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Fée Fléa(u

Les derniers chapitres plus courts ? sans doute qu'il y avait moins de choses à dire… l'écriture de mon tandem n'est pas raisonnée, elle ne vise pas à l'exhaustivité (ce serait chiant et exténuant à écrire …) elle est plutôt impulsive, désordonnée, obsessive, pas normative (vous m'en écrirez cinquante lignes chaque jour …) – elle est faite pour les dévoiler et aussi, peut-être (?) leur faire prendre des risques.

JXC n'est pas un truc si construit qu'il ne laisse aucune part au hasard, ou plutôt à l'improvisation, certes, il s'achemine vers une fin inéluctable, mais il y a quelques passages "dérogatoires", et ceux-là, ils pourraient y figurer ou pas, on y perdrait sans doute un peu en connaissance de la psychologie des protagonistes, mais pas plus.

Lupin, Arsène, sur une piste vers Lupin, le loup ? En fait, chez Leblanc, le nom est associé à la fleur, dernier chapitre des dents du tigre, justement " Le clos des lupins".

Et dans mon potager foisonne le lupin

Fausse piste alors ! (mais ça m'arrange, effectivement).

Les absences lors de la pleine lune – la réponse est oui, on en reparle dans le passage du jour et encore dans quelques temps – c'est capital.

Alixe – quoique tu penses de tes revues, moi j'aime bien le mot de ballet que tu me proposes dans la dernière, j'y suis très sensible, je trouve qu'un pas de deux entre un danseur et une danseuse est sans doute façon la plus jolie (et la plus sensuelle aussi) de décrire une relation amoureuse.

Fénice - presque rationnels… sont-ils vraiment si irrationnels que cela dans les autres moments ? je les trouve plutôt cohérents avec leurs angoisses, suivant scrupuleusement leur ligne névrotique, parfois au dessus (on respire), parfois au dessous (on expire).

Bonne lecture !

Journal de Remus, 31 janvier

Cette après-midi, je me suis fait convoquer dans le bureau de Severus Snape, comme un vulgaire étudiant pris en faute. Il m'attendait à la sortie de mon cours, et m'a prié de le suivre dans son antre. C'est la pièce qu'occupait autrefois notre professeur de potions, Edgar Usher, elle est restée fidèle au souvenir que j'en garde : érudite avec ses rangées de livres, de flacons et de boîtes, austère, mais Snape a su y ajouter une bonne dose de sinistre, une salle de tribunal ne sachant rendre que des verdicts de culpabilité !

Il s'assoit à son bureau, au bout de quelques secondes je fais de même dans le siège qu'il ne m'indique pas , je ne suis plus étudiant que diable, mais son collègue, son égal. L'atmosphère délétère qui règne dans cette pièce pénètre dans mes muscles et se transforme en tension douloureuse.

Il attaque soudain.

" A quoi jouez vous avec le professeur Dazurs ? Je vous ai déjà averti, mais vous n'en avez pas tenu compte, ou serait-ce que vous n'auriez pas compris ? Je vais donc être plus clair - je comprends que vous soyez tombé amoureux d'elle, c'est une femme, intelligente sensible, séduisante, c'est votre droit le plus strict. Oui, je comprends même qu'elle vous fasse bander " – la vulgarité inutile du terme me blesse, et bien sûr c'est ce qu'il cherchait. " Mais gardez vos sentiments pour vous, après tout vous vous êtes un homme de l'ombre, cela ne devrait être qu'un jeu d'enfant pour vous.

Vous comprenez ce que je veux dire (oh oui, oh comme je comprends, je sais ce que tu vas dire avant même que tu ouvres ta sale gueule, ces choses que je me suis dites tant de fois), vous n'avez pas le droit d'essayer de vous en faire aimer. Vous seriez obligé de lui mentir, déjà vous vous présentez à elle sous un jour trompeur ! "

Il se met à marteler chaque mot, impitoyablement.

" Vous savez le risque que vous lui feriez courir, le risque de la mordre, le risque de lui être fatal, comme le jour où vous avez failli me tuer ?

A ce propos, vous saviez que les loups-garous ne peuvent pas se "reproduire" (sa voix a mis le mot entre guillemets, le terme technique réservé aux animaux). Ce serait dommage qu'une jeune femme comme elle ne s'épanouisse pas dans la maternité "

Maintenant, la voix a pris une intonation lente et caressante sur ces deux mots : é-pa-nouis-se ma-ter-ni-té ; quelle compréhension il a de moi, pour avoir si vite trouvé le point douloureux où ma souffrance se cristallise dans le vide.

" Oui, ce serait tellement dommage qu'elle ne puisse transmettre ses talents à une descendance. Ce n'est pas parce qu'elle s'est fait vilainement plaquer par un petit crétin qu'elle doit désespérer de ne jamais trouver un mari convenable, oui, convenable et digne d'elle."

Il détache les syllabes et me les jette à la face les unes après les autres.

Je me suis souvent demandé si mes instincts de loup, donc de tueur, pourraient un jour , dans une situation hors normes, cannibaliser mon moi humain et m'en faire perdre le contrôle.

La réponse que j'ai reçue aujourd'hui est finalement encore plus terrifiante : c'est en toute conscience que j'ai mobilisé cette noire énergie, pas d'instincts déchaînés, mais une froide volonté.

Je me lève, contourne le bureau, Snape me regarde, ses yeux sont attentifs, concentrés sur moi, mais sans plus. Il prend conscience de son erreur d'appréciation quand mes mains sont déjà serrées autour de son cou . C'est la deuxième fois qu'il me jette à la figure, mon impuissance et ma dangerosité, qu'il s'introduit dans ma vie privée.

" Si c'est la seule méthode pour vous faire taire, je suis prêt à vous étrangler , je sais que ma vie est un désastre, je n'ai pas besoin de vous pour retourner le couteau dans cette plaie qui n'appartient qu'à moi ; vous voyez, je sais que je n'ai même pas la possibilité de la partager. "

Jusqu'où suis-je prêt à aller ? Snape ne fait aucune tentative pour se débarrasser de l'emprise de mes mains, pourtant la pression sur les cartilages est forte, et gêne sa respiration ; son inaction me met-elle au défi d'aller plus loin ? Si c'est le cas, alors il continue à me manipuler, depuis le début il est le maître du jeu, et le fait que je sois en train de le menacer n'est qu'un piège, dans lequel je viens de tomber : un argument de plus pour expliquer à Dumbledore qu'il a agit comme un insensé en me recrutant et que je dois quitter les lieux au plus vite. Ainsi pourra-t-il disposer du poste devenu vacant.

Une autre idée s'insinue dans mon esprit : serait-il également amoureux d'Isolfe ? Pourquoi pas, elle est une jeune femme séduisante et disponible, du sang neuf à Hogwarts, tout à fait susceptible de fouetter les instincts d'un pisse-froid comme lui et de le faire sortir de son donjon. Si oui, je serai un double rival pour lui.

C'est maintenant mon esprit qui se révolte à cette nouvelle pensée, et cette révolte passe dans mes mains, que je serre encore plus fort – d'autant que j'ai l'impression que Snape est en train de lire dans mes yeux écarquillés – mais si ce sont mes instincts de loup qui m'ont mis en branle, alors c'est contre eux que je dois lutter, contre mon ennemi inhumain, tapi dans ma part d'ombre, pas contre l'homme en face de moi – je ne dois pas me tromper de combat.

Je relâche mon emprise, un éclair de triomphe dans les yeux de Snape qui voit dans mes mains relâchées une défaite, et moi une victoire. Je donne l'impression de perdre, moi je sais contre qui j'ai gagné.! Il reprend calmement sa respiration, j'admire sa totale maîtrise – à aucun moment il n'a laissé voir sa peur.

Je m'éloigne de lui, mes mains sont légères au bout de mes bras. Soudain, je l'interpelle, poussé par la nécessité de clarifier la situation entre nous.

" Ecoutez, Snape, je viens d'agir comme un imbécile, mais c'est ce que vous cherchiez, non ? Depuis mon retour à Hogwarts, j'ai une fois de plus réfléchi à ce qui s'est passé cette nuit-là, et je ne veux plus me charger de la responsabilité que vous essayez de faire peser sur moi, vous savez que c'est le loup qui faillit vous tuer, pas moi. "

Sa réponse arrive, rapide, triomphante, exultante.

" Non, vous , l'homme, le professeur Lupin, c'est aujourd'hui qui vous avez tenté de m'assassiner ! "

Evidemment, il va essayer de tirer partie de la situation ; dois-je renoncer à essayer de le convaincre, partir, disparaître ? Il a obtenu ce qu'il souhaitait, que je sois homme ou loup, je suis dangereux, nocif, je dois donc être éradiqué. Je reprends malgré tout.

" Ne vous trompez sur les raisons qui m'ont conduit à ne pas aller jusqu'au bout… Vous savez bien que je ne serais pas allé jusqu'à l'irréparable, et puis si je vous avais vraiment menacé, vous l'auriez senti, vous vous seriez défendu, vous avez vécu bien des épisodes qui ont dû vous apprendre comment réagir face au danger. Et … ne croyez pas que je sois votre ennemi " .

A ces derniers mots, je le vois tressaillir, est-ce de dégoût ou de surprise ? Je décide de m'en aller, je m'apprête à franchir la porte, d'un bond il me bloque le passage, sa voix est basse et furieuse.

" Dumbledore la protège de vous, il s'est arrangé pour qu'elle s'absente toujours au moment de la pleine lune, je ne sais pas pourquoi, mais Dumbledore étant Dumbledore, il a sans doute ses raisons. "

Il me serre le bras aussi violemment que j'ai dû le serrer à la gorge tout à l'heure.

" Donc ne vous mettez pas en travers, ne l'exposez pas, ne la mettez pas en danger. "

Pendant encore quelques secondes mon bras reste emprisonné , puis il me laisse partir. Sur les derniers mots, sa voix semblait contenir une trace de prière, mais comment serait-ce possible de sa part ?

Je respire à grands traits, je regagne ma chambre, consigne soigneusement dans mon journal ce qui vient de se passer entre lui et moi, je m'astreins à une stricte neutralité ; j'ai besoin de fixer ces événements comme si je faisais une déposition. Et j'ai déjà décidé d'aller voir ensuite Dumbledore, peu m'importe que Snape m'ait pris de vitesse, mais je ne peux pas cacher à l'homme qui m'a choisi pour être l'un de ses professeurs, à celui qui semble me faire une totale confiance, ce qui s'est passé dans le bureau de Snape.

Lorsque j'ai tout consigné, je me dirige vers le bureau d'Albus, en espérant qu'il sera là et prêt à m'accorder un peu de son temps. Sa voix répond aux coups que j'ai frappé, durement et urgemment sur sa porte. J'entre, il m'accueille, comme s'il m'attendait, le visage sérieux et déjà attentif, avant même que j'ai commencé à lui parler. Il m'installe et je lui raconte le plus précisément possible ce qui vient de se passer, les mots cruels et crûs de Snape, la violence de ma réaction.

Quand il prend la parole à son tour, sa voix et ses yeux sont graves. Tout en m'assurant de sa compréhension.

" Remus, je suis triste pour vous, et triste aussi de voir que Severus peut encore s'abaisser à ce point. Je lui ai pourtant offert un rachat total… j'ai parfois l'impression qu'il ne s'en est jamais senti digne, et qu'il veut me persuader que j'ai finalement fait le mauvais choix. "

Il soupire.

" Mais l'important, pour le moment, c'est vous. Il vous a meurtri, il a su très vite trouver le point le plus douloureux, n'est-ce pas ?

Je lui réponds.

" Oui, je sens que je pourrais le détester toute ma vie durant pour cela, pour cette intrusion dans mon intimité, qu'il n'a pas hésité une seconde à commettre, comme si justement je n'étais qu'un animal malfaisant, sur lequel lui aurait tous les droits, m'interdire d'aimer, de désirer, m'interdire de bander " j'ai hésité un peu, puis j'ai fini par lâcher le mot, après tout c'est celui que Snape m'a lancé au visage, et ne suis-je pas en train d'effectuer une déposition ? Je continue.

" C'est comme s'il m'avait jeté à terre, et qu'il m'avait regardé de toute sa splendide hauteur de véritable homme, de celui qui peut procréer. Mais pourquoi lui n'en fait-il pas des enfants, au lieu de … "

Je m'interromps brutalement, revient de surgir en moi cette idée, qui pourrait expliquer cette scène – j'hésite longuement avant de confier ses craintes à Dumbledore, regardant mes mains qui s'agitent et se heurtent l'une l'autre, on dirait qu'elles paniquent, mais le directeur d'Hogwarts a sans doute mieux à faire qu'arbitrer les querelles de ses professeurs à propos d'une femme (je suis sûr qu'Isolfe aurait dit "des histoires de mec" – malgré ma détresse, je souris à l'intérieur de moi, dans l'espace qui lui est réservé).

" Allons Remus, dites-moi à quoi vous avez pensé ? Ou voulez-vous que je le fasse à votre place ? Vous craignez que Severus soit lui aussi, comment dire, tombé sous le charme du professeur Dazurs ? On pourrait faire plus mauvais choix …"

Je dois me contrôler rudement pour de pas se mettre à crier de rage et reprocher à Dumbledore de prendre un ton si badin.

" Oui, et il a maintenant une raison de plus de me faire expulser ! " Oui, et en plus de prendre ma place de professeur, ne se voit-il pas aussi comme celui qui la fera " s'épanouir dans la maternité ", le géniteur de sa descendance ? Mais là ce sont des mots que je n'ai pas le courage de formuler à voix haute, de peur de leur donner trop de matérialité.

" Et voici quelle est votre autre crainte, Remus. Regardez moi ".

Son regard se focalise sur mon visage, celui de son professeur, un faisceau chaleureux qui glisse sur mes traits tirés, ma bouche aux commissures plongeantes, mes yeux perdus, un regard attentionné qui serait capable de me révéler la beauté peu conventionnelle dont je sais qu'elle est la mienne " Et dites moi ce que vous redoutez le plus, il est nécessaire que vous ordonniez vos peurs pour savoir comment y répondre. "

Malgré la confiance qu'il me prodigue, je ne lui dirai finalement pas que mon angoisse la plus terrible maintenant, est que le loup tapi en moi dévore un jour la femme que mon moi humain aime maintenant plus que tout.

" Que vous me renvoyiez, peu m'importe : perdre un job de professeur dans une école renommée, et une source stable de revenus, ces deux choses là, je m'en suis passé pendant des années, je sais comment vivre sans …"

Je laisse ma voix vaciller, puis trembler, fatigué d'avoir constamment à juguler mes émotions, je sais également la profonde humanité qui anime Dumbledore dans tous ses actes, je le soupçonne souvent d'en savoir plus sur les autres qu'eux mêmes, je pourrais maintenant m'effondrer sur le bureau et me mettre à pleurer de désespoir et d'impuissance – comme je l'ai déjà fait une fois, qu'Albus serait toujours là, attentif.

" Mais par contre si le conseil des professeurs décide de m'exclure, je devrais vivre sans Is- le professeur Dazurs, mais peut-être cela vaudrait-il mieux, le professeur Snape m'a rappelé en des termes très clairs que mes sentiments pour elle étaient proprement, non plutôt salement monstrueux. Et de tout façon voués à l'échec. "

J'entend une fois de plus la voix de Snape articuler ces mots cruels : A ce propos vous saviez que les loups-garous ne peuvent pas se "reproduire", et l'injure contenue dans le dernier terme.

Dumbledore se remet à parler." Donc, si je vous résume, votre vie se résume à un choix entre deux maux…

- Merci du sarcasme, et pour continuer dans cette veine, pourquoi pas entre deux mots, m. o. t, homme ou loup ?

- Remus, la dernière chose que j'ai le droit de faire avec vous, c'est de me montrer sarcastique, je comprends votre dilemme, comme je comprends l'immensité de votre souffrance. "

Je pense que c'est la première fois qu 'un autre que moi-même emploie ce mot de souffrance à propos de moi, c'est comme si Dumbledore venait, en la nommant, de la mettre entre lui et moi, afin que nous l'examinions tous deux de façon rationnelle, clinique en quelque sorte.

" La question est maintenant de savoir ce que vous pouvez faire, et de ce que vous voulez faire. Y avez-vous déjà réfléchi ?

" Oui, j'y ai songé, j'ai essayé de trouver une issue au labyrinthe, Isolfe m'a proposé une relation d'amitié, je sais que je dois m'en satisfaire, qu'il s'agit déjà d'un formidable cadeau, et tant pis si la relation est déséquibrée, c'est à moi, et pas à elle d'en gérer les contradictions, mais, vous Dumbledore, je vous conjure de répondre là, maintenant, tout de suite à la question que je vous vous poser.

Hagrid, il y a quelques temps, puis Snape, tout à l'heure m'ont fait remarquer qu'Isolfe est toujours absente au moment de la pleine lune. Je sais que son contrat avec Hogwarts prévoit trois jours d'absence une fois par mois, ce qui lui permet de continuer à assurer un job de consultant pour la section Economie du Ministère de la Magie en France, mais ce que Hagrid ne fait que soupçonner, Snape me l'ai dit clairement : c'est vous qui lui avez imposé les dates de ses absences, qui ne reviennent pas à intervalle régulier, par rapport au calendrier officiel, mais se décalent avec la pleine lune…"

Je marque une pause, je lis sur le visage de Dumbledore que celui-ci s'attendait à ma question depuis le début.

"La conclusion de Snape est bien sûr que … que vous la protégez de moi. Mais pourquoi elle spécialement, et pas les autres, je suis potentiellement dangereux pour tout humain !

– Oui, Remus, et même pour moi si vous ne preniez pas les précautions nécessaires chaque mois. "

Je reprends la parole. " En fait non, Snape a tort, ce n'est pas elle que vous voulez protéger, mais son cours d'économie. Je sais que vous avez dû affronter certaines résistances pour l'imposer, et maintenant, vous vous mettriez dans une situation extrêmement délicate si, découvrant qu'un de ses collègues est un loup-garou, Isolfe s'enfuyait d'Hogwarts en laissant tout en plan ! "

J'ai parlé avec rage, et maintenant que j'ai terminé, je s'aperçois que j'ai été injuste et blessant.

" Je, … je suis désolé, je n'ai pas le droit de vous parler ainsi, excusez-moi et … il est temps que je cesse de vous importuner avec mes états d'âme et …"

Dumbledore m'invite à le laisser parler.

" Non, Remus, vous vous trompez dans votre analyse ; mais je comprends que vous essayiez de rationaliser la situation et je rends hommage à votre exigence de vérité. Par ailleurs, ne sous-estimez Isolfe, je pense que confrontée à votre hm nature, elle ne réagirait pas en s'enfuyant, mais plutôt en l'affrontant. Elle possède le courage nécessaire, même si elle ne le sait pas encore, elle est plus forte qu'elle ne le pense. Ne doutez pas d'elle, ne doutez jamais d'elle, vous m'entendez, ja-mais. "

J'ouvre la bouche.

" Ah, je sais ce qui vous alliez dire, que j'esquive votre question… il pose ses coudes sur son bureau, joint les cinq doigts de sa main gauche aux cinq doigts de sa main droite, je repense aux doigts d'Isolfe sur moi.

" Je pourrais vous raconter qu'il ne s'agit que d'une coïncidence et que j'ai laissé Isolfe, vous me permettez de faire comme vous et d'utiliser ce prénom si original, oui, original et hm… prophétique, choisir elle même le temps de ses absences. Ce serait vous mentir, et il n'est pas dans mes habitudes de mentir à mes semblables, même pour les protéger. Vous et moi savons que la vérité doit s'affronter et qu'elle ne souffre pas de complaisance. Donc, et vous voudrez bien m'excuser, je vais vous répondre que je ne peux pas vous en dire plus.

Une dernière chose, tout de même, Snape est effectivement venu de voir, tout de suite après votre querelle, je connais donc sa version des faits, sachez qu'il ne m'a pas demandé de prendre une quelconque mesure disciplinaire contre vous, je pense qu'il est sorti de mon bureau sachant qu'il avait été odieux au-delà de toute limite avec vous. Il n'est même pas impossible qu'il regrette déjà sa conduite. Quant à la toute dernière question qui vous préoccupe, à savoir les sentiments qu'il pourrait nourrir pour le professeur Dazurs, je suis le dernier à pouvoir vous répondre… Malgré toute la magie dont nous disposons, il semble bien que nous soyons aussi démunis que les Muggles sur ce point, ce n'est ni à vous ni au professeur Snape que je vais apprendre que la potion d'amour n' a jamais existé !

Il rit légèrement.

" Encore un mot et je vous laisse, vous devez être fatigué d'entendre mes bavardages de vieil homme ! " Il rit à nouveau, je pense que sa manière élégante de donner congé n'a pas changé depuis mes années d'étudiants.

" Vous avez, hélas, perdu vos amis, or l'amitié est une des choses les plus précieuses et les plus nécessaires, donc construisez solidement cette amitié, avec le plus grand soin possible, j'ai le pressentiment qu'un jour elle vous sera utile, à l'un comme à l'autre. "

Sa voix est devenue profondément sérieuse. " La seule chose que je sais et puis vous dire : le propre de l'espoir est justement de ne vous interdire aucune possibilité. "

Journal de Remus, 1ier février

Cette détestable journée d'hier, tempérée certes par les paroles réconfortantes de Dumbledore, mais qui a inquiété une grande partie de ma nuit sous forme de rêves terribles et inaboutis, de rêves sans pitié, sans Isolfe, me réveillant toutes les heures.

Et aujourd'hui, j'ai l'impression de quelque chose m' a été donné, mais je ne sais pas si je dois m'en réjouir ou m'en affoler, y voir une confirmation des menaces de Snape ou des liens subtils qui existeraient entre elle et moi.

Je me suis réveillé quelques minutes seulement, avant le début de mon cours du matin, des bruits de voix sous ma fenêtre. La précipitation dans laquelle j'ai dû me préparer m' a heureusement empêché de me remettre à ruminer les scènes de la veille. Pas le temps de prendre non plus un petit-déjeuner, donc encore un peu de temps avant de me retrouver devant Snape. Je redoute son attitude au moment où nous nous retrouverons face à face. Je suis persuadé qu'il se massera la gorge à ce moment – je pourrai toujours en faire autant avec mon bras, sur lequel j'ai remarqué ce matin une large ecchymose.

Un cours sans histoire, après plus d'un trimestre, mes élèves de première année restent impressionnés par la matière, et prennent des notes avec assiduité ; à leur âge, ce rempart de papier suffit à assurer leur protection.

Dix heures, fin de la classe. Je me rends en salle des professeurs, j'ai besoin de boire quelque chose de chaud, mais n'ai toujours pas faim. Je salue les divers collègues qui s'y trouvent déjà, je ne vois Snape nulle part. Isolfe non plus, je sais, pour récupérer ses étudiants après elle, quatre fois par semaine, qu'elle a tendance à prolonger ses cours au delà de l'heure.

Je m'approche de la table où café, thé, chocolat et diverses boissons, non alcoolisées, sont mises à la disposition des professeurs –pour moi un luxe auquel mes précédents postes ne m'avaient pas habitué – et soudain je sais qu'Isolfe vient de rentrer dans la pièce.

Pourtant aucun bruit de porte, le brouhaha habituel ne s'est modifié en rien, mais je sais que je ne me trompe pas. Le nimbe invisible autour d'elle qui diffuse sa présence vers moi, comme une gravitation inversée.

Et aujourd'hui, il y a cette chose en plus, cette odeur de sang. Isolfe est maintenant toute proche de moi, si je faisais un pas en arrière, mon dos entrerait en contact avec elle. . Je fais un demi-pas en arrière, je me retourne, je ne peux faire autrement que la frôler, non, que de la toucher, mon épaule juste au dessus des siennes, car mon aimée est grande, elle est à peine moins grande que moi, mon torse sur ses seins.

Evidemment le temps réel passe, hélas, bien plus vite que le temps de l'écriture, après, que le temps de la description. Sybille Trewlanay, qui nous regardait, n'a pas dû voir autre chose qu'une bousculade entre collègue. Isolfe s'est reculée, sans hâte, ni gêne, me disant bonjour, la main posée sur mon bras, à l'endroit exact que Snape brutalisait hier.

Je reprends alors conscience de l'odeur de sang, plus nette maintenant, un parfum métallique, salé et chaud. Rien pourtant dans son apparence ne m'explique d'où vient cette odeur. Je lui demande si elle va bien, elle me répond que oui, d'un air un peu surpris – j'ai sans doute mis dans ma voix plus d'inquiétude que ne l'exige une simple formule de politesse.

Elle me demande de lui servir une tasse de thé, puis s'excuse, elle doit voir Marigold. Elle s'éloigne en direction de celle-ci, qui commence immédiatement à lui parler. Je continue à la regarder, faisant semblant de me concentrer sur mon café. Elles sont toujours en train de converser, à un moment donné, je vois Isolfe pincer les narines, se pencher un peu en arrière, appuyer rapidement ses deux mains sur son ventre. Marigold a elle aussi vu le geste, mais elle a compris plus vite que moi !

J'en suis encore à me poser des questions qu'elle a déjà entraîné Isolfe vers un fauteuil, l'a faite asseoir, cesse de parler et la regarde d'un air débordant de sollicitude. Isolfe a l'air gêné, la plupart des professeurs présents sont effectivement en train de les regarder, elle esquisse un mouvement pour se relever, bien vite interrompu par un geste décidé de Marigold. Résignée, elle reste assise, cale son dos contre le dossier, repasse fugitivement ses mains sur son ventre. Je me rends alors compte qu'elle a … ses règles.

Trois points de suspension, même dans le domaine strictement privé de mon journal, j'ai été gêné d'écrire ce terme, cette réalité physiologique qui m'est si étrangère, à moi qui vit sans entourage féminin. Moi, pourtant, qui sait capter l'odeur du sang d'Isolfe. Cette aptitude m'effraie tant elle me renvoie cruellement à ma nature animale, mélangeant le flair au goût du sang.

J'entends à nouveau les brutales paroles de Snape : " Vous savez le risque que vous lui feriez courir, le risque de la mordre, le risque de lui être fatal " mais cette fois-ci venant de l'intérieur de moi-même, comme une leçon bien apprise qui ressurgit à la demande !

Pourtant, cette odeur de sang, qui ne provient pas d'une blessure, mais d'un phénomène physique qui concerne Isolfe parce qu'elle est une femme, fait surgir en moi un immense sentiment de tendresse, d'abord devant la douleur qu'elle ressent et ensuite devant cet aspect qui me la fait découvrir autre, moins intellectuelle, plus naturelle, au sens premier du terme, et potentiellement mère. Et ce constat est tellement douloureux, cette réalité d'un avenir qui me repousse : elle enfantera, mais le père de ses enfants ne sera pas moi. Ceci étant dit, écrit et déploré, il me reste à me demander pourquoi son sang résonne en moi de telle manière, pulsation, métallique et salée - et le sien seul, je m'en aperçois maintenant.

Etant professeur, je suis amené à côtoyer des jeunes filles qui, forcément, se trouvent dans ce cas à un moment du mois ; sur un effectif de quinze, la probabilité qu'au moins une ait ses règles un jour donné, or je n'ai jamais remarqué quoique ce soit. C'est déconcertant, mais cela m'autorise-t-il vraiment à en tirer de trop hâtives conclusions, comme je l'ai fait quelques lignes plus haut, en glosant sur " des liens subtils " ?

Mais comme c'est étrange, cet accès qui m'est donné à un aspect de son intimité, c'est presque comme si je la voyais nue….