Spoilers: Les quatre premiers tomes de Harry Potter seulement.

Disclaimer: Ce que vous ne reconnaissez pas m'appartient.

Chapitre 6: Risus

Le regard dans le vide, Draco réfléchissait. Il supposait bien sûr que Risus McGonagall ne pouvait être que l'époux de son professeur de Métamorphose. Mais comment se faisait-il qu'il n'en ait jamais entendu parler? Pourquoi Risus McGonagall n'enseignait-il plus? Qu'était-il devenu?

Il devait trouver un moyen de l'apprendre. De plus, cela lui permettrait de penser à autre chose qu'à la Sang-de-Bourbe de Poufsouffle. Qui pourrait le renseigner? McGonagall semblait évidemment la personne la plus à même de l'éclairer, mais il doutait fort d'être bien accueilli s'il cherchait à lui parler. Elle détestait les Serpentards en général, et lui en particulier. Oh, bien sûr, elle restait juste, avec le ridicule sens de noblesse et d'équité qui caractérise les Gryffondors. Mais son hostilité à leur égard était de notoriété publique.

Il se demandait si Amanda savait. Elle avait l'air de connaître beaucoup de choses sur Liz Reeder, peut-être était-elle également au courant du destin de Risus McGonagall. Cependant, Draco répugnait à le lui demander. Il avait l'impression de déjà sentir ses yeux le scruter, et de voir son sourire narquois se dessiner, ce sourire si semblable à celui de Draco lui-même. Il se doutait vaguement qu'elle suivait l'évolution de ses pensées de loin, même s'il ne pouvait pas en être absolument sûr.

Comme si elle attendait qu'il découvre quelque chose.

Mais quoi?

Les yeux bruns l'emmèneraient-ils sur la piste d'un secret quelconque?

- Alors, Draco, on cogite?

Blaise Zabini lui adressa un mince sourire et le considéra avec nonchalance. Draco se demandait s'il jouait un rôle ou s'il était véritablement comme il le paraissait. Il haussa les épaules et arbora à son tour un sourire narquois.

- Je viens juste de découvrir que la vieille McGonagall avait de la famille, répondit-il.

Ne jamais contrarier Zabini. Ne jamais se montrer désagréable avec lui. Ils avaient depuis longtemps établi un code de respect mutuel, et Zabini adoptait la même ligne de conduite que Draco. Leurs échanges étaient toujours surchargés d'une politesse feinte, excessive, envenimée. Deux loups ensemble ne devaient pas se provoquer. Pas avant que l'un des deux soit certain d'être le plus fort. Et pour le moment, aucun n'avait cette assurance.

- Quel genre? s'enquit Zabini d'une voix un peu trop doucereuse.

- Je ne sais pas exactement. J'ai juste trouvé le nom d'un McGonagall.

Le sourire de Draco ressemblait à présent dangereusement à un rictus plus qu'inquiétant. Ce fut assez pour que Zabini comprenne qu'il ne devait pas abuser de sa patience. Après un dernier regard d'avertissement à Draco, Zabini hocha brièvement la tête et s'éloigna avec désinvolture.

Enervé, Draco enfonça furieusement ses poings dans ses poches. Il sentit le papier froissé sous ses doigts. Le fameux "dossier".

Auprès de qui se renseigner?

oooooo

Mme Pince le dévisagea avec méfiance par-dessus ses lunettes.

- Que voulez-vous? cingla-t-elle. Je n'ai pas de temps à perdre!

Draco se retint de répliquer. Il avait besoin de savoir, et il doutait fort que la bibliothécaire accepte de lui venir en aide s'il se montrait trop désagréable.

- Je me demandais s'il y avait des registres sur les professeurs de Poudlard, dit-il.

Mme Pince plissa le nez.

- Bien sûr qu'il y en a! aboya-t-elle. Qu'est-ce que vous croyez?

- Est-ce que je peux y accéder? demanda-t-il froidement.

Elle l'observa des pieds à la tête pendant une bonne minute.

- Pour quoi faire? insista-t-elle. Il n'y a rien qui puisse vous intéresser, là-dedans. Si vous avez seulement l'intention de me faire perdre mon temps, c'est inutile!

- Je veux voir ces registres, grinça Draco entre ses dents.

Mme Pince émit un petit bruit prouvant clairement ses doutes, et lui fit signe de le suivre. Draco s'attendait à ce qu'elle l'emmène dans un rayon spécifique, ou dans une pièce réservée contenant les fameux registres, mais au lieu de cela elle l'amena à un fantôme, un petit vieux barbu à l'air morose qui flottait dans un coin, désœuvré. Il les regard approcher sans aucune expression.

- Sir Philip, veuillez montrer à ce garçon où se trouvent les registres des professeurs de Poudlard, dit Mme Pince sur un ton sans réplique. J'ai à faire.

Deux secondes plus tard, Draco se retrouva seul avec le fantôme, qui le dévisagea longuement avant de bouger enfin.

- Venez… dit-il d'une voix traînante d'outre-tombe.

Draco entreprit de le suivre, satisfait de penser qu'il allait bientôt en savoir plus.

Il déchanta rapidement.

De toute évidence, cette bibliothécaire de malheur lui avait joué un très mauvais tour. Draco n'avait jamais vu un fantôme évoluer aussi lentement. Il avançait à une vitesse d'escargot, et Draco, ne sachant pas où se trouvaient les registres, était forcé de le suivre. De plus, le fantôme lui faisait traverser la bibliothèque dans son intégralité, appréciant visiblement la promenade, et tous les élèves présents les regardaient curieusement, sans dissimuler leur hilarité.

Draco sentait ses joues le brûler furieusement. Il se sentait atrocement humilié. Comment cette misérable bibliothécaire osait-elle humilier un Malfoy? Il était tellement furieux qu'il aurait volontiers assassiné le fantôme sur le champ, si seulement celui-ci n'avait pas déjà été mort.

Et leur vitesse n'augmentait pas.

Draco avait certainement visité la bibliothèque entière à présent. Il s'appliquait à regarder droit devant lui, rassemblant toute la dignité qui lui restait, mais il était malgré tout plus que conscient des coups d'œil moqueurs qu'on lui lançait. Cette affreuse Granger et ses horribles cheveux devait se délecter de son humiliation.

Lui, Draco Malfoy, obligé de suivre un vieux fantôme ridé depuis dix minutes. Le Serpentard ressentait d'autant plus la vexation et la honte qu'il était arrogant, et imbu de sa personne.

Oh, oui, il savait qu'il l'était.

Et alors? S'il ne se mettait pas sur un piédestal, personne ne le ferait à sa place.

Il n'osait pas demander à ce fantôme exaspérant d'aller plus vite. Il n'osait pas esquisser un seul mouvement superflu. Bien assez d'attentions étaient braquées sur lui, inutile d'en rajouter.

Il s'immobilisa soudain.

Rebecca Arden était là, sur sa droite, ses beaux yeux bruns un peu trop grands, et observait la scène avec un air interloqué, un livre dans les bras.

Draco eut la sensation que le temps s'immobilisait tandis que le monde tournait autour de lui et d'elle.

Une sensation qui disparut bien vite quand une expression de haine passa sur son visage et qu'elle tourna vivement les talons.

La même expression que celle de la photographie de sa mère.

Pourquoi cette famille le détestait-il à ce point, sans même le connaître?… Mais après tout, personne à Poudlard ne pouvait vraiment se flatter de le connaître, et ça n'empêchait personne de le haïr cordialement. Draco fronça les sourcils et fit trois pas pour rattraper le fantôme.

Miraculeusement, Sir Philip tendit lentement le bras et indiqua une direction à Draco:

- C'est ici, annonça-t-il d'une voix traînante.

Draco ne se le fit pas dire deux fois. Il dépassa vivement le fantôme en mâchonnant sa langue pour se retenir d'insulter le vieux fantôme, et s'approcha de l'étagère. Tout en bas, dans un coin qu'il n'aurait jamais remarqué s'il ne l'avait pas cherché, se trouvait quelques grosses boîtes de cartons. Draco s'agenouilla et en tira une à lui. Sur le couvercle était inscrit: "Registre des professeurs de Poudlard, noms de F à J". Bien, il allait forcément trouver son bonheur. Il repoussa la boîte, et prit celle d'à côté, étiquetée "Registre des professeurs de Poudlard, noms de K à O". Il voulut la soulever, mais elle était trop lourde. Après avoir vérifié que Mme Pince n'était pas dans les parages, il sortit sa baguette et jeta un Sortilège d'Allégement, pour s'installer à la table derrière lui, avec la boîte.

Il souleva le couvercle, révélant des papiers en parfait état, de toute évidence soumis à un Sort de Conservation. En voulant sortir le premier parchemin, il s'aperçut que les feuilles étaient liées par paquets. Le premier parlait des professeurs dont le nom commençait par "O". Quelques instants plus tard, Draco avait en main le dossier des professeurs dont les noms commençaient par la lettre "M".

Il le consulta avidement. Après le celui d'un quelconque professeur de Défense contre les Forces du Mal, le nom de Risus McGonagall s'étalait en toutes lettres.

Risus McGonagall, excellent Botaniste, avait été engagé à Poudlard en 1953, à l'âge de trente-cinq ans. Il avait de toute évidence été plus que satisfaisant à ce poste, ainsi qu'en tant que directeur des Poufsouffles. On le dépeignait là comme quelqu'un d'extrêmement chaleureux et souriant, prêt à se dépenser sans compter pour aider ses élèves. Draco grimaça. Encore une de ses personnes tellement parfaites et louables devant lesquelles tout le monde se prosterne. Oui, il connaissait ce genre de gens. A commencer par Potter, pour ne pas le nommer. Risus McGonagall avait épousé Minerva Bennet en 1965, et était mort neuf ans plus tard, assassiné par des Mangemorts. Suivaient une foule de renseignements sans importance.

Draco, intrigué, chercha le dossier de Minerva McGonagall, mais ne le trouva pas. Il se fustigea mentalement en réalisant qu'il devait se trouver à la lettre "B", pour Bennet. Il dut à nouveau alléger une boîte en carton et feuilleter les innombrables parchemins à la recherche de ceux qu'il cherchait.

Minerva Bennet était devenue professeur de Métamorphose en cours d'année, à la fin du premier trimestre de 1956, l'ancien professeur ayant été assassiné. Si McGonagall était excellent, elle-même était, à en juger par ses résultats et qualifications, plus que brillante. Draco parcourut rapidement le passage sur sa forme Animagus, pour s'arrêter au suivant, qui traitait de son mariage. Quand Minerva McGonagall devint veuve, elle refusa de suspendre son enseignement durant quelque temps, comme on le lui avait proposé, et fit une annonce publique dans laquelle elle accusait un Mangemort en particulier du meurtre de son époux. Le Mangemort en question ayant été innocenté, l'accusation n'eut jamais de suites.

Les yeux de Draco glissèrent plus bas sur la feuille, pour apprendre le nom du Mangemort que McGonagall affirmait être le responsable de son veuvage.

Lucius Malfoy.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Kinou