Chapitre 41 : Retrouvailles

Grand-mère sortit tremblante de son lit. Qu'allait elle faire face au voleur masqué ? La peur lui tenaillait les tripes : elle était seule au château avec Madame de Jarjayes ! Elle se devait de protéger la vie de sa maîtresse au péril de la sienne ! Elle s'arma du grand chandelier qui était posé sur la table et s'avança discrètement dans l'entrée.

La vieille femme espérait que le masque noir avait déjà fini sa besogne et qu'il avait quitté la demeure, mais des pas se faisaient entendre. C'était des bruits de bottes ! Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Elle inspira profondément. Ne disait-on pas que l'homme était sans doute jeune et plutôt attirant ? Elle priait pour qu'il n'use pas de ses charmes pour abuser d'elle.

Elle aperçut alors la silhouette du rôdeur. Elle se cacha derrière un fauteuil en serrant son chandelier de toutes ses forces. « Faites qu'il ne m'ait pas vue » priait elle en silence. Mais l'ombre fit quelques pas en sa direction, puis contourna la cachette grotesque. « Grand-mère ? ». La vieille femme poussa un cri d'effroi…. Le fantôme de sa petite fille était venu la hanter ! Elle s'écroula au sol, son précieux chandelier dans les bras.

Oscar regardait sa nourrice ébahie : que comptait elle faire avec ce chandelier ? Ne pouvant pas la laisser sur le sol, elle souleva la vieille femme et l'assit sur le fauteuil qui lui avait fait office de cachette. Elle se redressa ensuite, intriguée par la lueur qui provenait de l'escalier. Oscar vit alors sa mère, une bougie à la main, tenant un mouchoir, en train de pleurer devant la vision de sa fille.

MADAME DE JARJAYES : Oscar c'est bien vous ?

OSCAR en se précipitant vers sa mère pour l'enlacer : oui, Mère, je suis de retour

MADAME DE JARJAYES : oh ma chère enfant, je suis tellement heureuse… nous vous croyions tous…

OSCAR à son tour en larmes : ne vous inquiétez pas, je vais bien… Mère, il faut faire vite, André nous attend devant les grilles : il est gravement blessé.

Madame de Jarjayes alla chercher les clefs du portail qu'elle donna à Oscar qui, sans attendre, sortit de la demeure pour rejoindre Bernard et André. Pendant ce temps, sa mère fit sentir quelques sels à grand-mère qui revint peu à peu à elle.

GRAND MERE affolée : Madame, j'ai... j'ai vu un fantôme…

MADAME DE JARJAYES : calmez vous, grand-mère, ce n'est qu'Oscar… notre petite Oscar est enfin revenue…

Enfin rassurée la vieille nourrice serra dans ses bras Madame de Jarjayes, qui ne s'en offusqua pas, tant sa joie de retrouver sa fille saine et sauve était grande. Après quelques instants, les deux femmes entreprirent de préparer le nécessaire pour soigner André : Oscar avait dit qu'il était gravement blessé, elles devaient s'attendre à toute éventualité. Que s'était il passé ? Les enfants leur expliqueraient en temps voulu.

La calèche stoppa devant le perron de la grande demeure. Madame de Jarjayes et grand-mère accoururent immédiatement. Bernard bondit de son siège, salua brièvement les deux femmes puis ouvrit la porte de la calèche pour aider Oscar à sortir le jeune homme.

Avec autant de précautions qu'il leur était possible, les quatre personnes transportèrent André à l'intérieur.

MADAME DE JARJAYES à sa fille : où voulez vous que nous le mettions.

OSCAR : dans ma chambre, le lit est plus confortable et il y sera plus au chaud et mieux installé.

Madame de Jarjayes ne fut pas étonnée par la proposition d'Oscar ; elle observait le regard angoissé et aimant que sa fille portait à André. Elle avait doublement le cœur serré. D'un côté, la joie immense d'avoir retrouvée sa chère fille et de savoir qu'elle avait trouvé l'homme qui ferait d'elle une femme… Mais de l'autre, il y avait cette peur de la voir souffrir éternellement si l'homme qu'elle aimait, succombait.

Finalement, André fut allongé dans la chambre d'Oscar. Elle laissa le soin à sa mère et à sa grand-mère de l'examiner : sa plaie avait beaucoup saigné pendant le voyage, la chemise autrefois blanche avait tourné à l'écarlate, mais la respiration d'André était calme. Madame de Jarjayes rassura alors sa fille sur la santé de son compagnon.

Malgré son envie de rester auprès de l'homme qu'elle aimait, Oscar se fit un devoir de raccompagner Bernard jusqu'à la calèche.

OSCAR : Bernard Châtelet vous venait d'obtenir ma reconnaissance éternelle. Je vous serais à jamais redevable pour votre aide. J'espère avoir l'occasion, un jour, de vous payer ma dette.

La jeune femme s'avança et déposa un amical baiser sur sa joue.

OSCAR en retournant dans la demeure : Embrassez Rosalie pour moi, voulez-vous ?

BERNARD doucement : je n'y manquerais pas … que Dieu vous garde, Chère Oscar.