lui résister.)
– C'est vrai, murmure Orochimaru, inclinant la tête, et tout cela n'est qu'un test qui sert à jauger à quel point Sarutobi lui fait encore confiance, peu importe combien cette confiance peut être éprouvée. J'aurais souhaité être accompagné par Hatake Kakashi, si c'est possible.
Sarutobi cligne lentement des yeux, l'air déconcerté et se penche vers l'arrière dans son siège en dévisageant Orochimaru d'un œil appréciateur. Orochimaru rencontre son regard avec calme, se demandant quelque peu amusé si Sarutobi attend de lui qu'il se mette à gigoter d'impatience ou quelque chose de la sorte. Il n'a jamais eu une telle réaction devant qui que ce soit, même lorsqu'il était encore un gringalet. Et c'était pour le moins… divertissant d'observer les pensées se presser à vive allure sur les traits lisses de Sarutobi, tout rusé et calculateur qu'il était. Pour tous ses chers mœurs et principes, Sarutobi Hiruzen n'en est pas moins un shinobi, et au-delà de ça, l'élève du Nidaime, qui se trouvait avoir été la personne à l'esprit le plus implacablement logique et raisonnée ayant jamais existé. De telles choses, lorsqu'elles sont apprises pendant l'enfance, ne s'effacent pas si facilement.
– Je dois admettre, commence Sarutobi après un battement, que je m'attendais à ce que tu me demandes l'assistance d'un Uchiha. Itachi, par exemple.
Orochimaru réussit tout juste à retenir une grimace. Il y avait pensé, parce que c'était également une chose qu'il devrait régler : le traumatisme profondément ancré qui ravageait l'esprit d'Itachi - qui, bien entendu, n'avait fait qu'être exacerbé par sa famille de bons à rien et par la guerre qui faisait rage - mais il avait fait disparaître cette pensée presque aussi vite qu'elle lui était apparue. Il ne voulait pas risquer que la loyauté de celui qui l'accompagnerait soit partagée lorsqu'il ferait face à Madara en personne. Kakashi en revanche, même s'il était porteur d'un sharingan, n'était en rien un Uchiha, et qui plus est, cherchait par tous les moyens à faire ses preuves - si ce n'est devant autrui, au moins pour lui-même - à la veille du supposé décès d'Obito.
Cherchant ses mots pour constituer une réponse aussi polie que possible, il répondit prudemment :
– Vous m'excuserez, sensei, mais je pensais pourtant que vous ne vouliez pas que je m'approche des Uchiha, en particulier de celui-ci, étant donné mon intérêt pour leur dôjutsu et mon…
Il bute sur ses mots, cherchant quelque chose qui ne lui soit pas défavorable et qui n'ait pas l'air préfabriqué. Ne trouvant rien qui conviendrait, il laisse une grimace se peindre sur son visage exprimant son honnête frustration, parce qu'il… n'est plus le même homme qu'il était avant la mort de Jiraiya, si habilement capable de passer au-dessus de ses propres vices.
Jiraiya est mort comme il était, comme il a vécu, mais Orochimaru n'a pas eu ce luxe.
Même avant de retourner dans le passé, le simple fait de revenir dessus et de constater le rôle qu'il avait joué dans le cours des événements l'avait changé, dans une moindre mesure.
De subtils changements, peut-être, mais plus que suffisants.
Sarutobi échappe une légère expiration, retournant l'attention d'Orochimaru sur sa personne. Son sensei porte à présent un fin sourire affligé. Il paraît épuisé, songe Orochimaru, avant de se souvenir soudainement que dans quelques mois à peine, Sarutobi laisserait le titre à quelqu'un d'autre. Pour de bon cette fois, si Orochimaru avait quoi que soit à y redire.
– J'ai… conscience que tu éprouves des difficultés sur certains points, offre doucement Sarutobi, mais son regard reste toujours aussi ferme. Points sur lesquels j'aurais certainement dû m'appesantir plus longuement, lorsque tu étais encore mon élève. La morale et les limites existantes sont souvent plus ou moins flexibles dans le monde dans lequel nous vivons, j'en ai peur, ce qui ne rend pas les choses plus faciles.
Orochimaru, aussi, est conscient qu'il n'est pas… normal, dans sa manière de percevoir les choses. Il en veut, est curieux, et donc étudie et s'empare des choses. Il y a quelque chose à l'intérieur de lui qui est brisé, ou peut-être que cette chose n'a jamais été présente, et qui, lorsqu'elle se manifeste chez d'autres, leur dit arrête, c'en est assez. Orochimaru n'a jamais entendu cette petite voix au fin fond de son esprit, en tout cas pas si elle ne venait pas déjà de Jiraiya tempêtant par-dessus son épaule. Depuis toujours, Orochimaru perçoit les choses dans des nuances et des dégradés de lignes floues et grisonnantes lorsque les autres voient tout en une séparation claire de blanc et de noir, et si souvent ça l'a frustré de vivre au milieu des shinobi de Konoha, c'est parce qu'il sait qu'il comprend les choses différemment et n'arrive bien souvent pas à assimiler d'autres manières de penser.
Sarutobi a essayé de lui apprendre. Tsunade aussi, d'une voix douce et attentionnée.
Jiraiya n'a jamais essayé. Jiraiya piétine devant lui et lui dit face à face crûment là où il a échoué, de manière habituellement bruyante et en profondeur. Il ne prend pas de gants, pas de mesures. De telles choses ne sont pas dans la nature de Jiraiya, sauf lorsqu'il est en train d'espionner le bain des femmes. Et Orochimaru se trouve apprécier une honnêteté si directe et inébranlable, bien plus que les leçons formulées avec tant de soin.
Et parce qu'il a encore en tête les souvenirs d'une vingtaine d'années sans l'aide de Jiraiya pour lui servir de boussole ; parce qu'ils ont été ennemis pour la dernière moitié de leurs vies, il se rappelle encore de la soudaine sensation de perte lorsqu'il fut informé de la mort de Jiraiya aux mains de ses anciens alliés ; parce qu'il est revenu et parce que lui, entre tous, a une chance de tout recommencer…
À cause de tout ça, Orochimaru rive son regard sur les mains posées sur ses genoux et dit délibérément d'une voix légère :
– Jiraiya m'a toujours été d'une aide précieuse, et je me retrouve à bien vouloir écouter ce qu'il a à me dire, à présent que… certains perturbateurs ont disparu.
Joindre Danzo à son changement de personnalité lui vient facilement - il est mort après tout et ne peut donc pas protester. Du moins, c'est bien plus facile que de dire la vérité vraie, si un jour elle venait à sortir.
Étant donné le pincement de sa bouche, l'assombrissement des traits marquant son front et le contour de ses yeux, Sarutobi arrive à la supposition qu'Orochimaru lui a tendue sur un plateau d'argent, et il n'aime pas ça. Avec un hochement de la tête pointu, il replace sa pipe entre ses lèvres, attrape un formulaire et le lui tend sans faire de pause.
– Ta requête est acceptée. Fais un compte-rendu de toutes les informations connues de la mission et j'enverrai une note à Kakashi. Mais je t'en prie Orochimaru, ramène-le-nous en un seul morceau. Je doute que même moi puisse te protéger de la colère de Minato, s'il arrivait quelque chose à l'un de ses deux élèves restants.
Prudemment, Orochimaru ne l'informe pas que bientôt, ce nombre va augmenter. À la place, il incline la tête et prend le stylo que lui offre Sarutobi, remplissant la paperasse qu'il connaît sur le bout des doigts, même après tant d'années.
– Le garçon sera sauf avec moi, promet-il, et il est presque surpris de constater qu'il le pense vraiment.
Cet… excès de sincérité doit certainement lui monter à la tête. Et comme si ce n'était pas assez, il ajoute :
– Si quelque chose arrive à Jiraiya…
Cela fait rire Sarutobi et il fait disparaître ses inquiétudes d'un geste de la main.
– Je ne pense pas t'avoir entendu faire une telle déclaration depuis… depuis la dernière guerre, s'amuse-t-il.
(Mais Orochimaru peut entendre ce qu'il avait prévu de dire à l'origine. Depuis que Tsunade est partie. Parce que ça l'a détruit, si ce n'est tout entier, au moins en partie. Jiraiya était à Ame à ce moment-là, et Tsunade a simplement tourné les talons et s'est éloigné de Konoha. De leur équipe. Orochimaru avait été laissé à la dérive, sans la moindre ancre et il avait détesté ça.
Il lui en avait voulu à l'époque, profondément et furieusement, parce qu'il (est) était un homme mauvais, jaloux et possessif lorsqu'on parlait des choses qu'il tenait près de son cœur, aussi rares qu'elles soient. Tsunade est une de ces choses, de toute évidence, et pourtant, elle fut celle à la lui arracher de ses propres mains.
Mais le ressentiment s'était effacé avec les années. Il disparut complètement lorsqu'elle chuta, usé, épuisé et brisé, incapable de continuer malgré sa force monstrueuse et ses grandes réserves de volonté.)
– Sensei, dit Orochimaru, légèrement contrarié, alors qu'il fixe le Hokage avec des yeux plissés.
Après tout, il a encore jusqu'à la mort de la petite Nohara pour aller sauver Obito. Seulement après cette limite n'y aura-t-il plus de retour en arrière. Et déjà, le paysage s'annonce différent avec l'exécution de Danzo. Peut-être l'absence de la Racine est suffisante pour créer une menace capable de poser problème à Jiraiya, et Orochimaru n'est pas prêt à laisser son travail, tout comme la douleur et les efforts qu'il y a investis être réduit à néant.
(Des émotions, pense-t-il avec une certaine mesure de dégoût pour sa propre personne. Des émotions irréfléchies et stupides. Mais pour tout ce qu'elle représente, il ne tente pas de s'y soustraire ou de les changer.)
Sarutobi sourit d'une manière rieuse dans sa direction avant de le chasser de son bureau d'un geste de la main tandis qu'il retourne à ses papiers.
– Pars maintenant. Si quelque chose se produit, j'enverrai immédiatement une invocation pour t'en informer, mais Jiraiya est plus que capable de se débrouiller seul, et tu as bien des choses à accomplir de ton côté, Orochimaru.
– Hokage-sama, autorise Orochimaru avec un roulement d'yeux, s'inclinant brièvement avant de se glisser en dehors du bureau par la porte. Dans le couloir, il s'arrête, prend une inspiration et remet ses idées en place en mettant de côté tout le reste.
Il a une mission pour laquelle il doit se préparer, et un ancien (futur ?) allié à aller récupérer.
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Kakashi contemple, quelque part entre horrifié et incrédule, Kushina descendre son cinquième bol de ramen. Elle avale le bouillon brûlant et les nouilles à une vitesse qui n'est tout simplement pas humaine avant de placer ledit bol en haut de la pile en face d'elle et annonce :
– Hé, Teuchi, un autre bol de ramen au miso quand tu as une seconde !
Kakashi jette un regard à son bol à peine touché, imaginant en manger cinq de plus et grimace en le poussant vers la gauche. Kushina s'en empare avec enthousiasme et l'engloutit à son tour.
À sa droite, Rin rit doucement, couvrant sa bouche d'une main pour endiguer le son et dit :
– Tu sais que tu lui fais une faveur là, Kakashi ? Habituellement, Teuchi arrête de la servir après le cinquième.
– Parce que ce n'est qu'un fumier de mercenaire radin qui sait très bien comment s'assurer que je revienne, intervient Kushina, mais son ton est toujours aussi enthousiaste.
Elle mange un peu plus lentement cette fois-ci, savourant chaque bouchée.
Teuchi se met à rire, ne prenant pas offense de sa déclaration.
– Kushina-chan, le jour où tu cesseras d'être mon meilleur client, je prendrai ma retraite pour de bon. Je ne pense pas être capable de me débarrasser de toi même si je t'offrais tous les bols de l'univers.
Kushina lui fait un clin d'œil et lui lance un sourire satisfait.
– Tu sais que je t'adore, Teuchi. Si tu n'étais pas déjà marié, je laisserais tomber cet ahuri dans la seconde.
– Hé ! proteste légèrement Minato, tout en contemplant sa petite amie avec un large sourire niais qui fait dresser les poils de Kakashi. Je pars au front demain. Et si quelque chose arrivait ? Tu veux vraiment que mon dernier souvenir de toi soit ta proposition de m'échanger contre un chef cuistot ?
Rin rit bien trop fort pour parler à ce point de la conversation, et Kakashi se demande s'il serait capable de se fondre dans le décor et de passer la porte sans que personne ne le remarque. Il se sent toujours un peu à l'écart lors de ces repas en équipe, avec toute cette légèreté et cette gaieté ambiante…
Enfin. Kakashi sait qu'ils n'ont pas oublié qui devrait être assis de l'autre côté de Rin… mais… parfois, il a l'impression que c'est le cas. Parce qu'Obito est mort, Obito n'est plus là, et d'une façon ou d'une autre, Minato, Rin et Kushina arrivent encore à rire, et ce n'est simplement pas… correct.
Son œil gauche le démange, comme si les larmes étaient en train de monter, et Kakashi est reconnaissant que son hitai-ate le couvre, reconnaissant que personne ne soit témoin de ce petit moment de faiblesse. C'est déjà suffisamment déplorable que ses mains soient serrées à en faire blanchir les jointures sur ses genoux, et il rentre la tête dans les épaules en leur lançant un regard noir. (Déjà assez déplorable qu'il lui semble être le seul à pleurer la mort de son coéquipier, mort à cause de lui, mort pour lui.)
Ça fait mal. Ça le fait souffrir, le déchire de l'intérieur et le brise en mille morceaux à toute heure de la journée. Et en pleine nuit, il les voit encore et encore, les rochers s'écraser, les mains qui l'empoignent, calleuses et puissantes, pour l'envoyer rouler hors du chemin. Puis, plus rien si ce n'est du sang, de la poussière et un horrible sourire livide, un au revoir pour lequel il n'était pas prêt. Pas quand il avait finalement…
Pas quand…
Comme sauvé par une grâce divine, il y eut un battement d'ailes dans le petit restaurant et un faucon messager se pose sur comptoir en face de Kakashi d'un mouvement d'ailes vers l'arrière et avec une adresse surprenante. Kakashi tend aussitôt la main dans sa direction, ouvrant l'étui dans lequel est gardée la missive et en sort un parchemin bien enroulé.
(Ça fait mal de penser à Obito. Il est impuissant vis-à-vis de ce genre de pensées, incapable d'oublier la caverne, les rochers, la tension de ses muscles en essayant de les pousser sur le côté, vainement, dérisoirement. Se souvenant que la chose qu'Obito lui avait demandée avait été ce qu'il aurait dû faire depuis le début : protéger ses coéquipiers, se comporter comme un shinobi et non comme un enfant gâté.)
– Une mission ? demanda Minato, curieux, en se penchant pour avoir un meilleur point de vue.
Kakashi acquiesce, repoussant les pensées que le tabouret vide à la droite de Rin fait émerger. Même en pleine guerre, Konoha accepte toujours des missions pour tenter de gagner le plus de fonds pour continuer à se battre, et en tant que nouvellement promu au rang de jounin, Kakashi en gagne plus que sa part. Il est meilleur en solo et dans les assassinats qu'en tant que soldat, et l'Hokage l'a bien compris.
– En duo, constate-t-il surpris en prenant connaissance des détails. C'est une mission de renseignement et de reconnaissance. Avec… (Il cligne des yeux, relit le nom de son partenaire juste pour être sûr qu'il n'hallucine pas et termine finalement avec stupéfaction,) Orochimaru.
Minato se tend perceptiblement, ses yeux bleus se plissant, et demande :
– Quoi ?
Contrairement à Kakashi, Orochimaru est un combattant de première ligne. Il est puissant, d'une manière presque écrasante, et très, vraiment très douée, lorsqu'il s'agit de décimer de larges groupes d'un seul coup. Cela fait une semaine qu'il est en permission ; et constater qu'il est sur le point d'être envoyé en mission loin des champs de bataille prouve que cela doit être d'une importance capitale, et qu'il soit assigné en tant partenaire signifie que c'est une mission à laquelle même le légendaire Sannin des serpents ne peut pas ne peut pas accomplir seul.
Cette seule pensée est… troublante.
– Qu'est-ce qui ne va pas avec Orochimaru, dit-il en reposant son bol maintenant vide sur la pile instable et en s'affalant dans sa chaise avec un soupir contenté.
Elle hausse un sourcil en direction de Minato et de son expression presque constipée et renifle moqueusement.
– Oh, épargne-moi. Je sais qu'il fait un peu peur, mais c'est un génie dans son genre. S'il y a une personne qui peut garder Kashi-chan en vie, c'est bien lui.
Kakashi débat intérieurement s'il devrait tirer la langue dans sa direction pour l'utilisation du surnom, mais juge finalement que ce serait certainement contre-productif et se contente d'un regard noir. La rousse l'ignore sans se cacher.
Minato se met à agiter les mains dans tous les sens, ayant soit l'intention de protester contre ses mots, soit le début d'une crise imprévue.
– Mais enfin… !
– Il n'est pas si mal que ça, sensei, souffla Rin de façon inattendue, et se sourit à elle-même lorsque tous les yeux se rivent subitement sur sa personne. L'autre jour, il m'a… hm… pourchassé dans tout le village parce qu'il avait entendu dire que je m'intéressais aux pilules énergétiques et qu'il aimerait mettre au point une nouvelle formule qui n'aurait pas les mêmes effets sur le corps de son utilisateur lorsqu'ils se dissipent. Je sais que beaucoup de personnes ne l'apprécient pas, Minato-sensei, mais il est très intelligent. Je ne pense pas qu'au village il y ait une personne qui en connaisse plus sur la biologie, la chimie et la manière dont elles interagissent que lui.
Dans un soupir, Minato croise les bras.
– Même si c'est le cas, dit-il, l'air plus sérieux que jamais, Sarutobi-sama m'a demander de garder un œil sur lui. Il suspecte Orochimaru d'avoir… poussé les recherches à la limite de l'éthique dernièrement, et ça ne m'étonnerait pas que ça se vérifie. Oui, il en connaît beaucoup sur la biologie, mais la plupart de ses connaissances viennent de ses expérimentations sur des otages ennemis, et je ne peux pas consciemment l'accepter.
– Ou alors, intervint Kushina, elles peuvent venir de sa proximité et sa connaissance du travail de Tsunade-sama.
Au regard exaspéré de Minato, elle lève les mains.
– Quoi ? Il y a deux jours, Orochimaru est venu me voir pour me demander de l'aide sur un sceau sur lequel il travaille. J'étais tout aussi sceptique au début, mais nous avons un peu discuté, et il était étonnamment calme à propos de…
Elle fait un geste en direction de son estomac et après une seconde, Kakashi comprend qu'elle évoque son statut de jinchuuriki.
– Je m'attendais à ce qu'il pose une tonne de questions lourdes et qu'il veuille m'utiliser pour pratiquer une vivisection, mais il l'a à peine mentionné au-delà de son envie de savoir comment le niveau de chakra affectait le sceau.
Minato a toujours les sourcils froncés, mais il paraît pensif à présent.
Choisissant de se former sa propre opinion lorsqu'il rencontrerait l'homme en personne, Kakashi vérifie l'heure à laquelle ils sont censés se retrouver. Il jette un œil en direction du soleil et réalise qu'il lui faudra se dépêcher s'il souhaite pouvoir rendre une visite au mémorial avant de partir.
– Désolé, dit-il sincèrement envers Rin.
Elle sourit simplement et lui fit un geste vague de la main. Une légère pointe de tristesse et d'inquiétude accompagne son geste, et Kakashi est presque… content de le voir. Elle est aussi affectée que lui, alors. Il sait bien que c'est moche de sa part d'avoir de telles pensées, de la considérer, elle, comme ça alors qu'Obito, lui, l'aimait tant, mais il ne parvient pas à s'y soustraire.
Pourquoi ne t'en es-tu pas rendu compte avant ? aimerait-il se demander. Pourquoi ne l'avait-il jamais vu comme son égal ? Pourquoi ne pouvais-tu donc pas ressentir ces choses-là lorsqu'il était encore suffisamment vivant pour s'en inquiéter ?
Ce n'est pas juste. Rin était l'amie d'Obito. Sa seule amie, peu importe qu'il ait toujours voulu qu'elle soit plus. Elle connaissait par cœur le moindre de ses rêves, sa manière de ressentir le monde et sa détermination à toute épreuve. Elle était celle à avoir marché à ses côtés, à lui avoir confié ses secrets en retour et celle qui avait gagné chacun de ses sourires étincelants, tandis que Kakashi avait toujours été celui à marcher devant eux en les ignorant l'un comme l'autre.
Stupide. Il avait été si stupide, et ça avait coûté la vie d'Obito.
Minato s'empresse de payer leurs repas et embrasse Kushina en guise d'au revoir, puis emboîte le pas de Kakashi en direction de son appartement. Kakashi le dévisage du coin de l'œil et Minato lui sourit, d'un sourire radieux et désarmant. C'est le genre de sourire charmeur qu'il offre aux hauts gradés du village, celui qui arrive à convaincre les chefs de clans de ne pas chercher plus loin que ce qu'ils ont devant les yeux. Kakashi hausse un sourcil en retour. Il n'est pas chef de clan, et il ne se laissera pas berner aussi facilement.
– Je t'y accompagne ? offre Minato candidement.
Kakashi roule les yeux et pose son regard ailleurs, cédant à l'inévitable.
Étant donné la teneur de la mission (renseignement et reconnaissance), il prépare un équipement léger, tout en s'assurant d'avoir assez armé, il le fallait, surtout avec le partenaire qu'on lui avait attribué. Minato tourne en rond tout du long en faisant un bruit semblable à celui d'un claquement de langue. Il faisait ça avant chacune de ses missions et de celles de Rin dernièrement. Kakashi y est presque habitué à présent et tolère presque sa présence en silence.
Néanmoins, cela signifie également qu'il sera dans l'incapacité de se rendre au mémorial, ce qui aggrava le poids déjà présent sur ses épaules. Il n'est… pas à l'aise avec l'idée que Minato sache combien de fois par jour il y trouve refuge, à tel point qu'il commençait même à arriver en retard lors des rendez-vous. Kakashi, cependant, n'arrive pas à se reprocher ces retards, surtout que…
Surtout que c'était exactement ce que faisait Obito. C'était sa petite manie, et ce n'est que justice que lui, la personne responsable de sa mort, la reprenne pour la faire subsister, d'une certaine manière. Il n'a pas encore réussi à s'autoriser à sortir l'une de ces excuses idiotes, mais… bientôt. Bientôt, il serait capable de jeter à tout-va ces inepties ridicules, et tout le monde l'accuserait de mentir, exactement comme ils l'avaient fait avec Obito.
Seulement, Obito ne mentait pas, tandis que Kakashi lui, en prendrait avantage, car c'est la différence entre eux deux. C'est ce qui les sépare en deux entités distinctes. Obito était vrai : un vrai ami, un vrai shinobi, un vrai héros, et Kakashi n'est rien de toutes ces choses.
Un simple garçon dont le meilleur ami est mort parce qu'il ne s'est jamais soucié d'agir humainement, et préfère agir comme un automate dénué de sentiments dont la vie tourne autour d'un tas de règles abstraites.
Kakashi prend une respiration, laisse son souffle trembloter et resserre douloureusement sa main tendue autour de la bretelle de son sac à s'en blanchir les articulations.
– Kakashi, fit doucement Minato, faisant halte à quelques mètres de la porte nord.
Kakashi se tourne pour river son regard dans les orbes bleus.
– Je sais ce que Rin et Kushina ont dit, mais… promets-moi d'être prudent, d'accord ? Orochimaru a toujours eu un intérêt obscur pour le sharingan, et je ne sais pas si cela y change quelque chose que tu ne sois pas un Uchiha. Garde les yeux grands ouverts et ne baisse pas ta garde, c'est tout ce que je te demande. Peu importe qu'il paraisse agréable ou poli, tu m'entends ?
Comme toujours, l'estomac de Kakashi se retourne à la mention de sa nouvelle orbite. Seulement, Minato est son sensei, son capitaine, son héros, alors il hoche simplement la tête et murmure :
– Ne vous inquiétez pas, Minato-sensei. Ça ira.
– Bien sûr que ça ira. Crois-moi, Namikaze, je ne laisserai rien arriver à ton précieux élève, fit une voix traînante un peu plus loin.
Minato et Kakashi se retournent dans la direction d'où elle provient.
Orochimaru est appuyé contre le mur d'un bâtiment, ses orbes dorés rivés sur eux, et vêtu d'un pardessus bleu aux bordures grises. Il ne porte aucun sac comme le fait Kakashi, mais sa lourde et longue épée est ceinturée à sa poitrine et sa sacoche d'armes est pleine. Desserrant ses bras, il s'éloigne du flanc de pierre et s'approche d'eux d'une démarche de désossé, gracieuse, mais trop déconcertante pour être plaisante. Le corps humain - même celui d'un ninja entraîné - n'est pas censé pouvoir se mouvoir comme ça. En revanche, son sourire est tout ce qu'il a de plus poli, dépourvu de l'air de suffisance ou de mépris que Kakashi avait observé lors de leurs deux précédentes brèves rencontres.
– Orochimaru, le salue Minato, tout aussi polie, en lui offrant son meilleur sourire de Candidat au Poste de Hokage.
Celui qui est chaleureux et amical, mais qui n'arrive jamais à atteindre ses yeux.
Orochimaru paraît aussi peu impressionné que Kakashi, néanmoins, il incline tout de même la tête et la tourne pour faire face à ce dernier.
– Hatake, commence-t-il d'une voix parfaitement calme. J'ai entendu du bien de tes capacités. La mission requière un large éventail de compétences et une certaine vitesse, du moins, autant qu'on puisse en dépenser sans risques. T'es-tu préparé en conséquence ?
Il est surprenant pour lui de ne pas être traité comme un gamin, mais peut-être qu'au fond, il ne devrait pas en être surprit. Après tout, enfant déjà, Orochimaru était un petit génie et sait donc certainement combien cela peut être agaçant d'être traité de la sorte.
– Oui, monsieur, répondit Kakashi et Orochimaru agite la main, l'air ennuyé.
– Pas de « monsieur », corrige-t-il. À l'exception des inepties de surnoms dont se targue Jiraiya, tu m'appelleras comme t'en prend l'envie. Ce qui me rappelle d'ailleurs…
Les orbes dorés bordés de violet se posent sur Minato une nouvelle fois, et une main pâle lui tend une petite boîte en bois finement ouvragée.
– Si je ne me trompe pas, on t'envoie en renforcement pour l'unité de Jiraiya au nord-ouest dès demain, correct ?
Minato hoche la tête, la curiosité creusant les traits de son visage.
– C'est ça, répond-t-il. Nous partons à l'aube et devrions les avoir rejoints vers l'heure du déjeuner du jour suivant, si nous ne sommes pas retardés.
- Aurais-tu l'amabilité de lui donner ça, avec mes compliments ? demande Orochimaru, et il ne détourne pas vraiment les yeux, mais il y a un balancement dans la position de ses épaules qui indique qu'il aurait aimé le faire. Je t'en serais… reconnaissant…
Ça ne fait rien pour apaiser les préoccupations de Minato, cependant, il opine quand même et accepte la petite boîte.
– Ce sera fait, Orochimaru. Prenez soin de Kakashi. Je veux le retrouver en un seul morceau.
Ses mots sont enjoués, mais il y a une étincelle dans le regard de Minato qui indique qu'il est loin de plaisanter. Kakashi aurait bien voulu protester contre le fait d'être traité comme un stupide incapable de première, mais… il sait, il sait que c'est la manière qu'à Minato de montrer qu'il s'inquiète.
Et au vu de la manière dont s'est déroulée la mission au Pont Kanabi, Kakashi ne peut pas le lui reprocher.
Orochimaru tourne les talons sans s'ennuyer à rétorquer, avançant en direction de la porte à pas faussement traînants et empressés. Kakashi fait brièvement un salut en direction de Minato et hâte le pas pour emboîter le chemin pris par Orochimaru. Il saute d'un bond et disparaît entre les branches des arbres.
Kakashi toise une dernière fois son sensei avant de suivre le Serpent Blanc au-delà des portes du village.
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Ils sont à quelques heures de Konoha, se mouvant d'arbre en arbre à une bonne allure, lorsque Kakashi se sent finalement assez en confiance avec son étrange partenaire pour demander :
– Pouvez-vous me donner les détails de la mission ?
Orochimaru se pose avec délicatesse sur la branche suivante et fait halte, inclinant la tête pour scruter les alentours. Puis, après un bref hochement de tête, il s'abaisse et s'installe sur la large branche, faisant signe à Kakashi de faire de même.
– Je peux, accepte-t-il, et, même si le langage de son corps indique qu'il est détendu, ses yeux sont toujours méfiants et vigilants. Ce sera très certainement dangereux, mais avec un peu de chance, nous en aurons rapidement terminé.
Kakashi se retient de toutes ses forces de renifler de dédain. Il ne se souvient pas de la dernière fois où une mission s'est passée sans imprévu aucun. Lisant apparemment le scepticisme sur son visage, Orochimaru exhale moqueusement.
– Un informateur m'a récemment alerté de la présence d'activités suspectes au Nord près du Cimetière des Montagnes. Des forces hostiles retiendraient en otage un shinobi inconnu de Konoha. Étant donné la situation actuelle et la manière dont sont déployées les forces du village, une attaque en masse venant de cette direction nous écraserait certainement. J'ai pensé qu'il serait plus sûr d'aller enquêter personnellement, et soit de m'en occuper moi-même, soit de te renvoyer au village pour demander des renforts tandis que je garde un œil sur la situation.
Il lui faut faire un effort pour ne pas laisser remonter son mécontentement d'avoir été entraîné à l'autre bout du Pays du Feu seulement pour jouer les messagers. Kakashi dompte son envie de grogner, mais ne peut empêcher ses yeux rivés sur le Sannin de se plisser. Sans doute un chûnin aurait pu…
– Trouverions-nous un assez petit nombre de forces pour que nous puissions nous en occuper à deux, l'interrompit Orochimaru dans ses pensées en haussant dans sa direction un élégant et suffisant sourcil, je préférerai avoir sous la main un jônin pour protéger mes arrières, Hatake. Si c'était le genre de travail pour un chûnin, j'aurais emmené Anko avec moi.
Puis il ajouta sèchement en lisant ses pensées suivantes sur son visage :
– Je t'assure, Hatake, je ne suis pas un Yamanaka. En revanche, j'ai eu plus de vingt ans pour apprendre à lire le langage du corps, et même si ton masque en cache beaucoup, il ne dissimule pas tout.
Légèrement impressionné malgré lui, Kakashi opine et ajoute simplement :
– Mes excuses.
Il est habitué à être entouré par des shinobi, bien sûr, mais la plupart d'entre eux tentent au moins de prétendre penser, agir et réagir comme des civils, la plupart du temps. Orochimaru en est soit incapable, soit il n'en a rien à faire. Il ne cache pas qu'il a été entraîné presque depuis sa naissance à lire les gens et à déterminer leurs motivations ou encore à les manipuler. Même le Hokage - peut-être même le Hokage en particulier - fait semblant d'être une personne tout à fait normale, soit pour se faire sous-estimé par ses ennemis ou pour mettre les habitants du village à l'aise en sa présence, mais Orochimaru, lui, ne le fait pas.
Kakashi n'est pas certain de savoir s'il le déteste ou le respecte encore plus pour ça.
Orochimaru écarte l'excuse d'un geste vague de la main et étudie le ciel pour avoir une idée de l'heure qu'il était.
– Nous resterons ici pour une autre demi-heure, l'informe-t-il. Je veux avoir passé la frontière avant de reprendre une pause.
Le Sannin ne lui demande pas s'il arrivera à garder le rythme, chose dont il lui est reconnaissant ; trop de personnes, même en connaissant ses capacités, le traitent comme le gamin de quatorze ans qu'il devrait être au lieu du jônin qu'il était en réalité. Même Minato adopte ce comportement, parfois.
Tandis que l'autre homme prend une position plus confortable et sort un petit carnet de l'un des étuis où sont contenues ses armes, Kakashi s'adosse au tronc de l'arbre et l'observe avec curiosité. Cet homme… l'intéresse. Un autre prodige né dans le même village, mais portant une réputation comme aucun autre. Morino Ibiki en particulier, se rappelle-t-il, tend à frissonner et tiquer à la mention même de son nom. Kakashi lui-même n'avait pas vraiment d'opinion le concernant jusqu'à il y a peu, mais ce qu'il a pu observer de l'homme jusque-là le trouble légèrement. Peut-être que c'est parce qu'ils sont en pleine mission et qu'ils doivent agir de manière professionnelle au possible, mais d'une certaine manière, tous les propos tenus à son égard ne semble pas justifié. Pour une raison ou une autre, les seules choses que le Serpent Blanc dégage selon ses observations, sont une sorte d'amusement enfoui sous une couche de méfiance, une nuance de suffisance et une pointe de… regrets ?
Si ce n'en est pas, c'est quelque chose de très proche en tout cas.
– Sur quoi est-ce que vous travaillez ? demanda-t-il après un long moment, incapable de retenir sa curiosité une seule seconde de plus tandis que le stylo d'Orochimaru file sur les pages du carnet. L'expression de l'homme est pensive, mais intense, de la même manière que l'est celle de Minato lorsqu'il travaille sur un sceau particulièrement compliqué. Le parallèle est suffisant pour que Kakashi pose la question au lieu de tenir sa langue comme il l'aurait fait habituellement. La curiosité est l'un de ses nombreux défauts, c'est vrai, mais il tend à préférer dégoter les réponses lui-même qu'à les demander directement.
Petite fouine, l'appelle Kushina à la place de « petit curieux ». Kakashi n'est pas encore certain de la différence qui existe entre les deux.
Orochimaru lui jette un regard, ses fins sourcils se soulevant sous la nette surprise qui le traverse, puis il… sourit. Juste un peu, mais sans aucun doute véritable.
– Je recompose la formule utilisée pour créer les pilules énergétiques, répondit-il sans hésiter. Il y a un moyen de minimiser les effets secondaires, mais le processus pour en arriver là est long et compliqué. Pour le moment, je ne peux lancer la production que de petits lots et ils ne valent pas l'effort qu'on y met. Rationaliser le processus est assez simple, mais simplifié la formule se trouve être… délicat.
Kakashi se souvient encore des mots de Rin, de l'effort qu'a fait Orochimaru en allant à sa rencontre, et de la petite boîte qu'il a confiée à Minato pour Jiraiya. Il a le pressentiment qu'à l'intérieur ne se trouvait autre que lesdites pilules, mais il ne pose pas la question. Le fait même qu'Orochimaru ait répondu à sa question paraît… important, d'une certaine façon.
Voyant que le Sannin est retourné à ses notes, Kakashi ne pousse pas sa chance pour essayer d'en savoir plus. À la place, il ferme les yeux et appuie sa tête contre le tronc, souhaitant avoir pu passer par le mémorial pendant au moins quelques minutes avant de quitter Konoha. Il y avait été avant de voir son équipe, bien entendu, de la même manière qu'il le faisait avant chaque rencontre entre eux trois, mais ça ne semblait pas suffisant.
Bien sûr, rien ne semblait à la mesure du sacrifice d'Obito.
Kakashi expire l'air frais de la nuit et presse une main sur son œil gauche, tentant par tous les moyens de ne pas laisser la honte et la culpabilité le submerger. Il se concentre, reprend une inspiration et se concentre sur le bruit que fait le stylo d'Orochimaru en glissant sur le papier et son fredonnement pensif jusqu'à ce qu'il n'entende plus que cela.
Un bref refuge, peut-être, mais pour le moment, il désespère pour un instant de répit et le saisit avec soulagement.
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Ici, au moins, rien n'a changé par rapport à sa précédente vie, songe Orochimaru avec satisfaction en entrant dans le tunnel qui mène directement dans la chambre où se trouve Madara. Kakashi - qu'est-ce que ça pouvait être étrange et amusant de le voir comme un petit et mince adolescent lorsqu'il est tant habitué au grand, féroce et redoutable combattant qu'il deviendrait - se trouve trois pas derrière lui et un pas sur sa droite, lui laissant de l'espace au cas où Orochimaru aurait besoin d'invoquer ses serpents. Orochimaru est reconnaissant que le discernement du ninja copieur, contrairement à sa taille, n'ait pas changé d'un pouce au fil des années.
Même si sa mission est plus ou moins orchestrée - sauf en ce qui concerne sa dangerosité, qui est malheureusement bien trop réelle - pour sceller la position d'Orochimaru en tant que loyal shinobi de Konoha et pour payer sa dette envers Obito du futur, Orochimaru est reconnaissant que Kakashi puisse être autant un témoin crédible qu'un second compétent.
L'air devient de plus en plus stagnant à mesure qu'ils descendent, épaissi par les années et alourdi par le chakra ambiant. Il lui faut faire un effort pour ne pas montrer les dents - le chakra que la Statue du Grand Démon Hérésiarque dégage est écrasant, et lorsqu'il risque un regard rapide derrière lui, il peut confirmer que Kakashi est tout autant affecté que lui. Une goutte de sueur glisse jusqu'au sourcil du garçon, et il paraît encore plus pâle que d'habitude, néanmoins, son expression est ferme et il agrippe son tanto d'un air résolu dans une main.
– Est-ce qu'il y a un bijû en bas ? murmure Kakashi, presque trop bas pour qu'Orochimaru ne l'entende et le Serpent Blanc dut étouffer un reniflement amusé.
– Cinq signatures de chakra, murmure-t-il en retour. L'une d'entre elle bien trop massive pour être humaine, mais stationnaire. L'une doit être celle de l'otage, les trois autres sont nos cibles. As-tu assez de chakra pour te servir de ta technique spéciale ?
La surprise brille brièvement dans ses yeux, mais Kakashi opine et remonte une main jusqu'à son visage pour découvrir son sharingan.
– Je ne serai plus d'une grande aide après ça, le prévient-il.
Orochimaru incline la tête, déjà en train de rassembler son propre chakra qui bourdonne jusqu'au bout du couloir comme une brise égarée, subtil, mais prêt à être utilisé à tout moment.
– C'est acceptable. Si c'est bien qui je pense, attaque celui en noir. Vise la tête. Je m'occuperai des autres. Et quoi que tu fasses, ne reste surtout pas immobile. Ne t'arrête pas avant d'en avoir fini avec ta cible, peu importe ce que tu peux voir.
Kakashi lui envoie un regard plissé qui crirait presque « adolescent qui sait tout », et qui dit très clairement qu'il n'apprécie pas être traité comme un enfant.
Si seulement tu savais, songe Orochimaru sombrement en faisant signe à Kakashi de rester silencieux. Une fine brise qui vient d'au-dessus de leurs têtes les effleure et Orochimaru en déduit que le passage est ouvert, ce qui est une bonne nouvelle pour eux. Il sait où se trouvent les autres entrées, mais la plus proche est à un jour de marche vers l'est, et étant si près du but, la frustration d'avoir à revenir sur leur pas aurait été immense. Et d'un autre côté…
Des voix. L'une d'entre elles joyeuse, une autre plus profonde et la dernière brisée et usée par les années, qui viennent toutes de la même direction : par derrière une rangée de draps couvrant l'entrée du passage.
Orochimaru sourit.
Il ferme les yeux, jaugeant leurs distances et leurs positions exactes. Il passe par plusieurs mûdras puis balaie l'air avec sa main envoyant de ce geste des épées de vents faucher tout ce qui se trouve sur leurs passages. Elles mettent l'assemblage de draps en pièce et tout comme ce qui se trouve à leurs portées dans la caverne. Zetsu Blanc tombe sous leur tranchant et elles heurtèrent presque Madara avant que celui-ci ne se jette sur le côté. Orochimaru ne perd pas une seule seconde et dégaine Kusanagi pour s'élancer dans la bataille à sa vitesse maximale. Il embrasse la chambre d'un regard : sur le côté, un lit de bois surélevé par une plateforme, de l'autre, le tronc massif de l'arbre sur lequel sont posés la Statue, le trône de Madara, et les trois longs cordons connectés au vieil Uchiha. Cet instant est suffisant pour étudier son environnement et Orochimaru bondit vers l'avant, visant ce qui connecte Madara à l'arbre.
Derrière lui, la subite éruption de crépitement lui indique que Kakashi a activé son Raikiri et que ses pas précipités se dirigent vers Zetsu Noir. Orochimaru épargne une demi-seconde de plus pour lancer un autre arc chargé en fûton en direction du dernier Zetsu pour l'aveugler et l'empêcher d'y échapper tandis qu'il esquive et tourne sur lui-même pour attraper au vol le gumbai de Madara avec sa Kusanagi et le trancher sans le moindre effort.
Madara ouvre la bouche, sûrement pour cracher quelque chose de désobligeant, mais Orochimaru ne l'attend pas - il a souffert assez de ses remarques lorsque l'homme enfonçait Kusanagi en travers de sa poitrine, le bloquant sur un sol froid et couvert de sang comme un papillon dans un cadre, et malgré sa patience rivalisant avec celle des serpents, il n'en a plus une seule goutte pour cet aliéné. Dans un grondement, il fait appel à ses invocations, laissant des dizaines et des dizaines de larges vipères à écailles blanches se jeter sur les jambes et les pieds de Madara, le recouvrant de leurs morsures empoisonnées. Le vieil homme titube en arrière en jurant, et Orochimaru envoie une autre vague de vent tranchant au possible en direction des trois cordons qui pendent derrière l'homme pour les couper nettement. Elles se détachent sans difficulté et Madara chancelle et trébuche puis tombe à genoux.
Orochimaru patiente juste assez longtemps pour laisser le temps à ses invocations de se mettre en retrait avant de détacher la tête de Madara du reste de son corps.
Une chose de faite, songe-t-il avec une satisfaction presque vicieuse tandis qu'il regarde le corps s'écraser sur le sol et le sang couler. Rapide et permanent, Obito, comme tu le voulais.
Cependant, sa dette n'est pas entièrement payée. Pas encore.
Se retournant, il contrôle les résultats du court combat. Zetsu Blanc est mort, tout comme l'est Zetsu Noir dont la tête a entièrement disparu sous la force de l'Eclair Pourfendeur de Kakashi. Kakashi lui-même se trouve à genoux à côté du corps, l'air quelque peu malade, néanmoins, il relève tout de même la tête et la hoche lorsque les yeux d'Orochimaru viennent se poser sur lui.
– Les dépouilles ? l'interroge-t-il en passant son poignet contre sa bouche en se remettant difficilement sur ses pieds.
Orochimaru jette un dernier coup d'œil aux trois corps. Les Zetsu représentent toujours la volonté de Madara sous forme physique et sont donc trop dangereux pour rester là, même ainsi morts.
– Brûle-les, conseille-t-il. Brûle-les jusqu'à ce qu'il n'en reste que des cendres qui s'éparpilleront au gré du vent. Je ne veux pas risquer que l'un d'entre eux ait l'opportunité de vaincre la mort étant donné que Madara s'est plutôt bien débrouillé pour le faire jusque-là.
Kakashi pâlit un peu plus encore au nom du déserteur, mais hoche la tête.
– Il me reste encore assez de chakra pour le faire, dit-il d'un air décidé, et Orochimaru se sent d'humeur assez généreuse pour ne pas lui faire de remarque sur cette exagération. À la place, étant donné qu'il n'a lui-même aucun talent avec le feu, il hausse un sourcil avant de tourner les talons, se dirigeant vers la silhouette vague couverte d'une couverture fine sur le lit.
Obito respire lentement, mais de manière régulière. Des lignes d'épuisement creusent son visage, pas aussi profondément que les cicatrices, mais ce n'en est pas loin, et ça ne surprend pas Orochimaru de constater que le combat ne l'a pas réveillé. Il est probable qu'il ait déjà entamé son entraînement afin de s'habituer au possible à ce corps raccommodé. Avec un léger soupir, Orochimaru se penche vers l'avant et prend le maigre garçon dans ses bras, le soulevant du matelas sur lequel il est installé. Obito remue brièvement dans le mouvement, mais juste assez pour changer d'appui et se repositionner avant de retomber dans les limbes de son inconscient.
Orochimaru baisse les yeux vers la tête du brun reposant sur son épaule, et repense à Obito la dernière fois qu'il l'a vu, pâle et épuisé, s'appuyant sur lui sur le champ de bataille avec une seule et dernière lueur d'espoir dans le regard. Le garçon qu'il tient entre ses bras est différent, mais c'est aussi la même personne. Ce sont deux personnes complètement différentes, mais elles ne le sont pas vraiment tant que ça, au fond.
– Je paierais ma dette, murmure-t-il, trop bas pour que Kakashi puisse l'entendre.
Jiraiya est la première personne à laquelle il pense. Jiraiya, Sarutobi, Tsunade… ils sont tous en vie ici, tout ça grâce à Obito. Anko est encore son élève, l'adore toujours d'une dévotion aveugle qui est aussi étrange que bizarrement flatteuse et qu'il avait oubliée. Danzo n'est plus de la partie, et Orochimaru est toujours un shinobi de Konoha. Il a une nouvelle chance, même s'il n'en avait jamais considéré la possibilité auparavant. Et tout ça est possible grâce à ce garçon scarifié et abîmé qui allait se réveiller avec un pouvoir dont il ne savait rien et avec personne pour lui apprendre à le maîtriser.
Personne à l'exception d'Orochimaru.
Madara est mort, mais Orochimaru considère plus cela comme un dédommagement vis-à-vis de sa propre mort qu'à l'achèvement d'une promesse. Sa vengeance pour la mort de Tsunade aux mains de l'Uchiha. Sa vengeance pour Sasuke, même s'il n'existe pas encore. La mort de cet homme était intéressé et le résultat d'un acte égoïste, et de ce fait, ne peut être considéré comme le paiement de sa dette.
Mais prendre sous son aile le jeune Obito, prendre soin de lui à la place d'un clan qui s'en fiche, lui apprendre des techniques que d'autres shinobi seraient incapables de reproduire…
Ca semble être un prix juste pour sa nouvelle vie.
– Orochimaru ? fit Kakashi, ses pas s'approchant, et Orochimaru lisse son expression et se tourne vers le plus jeune.
– Leur otage, commence-t-il. Je… crois bien qu'il ne t'est pas inconnu.
Kakashi lui jette un regard, puis au corps qu'il porte dans ses bras et se pétrifie. Ses yeux dépareillés s'écarquillent et tout le sang quitte son visage, puis…
Puis il trébuche.
Deux pas instables vers l'avant, et à ce niveau-là c'est plus une précipitation chancelante qu'un mouvement à la fluidité propre aux shinobi, mais Kakashi s'accroche au bras d'Orochimaru lorsque ses genoux cessent de le porter et entraîne le Serpent Blanc dans sa chute sur le sol dur de la cave. Ils atterrissent tous deux bruyamment sur leurs genoux. Son autre main se tend vers Obito, ses doigts cherchant aveuglément avant d'accrocher son poignet. Orochimaru roule les yeux d'exaspération et change de position avant de prendre la main de Kakashi et de la tirer jusqu'au pouls battant contre la gorge d'Obito.
– Doucement, murmure-t-il. Apparemment, Madara l'a soigné en utilisant les cellules du Shodaime. Il va bien, il se repose simplement, mais il aura besoin de beaucoup de repos jusqu'à ce que son corps accepte le changement.
Le souffle que Kakashi expire se trouve quelque part entre un halètement et un sanglot. Il parle, mais Orochimaru ne peut comprendre que quelques mots ici et là - en retard toujours en retard bon sang espèce d'idiot tu es en vie - et il fait semblant de ne pas les entendre, parce que même s'il lui arrive d'être horrible envers certaines personnes, il a toujours le sens de la courtoisie.
Laissant au garçon un peu d'intimité dans sa rupture, il détourne le regard, jugeant d'un coup d'œil lequel de ces passages émergerait au Pays du Feu. Chacun d'entre eux est imprégné par un jutsu spatio-temporel compliqué visant à réduire la distance et sur le coup, Orochimaru en est reconnaissant. Il veut ramener Obito chez lui - et dans son laboratoire personnel - aussi vite que possible, pour assurer la réussite de la mission. Il doute qu'il puisse échouer, à ce stade, mais ne se baser que sur ses présomptions serait un bien pauvre moyen de payer sa dette.
Kakashi est toujours penché au-dessus d'Obito, une main pressée contre son cou. Il s'est arrêté de parler, mais ses épaules sont baissées et ses yeux sont fermement clos. Orochimaru penche sa tête vers l'arrière et ferme les yeux à son tour. Cette fin paraît presque… décevante, surtout lorsqu'on sait combien sa vie a toujours été périlleuse dans son déroulé, mais il ne peut pas dire qu'il n'apprécie pas l'ironie.
C'est une victoire. C'est sa victoire, pour le bien de ce qui serait dans le futur et c'est aussi un pas vers l'avant.
Un seul pas en avant, mais c'est assez pour avoir une prise ferme sur le futur.
Un seul pas en avant, mais il sait que ce n'est que le premier d'une longue liste.
