To my very deeply loved and desired one
Premier jour 31 août Hogwarts, grande salle.
Le voyage jusqu'à Hogwarts comme un retour vers mon passé. J'ai retrouvé le bourdonnement excité du Hogwarts Express, mélange de souvenirs de vacances et d'interrogation sur l'année qui débute.
Mais cette fois-ci, j'étais le seul adulte, à l'exception des employés du train. Donc solitaire et d'autant plus remarquable dans cette masse d'étudiants.
Je suis allé me chercher un compartiment encore inoccupé, et je me suis installé pour dormir: je n'avais pas vraiment envie de voir le paysage défiler sous mes yeux, et encore moins d'être obligé de faire la conversation.
Je me suis vaguement aperçu que trois élèves venaient s'installer sur la banquette d'en face, me regardaient avec curiosité et en déduisaient que j'étais le nouveau professeur de défense contre les forces du mal. Mais rien de plus, rien que de très banal.
Puis l'arrivée au terminus, les calèches sans chevaux, cette fois-ci je suis resté seul dans la mienne, j'ai subi un choc antérieur à me retrouver tout d'un coup devant le château, puis en train de gravir les marches, de pénétrer dans le hall, puis dans la grande salle, d'assister à l'affectation des nouveaux élèves dans leur maison.
Je suis à peu près parvenu à contrôler mes souvenirs - je ne voulais pas me laisser envahir par leur tristesse – au prix d'un état proche de l'hébétude, qui, à la fin de la cérémonie m'a fait avancer mécaniquement vers la table des professeurs, placée comme toujours en bout de la grande salle.
Dumbledore, déjà installé, m' a fait asseoir à sa gauche, je me trouvais donc entre lui et Minerva Mac Gonagall.
Etrange, de me retrouver soudainement avec eux comme un primus inter-pares, alors que jusqu'à présent je n'avais vu cette table et ses occupants que de loin.
A droite de Dumbledore se trouvait une jeune femme, qui m'a donné l'impression d'être aussi tendue que moi, et presque paniquée, regardant fixement devant elle – ma première image d'elle.
A côté Severus Snape, nos yeux se sont croisés rapidement, mais cela a suffit à me faire comprendre qu'il me déteste. Effectivement, il a toutes les raisons du monde de le faire : j'ai obtenu le poste qu'il convoite depuis longtemps, il sait ce que je suis, et un jour, j'ai failli le tuer. Par contre, je serai curieux de savoir s'il éprouve aussi de la peur, à me voir revenu à Hogwarts. Non j'imagine, Dumbledore a dû lui donner toutes les assurances possibles sur mon innocuité pour lui, puisque c'est à seule condition que j'ai accepté le poste : qu'Albus me laisse prendre toutes les conditions nécessaires afin que je ne sois un danger pour quiconque.
Dumbledore a réclamé le silence, puis a commencé son discours de bienvenu. J'essayais, sans succès, de me concentrer sur ses paroles; quand tout à coup, je l'ai entendu prononcer mon nom, Minerva m'a donné un léger coup de coude, j'ai compris qu'il fallait que je me lève, et l'assistance a décerné des applaudissements, assez nourris m' a-t-il semblé, à son nouveau professeur de défense contre les forces du mal.
Puis Dumbledore a repris la parole ; le fait de me lever et de me rasseoir m'ayant tiré de ma torpeur, je me suis mis à l'écouter attentivement .
– Et maintenant, permettez-moi de vous présenter une autre nouvelle recrue – il se tourne vers moi, pour un imperceptible clin d'œil – le professeur Isolfe Aloisia Dazurs, à qui le conseil d'Hogwarts, appuyé en cela par notre ministre, a confié un magistère hm innovant.
En effet depuis quelques temps, notre conseil a réfléchi à la nécessité d'ouvrir plus largement l'enseignement d'Hogwarts au monde extérieur, et à de nouvelles disciplines (depuis ma place j'entends Snape émettre un chuintement désapprobateur ) et en particulier à celle de l'économie. Ce sujet tient une place centrale dans le monde des Muggles, et force nous est de reconnaître que notre monde ne peut pas rester absolument en dehors du mouvement.
Contrairement à ce que certains pourraient penser, ou craindre , mais je suis sûr qu'il ne sont qu'une infime minorité – là , il se tourne vers Snape, avec un imperceptible hochement de tête, - il ne s'agit en aucun cas d'une reddition au monde des Muggles et à ses règles, mais d'un enrichissement de notre culture.
J'ajoute également que bon nombre de vos parents ont été les premiers à demander une telle évolution . Il est en effet bien évident qu'un certain nombre parmi vous va choisir de travailler dans la sphère économique, et que Hogwarts se doit, dans ce domaine, comme dans les autres – la voix de Dumbledore a clairement détaché ces derniers mots, de former d'excellents professionnels. Et comme nos amis magiciens français ont quelques longueurs d'avance dans ce domaine, nous les avons contacté, et nous nous sommes assurés les services académiques du professeur Dazurs.
Le professeur Dazurs, vous l'avez compris, est française, mais je vous rassure elle s'adressera à vous en anglais – un brouhaha de soulagement se fait entendre en contrebas de notre table - c'est déjà une nouveauté pour Hogwarts, puisqu'elle sera notre premier professeur étranger à plein temps, et elle possède un double cursus, puisqu'elle a effectué des études de magie à Hauteville, sur les îles Chausey, et par la suite des études purement muggles en économie.
Elle a également participé au sein du ministère de la magie à Paris à l'élaboration d'un système de règles économiques transposable à notre monde, et qui a d'ailleurs déjà été adopté par notre ministère, ici au Royaume-Uni. D'où la nécessité pour Hogwarts d'ajouter cette matière au corpus de ses autres enseignements. Néanmoins, nous avons également convenu, dans un premier temps, de limiter l'ouverture de ce cours aux sixièmes et septièmes années.
A la fin de cette année, nous verrons s'il y a lieu d'élargir cet hm arrangement. Par ailleurs, le professeur Dazurs garde une partie de ses attributions auprès du ministère à Paris, et sera absente 3 jours par mois, ce qui ne gênera bien sûr en rien le planning de ses cours. Enfin, elle vient d'accepter ce matin, et je la remercie d'avoir bien voulu donner une réponse positive à une demande faite un peu au dernier moment, d'assurer la partie euh française du cours d'histoire de la magie - .
Minerval se penche vers moi et me glisse à l'oreille - Je suis sûre que les élèves vont être ravis et que les cours seront plus animés - j'ajoute alors, car, tout comme Minerval, j'ai subi la monotone logorrhée de Pins - et moins soporifiques - et nous échangeons un sourire de connivence.
Je vois alors que le nouveau professeur s'est levée, elle porte une robe noire à col montant, et a l'air toujours aussi tendue, mais se décontracte un peu en attendant les applaudissements qui ne lui sont pas ménagés, sauf bien sûr du côté des Slytherin. J'entends même un sifflement en provenance de leur table.
Minerva l'a remarqué comme moi et émet un tss désapprobateur, elle se penche vers Snape par dessus mon épaule, mais ce dernier, qui pourtant a dû apercevoir son mouvement, reste impassible. Dumbledore reprend – Je vous demande donc de lui réserver votre meilleur accueil. Il se tourne vers elle, lui sourit et l'aide à se rasseoir.
Lui reste debout et se remet à parler – J'ai bien conscience de différer encore le moment où vos jeunes estomacs pourront enfin de rassasier, mais il me reste une dernière communication à vous faire et il s'agit là encore d'une nouveauté, mais qui concerne cette fois-ci votre temps extrascolaire. Le conseil d'école, suite d'ailleurs a une consultation réalisée en fin d'année dernière auprès de nous tous, a en effet décidé qu'Hogwarts se devait de proposer d'autres disciplines que le quidditsch ; par conséquent ceux qui le souhaitent pourront pratiquer différents activités sportives ou artistiques soit le soir, soit le samedi matin. Des formulaires d'inscription à ces différentes activités vous seront distribués dès demain.
Je vous précise que les différents intervenants chargés de ces cours ne font pas partie de notre équipe pédagogique permanente, mais viendront de l'extérieur, principalement de Londres je crois, pour assurer ces sessions. Leurs noms vous seront également communiqués dès demain. Et maintenant je vous remercie de votre patiente attention et vous souhaite un bon appétit.
Nos assiettes se remplissent alors subitement de toutes sortes de mets que je mange machinalement, sans vraiment les savourer, alors que je n'ai pas connu une telle d'abondance depuis... en bien en fait depuis mes années à Hogwarts !
Mais le souvenir de mes amis disparus me nourrit de tristesse. Minerva Mac Gonagall est cependant pleine de sollicitude à mes côtés, j'imagine qu'elle doit comprendre ce que je ressens, et je lui sais gré des quelques perches qu'elle me tend afin de me sortir de ma morosité – Une nouvelle année qui commence – et avec beaucoup de nouveautés, me semble-t-il !
A ma droite, Dumbledore est en conversation avec le professeur comme déjà quelque chose à voir avec ciel et bleu, Bluesky, non ça doit être français, ah voilà - Dazurs, qui semble heureuse d'avoir ainsi une bonne excuse pour se détourner de Snape.
Comme je la comprends ! Je poursuis ma conversation avec Minerva, j'ai soudain besoin d'une voix qui me parle et d'yeux qui me regardent.
– Alors professeur Mac Gonagall, avez-vous passé de bonnes vacances ? (Il y a bien longtemps que je ne suis lancé dans une conversation de ce genre, informelle, sans enjeu). – Je vous en prie, nous somme collègues maintenant, je ne suis plus votre professeur, appelez moi par mon prénom !
Elle semble heureuse de ma question, de me voir enfin sortir de cette stupéfaction douloureuse dans laquelle j'étais immergé, je me rends compte alors combien j'ai dû lui sembler indifférent ce soir à tout ce qui m'entourait.
– Eh bien, j'ai passé 2 merveilleuses semaines en Italie, avec une de mes anciennes étudiantes, elle était en dernière année lorsque j'ai commencé à enseigner à Hogwarts, vous voyez que la différence d'âge est quasi inexistante entre nous !
Nous nous sommes pas mal baladées en Toscane, bien sûr nous avons consacré beaucoup de temps à Florence, et puis nous n'avons pas pu résister au plaisir de revoir Venise. C'est vraiment une ville magique, enfin pour parler comme les Muggles ! Et cette fois-ci, nous avons vraiment pris le temps de flâner, ou plutôt de nous perdre dans les campos , en marchant à l'aventure. C'est au rythme lent de la marche que l'on arrive à capter un peu de l'atmosphère d'un lieu...
Euh, connaissez-vous l'Italie ? – Et bien, j'ai pas mal lu de choses sur ce pays, particulièrement sur l'empire romain (évidemment quand on s'appelle Remus ) et l'art de la Renaissance, mais vous savez, je n'ai jamais eu tellement beaucoup de hm moyens financiers pour des vacances à l'étranger -.
Voyant que ma réponse pouvait signifier qu'elle avait été indélicate, j'enchaînais rapidement – Et donc après l'Italie, directement l'Ecosse, son climat vivifiant et Hogwarts ?
Elle est rassurée par mon – piètre – humour. – Non, il me restait encore trois bonnes semaines, que j'ai passées en famille à Gairloch, près du lac Maree, dans la région des Highlands, chez ma sœur aînée, Frances. Elle va être grand-mère dans quelques mois, pour la première fois. Vous imaginez quelle excitation règne dans la famille. Nous somme tous enchantés de voir une nouvelle génération bientôt montrer le bout de son petit nez !
J'étais très étonné d'entendre Minerva si volubile, et si visiblement émue, parlant de naissance et de famille. Etudiant, je ne m'étais jamais posé trop de questions sur la vie privée des professeurs, excepté bien sûr les quelques histoires plutôt scabreuses qui circulaient sur les supposés rapports entre certains des enseignants d'Hogwarts, notamment entre Philip Mac Elroy, professeur d'arithmétique, et Elleina Grawrthec, qui renonça au bout d'à peine une année à essayer de nous apprendre la divination astrologique ! Je me souviens même que certains la soupçonnaient de s'être enfuie pour dissimuler les débuts d'une grossesse...
Etant devenu un de ses collègues, je découvre donc Minerva sous un autre jour. Et je peux facilement imaginer qu'étant restée elle-même célibataire, que ce volontairement ou non , elle soit contente de trouver dans son entourage de quoi exprimer une maternité par procuration.
Je me dis également que cette possibilité m'est interdite, une fois de plus et un flux malveillant d'amertume et d'incomplétude m'envahit et me violente, comme chaque fois que je réfléchis à ces sujets.
– Et voilà pour mes vacances, et maintenant une nouvelle année... Sachez Remus que Albus et moi-même sommes très contents que vous ayez accepté ce poste de professeur. Nous sommes tous les deux persuadés que vous saurez dispenser un enseignement de qualité, il faut bien dire que jusqu'à présent Hogwarts ne s'est pas montré à la hauteur dans cette discipline si...Je complète sa pensée – stratégique
Oui, stratégique, c'est bien le mot. Vous savez les cours de Gilderoy Lockhart tenaient plus de la mascarade et de l'esbroufe qu'autre chose, quant à Squirell ... Bref il était temps que nous ayons un professeur digne de ce nom et nous comptons sur vous et sur vos hm expériences en Roumanie, pour faire rattraper le temps perdu à nos élèves...
- Et bien, j'espère que je saurai donner satisfaction et ... je vous remercie de la confiance que vous m'avez accordée en me recrutant. Elle pose légèrement sa main sur mon bras, un geste plein d'encouragement et d'humanité dont je ne suis pas sûr d'être digne.
Enfin, le banquet de rentrée est terminé, je serais incapable de dire ce que j'ai mangé ! Dumbledore se lève, nous l'imitons, il souhaite une excellente année scolaire et une bonne nuit à tous.
Tous les professeurs regardent passer le flot des élèves, comme si nous assistions à une parade. Il semble que notre statut de "nouvelles recrues" vaille au professeur Dazurs (a-t-elle les yeux bleus ? ) et à moi-même de nous faire abondamment dévisager.
Lequel de nos deux est le plus mal à l'aise ? J'essaie de sourire, en me demandant si je suis vraiment convaincant. Je suis fatigué, j'ai hâte d'être seul à nouveau, il y a si longtemps que je m'étais trouvé au milieu d'une telle foule ; combien d'années ? 14 sans doute, depuis que j'ai quitté Hogwarts. J'ai tellement perdu l'habitude du commerce avec les humains...
Les étudiants ont enfin tous quitté la salle, mais hélas, Dumbledore se tourne vers moi – vous me pardonnerez, cher Remus, mais je souhaiterais vous dire un mot en privé. Auriez-vous l'obligeance de me suivre dans mon bureau ? – J'acquiesçais, bien sûr, et tout en suivant le directeur d'Hogwarts, je me rappelais que ma dernière visite dans son bureau datait de mon dernier jour d'étudiant et que Dumbledore m'avait prodigué tous ses encouragements : je quittais alors le douillet cocon de mon alma mater, sans trop savoir comment j'allais pouvoir gérer mon statut de loup-garou diplômé d'une des plus prestigieuses écoles de magie.
Le bureau n'a pas vraiment changé, peut-être encore un peu plus de livres sur les étagères. Dumbledore m'invite à m'asseoir dans un des fauteuils à haut dossier disposé à côté de la cheminée, il fait de même.
Nous restons un moment sans parler. Dans cette atmosphère austère mais chaleureuse, je sens mon corps et esprit se détendrent peu à peu. Dumbledore me regarde attentivement, plissant les yeux, souriant légèrement. Je me surprends à faire de même. Soudain un bruissement d'ailes dorées et Fawkes est perché sur l'épaule de son maître, sollicitant une caresse. Puis le phœnix me regarde, ses yeux sont bienveillants.
– Appelez-le, je crois qu'il a envie de renouer le contact avec vous. – Est-ce toujours le même ou a-t-il ressuscité depuis que j'ai quitté Hogwarts ?- Je tends mon bras sur le côté, coude replié à angle droit. L'oiseau répond à ma sollicitation, et je sens bientôt son poids sur mon avant-bras, le délicat mouvement de balancier qui lui permet de trouver son équilibre. Maintenant que j'ai vieilli, je suis moins impressionné par sa beauté que sensible au rayonnement bénéfique qui se dégage de lui et arrive à se frayer un subtil chemin en moi, et apaise mes angoisses.
– Et bien, oui, c'est toujours le Fawkes que vous avez connu, et qui donc commence à se faire vieux ; il n'est donc impossible qu'il me quitte bientôt...
Bien, je vous ai demandé de m'accompagner et de prolonger encore votre soirée, car je souhaite évoquer deux points avec vous, l'un pour vous hm rassurer et l'autre pour vous solliciter.
Dans trois semaines, ce sera la pleine lune - ... je me crispe brusquement, mon bras enregistre le sursaut, Fawkes rétablit son équilibre et s'immobilise à nouveau ...
- Minerva et moi-même avons récemment inspecté votre hm abri, il est prêt à vous assurer toute la protection et la discrétion nécessaire. Je pense que vous ne devriez n'être indisponible qu'une matinée, vous pourrez donc facilement déplacer vos cours, mais bien sûr, si vous aviez besoin de davantage de temps pour récupérer de votre hm transformation, je trouverais une raison pour justifier d'une absence prolongée.
Vous voyez que ce côté là des choses est sous contrôle, vous avez donc l'esprit libre pour vous consacrez à votre tâche de pédagogue. Il s'interrompt, regarde l'oiseau resté sur mon bras. - En tout cas, vous avez apprivoisé Fawkes, sans cela, il serait certes venu vers vous, mais vous aurait presque immédiatement abandonné. Voulez-vous savoir pourquoi ? Il ne me laisse pas le temps de répondre.
– Le fait qu'il soit resté près de vous rend honneur à l'effort constant qui vous a toujours animé, et qui vous animait déjà quand vous être venu rejoindre Hogwarts, en qualité de jeune élève, la lutte contre votre monstruosité. Vous y abandonner eût été normal, la plupart de ceux qui sont dans votre hm cas, ont choisi la voie facile. Vous, en revanche, vous avez toujours tenu bon, vous vous êtes toujours imposé cet effort extraordinaire, exigeant toute renonciation à une vie qui aurait pu être moins austère.
J'esquisse un sourire, sans réussir à y mettre aucune ironie, plutôt l'anxiété qui précède le résultat d'un examen - je ne suis jamais parvenu à me soustraire à la bonté de Dumbledore - Donc, si je comprends bien, Fawkes lit dans les âmes comme dans du cristal et ainsi, grâce à lui, vous testez vos interlocuteurs ! – mais comme j'étais sensible au jugement que Dumbledore venait de porter sur moi.
Touché également par la façon précise et discrète dont il m'avait rassuré sur les périodes de pleine lune. Avais-je jamais fait l'objet d'une telle sollicitude par un autre que lui ? Dumbledore a repris la parole
- Et bien, disons que Fawkes m'a souvent permis de vérifier mes intuitions, oui, et je dois dire que nous sommes rarement en désaccord... Mais s'il a lu en vous, et je pense que l'expression est effectivement bien choisie, c'est que vous le lui avez permis.
Il médite un instant – C'est que vous avez une âme limpide, qui n'a rien de terrible à dissimuler. Acceptez ce que Fawkes vient de vous démontrez : la malédiction dont vous souffrez n'a jamais altéré ni votre sens du bien, ni votre profonde humanité, vous n'avez jamais laissé sa noirceur déteindre sur vous.
Il s'interrompt encore, comme pour me laisser le temps de m'imprégner de ses paroles, d'y adhérer peut-être ?
Bien, venons-en maintenant au dernier point, un service que je vous demande. Vous avez découvert toute à l'heure votre nouvelle collègue, le professeur Dazurs. En tant qu'ancien étudiant d'Hogwarts, vous êtes au courant des usages et des particularités de cette maison, de tous ses coins et ses recoins, de ses zones accessibles, et aussi de ses dangers...
– C'est comme si les paroles de Dumbledore, et précisément l'évocation des coins et des recoins de l'école venaient de briser le léger et futile couvercle que j'avais essayé jusqu'à ce moment de faire peser sur le puits sombre dans lequel s'agitent douloureusement mes souvenirs. Tant de temps passé à essayer de les inactiver et une unique fraction de seconde a suffit à les relâcher !
Je suis impuissant devant eux, au bout de la résistance que j'ai tentée de leur opposer depuis si longtemps, je m'aperçois que je pleure, la tête tombée entre mes mains. Les larmes s'écoulent des mes yeux aussi facilement que les minutes à l'horloge du bureau. Je sens que Dumbledore s'est levé et rapproché de moi et qu'il est prêt à attendre que je ressurgisse dans le moment actuel. J'y parviens enfin, au moment où mes mains s'écartent de mon visage, Dumbledore leur propose un mouchoir. Comme une bouée lancée à un noyé.
Je frotte mes yeux, mes joues, durement – J'étais en train de réfléchir au nombre d'enfants, de femmes et d'hommes qui ont comme vous essuyé leurs yeux depuis que le monde existe, combien de mouchoirs, somptueux, modestes, propres ou sales pour combien de douleurs, pour combien de chagrins ... le point où l'âme s'épanche dans la matière...
- Je lui sais gré de rester dans un registre neutre, d'autant plus que je suis sûr qu'il a compris par quoi je viens d'être défait. C'est moi qui reprends la parole, soulagé de découvrir que je maîtrise au moins ma voix.
– Excusez-moi, je vous fait perdre du temps. Nous en étions arrivés au dernier point, et vous me parliez du professeur Dazurs... (que penserait-elle en me voyant effondré en larmes ?) – Oui, mais avant que je ne continue sur ce point, peut-être avez-vous un autre sujet que vous souhaiteriez aborder ? – Non, merci, mais ... non – Comme vous le souhaitez, sachez que je considère pas votre réponse comme irréversible.
Il marque une légère pause, puis constatant que je reste obstinément silencieux - Donc, le professeur Dazurs. Hogwarts l'a recrutée pour une tâche un peu risquée, finalement : introduire une discipline muggle, donc non canonique ; elle risque de rencontrer une certaine résistance, d'autant plus qu'elle va conserver des activités en dehors d'Hoqwarts, ce qui constitue un mode de fonctionnement très novateur au sein de notre école, et comme tel propre à susciter certaines résistance de la part de hm certains d'entre nous. Je n'ai bien sûr pas d'inquiétude sur sa capacité à réussir, mais Minerva et moi avons pensé qu'elle aurait, du moins dans les premiers temps, besoin d'un hm chaperon, pour faciliter son acclimatation.
– Je comprends votre position, mais pourquoi ne pas lui avoir choisi un professeur confirmé, comme Flitwick ou Madame Sprout ou ...
- Nous y avions effectivement songé, mais finalement nous avons trouvé préférable de lui assigner quelqu'un de hm la même génération et qui, tout en connaissant Hogwarts et son mode de fonctionnement, partagerait avec elle le statut de nouveau professeur...
- Attendez, Albus, je ne suis pas seulement un nouveau professeur, je suis également un loup-garou, bien sûr, vous savez que j'essaie de ne pas me laisser ... déborder par cette situation, mais je suis désolé, mais les faits sont têtus, vous ne voulez tout de même pas imposer un tel voisinage à cette jeune femme ! Quelle drôle d'acclimatation ce serait pour elle et quel effrayant chaperon ! De quoi la faire fuir à toutes jambes, en effet !
Et puis – j'hésite, mais je sens que je lui dois davantage d'explication – je n'ai pas l'habitude des jeunes femmes... je suis désolé, je ne peux pas.
Dumbledore me regarde à nouveau, ses yeux toujours pénétrants, mais pas intrusifs. A ce moment précis, je pense qu'il a compris ma détresse, qu'il a compris que je n'ai jamais eu de rapports intimes avec une femme
– Du calme Remus, croyez-moi, mon intention n'est pas de rajouter à vos difficultés, bien au contraire. Peut-être Minerva et moi avons-nous effectivement commis une erreur d'appréciation, et je m'aperçois que je viens de vous blesser, en tout cas le moment était-il sans doute mal choisi ... donc, n'en parlons plus. Je demanderais à Hagrid d'endosser le rôle de mentor, je suis sûr qu'il en sera ravi et honoré
– Je sens la pique que contiennent ses paroles, mais je suis trop fatigué pour en être blessé. Je prends congé de Dumbledore, qui m'expliquent que mon appartement se trouve au quatrième étage, au dessus de la bibliothèque. Filch ayant fixé un parchemin avec mon nom sur la porte, je devrais trouver facilement et aurait toute latitude de changer le mot de passe provisoire qui était " maestus".
Abattu, affligé, sinistre, finalement je le garderai peut-être.
J'ai effectivement trouvé facilement, et refermant ma porte, je me suis enfin retrouvé seul. Quelques préparatifs m'amenèrent vite dans mon lit, je réfléchis encore quelques temps à la manière discourtoise dont j'avais refusé la proposition de Dumbledore, en me rendant compte que j'avais déjà commencé à regretter ma réponse au moment même où je l'exprimais.
Je m'obligeai pourtant à ne pas me sentir coupable, espérant que Dumbledore avait à cette heure déjà compris mes raisons. Puis j'arrivai enfin à identifier ce qui me chiffonnait encore : Dumbledore ne se serait-il pas mépris sur le sens de mes paroles " Je n'ai pas l'habitude des jeunes femmes " et n'en aurait-il pas déduit que j'étais homosexuel ? Pendant mes années d'études, je m'étais vaguement rendu compte que certains tiraient ce genre de conclusions, se basant sur mon absence de relation suivie avec quelque étudiante que ce soit à Hogwarts, j'avais traité ces rumeurs avec la plus grande indifférence, après tout mieux valait passer pour un gay qu'être démasqué comme loup-garou.
Alors que j'étais en dernière année, un étudiant plus jeune m'avait fait des avances , il s'était bien vite rendu compte de son erreur, je lui avais promis la discrétion et j'imagine qu'il était allé tenté sa chance ailleurs. Par la suite, je m'étais dit à plusieurs reprises que me lancer dans une relation avec un homme aurait pu être une solution, assouvir mon désir, apaiser ma chair, sans avoir à affronter la question de l'impossibilité d'une paternité. Mais je ne suis jamais allé au-delà de la simple spéculation dans ce domaine. Ce sont les corps des femmes qui m'ont fait crever de désir et de frustration.
Jusqu'à ce que, ne pouvant plus supporter les tourments de ces ardeurs inassouvies, je me résolve à recourir à une potion, permettant de "juguler les échauffements de la chair" comme l'expliquait cliniquement le grimoire du XVIième siècle dans lequel je la découvris. Maintenant, je suis un homme sans désir physique, donc encore plus anormal qu'avant. Mais peu importe ce que pense Dumbledore à ce sujet, ce que je lui dois maintenant, c'est simplement d'être un bon professeur. Et je cessai de penser à quoi que ce soit.
