La RAR de Fenice a déjà était faite, en privé.

Léna – le carré d'azur … c'est beau … je me demande bien où Remus a rangé ? caché ? cette lettre … entre les pages de son journal ? dans la poche du tabard ? sous son oreiller ?

La glace au mastic n'est pas la spécialité des vitriers, en fait c'est de la glace au lait parfumée à la gomme arabique (meskeh – mastic) et le mouhallayé se fait avec du riz en poudre et de l'eau de rose et de fleurs d'oranger – hyper facile !

Snape – le revoilà l'œuvre - à toi de voir dans quel sens il tire, (ou est-ce moi qui le pousse ? ).

Bonne (courte) lecture et dédicace spéciale aux lecteurs silencieux.

Journal d'Isolfe, 17 mai

Voilà, j'ai dormi seule, peu et mal.

Et je n'arrive pas à savoir ce que je pense de cet état de chose. Enfin, disons que j'en suis à la fois soulagée et insatisfaite. Je n'ai pas envie d'être plus honnête que cela avec ce journal qui n'a pas vocation à savoir tout de moi.

Severus était à l'affût, j'ai réussi à l'éviter jusqu'à la fin de mes cours du matin, mais il est fin manoeuvrier, il est parvenu à me coincer et comme j'en avais marre de son petit jeu, j'ai attendu l'attaque, en décidant d'être aussi insolente qu'il serait indiscret. Et éventuellement de lui coller une baffe.

Le moins que l'on puisse dire est qu'il m'a fait grâce de toute entrée en matière en me jetant à la figure :

« Alors, vous avez consommé ?

– Dois-je donner un sens économique à votre question ?

– Ne faites pas la maligne !

– Maligne, je ne le suis pas bien, je ne comprends pas votre question. »

Là, j'ai cru que c'est moi qui allais recevoir cette fameuse baffe...

« Bien, vous m'obligez donc à formuler la question autrement ... Avez-vous couché avec lui ?

– Pourquoi cette question aujourd'hui ?

– Mais, parce que vous êtes sortis hier ensemble !

– Ahah, je vois qu'à Hogwarts les bruits de fond de chaudron circulent plus vite que les chouettes express !

Et ceci vous permet-il d'en déduire cela ? Je comprends fort bien que vous appliquiez cette règle pour vous-même et que toute invitation commencée à un quelconque endroit se termine dans votre lit, c'est bon à savoir, je n'irai jamais dîner en tête-à-tête avec vous, Severus, mais il se trouve que Remus Lupin et moi sommes sortis hier soir en amis. »

Il secoue la tête lentement, d'un air incrédule et désolé, comme si je venais de gâcher – volontairement - ma dernière chance.

« Je sais que vous vous interrogez sur lui, que vous tournez autour de son sale secret, mais patience, vous allez bientôt savoir quoi penser de lui ...bientôt, très bientôt…

…. et vous n'y résisterez pas. Il n'y a que moi qui puisse m'en accommoder. »

Puis, il fait quelque chose de bizarre - il commence à marcher à reculons, tout en me regardant fixement, et plus il s'éloigne, plus ses yeux sont lourds sur les miens, comme si, de ses deux pouces, il appuyait dessus, inexorablement, impitoyablement,.

La douleur augmente, encore, encore plus, son chemin est si bref, des yeux au cerveau, je comprends subitement : il est en train d'essayer de pénétrer dans mon esprit !

Naturellement, il doit avoir envie de connaître la nature des sentiments que je porte à Remus ? ou pire, il le fait pour me révéler ce qu'il a appelé son sale secret - mais comment Remus pourrait-il représenter un danger pour moi ? Dumbledore ne m'a-t-il pas dit que je ne devais jamais douter de lui ?

J'ai envie de vomir, révolte et douleur mêlées, ce que Remus ne veut, ou ne peut, me révéler n'appartient pas à Snape, mais à lui et à moi, même dans le non-dit, comment ose-t-il s'immiscer entre nous deux ? C'est un démon qui veut nous séparer, déchirer ce qui existe entre nous.

Je bloque l'accès de mon esprit, brutalement, une branche spéciale d'occlumencie, complexe, formidable, occlumens dextra, pour les cas d'urgence, défense et attaque en même temps, mais où l'on risque de se perdre…

Snape ne devait pas s'y attendre, je le vois, à dix mètres de moi maintenant, sursauter violemment, comme sous l'effet d'un très puissant sort d'attaque, ses cheveux lui retombent dans les yeux, il les rejette brutalement en arrière, et ensuite se passe les deux mains sur le visage, comme un homme hébété.

Je m'entends lui crier, d'une voix mal ajustée, stridente, qui tressaute de désarroi et de révolte :

« Comment avez-vous osé ? vous savez ce que vous venez d'enfreindre ? Mais les codes n'ont aucune valeur pour vous, n'est-ce pas ? vos anciens réflexes de mange-mort sont toujours là ! »

L'effet est encore plus violent que ma contre-attaque de toute à l'heure, il vacille et est contraint de s'adosser au mur. Moi, je suis douloureusement essoufflée, la tête perdue dans un vertige malsain, racoleur, qui m'incite à me laisser couler.

Ce que je lui ai crié vibre encore autour de nous, mais maintenant, nous sommes tous deux rigoureusement immobiles, comme si ni lui, ni moi, n'allions jamais pouvoir nous remettre en mouvement. Exténués par ce qui vient de se passer entre nous ? Pétrifiés par cette violence illégitime qui a circulé entre lui et moi ? Combien de temps restons-nous ainsi, érigés l'un en face de l'autre, appliqués à récupérer ? Lequel de nous retrouvera en premier la force nécessaire pour quitter son immobilisme ? ou lequel prendra le risque, en bougeant, de remettre en branle la déraison contre l'autre ?

C'est lui, mais c'est finalement un message d'apaisement qu'il m'envoie. Je vois ses lèvres bouger, je l'entends me dire :

« Vous avez réagi vite et bien, mais vous êtes épuisée, allez vous reposer. »

C'est comme si j'avais reçu ma relaxe, je me mets à marcher. Je suis arrivée à sa hauteur. J'avais pensé lui jeter à la face que je ne lui pardonnerai jamais, ou lui demander de laisser Lupin hors de tout cela, mais il a un geste impatient qui passe comme une nouvelle menace à hauteur de mon cou.

« Allez, vous n'avez rien à me dire ! Vous ne savez pas… là, ce qui aurait pu se passer entre nous. C'est vous qui avez voulu que ce soit violent, il aurait pu en être autrement ! »

Il est à nouveau furieux. Je m'en vais. Je ne veux pas chercher à comprendre ce qu'il vient de me dire. C'est une autre interrogation qui me travaille. Lorsque j'ai compris quelles étaient les intentions de Snape, j'ai pensé, et donc là, je viens d'écrire, mes yeux remontent sur la feuille et voient ces mots là

« déchirer ce qui existe entre nous »

et aussi « nous séparer ».

De quoi me suis-je approchée à ce moment précis, de ce que j'avais de plus précieux à protéger ?

Journal de Remus, 18 mai

Le désir hurle à m'en briser les tympans.

Tête perdue dans l'oreiller

je donne des coups de reins dans le matelas, sauvages, affligés

je me débats sur une Isolfe idéale

je me soulage de l'envie qui me tenaille le ventre

dans la fausseté de ces gestes

le désir s'expose en se moquant de moi

mon amour est immense

Journal d'Isolfe, 18 mai

Je viens de quitter Remus, je me mets au lit ; allongée sur le dos, je sens sur moi le poids de son désir, couché sur moi, pesant sur moi, me communiquant sa chaleur, persévérant comme une tentation, doux comme une miséricorde.

Que m'avait donc dit Herbert, l'oncle de Benedikt, le seul de leur famille qui m'ait, avec des mots à la fois crus et inquiets, manifesté sa sollicitude à l'occasion de notre rupture ? « Tu commenceras à aller mieux quand tu désireras à nouveau le poids d'un homme sur toi, et plus tard, tu redeviendras amoureuse et tu pourras enfin te débarrasser de Benedikt ». A quelle étape en suis-je rendue ?

Au matin, le ciel est d'un bleu extravagant, profond et matériel, j'ai l'impression que si je levais mes mains vers lui et que je les ramenais à moi comme une coupe, elles déborderaient de bleu.

J'en envie de marcher vers Remus, et de lui faire partager cette sensation. De lui faire boire de ce bleu à mes mains. De nous faire partager cette ablution céruléenne.

Journal d'Isolfe, le 2 juin

Plus tard, Remus traverse la salle des professeurs, tête tournée dans ma direction, nos yeux qui se touchent, lui continue d'avancer, nous tenons toujours notre regard, plus longtemps que d'habitude encore, j'abandonne la première, mais c'est moi qui emporte la victoire.

Remus, qu'est-ce que cela veut dire, te dévoileras-tu un jour ?

Je porte ce regard en moi comme un enfant dans mon ventre.