Chapitre 42 : Confession

Les trois femmes passèrent le reste de la nuit dans la petite pièce attenante à sa chambre où André était alité. Madame de Jarjayes et grand-mère voulaient savoir ce qui s'était passé. Le Général, avait été plus que vague sur la disparition d'Oscar : « ne vous inquiétez pas ! Je vous ramènerai votre fils »avait il dit. Mais il était revenu seul du rendez vous.

Leur angoisse avait redoublé quand, après l'enlèvement d'Oscar, André avait à son tour disparu. Elles avaient d'abord pensé qu'il était parti à la recherche de la jeune femme, mais finalement, ne le voyant pas revenir à son tour, leur souci grandit : André avait lui aussi disparu.

Autour d'une tasse de chocolat, Oscar décida de tout raconter à sa mère et à sa nourrice. Elle était fatiguée mais cela faisait trop longtemps qu'elle ne s'était pas confiée à quelqu'un … à André. Elle s'arma de courage et voulut commencer son récit en leur parlant d'André.

La jeune femme expliqua qu'André avait découvert sa féminité quelques semaines auparavant… elle leur avoua, le rouge aux joues, les sentiments qu'elle avait éprouvé pour lui. Oscar fut alors surprise de croiser le sourire tendre de sa mère. Madame de Jarjayes raconta alors calmement à sa fille comment elle avait rencontré André sortant de sa chambre, un peu négligé, alors que l'aube n'avait pas encore pointé. Les joues d'Oscar virèrent instantanément au vermillon ! « Soyez en paix, ma fille… André a eu ma bénédiction » avait ajouté Madame de Jarjayes.

Devant cet infini geste d'amour, Oscar se précipita aux pieds de sa mère qui posa délicatement la tête de sa fille sur ses genoux et lui caressa tendrement les cheveux. « Pleurez, ma fille ». Madame de Jarjayes ne put, elle-même, retenir ses larmes : elle avait enfin près d'elle la fille qu'elle avait mise au monde. Grand-mère regardait le tableau en retrait, elle prétexta une visite au chevet de son petit fils pour laisser la mère et la fille seules.

L'aube émergeait par la fenêtre de la chambre. Madame de Jarjayes était restée toute la fin de la nuit dans ce fauteuil, la tête de sa fille sur ses genoux, à la regarder dormir. Bien qu'épuisée et morte d'inquiétude pour son compagnon, Oscar dormait paisiblement.

Après ses quelques heures de sommeil et un brin de toilette, Oscar rejoignit André dans sa chambre. Grand-mère l'avait veillé le reste de la nuit. Le jeune homme semblait lui aussi dormir calmement. Sa nourrice avait pris soin de lui changer son pansement, l'avait lavé et lui avait passé des vêtements propres. Avec toutes ces attentions, le visage du malade avait repris quelques couleurs et paraissait plus détendu.

OSCAR : comment va-t-il, grand-mère ?

GRAND MERE se voulant rassurante : cesse de te morfondre ! La blessure est propre, le médecin qui l'a soigné a un fait du bon travail. Regarde, ses joues commencent à rosir. Je ne serai pas étonnée que, d'ici quelques jours, il se goinfre pour reprendre des forces.

OSCAR en la serrant dans ses bras : merci, grand-mère

Madame de Jarjayes apporta, elle-même, le petit déjeuner dans la chambre d'Oscar.

GRAND MERE : mais Madame, ce n'est pas à vous de faire cela…

MADAME DE JARJAYES : il est inutile, grand-mère… tant qu'André n'est pas sur pieds, je m'occuperais de mes enfants.

Oscar n'eut aucun mal à comprendre l'allusion de sa mère : elle était redevenue sa fille à ses yeux, comme Madame de Jarjayes l'avait toujours souhaité, et accueillait maintenant André comme son fils. Elle connaissait ce cœur empli de générosité de sa mère. Elle l'aimait d'autant plus.

GRAND MERE après un moment : dis nous Oscar, comment André t'a-t-il retrouvée ? Et qui lui a fait ça ?

OSCAR : c'est une longue histoire. Il y a quelques semaines nous avons stoppé des voleurs dans la demeure de Monsieur de Fontange ; les bandits nous ont révélé qu'ils agissaient pour un homme qui se faisait appeler « l'Archange de la terreur » et que celui-ci avait été aperçu rôdant aux alentours du Palais Royal.

Grand-mère et Madame de Jarjayes écoutaient le récit d'Oscar, leur tasse suspendue en l'air, le regard médusé. La jeune femme fut surprise par l'attention de son auditoire. Elle reprit.

OSCAR : Quelques temps plus tard, alors que je voulais rejoindre André, au village, des hommes m'ont prise en chasse et m'ont enlevée. Ils voulaient que Père leur fournisse des fusils.

Oscar évita sciemment d'aborder la vraie raison qui avait incité l'Archange de la kidnapper : la vengeance et la mort du colonel de la garde. Elle ne voulait pas les affoler.

OSCAR : j'ai été emprisonnée dans un cachot ; j'ai réussi à m'en échapper mais l'Archange m'attendait… si André n'avait pas été là… je serais morte et lui vivrait…

Les larmes coulaient sur les joues d'Oscar mais elle fit de son mieux pour garder son calme. Certes, André était gravement blessé mais il était en vie et c'était tout ce qui comptait. Elle prendrait soin de lui, comme lui avait pris soin d'elle … et ils passeraient tout le reste de leur vie ensemble.