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CHAPITRE XIII
Cela faisait plusieurs heures que Thia restait à l'infirmerie. Elle veillait sur le corps sans vie de Lee. Elle n'avait plus assez de larmes pour pleurer et seul son visage blafard reflétait l'immense détresse dans laquelle elle se trouvait.
Lee, Lee, pourquoi? Je ne veux pas, je ne veux pas…
Une unique larme glissa le long de sa joue couleur de cire et tomba comme une goutte de cristal sur le pull de Lee où elle fonça légèrement le tissu. Personne n'était venu ici. La Grande Salle tenait d'infirmerie. Les blessés et morts étaient trop nombreux. Les cadavres étaient entreposés ici sur des couvertures. Leurs visages pourrissaient déjà. Les joues se creusaient. Les yeux des morts avaient été fermés par Pomfresh. C'était dans cette atmosphère que Thia veillait Lee.
La peau foncée du jeune homme avait déjà blanchie. Thia avait tenu à fermer elle-même les paupières du Gryffondor. C'était comme une ultime marque d'amour envers celui qui avait éclairé son existence. Elle l'avait ensuite embrassé. Son dernier baiser. Elle ne voudrait plus jamais fréquenter d'hommes. Ça faisait trop mal quand on les perdait. Elle avait le cœur déchiré en deux par la douleur.
Elle se pencha vers lui et lui caressa la joue, encore et encore. Personne ne savait qu'elle était là. Elle avait réussi à forcer la serrure de l'infirmerie et dans la pagaille générale, elle était passée inaperçue. Elle ne voulait pas sortir de là. Pas question. On lui avait enlevé Lee. Il y avait tant de choses qu'elle aurait voulu faire avec lui! Tant de choses… maintenant, c'était trop tard. Elle n'avait jamais eu cours avec lui, elle n'avait jamais pu se serrer contre lui au coin d'un feu ou nager avec lui, voler avec lui. Il l'avait emmené dans les cuisines et elle avait rencontré les elfes de maison qui s'y tenaient. Ils avaient partagé une pomme d'amour. Lee lui avait expliqué que la friandise était différente de chez les Moldus. Ici, elle conférait une sensation de bien-être. On était isolé avec celui qu'on aimait. Ça avait été merveilleux. Il s'était inquiété pour elle lors de la bataille de boules de neige, lorsqu'elle en avait reçu une en pleine figure. Il y avait un caillou à l'intérieur qui avait fait saigner son arcade sourcilière. Il s'était pratiquement fâché avec Seamus à cause de ça. Mais elle n'avait jamais pu connaître l'extase dans ses bras et regrettait de lui avoir fait comprendre qu'elle n'était pas encore prête pour ça. Si elle avait su, elle l'aurait laissé faire.
Soudain, la porte s'ouvrit. Thia ne tourna pas la tête, absorbée qu'elle était dans ses souvenirs. De gros sanglots secouèrent l'arrivant qui se précipita vers elle. Enfin, elle dévisagea celle qui venait de franchir le seuil de l'infirmerie. La femme noire était sans aucun doute la mère de Lee. Elle lui ressemblait beaucoup mais le jeune homme avait acquis sans conteste de son père sa carrure élancée d'athlète. Les deux parents la regardèrent avec détresse. Elle comprit qu'elle devait laisser la place. Elle se releva et s'écarta. Mais la femme l'en empêcha.
« Je suis la mère de Lee. Appelle-moi Rachel. Je suppose que tu es Thia. » fit-elle avec un pauvre sourire.
Sa voix tremblait, ses yeux larmoyaient mais, courageusement, elle réussit à tendre une main ferme à la jeune fille, main que celle-ci prit sans hésiter.
« Je suis son père, Christopher. » se présenta alors l'homme. « Lee nous a beaucoup parlé de toi. »
Instinctivement, ils avaient tutoyé Thia. Elle leur en fut reconnaissante. Cette marque d'amitié l'incluait pleinement dans le cercle de leur famille. Elle eut un pauvre sourire.
Rachel lui prit doucement le bras pour l'inviter à rester auprès du corps de leur fils, invitation qu'accepta Thia en s'agenouillant de nouveau. Elle aurait été gênée en temps normal de voir les Jordan pleurer ainsi mais elle était trop effondrée pour ça. Elle fit de son mieux pour les soutenir.
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Une semaine plus tard, l'école s'était remise difficilement du choc, bien que lésée d'une bonne partie de ses élèves. Les blessés avaient été dirigés vers Sainte-Mangouste. Les cours avaient repris mais sans énergie. Dans la Grande Salle, durant les dîners, les tables des différentes maisons étaient clairsemées. Toutes sauf celles des Serpentard. Tout le monde les méprisaient, pensant qu'ils étaient au courant pour cette attaque. Thia, la première, en avait voulu à Malfoy pour l'avoir aidée et laissé Lee se faire tuer.
Thia se sentait affreusement seule et coupable. Normalement, elle aurait dû occuper la place de Lee à la morgue et non pas être là, vivante et miraculée. Malfoy lui avait sauvé la vie et elle avait encore du mal à avaler la pilule, d'autant qu'elle était de taille. Elle ne comprenait pas pourquoi il avait agi ainsi. Il était un Serpentard, son père avait été par deux fois accusé d'être un Mangemort, même s'il s'en était sorti les deux fois. Alors pourquoi? Pourquoi? Son attitude envers elle n'avait pas changé depuis le match de Quidditch et soudain, il lui sauvait la vie.
Mais il devait nécessairement être au courant. Cependant, ceci n'expliquait pas cela. S'il était au courant, pourquoi l'avoir sauvée? Représentait-elle quelque chose pour lui? Pendant les semaines qui avaient suivi le match de Quidditch, il ne lui avait pas adressé un mot. C'était incompréhensible. Thia avait beau tourner et retourner le problème sans arrêt dans sa tête, rien n'en ressortait.
Les Jordan avaient emporté le corps de Lee, permettant à Thia de garder certaines affaires personnelles du jeune homme. La Gryffondor les avait longuement remercié. Elle avait dû leur raconter elle-même ce qui s'était passé, une autre difficile épreuve. Elle s'était écroulée, en larmes, lorsqu'elle avait évoqué l'éclair qui avait mortellement frappé leur fils. Rachel l'avait prise dans ses bras, l'assurant qu'elle aurait toujours sa place chez eux. Thia se sentait tellement coupable de n'avoir pratiquement pas été blessée qu'elle n'avait rien ajouté.
Depuis l'attaque à Pré-au-lard (qui avait eu d'importants retentissements dans le monde sorcier), la jeune fille se renfermait sur elle-même à une vitesse qui effrayait ses amis. Elle ne parlait plus, ne mangeait plus et se laissait mourir à petit feu. Ses professeurs l'avaient eux aussi remarqué. Elle avait été convoquée plusieurs fois chez McGonagall, en vain. La jeune fille l'avait contemplée d'un œil vide en demandant quand le professeur de métamorphoses eut fini son discours si elle pouvait maintenant sortir. McGonagall l'avait regardée partir avec un petit serrement au cœur. La plupart des professeurs l'avaient d'ailleurs convoquée. Même Rogue. Le résultat n'avait pas varié d'un chouia. Un regard vide et un travail dont la qualité baissait dangereusement à chaque cours. D'ailleurs, maintenant, elle ne rendait plus rien du tout. Les Joyce-Seaton étaient venus exprès de chez eux pour raisonner leur fille mais Thia était restée imperméable aux reproches et autres morales. Elle se laissait doucement couler, n'ayant plus goût à rien. Puis, Malfoy était venue la voir. À partir de là, la situation avait complètement changée.
Flash-back.
Lee était mort depuis deux semaines maintenant. Ron et Hermione, les deux préfets de Gryffondor s'étaient fermement décidés à lui parler sérieusement. Ils l'avaient traînée dans la bibliothèque où plus personne ne se pressait depuis le drame, à part ceux qui tentaient d'oublier en travaillant et ne portaient alors aucun intérêt à leur discussion.
« Tu ne dois pas te laisser détruire! » avait balancé Hermione.
Un fort « chuuuut! » provenant de Mme Pince, l'avait fait baisser la voix.
« Ce n'était pas ta faute! » argua Ron.
« Il n'aurait pas dû mourir… » se reprocha Thia en serrant frileusement les bras autour d'elle, frissonnant.
« Tu as froid? » demanda Ron.
Hermione lui envoya un regard exaspéré.
« Tu sais que tu peux en parler, Thia! Mai si tu ne nous dis rien, comment veux-tu que l'on t'aide! Et tu crois que Lee aurait aimé que tu sois dans cet état? »
L'argument toucha Thia mais pas assez pour la sortir de sa léthargie. Ce fut l'apparition de Malfoy qui changea tout. Il venait d'entrer dans la bibliothèque, un air suffisant sur le visage, accompagné de ses deux chiens de garde, Crabbe et Goyle. À sa vue, le sang de Thia ne fit qu'un tour. Elle se leva brusquement, la chaise grinçant horriblement contre le carrelage. Mme Pince roula furieusement des yeux, furieuse. Les étudiants levèrent la tête, agacés. Ron et Hermione restèrent interdits devant sa réaction et se tournèrent pour voir quelle en était la cause. Leurs yeux s'agrandirent, cherchant ce qu'avait pu faire le Serpentard pour la mettre si en rage. Mais ils connaissaient déjà la réponse. Tous en voulaient aux Serpentard, rejetant sur eux la responsabilité de l'attaque. Mais Thia n'y fit pas attention. Elle regardait son visage. Comment pouvait-il avoir cet air-là alors que Lee était mort? Salaud!
Elle s'approcha à grands pas de Malfoy, l'air déterminé. Il ne la vit arriver que trop tard. Elle lui flanqua une gifle de toutes ses forces dont le bruit résonna dans toute la salle. Il la regarda avec stupeur, la marque de sa main imprimée sur sa joue blanche. Son visage pâlit davantage mais de colère.
« Comment oses-tu? » siffla-t-il.
« Quoi? C'est toi qui me demandes ça? Enfoiré! » grinça-t-elle, dents et mâchoires serrées. « Pourquoi t'as fait ça? »
Crabbe et Goyle s'apprêtaient à l'envoyer valser mais, d'un geste, Malfoy les en empêcha et les fit sortir de la bibliothèque, montrant qu'il pouvait s'en occuper tout seul. Ils s'éclipsèrent en haussant les épaules. Derrière, Ron et Hermione les observaient sans faire un geste. Il la regarda dans les yeux, comme pour la convaincre.
« Je t'ai sauvé la vie, Joyce-Seaton. Pourquoi m'accuses-tu? »
Ces propos la mirent en colère.
« Menteur! » explosa-t-elle, alors que Mme Pince, tout d'abord interdite, se reprenait rapidement et approchait à grandes enjambées. « Tu le savais, j'en suis sûre! Pourquoi tu n'as rien dit? Pourquoi l'as-tu laissé mourir? »
À ce moment, elle éclata en sanglots. Maladroitement, oubliant la présence de ses ennemis jurés, il la serra contre sa poitrine où elle s'y réfugia. Elle avait l'impression qu'à travers Malfoy, c'était Lee qui la tenait. Elle se pelotonna contre lui et mouilla la chemise blanche du jeune homme de ses larmes sans qu'il ne dise rien, la berçant inconsciemment.
« Oh, Seigneur, Seigneur… » répéta-t-elle inlassablement.
Enfin, elle discerna la voix douce d'Hermione:
« On va la conduire à l'infirmerie. »
Lentement, elle sentit qu'on l'écartait de Draco.
« Excuse-moi… » fit-elle en essuyant son nez rouge.
« Merci. » dit Hermione en la désignant.
Malfoy fit mine de se désintéresser de la situation mais il sourit gentiment à Thia avant de s'effacer, lui aussi, sans oublier de darder Ron et Hermione d'un regard froid.
Depuis, Thia s'était reprise et n'avait de cesse de retrouver l'assassin de Lee. Sa dette serait payée quand l'homme serait arrêté. Elle devait savoir le nom du Mangemort. Or, les Serpentard paraissaient très au courant de leurs agissements. C'est pourquoi elle décida de se rapprocher de Malfoy. Elle s'en méfiait encore, malgré le fait qu'il l'air pratiquement convaincue de n'y être pour rien dans cette attaque et qu'il en ignorait tout. Un Serpentard était un menteur dans l'âme, c'était connu!
Thia venait de finir sa journée et se dirigeait vers la salle commune des Serpentard. Elle était sûre que l'un d'eux serait d'accord pour aller chercher Malfoy. Elle essayerait de le persuader ou, au pire, de le charmer. Elle n'était pas sûre qu'elle aurait le dessus en tentant de le séduire mais elle s'étai rendue compte au premiers cours qu'elle avait un certain effet sur lui. Restait à savoir s'il en était toujours autant maintenant et si ce n'était pas qu'une simple réaction physique. Toutefois, le jeune homme paraissait toujours aussi disposé envers elle que lors de la scène de la bibliothèque. Il lui adressait un sourire quand il la croisait et Thia avait bonne chance de le persuader de l'aider. Bien sûr, elle en lui demanderait pas texto les noms des Mangemorts, ç'aurait été maladroit. Elle essayerait de le duper.
Soudain, on l'agrippa violemment et, avant qu'elle put dire quoi que ce soit, on l'entraîna plus loin, dans l'ombre d'une statue volumineuse. Elle se débattit mais en vain. Une main vint se placer contre sa bouche pour l'empêcher de crier. Enfin, une voix masculine perça:
« J'ai quelque chose à te dire mais si tu cries, tu ne le sauras jamais, tu entends? C'est à propos de Malfoy. »
Aussitôt, la jeune fille se fit tout ouïe. Elle se détendit pour prouver à son agresseur qu'elle resterait docile. Tout renseignement sur Malfoy pourrait lui être utile. L'inconnu enleva sa main et elle resta muette. Enfin, il la relâcha. Elle se retourna pour le regarder. C'était un Serpentard qui traînait parfois avec Malfoy. Un grand brun aux yeux espiègles qui aurait été mignon sans cette expression de suffisance en permanence accrochée sur sa figure. Quel était son nom déjà?
« N'en parle à personne, okay? Je risque gros. »
Thia se crut dans un film d'espionnage. C'était grotesque. Malfoy n'allait pas le tuer! Mais c'était peut-être extrêmement grave. Malfoy l'avait peut-être trompée. Il savait peut-être pour l'attaque des Mangemorts. Et alors il aurait joué la comédie à la bibliothèque. Le cœur de Thia manqua un battement. Et l'attaque sur sa propre personne au stade aurait montré sa véritable personnalité. Elle se morigéna intérieurement. L'autre n'avait rien dit encore et avec ses « peut-être », elle s'inventait des histoires. Malfoy ne pouvait pas être aussi maléfique que ça. Ce n'était qu'un play-boy, macho par dessus le marché et suprêmement orgueilleux. Un doute la prit.
« Attends une minute. Quel serait ton avantage à me raconter à moi quelque chose sur Malfoy? »
Elle se montra très méfiante. Ce n'était peut-être que pure calomnie. Elle devait être extrêmement prudente. L'autre prit un air offusqué qui sonnait faux.
« Je ne peux pas le sentir, en fait. Il me pourrit la vie. ( les poings de l'autre se contractèrent violemment) Et je sais que tu le connais. Mais ne te laisse pas embobiner par ses sourires à la noix. Il se sert de toi. »
Thia accusa la coup, profondément choquée. Ainsi ce petit salaud se moquerait d'elle depuis le début? Mais il lui avait tout de même sauvé la vie. Elle se résolut à ne pas faire confiance à son interlocuteur, du moins pas sans savoir où elle s'avançait. Ses yeux s'étrécirent jusqu'à n'être que deux fentes.
« Tu as de preuves de ce que tu avances? » s'enquit-elle froidement, n'osant croire que Malfoy se soit fichu d'elle.
« Ma parole. Si tu ne me crois pas, alors cours à ta perte, je n'y pourrais rien. » fit-il en haussant les épaules.
Thia n'hésita qu'un quart de seconde.
« Vas-y. »
L'autre se lécha nerveusement les lèvres, regardant autour de lui comme s'il cherchait quelqu'un. Jouait-il la comédie, lui aussi? Lui aussi. Thia s'aperçut avec saisissement qu'elle était déjà convaincue de la culpabilité de Malfoy. Mais elle devait savoir.
« On a conclu un accord, lui et moi. Il se vantait d'être irrésistible. Je lui ai rétorqué que je n'en étais pas aussi sûr. Il a parié 100 Gallions qu'il séduirait n'importe quelle fille de Poudlard. La seule condition était qu'elle soit de Gryffondor. »
En entendant ce récit, Thia voulut vomir, horrifiée qu'elle était. Il l'avait bien eue! Ce petit salaud n'avait fait que se jouer d'elle! Et dire qu'elle s'apprêtait à aller le voir! Ah, il devait bien rigoler à l'heure actuelle! 100 Gallions. Ainsi, elle ne valait que 100 Gallions à ses yeux? Elle n'était qu'une prime de chasse? Un vulgaire pari?
« C'est lui qui t'a choisie. Il devait sûrement penser que comme tu ne te mettais pas en avant, tu devais avoir un caractère assez facile. »
« De sorte qu'il pourrait me séduire en deux temps trois mouvements! »grinça-t-elle. « Il s'est fourré le doigt dans l'œil. »
« Il ne voulait pas uniquement te séduire. »
Elle lui jeta un regard d'incompréhension.
« Il devait te sauter aussi. »
Son estomac se révulsa. Elle s'excusa vaguement et s'enfuit aussi vite que possible en direction des toilettes. Des larmes de rage et de douleur se mêlèrent aux vomissures.
De son côté, Blaise Zabini s'autorisa un sourire d'autosatisfaction. Après tout, Draco n'avait jamais précisé qu'il ne devait pas intervenir… Il allait sûrement pâtir de son geste mais la déconfiture du Serpentard le valait bien…
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Conclusion, Thia va se faire nonne après avoir fichu une raclée à Malfoy…
