Dialogue impossible Alixe bien vu ! ou du moins ne sont-ils pas souvent sur le même plan – lui est terriblement sérieux et elle, elle plaisante…. Mais si l'humour était une façon de se protéger ?
(merci pour tes explications sur les tirets, mais les miens étaient bien où je les avais mis, aux changements d'interlocuteurs dans les dialogues, enfin théoriquement ! Et mes félicitations pour ton site très clair et très précis – mais je n'ai jamais réussi à trouver la barre d'outils dont tu parles dans Quick Edit)
Sacha – oui, il s'exprime crûment, oui, il est terrible (Sacha le Terrible ?) mais finalement, comme un frère taquin et exubérant. Son personnage est une tentative pour adoucir la misère affective de Lupin en lui offrant un frère de substitution, un collatéral, lui qui est torturé par l'impossibilité d'une descendance. Je pense que Remus a toujours douloureusement regretté le fait d'être fils unique, et que les Maradeurs n'ont jamais pu vraiment remplacer une fratrie de sang. Avoir un (des) frère (s) une (des) sœur (s) lui aurait, aussi, ouvert la possibililé d'avoir des neveux, des nièces autour de lui - une sorte de paternité de remplacement.
Donc, même avec ce Sacha là,
Fénice –je martyrise Lupin ? ou lui ai-je mis en main tous les instruments pour le faire lui-même ? Et ça continue aujourd'hui avec un épisode mi-figue, mi-raisin (mais, tiens, Harry fait une apparition)
Quant à ne pas croire à la gentillesse ? je veux bien que sur le plan macro-humain (si je puis me permettre) ce soit vrai, mais zut, et rezut, les humains indiviuduellement gentils ça existe ! des gens toujours disponibles aux autres, prêts à rendre service à tout moment, à consoler, à trouver des solutions pour les autres. (Je n'en fais pas partie, mais au moins sais-je les reconnaître).
Léna – merci merci merci de m'écrire que tu as envie de lire la suite … ça me redonne du cœur à l'écriture (même si je n'ai pas réussi à m'imposer une semaine de jeûne). Si j'ai bien compris, la question est - How are they going to get themselves out of that mess ?
Fée – j'espère queles commentaires ci-dessus te permettrontde mieux cerner Sacha !
Quant au physique d'Isolfe, désolée je n'ai pas prévu de description en bonne et due forme, les indices sont disséminés, et c'est vrai que jusqu'à présent il n'y en a pas beaucoup (grande, pas bien grosse, yeux bruns).
Si tu veux, tu peux m'envoyer un descriptif de ta prof, et je mettrai une note entre 0 "l'anti-Isolfe "et 10 "Isolfe tout craché" !
Terre et vent… Où Isolfe interroge Remus et ce qui s'ensuit…
Journal d'Isolfe, 24 mars
Jour de tempête, grand vent fou et furieux, mais tiède, soufflant du sud - un samedi après-midi.
Remus vient proposer me proposer d'aller nous battre contre le vent, il me précise que cela le changera des combats contre la magie noire. Je suis touchée, mais je ne lui dis pas, j'accepte d'un simple oui. Nous convenons de nous rejoindre dehors, dans une dizaine de minutes.
Je choisis mon grand manteau noir, qui laissera s'engouffrer tous les vents de la terre, j'attache mes cheveux serrés, mais je sais déjà que la précaution est vaine. La tempête souffle du sud sud-ouest, nous décidons de l'affronter directement, nous nous mettons en marche dans le lit du vent, Remus ne connaissait pas cette expression nautique. Il me dit qu'il la trouve étrange, je lui explique que c'est par rapport à ce lit que l'on juge les qualités de barreur des marins, quand ils naviguent au pré serré ils doivent, pour avancer le plus efficacement, s'en rapprocher au maximum, sans jamais entrer dedans, sous peine d'arrêter leur bateau. Il me répond que cela a l'air d'un supplice, digne des épreuves imposées par l'amour courtois. Il fait celui qui plaisante, mais il est sérieux et son regard est troublé.
Mais nous, les deux pieds sur terre, nous n'avons pas besoin de louvoyer, nos capes sont des voiles inutiles, qui n'offrent pas de prise et fasseyent à grand bruit derrière nous, en s'emmêlant, en ralentissant encore notre progression. Nous tentons d'avancer sur une ligne qui évite le lac et la forêt, vers la campagne ouverte.
Par bravade, nous relevons la tête, exposant nos visages au furieux massage du vent. Je sens la peau de mes joues onduler sur mes os, comme un drapeau de chair qui ne m'appartiendrait plus. Jusqu'à mes cils qui se débattent sous ces gifles venteuses .
Nous progressons, proches l'un de l'autre, pour offrir une plus grande surface de résistance ? Il y avait si longtemps que je n'avais marché comme cela, dans la toute proximité d'un autre. Parfois, mes épaules touchent ses bras, à l'endroit où le biceps se transforme en deltoïde, ce muscle rond et plaisant sous la main, et rebondissent de façon désordonnée. Quelques mètres plus loin, et de longues minutes plus tard, tant nous avançons lentement, tant le vent est plus fort que nous, ce sera nos hanches qui se heurteront.
Les bourrasques nous jettent trop d'air, nous étouffons dans cette abondance d'oxygène. Une rafale plus forte dont je ne m'étais pas méfiée (je devais rêver) me fait perdre le rythme de Remus, est-il plus concentré ou n'est-ce qu'une question de force physique ? Il s'en aperçoit tout de suite, se retourne dans les plis de son manteau, qui viennent m'envelopper, dégage sa main, me la tend au bout de son bras nerveusement étendu de toute sa longueur, comme une haussière offerte à un autre équipage en perdition. J'agrippe son poignet, ses doigts entourent le mien, l'un vient se poser sur mon pouls, qui s'empresse à l'unisson de la tempête. Il me tire fortement vers lui, soudain je ne sens plus le vent, qui continue pourtant à taper dans son dos.
Il est aussi difficile de s'arrêter que de marcher, d'autant plus que nous sommes dans un champ nouvellement labouré, creusé de sillons, et cette surface inégale et meuble constitue une gêne supplémentaire. Je demande grâce.
« Et si nous nous installions dans ces sillons, je crois que j'ai besoin de faire une pause, j'ai souvent fait çà pour échapper au vent de la campagne où j'ai grandi. C'est la seule protection disponible à la ronde ».
Effectivement, aucun mur, aucune haie n'est visible aux alentours. Et les sillons sont larges, profonds et suivent une direction est-ouest, la tempête ne s'y engouffre pas, et se contente de claquer leur sommet. Je lâche ma prise sur lui, il hésite, et m'imite. Je m'allonge, au moment où je touche le sol de tout mon long, je me rends compte que je n'ai échappé que de peu au malaise.
Au ras du sol, tout est tellement plus calme, mais le vent dérange nos grands manteaux, qui tournoient et claquent au-dessus de nous, comme s'ils voulaient nos échapper et nous laisser nus l'un à côté de l'autre. Et oui, voilà les mots qui me sont venus à ce moment, précis et audacieux, caressants et tentateurs.
Remus a rattrapé le pan de son vêtement qui s'était rabattu sur moi ; mais comment faire sans poser sa main sur moi, j'ai senti qu'il hésitait, j'ai perçu le ralentissement qu'il imposait à son mouvement, il s'est enfin décidé. Son poing rempli d'étoffe était sur moi, on aurait pu croire qu'il venait de me frapper, et je ne voulais pas que ce contact cessât.
Je lui ai demandé, c'était presque une imploration, le vent du sud m'avait-il fait perdre la raison ? et en plus, je devais crier contre lui, mais l'effort déployé pour me faire entendre me dispensait de me juger impudique et audacieuse.
« S'il vous plaît, laissez votre main, posez votre bras sur moi, j'ai peur de m'envoler ».
Ce que je n'ai pas dit – J'ai envie d'être pressée entre toi et cette terre de labour, comme il y a quelques nuits, j'ai envie d'un homme, qui pourrait être toi si tu me parlais de tes mystères.
Ce que j'ai dit pourtant, en tournant ma tête vers lui :
« Remus, me parlerez-vous jamais de votre zone interdite ? Cachez-vous vraiment un si terrible secret ? Etes-vous un assassin, comme Snape veut me le faire croire ? je sens votre bras qui se crispe ? Je savais que j'allais vous blesser, mais j'ai… j'avais pensé que vous pourriez partager ces choses avec moi ; je pensais que notre amitié pouvait supporter … cela. Vous vous taisez, vous ne me faites pas confiance ? Je vous jure qu'il n'y a aucune curiosité malsaine ou perverse en moi, je ne vous tends aucun piège »….
Il m' a alors interrompu, en se rapprochant de mon visage, j'ai compris pourquoi, la proximité entre nous rendait inutile le fait de crier, j'ai cru qu'il allait enfin se révéler dans ce chuchotement, et que j'allais comprendre et qu'il allait me parler de moi en me parlant de lui. Son murmure était trop tendu pour que quelque chose ne se rompe pas enfin en lui et entre nous. Mais il me répondit par d'autres questions qui firent trembler sa bouche, je pus le sentir sur le milieu de ma joue :
« Pourquoi voulez- vous savoir cela de moi ? croyez-vous que j'en vaille la peine ? »
N'a-t-il voulu que retourner le situation, s'esquiver, ou veut-il s'assurer de mon état d'esprit, ou de mon degré d'engagement vis-à-vis de lui ? Ce mystère est-il donc si terrible qu'il ne peut le dévoiler qu'à la femme qui l'aimerait ? Alors, j'ai outrepassé mes droits, je n'aurais pas dû le questionner. Mais comment une femme pourrait-elle l'aimer sans avoir d'abord levé ce voile qui l'étouffe, et le rend malheureux ? Comment une femme pourrait-elle l'aimer sans avoir d'abord tenté de l'aider ? Faudrait-il l'aimer en aveugle, sans comprendre ? Mais moi je ne le pourrais pas ! Ou serait-ce cela le véritable amour, aimer l'autre comme un absolu, qui est et ne s'explique pas ? Moi qui ai toujours pensé l'amour devait vous faire entrer dans la compréhension de l'autre, et transcender ceux qui le partagent…
Dans ce cas, je ne peux pas répondre, inutile de s'engager dans une impasse. Je ne me concède plus rien.
Je ne sais plus qui attend une vérité de l'autre.
Nous sommes blottis dans ce sillon comme dans un lit, mais ni apaisement, ni réconfort, ne circulent de lui à moi, nos questions restent sans réponse.
Je me suis levée brusquement et suis partie en courant. Je ne l'ai pas entendu derrière moi, je ne me suis pas retournée, je savais qu'il était toujours allongé, peut-être en train de confier ses secrets à la terre, sa bouche posée sur l'humus frais. J'avais le vent dans le dos maintenant, il m'envoyait de grandes ruades brutales qui me forçait à accélérer ma fuite, moi, véloce et échevelée comme un nuage, lui, lourd et immobilisé dans son ornière.
Je suis arrivée hors d'haleine au château, comme ce jour de février, mais Remus ne m'attendait pas. Je l'ai abandonné à ses mystères. J'ai continué ma course, j'avais hâte de me mettre à l'abri chez moi, mes yeux commençaient déjà à se vider de larmes, je leur avais pourtant interdit de perdre le contrôle d'eux mêmes, comme le corps est prompt à vous échapper, les larmes qui coulent, le cœur qui cogne, la poitrine qui fait mal …
Je viens de me heurter à quelqu'un qui descendait l'escalier en courant aussi, et sans regarder devant lui. Je tombe sur les genoux, lui, emporté par son élan, vient frapper contre moi. Le poids est léger, j'arrive à le stopper et à éviter la chute totale. C'est Harry.
Je suis furieuse contre lui, ce n'est pas lui qui devrait être contre moi ! Nous nous remettons sur nos pieds, mes genoux me font mal. J'explose, je suis injuste, mais quel commode dérivatif :
« Potter, vous arrive-t-il de faire attention et de regarder où vous allez ! Pensez-vous donc être seul au monde! Oubliez que, même si je ne suis pas votre professeur, vous me devez un minimum de respect ».
Il est devenu tout rouge, il se mord les lèvres de fureur, et je sais qu'il est en train de se demander quelle punition va lui tomber dessus. Mes cris de mégère ont du attirer quelqu'un, car voilà que des pas se rapprochent. Je me tais, et dans le silence revenu, s'élève mauvaise et menaçante, la voix de Snape :
« Potter, Potter, encore une entorse au règlement, je suis content de voir que le professeur Dazurs a parfaitement hm diagnostiqué la situation. Légèreté, inattention, manque de respect … du Potter tout craché »
Il est arrivé à notre niveau, à pas rapides, jusqu'à la marche où Harry et moi sommes entrés en collision. Il nous domine, je ne suis pas sûr qu'il ne me considère pas comme aussi coupable que le garçon, et que les chefs d'accusation qu'il a laissé tomber comme un couperet ne m'étaient pas aussi destinés, mais solidarité professorale oblige, c'est Harry qui va tout prendre. :
« Vous voudrez vous excuser auprès de professeur Dazurs, et me suivre dans mon bureau »
Il tourne déjà les talons, je le rattrape par la manche :
« Ne soyez pas injuste, Severus, c'est moi la coupable, je ne regardais pas devant moi et … je me suis absurdement emportée, c'est contre moi que j'étais furieuse, pas contre Harry.
Furieuse contre vous, dites-vous. Je pense savoir pourquoi, vous partez en promenade avec Lupin et vous rentrez seule, en courant… Comme c'est étrange, étrange et intéressant. Mais ce n'est pas parce que vous êtes disputée, ou je ne sais quoi, avec votre cher ami, que je vais renoncer à faire régner la discipline dans cet établissement. Ne surestimez pas la force de … vos yeux rougis. Ce qui marche avec lui, pas aujourd'hui apparemment, ne fonctionne pas avec tout le monde. Mais vous tremblez, vous aurait-il enfin dégoûté de lui ? »
Il a débité son discours avec un plaisir cruel, qui s'échauffe tout seul, encore exacerbé par la présence de Harry devant lequel il étale complaisamment mon malaise.
« J'en appelle simplement à votre sens de la justice, Severus, je vous présente mes excuses les plus sincères (sincères, tu parles) pour vous avoir dérangé dans vos occupations avec tout cet inutile remue-ménage ».
J'ai décidé d'afficher un profil bas et humble, alors que je suis révoltée par la façon dont il se comporte et que j'ai une sacrée envie de lui envoyer tout cela au visage, son iniquité, sa rudesse, sa méchanceté, sa foutue "slytherinité".
Mais je suis prête à le flatter et à m'humilier pour sauver la mise à Harry. Je m'en veux tellement de lui avoir crié " Pensez-vous donc être seul au monde !" alors que c'est vrai, puisqu'il a plus de famille…
Harry, qui se balance d'un pied sur l'autre, en essayant de se faire le plus discret possible. Il m'envoie un rapide sourire, évidemment intercepté par Snape. Ce dernier se met à hurler :
« Potter, dans mon bureau, immédiatement » et il se met à le tirer par le bras, obligeant le garçon à dévaler précipitamment les marches qui lui restaient à descendre. Je les rattrape, à mon tout, je tire violemment Harry par le bras, je le fais passer derrière moi, sa présence dans mon dos est étrange, il possède une aura dont il ne se doute pas, qui m'enveloppe et maintient Snape à distance.
Je reprends : « Severus, une fois encore, oubliez ce stupide incident, vous seriez terriblement injuste si vous deviez punir Harry, le garçon n'a rien fait, laissez le partir, nous vous avons déjà fait perdre beaucoup de temps, s'il vous plaît, je vous en prie. ».
Alors que je regardais droit dans la noirceur de ses yeux, j'abaisse mon regard sur ces derniers mots, je regarde ses pieds, je courbe l'échine. Il se met soudain à rire, je m'y attendais tellement peu que je sursaute, et dans mon dos, Harry fait de même.
« Professeur Dazurs, arrêtez vos simagrées, vous êtes tellement pleine d'orgueil que vous pourriez vous traîner à mes pieds sans réussir à me faire croire que vous vous humiliez. C'est admirable. Allez, vous m'avez diverti, je vous laisse votre petit protégé. Comme vous le faisiez remarquer astucieusement, j'ai perdu trop de temps avec vous deux. »
Il tourne brusquement les talons, et fait claquer ses pas sur le sol. Le "Merci Severus" enjoué que je lui crie perturbe le rythme grandiose de sa marche, il hésite un peu et poursuit moins bruyamment.
Harry et moi restons silencieux et immobiles, quand il a disparu dans l'escalier de son donjon, nous nous donnons encore quelques instants, je me retourne vers lui, met un doigt sur ma bouche, lui chuchote.
« Trouvez-nous un endroit calme pour débriefer », il a l'air ravi, il me fait signe de le suivre, nous nous retrouvons dans un bout de corridor que je ne connaissais pas. Nous éclatons de rire.
« Eh bien Harry, je pense que vous et moi avons eu envie de lui mettre des baffes, non ? Enfin méfiez-vous, à la prochaine occasion qu'il aura de vous coincer, il va se rattraper. Vous me tiendrez au courant, vous voulez bien. Non d'ailleurs pas moi, je ne suis pas votre professeur, cela risque encore de vous attirer des ennuis, mais vous en parlerez à Lupin, n'est-ce pas ? Et lui me tiendra au courant, enfin peut-être. »
J'avais envie de prononcer son nom, est-il toujours allongé, indifférent au vent qui hurle encore, attendant que je revienne vers lui pour enfin répondre à mes questions ?
Je vois Harry hésiter, il rougit et se tortille, j'avais oublié que les enfants sont comme cela et pourtant Dieu sait que je me suis souvent tortillée en rougissant. Puis il se lance, mais comme à regret, et donc il bafouille, classique. J'ai tout d'abord un peu de mal à comprendre.
« Vous.. vous êtes … enfin… c'est vrai ce que Snape disait, il vous espionne…je suis désolé… ça m' regarde pas, mais comme il en a parlé vous vous êtes vraiment disputé avec le professeur Lupin ?
– Et bien Harry, ce fut laborieux ! Non, Snape tire des conclusions erronées, et c'est d'ailleurs vous avez raison, il nous espionne, il semble qu'il n'ait rien de mieux à faire. Non, simplement j'étais fatiguée de cette promenade dans le vent, et j'ai préféré rentrer toute seule.
– Mais, vous.. enfin j'ai eu l'impression que vous étiez euh pas contente et que c'est euh pour cela que vous m'avez crié dessus…
Bien vu Harry, vous voyez pourquoi je ne pouvais pas laisser Snape vous punir… Oui, j'étais un peu perturbée, Lupin n'est pas facile à comprendre – Indigné Harry m'interrompt :
– Mais c'est un excellent professeur, Dumbledore dit que c'est le meilleur qu' Hogwarts ait eu depuis bien longtemps.
– Harry, Harry, je ne disais pas le contraire, je sais qu'il est excellent, mais il n'est pas simplement un professeur, c'est un collègue et hm un homme hm privé, et c'est à ce titre qu'il n'est pas facile à comprendre. Vous voyez ?
– Oui, je crois. Mais vous allez rester amis, n'est-ce pas ? Je ..vous savez je crois que … c'est bien pour lui – il complète précipitamment – et pour vous aussi. Vous savez, quand on se dispute avec Ron ou Hermione, on finit toujours par se réconcilier …
et vous vous donnez de grandes tapes dans le dos, j'imagine
– Euh, avec Ron, oui mais avec Hermione ce serait une nouvelle crise assurée. »
Il rit à cette perspective. J'appuie mon dos contre le mur, je m'aperçois que mes jambes sont en train de fléchir, trop de vent, de marche, et la confrontation avec Snape qui a encore exigé son tribut d'énergie.
« Vous savez, Harry, les rapports d'amitié entre adultes, surtout, eh bien entre un homme et une femme, sont souvent plus compliqués que ceux que vivent les gens de votre âge.
Je continue :
– Gardez le secret de tout ceci, bien sûr vous pouvez raconter ce qui s'est passé avec Snape à Hermione et à Ron, les amis sont fait pour cela; mais assurez-vous que cela n'aille pas plus loin qu'eux. Et ne pensez surtout pas que je vous donne cette hm autorisation pour me vanter de l'aide que je vous ai apportée, je vous la devais vraiment, Snape a raison, je suis bien trop orgueilleuse pour m'abaisser aux vantardises. Mais pour ce que nous avons dit de Lupin, là vous me promettez le secret absolu envers vos amis, allez dites le moi.
– Je vous le promets, je ne leur dirais rien de … ce que … enfin de vous et du professeur Lupin. Et puis, ben, merci pour ce que vous avez fait, vous croyez que Snape va vous en vouloir ? Déjà qu'il déteste le professeur Lupin, il pourrait…
Tttt, ne vous souciez pas de cela, Harry, vous savez je préfère garder l'amitié du professeur Lupin plutôt que d'essayer de gagner celle de Snape. Mais dites-moi, je suis sûre que vos amis doivent vous chercher, au rythme où vous dévaliez les escaliers, j'imagine que vous alliez les rejoindre…
Euh oui chez Hagrid
– Fort bien, vous leur direz bonjour de ma part. Moi je rentre. »
Je lui fais un clin d'œil, qui le surprend d'abord, et le rassure ensuite.
Je me dirige à nouveau vers le grand escalier, mais cette fois-ci, je suis incapable de courir.
Comment dois-je renouer le contact avec Remus, ne rien faire, aller le voir quand il sera rentré ? Et pour lui dire quoi, que j'ai envie qu'il se couche sur moi ? malgré ses secrets et ses mystères ? Peut-être l'impulsion du plaisir serait suffisante pour me faire franchir l'abîme qui le coupe en deux et pour me faire découvrir son véritable moi ?
Non, je ne dois pas, je ne veux pas, je ne peux pas aller aussi loin dans cette direction, je vais me contenter de renouveler mon serment d'amitié.
Et ensuite, basta Hogwarts, je fais une surprise à mes parents, je pars me faire câliner dans le nid familial. Il me suffit d'obtenir la permission de Dumbledore, sachant que je suis de tour de garde ce dimanche. Je vais lui suggérer de me remplacer par Lupin, non, par Remus. Vais-je encore rêver de lui ? Est-ce pour cela que je m'éloigne d'Hogwarts ? c'est loin d'ici que je rêve le mieux de lui et que m'avait donc dit Dumbledore ? Restez à l'écoute de vos rêves.
Journal de Remus, 24 mars
Cette après-midi m'a dévasté, la perspective de m'installer devant ce journal augmente le dégoût que j'ai de moi (je suis à quelques pas seulement de ma porte).
J'ai fait fuir Isolfe, elle s'est éloignée de moi à toutes jambes. Et je n'ai pas eu le courage de courir après elle. Elle m' a questionné et je n'ai pas eu le courage de lui répondre, j'ai été lâche et je lui ai retourné ses questions, comme un jet de pierres et je l'ai blessée.
Ou peut-être que non, et que je l'ai définitivement détachée de moi, et pourtant elle était si proche, lorsque nous marchions, quand je l'ai rattrapée, j'ai senti la force bienveillante de ses doigts serrés autour de mon poignet comme un événement miraculeux. Et quand nous étions allongés sur le sol, le vent soufflait au dessus de nous sans nous atteindre, et tout d'un coup j'ai senti une fois encore qu'elle pouvait me protéger de ce que je suis et cette pensée tellement intense est entrée en moi, aiguë comme une lame et prolifique comme une absolution.
Et je me suis encore rapproché d'elle, mes lèvres ont touché le milieu de sa joue, c'était un bonheur que je n'ai su attraper, j'aurais dû immobiliser mes lèvres sur sa peau, et j'ai tout fichu en l'air parce que j'ai prononcé des mots agressifs et imbéciles. Nous étions dans ce sillon comme dans un lit, mais mon loup prenait toute la place entre nous deux.
Elle est partie, je suis resté. Je me suis débarrassé de ma rage en la chuchotant à la terre sous moi. De la glèbe est entrée dans ma bouche, qui s'est mêlée à ma salive, n'est-ce pas la méthode retenue par les dieux pour créer le premier homme ? De la terre mouillée de salive, sur laquelle il faut souffler. Moi, je laisserai le vent faire à ma place, mon haleine risquerait de pervertir ma créature. Oh, créer un autre moi qui ne serait pas entaché de malédiction, qu'Isolfe pourrait aimer sans danger, et qui pourrait se faire librement aimer d'elle et ils pourraient être féconds, croître et se multiplier.
La tempête continue à se déverser au dessus de moi, bientôt le vent aura rabattu toute la crête du sillon sur mon corps immobile. Maintenant je suis furieux contre Isolfe, j'aurai dû la rattraper et la secouer dans le vent, et la colère de ma voix aurait vaincu le bruit des rafales.
« Pose-toi des questions, regarde, interroge les autres sur ce qui se passe quand tu n'es pas là, car tu ne t'en es jamais souciée, investigue sur mes absences, compare les dates, tu comprendras toute seule, tu n'a pas besoin de moi, même pour t'apprendre des choses sur moi, je suis disqualifié. »
Encore des bourrasques, bruit et fureur au dessus de moi, je suis si lourd sur la terre, le vent joue contre moi, il a emporté Isolfe, et se désintéresse de celui qui se terre. Comment ai-je pu m'emporter contre elle il y a un instant ? Comment lui reprocher d'être absente lors de la pleine lune, alors que c'est ce qui la protège définitivement de moi ? Je me souviens des paroles de Dumbledore "Ne doutez jamais d'elle". C'est pourtant ce que je viens de faire, en refusant de lui répondre.
J'ai dû m'endormir puisque j'ai rêvé que le vent avait la voix d'Isolfe et les nuées son visage.
C'est le silence presque revenu qui m'a réveillé, les bourrasques ont enfin forcé leur passage vers l'est, je me retourne sur le dos, le ciel n'est pas encore limpide, des nuages encore gris s'y bousculent toujours, mais il ne s'agit plus que d'une arrière-garde pressée de déguerpir. Un grand soulagement commence à se répandre sur le paysage. Les branches, les feuilles et les herbes se secouent une dernière fois, puis se remettent en place, aucune terre ne tombe plus sur moi.
Je me relève, tout mon corps est douloureux, comme lorsque je me retrouve après une transformation. Mais là s'arrête la comparaison, je ne goûte pas l'apaisement habituel qui fait suite à la fin de la pleine lune, là je m'exècre toujours, d'avoir causé la fuite d'Isolfe. J'hésite à rentrer, pourtant je me mets en marche, voudra-t-elle encore me voir ? Si je l'avais perdue pour toujours, moi qui pensait, vaniteux impudent, qu'elle serait toujours présente dans ma vie …
Je redoute de rentrer, de voir Isolfe ou de ne pas la voir ; les fenêtres éclairées de la cabane d'Hagrid m'offrent un prétexte commode à différer encore mon retour au château, je me dirige dans leur direction, je suis sûr que je vais pouvoir me faire offrir une tasse de thé et prodiguer mes caresses à Fang. Fang qui s'entend si bien avec Isolfe, et qu'elle caresse aussi, Fang qui va jouer le rôle d'intermédiaire docile et inconscient entre nos mains.
Je me dirige vers la porte, sans oser jeter un coup d'œil par la fenêtre devant laquelle pourtant je suis obligé de passer. Je peux distinguer plusieurs voix à l'intérieur, des voix juvéniles. J'hésite, Hagrid n'est pas seul, je frappe quand même. Fang aboie, Ron ouvre la porte. Donc, voilà, Harry et Hermione doivent être là également. Eh bien, pourquoi pas, j'espère simplement que l'irruption d'un de leurs professeurs ne va casser l'ambiance.
Je me demande tout d'un coup quelle allure je peux bien avoir, ai-je de la terre dans les cheveux, sur mes lèvres ? Je vérifie discrètement en passant une main sur ma bouche, puis sur ma tête – tout à l'air normal. Je m'avance dans la pièce, ils sont attablés, de toute évidence pour un thé, je regarde ma montre, cinq heures trente.
« Bonsoir à tous, je … ne veux pas vous imposer une présence hm magistrale, surtout un samedi après-midi, donc… ».
Je suis soudain saisi d'une envie folle de me faire accepter par leur cercle chaleureux. Ils se regardent tous quatre, c'est Hermione qui répond – vivacité d'esprit et sens féminin des convenances :
« Mais, non voyons, professeur Lupin, nous sommes ravis de vous voir. »
Hagrid enchaîne « Eh ben oui moi j'pense comme Hermione, v'nez donc vous asseoir. »
Me voyant avancer vers la table, Fang déboule dans mes jambes, jappe en sautant autour de moi, et finit par quelques coups de museaux ravis dans mes mollets. Harry reste silencieux, j'ai l'impression qu'il essaie de lire quelque chose sur mon visage, nos yeux se croisent, rapidement, car il détourne aussitôt les siens en rougissant. ? On entend alors la voix sarcastique de Ron :
« En fait, professeur, on peut dire que vous tombez plutôt bien. Cela fait dix bonnes minutes qu'Hermione était en train de gémir et de se lamenter, et de nous casser les pieds, au sujet du devoir que nous vous avons remis, sur les katpas , comme d'hab, elle est sûre d'avoir tout raté, donc si jamais vous aviez déjà corrigé sa copie, vous pourriez peut-être arrêter le flots de ses gémissements…. ».Je décide d'entrer dans le jeu :
« Ou au contraire de les accentuer, si effectivement la copie n'était pas bonne… »
Le visage d'Hermione, qui avait considérablement rougi pendant la tirade de Ron, prend maintenant une teinte livide, et l'angoisse ternit ses yeux. J'arrête la plaisanterie :
« Hermione, rassurez-vous, ce n'était qu'une hypothèse, il faut d'abord que je me souvienne où je m'en suis arrêté dans mes corrections. »
Je ferme les yeux, et porte mes mains à mes tempes dans une posture dramatique. Je fais semblant de réfléchir, mais je n'en ai pas besoin, j'ai déjà corrigé la copie d'Hermione, excellente, malgré quelques imprécisions, celle de Ron est correcte, du style tout-point-obtenu-au-dessus-de-la-moyenne-l'est-en-pure-perte, celle d'Harry est toujours dans le tas de celles qui restent à noter
Je m'accorde donc quelques secondes pour penser à Isolfe : est-elle rentrée directement ? que fait-elle en ce moment ? que pense-t-elle de moi et de mes silences ?
Mon poignet est chaud encore du toucher de ses doigts, et à nouveau le pressentiment d'une protection qu'elle pourrait m'apporter vient m'envelopper comme une eau natale. J'entends Hagrid toussoter, ce qui équivaut à une grosse quinte chez une personne d'un gabarit standard, je sursaute, j'ouvre les yeux et souris à Hermione, d'un sourire destiné en fait à Isolfe et qui a forcé son passage sur ma bouche. Elle est gênée, j'enchaîne rapidement, la nécessité d'articuler chasse le sourire :
« Eh bien, Hermione, je viens juste de me souvenir que votre copie est parfaite, tout au plus vous vous êtes légèrement trompée sur certaines habitudes alimentaires des katpas des lacs d'Afrique Centrale »
Ron ouvre de grands yeux, de tout évidence il ne s'était pas posé la question de la présence de katpas dans les lacs d'Afrique Centrale et, a fortiori, de leurs habitudes alimentaires.
« Mais, vous n'étiez pas obligée de traiter ce thème, donc je n'en ai pas tenu compte dans ma notation. »
Le soulagement d'Hermione est manifeste, mais de peur de le laisser voir, elle se tourne vers Ron :
« Espèce d'imbécile, quelle idée de raconter tout cela, ce hm n'était vraiment pas intéressant, c'était même impoli d'importuner le professeur Lupin avec tout cela »
Là , elle se tourne vers moi en me souriant bravement. Hagrid intervient :
« Bon, bah maintenant, vous v'là soulagée, Hermione. On va pouvoir parler d'aut' chose. »
Il fait un grand clin d'œil à Harry, et en même temps pousse vers moi une tasse et une assiette avec une part de gâteau.
« Goûtez, professeur, et pis on va voir si vous trouvez c'qui y dedans, pis après, j'vous dirai qui m'a donné la recette.. – je le regarde interloqué, Ron ajoute :
– Allez-y, c'est drôlement bon, d'ailleurs Hagrid, peut-être qu'on pourrait faire un deuxième passage général et rassurez-vous, ce n'est pas une recette de Snape, vous pouvez y aller sans crainte, et quand vous saurez qui… ouch … »
Hermione vient-elle de lui enfoncer discrètement et précisément son coude dans les côtes ? Une vengeance pour tout à l'heure ? Harry n'a rien dit depuis mon arrivée, il se tortille sur sa chaise, gêné vis à vis de moi. Je commence par vider ma tasse de thé, l'intérieur de ma bouche est tout desséché, comme si le vent avait soufflé dedans.
Puis je goûte à ce fameux gâteau, chocolat évidemment, sa couleur rendait déjà la réponse évidente, et effectivement autre chose, qui rend le tout délicieusement fondant en bouche.
« Je ne vois pas, mais c'est excellent. »Je me tourne vers Harry, dont le mutisme m'inquiète :
« Eh bien, je constate que ni vous, ni Ron, n'avez les mêmes craintes qu'Hermione au sujet de cette composition ? C'est Ron qui répond :
– Au contraire, des craintes, on en a, mais justement, on n'est pas trop pressés d'apprendre une mauvaise nouvelle, s' pas Harry ? »
Ce dernier bougonne un vague "Oui" en faisant tourner sa cuillère dans son assiette. Hagrid revient à la charge :
« Et ben Harry, z'avez pas envie d'raconter c'qui vous est arrivé tout à l'heure, maint'nant que l'professeur Lupin est avec nous, moi j'serais ravi d'entend' vot' histoire une fois d'plus. »
Ils ont tous l'air excité, dans l'attente d'une bonne histoire, dans laquelle je sens que je joue, involontairement, un rôle, si j'en crois leur échange de regards entendus, tous, sauf Harry. Ron se tourne vers moi, pour, semble-t-il, amorcer l'histoire :
« Harry a échappé aux griffes de Snape, il … - Bon, c'est bon, vous avez gagné ».
Harry vient de céder à la pression générale, mais sa voix ennuyée nous indique bien qu'il le fait à contre-cœur. Pourtant, cette espèce de feinte va le quitter au fur à et mesure qu'il progressera dans le récit. Il commence donc à raconter ce qu'il lui est arrivé il y a environ deux heures (je calcule rapidement qu'alors j'étais toujours figé sur ma terre, laissé en arrière par Isolfe), son retard au rendez-vous avec Hermione et Ron chez Hagrid, une histoire de quidditch si je comprends bien, sa hâte, les escaliers dévalés en courant en pensant à sa conversation avec Oliver Wood, en train de visualiser une nouvelle attaque, sa collision avec le professeur Dazurs, - pause dans son récit, ils me regardent tous, y compris Fang dont la tête repose sur mon genou, je parviens à peu près à rester impassible, néanmoins je m'entends déglutir péniblement, ils me semblent tous hostiles maintenant, comme des inquisiteurs attendant que l'accusé se trahisse, sauf Fang que je caresse avec tendresse pour qu'ensuite, il soit caressé par elle – sa colère contre lui, et puis l'arrivée de Snape, la convocation dans son bureau, et comment le professeur Dazurs l'a rattrapé par le bras, là Ron, intervient :
« C'est c'que j'vous disais, elle l'a arrachée des griffes de Snape » , je souris à cette vision, ma splendide, ma juste, bataillant contre Snape, mon cœur s'exhausse dans ma poitrine.
Harry reprend, les excuses qu'elle a présenté à Snape, en baissant humblement la tête, et comment elle lui a dit que ce serait injuste de le punir, que c'était elle qui était la coupable et ne regardait pas devant elle en montant l'escalier en courant, et Snape a renoncé, il lui a dit qu'elle était trop orgueilleuse pour vraiment s'humilier devant lui – Harry hausse les épaules en me regardant d'un air désolé et confus
« là je ne suis pas sûr d'avoir tout compris, mais en tout cas, Snape est parti en marchant le plus bruyamment possible, le professeur Dazurs lui a crié " Merci, Severus " et là je suis sûr qu'il a souri, et là ce n'était pas son méchant sourire qui vous promet des tonnes d'ennui ».
Harry s'arrête, étourdi par ce long récit, débité à toute allure. Snape a souri donc, il a été touché par ses remerciements, ou par son intercession ? ou par elle ? A-t-il pensé marquer un point dans ses manœuvres ? d'ailleurs pourquoi me sens-je autorisé à dire "pensé", et s'il avait réellement marqué un point ?
Après tout, Isolfe en a sans doute assez de traiter avec un abruti tel que moi, Snape est sans doute prêt à lui proposer à nouveau ses … services. Oui, et alors elle et lui se défiant sans cesse, pour mieux se rendre l'un à l'autre. S'agit-il d'un jeu entre eux, qui donnera plus de prix, plus de piquant à leur ultime reddition amoureuse ? Isolfe dans les bras de Snape, enlacée à un véritable avenir ? Je défends à mon esprit de se livrer à de telles divagations, pas ici, pas en ce moment. Et puis, si c'était le cas, pourquoi aurait-elle eu besoin de mon bras sur elle, tout à l'heure ?
Hermione qui piaffait depuis un bon moment, n'y tient plus et lance, en ma direction :
« Et puis, il faut que vous sachiez, il doit vous espionner, il a dit au professeur Dazurs devant Harry que vous étiez partis vous promener tous les deux et qu'elle rentrait toute seule, et que c'était étrange. Etrange et intéressant Et… et il a dit que vous vous étiez disputés. ».
Ils se consultent à nouveau du regard, pour bien me faire comprendre qu'ils ont déjà abondamment débattu du sujet avant mon arrivée, et qu'ils attendent une réponse de ma part. :
« Le professeur Dazurs a-t-elle répondu à cela ? Il me semble plus juste de d'abord entendre sa réponse, s'il y en a eu une, bien sûr » .
Juste, tu parles Lupin, tu veux tout simplement ne pas laisser passer l'occasion d'entendre les autres de rapporter des paroles qui n'étaient pas pour toi ! Mais j'ai tellement besoin de savoir, besoin de me faire entourer par des mots qui me parlent d'elle, que leur message soit faste ou néfaste. C'est Harry qui reprend la parole :
« Euh, et bien, elle n'a rien dit là-dessus, elle a dit qu'elle était furieuse contre elle, pas contre moi. Et alors Snape lui a dit qu'il pensait savoir pourquoi, euh pourquoi elle était furieuse, parce qu'il vous a vus partir ensemble et elle revenir seule; et elle m'a dit qu'en fait elle s'était sentie fatiguée et que c'est pour cela qu'elle était rentrée avant ».
Impatiente et sentencieuse, Hermione enchaîne « Et puis, Harry ne peut pas tout dire, le professeur Dazurs … Harry s'exclame
– Hermione, arrête, j'ai promis, et même çà je n'aurais pas dû vous le dire, et toi tu n'aurais pas dû le répéter.
– Pfff, pas la peine de s'énerver pour si peu, le professeur Lupin n'est ni Snape, ni Malfoy ou ces autres imbéciles de Slytherin, il ne va pas chercher à en savoir plus, n'est-ce pas professeur ? »
Dois-je discerner un peu de rouerie féminine mâtinée de jalousie dans cette façon de me couper l'herbe sous le pied, ou plutôt de figer les mots sur mes lèvres ?
Je réponds prudemment :
« Vous avez raison, Hermione, la seule chose qui m'intéresse à cette heure est de connaître le mystérieux ingrédient de ce gâteau …Voyons, cela pourrait être ..du massepain ? de la confiture d'abricot ? »Je crois que j'ai épuisé mes souvenirs culinaires…
« Ah, peut-être du jus d'orange ? Bon Hagrid, alors je ne sais plus quoi proposer, allez -y !
– Ah ben çà alors, professeur Lupin, v'là une question qu'vous savez pas y répondre ! »
Il a l'air enchanté de me prendre mon savoir en défaut, les trois autres pouffent derrière leurs mains, mes inquisiteurs ont disparu.
« C'est … il laisse sa grosse voix en suspens, et ça marche, je suis suspendu à ses lèvres – de la pomme râpée ! (1)
– Bon et bien j'avais tout faux, et Hagrid, je vous en prie, cessez de croire que je possède la science infuse, il y a beaucoup de questions auxquelles je ne sais pas répondre… cette phrase me rejette dans mon trouble de l'après-midi.
– Et la r'cette, c'est l'professeur Dazurs qui m'la donnée, elle 'était v'nue faire d'la cuisine chez moi un jour et pis elle m'a laissée sa r'cette. Rudement bon, hein ? »
Ron ajoute, les yeux rêveurs sur le plateau irrémédiablement vide :
« Ah, la cuisine française, moi je me vois bien … Hermione l'interrompt, si brusquement qu'elle surprend tout le monde
- Tu te vois bien faire quoi, épouser une Française !
– Et pourquoi pas ma chère Miss Granger, oui, une belle cuisinière, en tout cas Fred et Georges seraient ravis avec une telle belle-sœur » .
Il a pris un accent comiquement français pour balancer sa réplique en direction d'Hermione. Harry n'a pas cessé de me regarder pendant tout leur échange. Je décide de prendre congés d'eux tous, j'ai maintenant moins peur de rentrer, j'ai retrouvé le fil d'Isolfe grâce à cette halte chez Hagrid, je n'ai plus qu'à le suivre.
Je me suis éloigné d'une centaine de mètres, quand j'entends le bruit d'une course derrière moi, Merlin, fais que cela soit Harry ! Je m'arrête, mais sans me retourner, mon poursuivant me rattrape, arrive à ma hauteur, c'est bien lui, il s'immobilise, il est essoufflé et ne sait pas comment commencer.
« Eh bien, Harry, qu'est-ce qui vous pousse à courir derrière moi ? » Ma voix s'est mise à trembler, bousculée par un élan d'affection.
« Professeur Lupin, j'ai… j'ai réfléchi depuis un bon moment, le professeur Dazurs m'a dit d'autres choses, et oui, elle m'a demandé de ne pas le répéter mais à Hermione et à Ron, et comme ça vous concerne, et que peut-être ça pourrait vous aider – comme tout à l'heure il parle à toute vitesse, mais je le suis sans peine, je sens que mes pupilles se sont rétrécies sur lui – elle m'a dit " Lupin n'est pas facile à comprendre ", moi je croyais qu'elle me disait que vous étiez un mauvais professeur – je souris intérieurement de son erreur d'interprétation – alors j'ai dit que vous étiez le meilleur professeur de DCFM, Dumbledore le sait, et donc elle m'a expliqué qu'elle savait que vous étiez excellent, mais que vous étiez aussi un collègue et un homme privé, et c'est là que vous n'étiez pas facile à comprendre. Elle a aussi ajouté que l'amitié entre un homme et une femme adulte – son débit est toujours aussi rapide, mais un peu troublé aussi sur ces mots, ouvrant sur des perspectives qu'il n'avait pas envisagées jusqu'à maintenant - sont souvent plus compliqués qu'entre euh ben des gens de notre âge euh à Hermione, Ron et moi, quoi ».
Il s'arrête, encore plus haletant qu'après son sprint jusqu'à moi.
« Voilà, c'est tout, mais peut-être ça peut vous aider ?
Harry, je suis très touché par votre démarche, et oui, c'est bien pour moi de savoir ce que vous venez de me dire, rassurez-vous, j'en ferai bon usage. Et maintenant, vous rentrez avec moi, ou vous retournez chez Hagrid ?
– Euh, je crois que je retourne, je crois qu'ils ne vont pas me demander pourquoi j'ai couru après vous, ils ont compris de toute façon quand ils m'ont vu partir. »
Ses yeux sont soulagés et allègres. Je lui souris largement. :
« Bien, alors bonne fin de soirée, Harry et une fois encore merci ».
Nous repartons dans chacun notre direction, lui soulagé de cette sorte de confession, moi chargé de celle-ci. Bon, mais je n'ai rien appris de bien nouveau, que je suis compliqué à comprendre, évidemment, puisque je suis affligé d'une double personnalité, un homme seul n'est déjà pas facile à saisir, alors un homme plus un loup, vous pensez bien ! Pas étonnant qu'Isolfe ait renoncé et soit partie, même si elle semble avoir été furieuse d'avoir agi comme cela.
Mais qu'est-ce que j'espérais, qu'elle avait dit à Harry avoir rencontré l'homme de sa vie en la personne de l'excellent professeur Lupin ! Fichtremerlin, quelle importance d'être excellent, le meilleur bla bla bla; je n'en ai rien à ficher, ici et maintenant, s'il n'y a pas d'Isolfe pour me comprendre vraiment, pas d'Isolfe pour être autre chose qu'une amie incertaine, pas d'Isolfe pour oser m'aimer.
J'arrive à ma porte, mot de passe, je m'affale contre le battant qui cède et m'emporte à l'intérieur, mes pieds saccagent une lettre sous eux. Je les écarte brutalement, le papier est terreux et déchiré, je me mets à genoux car mes mains sont sans courage pour se saisir du message. Je vois la courbe bleue des mots " Isolfe à Remus " n'est-ce pas ce genre de dédicace que les muggles gravent à l'intérieur des alliances qu'ils se remettent ?
je tremble comme un forcené de violents spasmes qui me départissent de moi cette lettre a rappelé la furie du vent sur ma tête allons il faut bien que je lise les mots qu'elle a pris la peine de tracer pour moi et que ce soit les derniers et qu'il n'en soit plus jamais parlé
Vous voudrez bien m'excuser, j'ai outrepassé les limites de notre contrat amical, j'ai voulu connaître des choses qui ne me regardent point - vous me l'avez fait comprendre - alors que l'amitié réelle ne doit pas s'immiscer dans ce qu'un ami veut défendre à l'autre ; ce sentiment là, lui, s'il est véritable, n'en est pas empêché pour cela. Si vous voulez bien, moi je reste votre amie.
Donc l'après-midi n'a rien changé entre nous ! Elle a glissé sur Isolfe comme le vent, laissant ses sentiments inentamés, elle reste imperturbable, entêtée dans sa douce résolution amicale.
J'ose me plaindre, alors que je m'attendais à être rejeté, et elle veut rester mon amie, compréhensive, mais pas intruse, chaste et assexuelle ! N'est-ce pas le mieux que je peux espérer d'elle ? Je me le suis pourtant dit et redit, je l'ai pourtant écrit, encore et encore, par exemple, voilà, je feuillette les pages en remontant le temps, en février,
Résolution : préserver le lien avec elle, quel qu'en soit le prix à payer, même si cela doit être de loin, même si je dois la voir heureuse avec un autre, même si je dois la voir mettre au monde et aimer les enfants d'un autre…
Mais que signifie le ce sentiment là, lui, cela signifie qu'il existe un autre sentiment qui, lui, ne peut pas laisser subsister de tels secrets entre les êtres qui veulent s'y adonner. Je retombe dans mon cercle vicieux, dans mon encagement de pestiféré. Une femme ne pourra jamais m'aimer, qui ne partagerait mon secret, une femme ne pourra jamais m'aimer à qui je l'aurais révélé.
Je me jette par terre, en serrant le message d'Isolfe contre moi. Je pense au bras qu'elle m'a autorisé à faire peser sur elle. J'ai envie d'elle, je crève d'un désir esseulé et implorant qui me ravage le ventre.
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(1) ce gateau est délicieux, et rares sont ceux qui trouvent l'ingrédient mystère… je tiens la recette à votre disposition.
