X. Neige et soleil
Six mois Après l'Accident
A genoux dans la neige, Shido avait terminé son histoire. Il l'avait tantôt criée, tantôt murmurée, tantôt racontée sans dire un seul mot. Madoka l'entendrait, de toute manière.
Il avait au départ voulu simplement mourir, loin de Kurodo, pour montrer qu'il regrettait. Mais les souvenirs… ils étaient toujours plus forts que tout. Il s'était souvenu. Et au fur et à mesure, il avait compris…
En fait… il ne regrettait pas, il n'arrivait pas à regretter. Il aimait Kurodo et ne pouvait rien y faire.
Il n'avait jamais aimé Madoka. Il l'avait compris. Lors de sa première nuit avec le Docteur Jackal, il l'avait compris. Puis il l'avait oublié.
Et Ban le lui avait rappelé. Ban… s'il n'était pas venu le voir, il aurait sans doute continué à vivre avec Akabane. Durant un moment. Jusqu'à ce qu'il découvre de lui-même à quel point il était lâche.
Il ne pourrait pas réparer. Il ne pourrait pas remonter le temps. Il ne pourrait pas revenir à cette discussion lointaine, et avouer la vérité tant à Madoka qu'à lui-même. Il ne pourrait pas empêcher l'Accident. Il ne pourrait pas refuser la mission qui l'avait amenée à rencontrer Kurodo. Il ne pourrait rien empêcher du reste.
Mais il pouvait empêcher le futur. Ne plus commettre d'erreurs. Plus aucune. Jamais.
C'est ce qu'il faisait.
POV de Shido
Et c'est ce que je fais. J'ai revu ces derniers mois. Et en fait je ne les regrette pas… pardonne moi. Mais je sais que ce serait injuste si cela continuait.
Je ne ferai plus d'erreurs… n'est-ce pas ce dont tout le monde rêve? Ne jamais se tromper. J'ai trouvé comment. Il faut le vouloir. Et je le veux.
J'ai du mal à sourire. Cela doit faire plusieurs heures que je suis là. Je ne sais plus. Je ne pense plus… ou si. Si, je pense, toujours aussi clairement. C'est étrange…
J'ai froid.
Un homme émergea de l'ombre, derrière lui. Il soupira. S'approcha de Shido. Mit sa main sur son épaule.
"Puisque tu as fini, tu peux rentrer à la maison maintenant."
POV de Shido
Lui… que fait-il là? Je rêve...
Non. C'est bien lui.
"Tu n'es pas déjà mort quand même?"
Il se met en face de moi. S'accroupit pour être à ma hauteur.
Il sourit toujours, mais son regard se fait plus inquiet. Pourquoi…?
"Non, je murmure.
- Je doute que ton ami Ban soit fier de ce qu'il a fait.
- Non…
- Je dois te dire, au fait : je comprends, mais c'est quand même un peu stupide. Allez, viens."
Il veut me relever… non!
Shido voulut se dégager et retomba à terre. Akabane soupira encore. Il ne souriait plus, cette fois.
"Le jeu est terminé, mon petit Shido.
- Ce… n'est pas…
- Tu sais que tu vas attraper froid?
- Laisse… moi."
Le Psycopathe leva les yeux au ciel. Il se rapprocha du Beastmaster et tenta à nouveau de le relever, le prenant par le bras.
Shido se débattait.
Quatre mois après l'Accident
" Tu sais, une fois que ce boulot sera fini... si tu veux que je t'aide à en finir avec la vie, il n'y a pas de problème... ce pourrait même être amusant... "
"Je prends cela pour un oui."
Six mois Après l'Accident, POV de Shido
Je me souviens… il m'a promit. Il me l'a promis.
"Tu m'as promis."
Jackal se figea. Il lâcha la main de Shido et se tourna lentement vers lui.
"Tu m'as promis! Répéta Fuyuki.
- Proposé. Il y a une nuance.
- "Je prends ça pour un oui", tu l'as dit, non?
- Si c'est toi qui le demande, c'est moins amusant.
- Arrête! Je t'en prie. Amusant, amusant, tu aimes tuer, non? C'est ton travail? Alors!"
Kurodo ferma les yeux.
"Alors? Non, arrête, ne me dis pas que ça te fait quelque chose? Tu es un Psychopathe, et moi je suis un Monstre. C'est tout!
- Etonnant, en fin de compte il te reste assez de forces.
- La ferme! Fais-le! Tues-moi! Ou laisse moi mourir:
- Pourquoi ferais-je cela? Où serait l'intérêt?
- Pourquoi! Quel intérêt! Quel intérêt y a-t-il à tuer à tort et à travers? Pourtant, tu le fais bien! Et… ne me dis… pas… que ce n'est pas pareil. Ne me dis pas…"
Kurodo s'agenouilla, son visage à la hauteur de Shido, et l'embrassa. Le Beastmaster ne le repoussa pas, mais dès qu'il se fut éloigné cria de plus belle. Des larmes coulaient sur ses joues.
"Pourquoi? Pourquoi! Tu n'en as rien à faire de moi! Je ne suis qu'un jeu, une proie, depuis le début! Alors pourquoi? POURQUOI?"
Kurodo Akabane sourit. D'abord faiblement. Il prit dans ses bras Shido Fuyuki. Et son sourire s'élargit.
POV de Shido
Non… pourquoi… pourquoi ne veut-il pas… pourquoi ne veut-il pas… me laisser? Kurodo, laisse-moi…
J'ai froid et…
Mais… en fait…
Alors c'est comme ça…
Je comprends.
Il n'y eut qu'un dernier souffle. Pas une vraie dernière parole. Ou alors, elle était indéchiffrable.
Pourtant, le Docteur Jackal garda un long moment sa dernière victime dans ses bras. Mais il ne pleurait pas. Il ne souriait pas non plus. Juste un visage impassible.
Il finit par se relever. S'épousseta. Avança de quelques pas. S'arrêta. Observa le scalpel sanglant dans sa main.
Se retourna.
Il s'était toujours demandé…
Oui.
"Cela ne va plus être très amusant, maintenant."
Non. Cela n'aurait plus le même intérêt.
L'homme tout en noir revint sur ses pas et s'agenouilla.
Il s'était toujours demandé…
Il s'était toujours demandé si ses propres scalpels n'étaient pas la seule arme capable de le tuer.
Bien après l'Accident
Le printemps était arrivé très tôt. Et il faisait beau, très beau, il y avait beaucoup de soleil.
Emishi, les mains dans les poches, éclata de rire à une blague quelconque. Non loin de lui, MakubeX analysait tout ce qu'il voyait.
C'était sa première sortie, dans le monde extérieur, et il était entouré de tous ses amis.
Jubei et Kazuki se tenaient par la main, le premier guidé par le second. Il en était de même pour Ginji et Ban, Ban qui tenait d'empêcher son partenaire de courir après les canards.
Pore et les filles discutaient un peu plus loin.
Le groupe était au complet…
MakubeX sourit quand un papillon se posa sur sa tête.
Il avait fallu du temps et beaucoup de patience à Jubei et Emishi pour le convaincre de sortir. Déjà, ils l'avaient récupéré, arraché à ses ordinateurs et aux organisations peu scrupuleuses pour lesquelles il avait travaillé.
Finalement, ils avaient réussi, et le jeune adolescent trouvait que l'air libre, s'il ne valait pas le virtuel, n'était tout de même pas si mauvais.
Deux corbeaux passèrent. Tous sourirent.
Il ne manquait que les deux personnes qu'ils avaient rejetées, volontairement ou non. L'une parce qu'elle était trop elle-même, et l'autre parce qu'elle ne l'était pas assez. A présent, les deux avaient sans doute trouvé la forme de paix qu'ils cherchaient désespérément chacun à leur manière.
C'était une belle journée ensoleillée.
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