Chapitre 4
Cela faisait deux jours que Heero s'occupait de Duo et le garçon semblait aller beaucoup mieux. Il n'avait eu qu'une seule crise après la première et puis, plus rien. Il n'avait plus l'air de souffrir et ça remplissait le cœur de Heero de joie. Il avait passé deux journées merveilleuses avec celui qu'il aimait, il lui avait même fait la cuisine, à la grande surprise de Duo. Mais Heero commença à s'inquiéter de nouveau quand son ami émit le désir de sortir. L'ancien soldat parfait se rendit compte que ni l'un ni l'autre n'étaient sortis et il pensa qu'il leur ferait du bien de prendre l'air. Mais Duo voulait sortir seul. Il avait des choses à faire et, d'après lui, ne pouvait pas les faire avec Heero.
Le jeune homme le laissa donc sortir malgré ses réticences. Une fois qu'il fut dehors, Duo se dirigea vers la clinique médicale, empruntant le chemin qu'il connaissait si bien. Sans hésitation, il entra et se présenta à l'accueil. La secrétaire le reconnut tout de suite.
« Monsieur Maxwell, vous venez pour votre traitement ? Asseyez-vous, le docteur va venir vous chercher. »
« Merci. »
Heero, resté seul à la maison, se trouva ridicule d'attendre le retour de Duo comme une mère qui aurait laissé son enfant sortir pour la première fois seul. Il décida d'aller lui aussi faire un tour et visiter le quartier, chose qu'il avait prévu de faire avec Duo mais qui était tombé à l'eau, certains événements lui étant tombés dessus.
Duo sortit de la clinique une vingtaine de minutes après y être entré. Il ne se sentait pas bien, ce traitement ne lui réussissait vraiment pas. Il avait une de ses nausées comme jamais il n'avait eu. Décidément, les produits faisaient effet de plus en plus vite et bientôt, il ne pourrait plus les supporter et serait obligé d'arrêter tout ça. Retournant vers sa maison, il n'avait pas fait dix mètres qu'une personne se planta devant lui. Duo ouvrit de grands yeux, ne sachant pas quoi dire.
« Duo, tu continues ? »
« Hilde, laisse-moi passer. »
Mais, voulant la contourner, il s'effondra sur le trottoir. Elle se précipita sur lui pour le relever et l'aida à marcher jusque chez lui. Quand il releva son visage pour faire face à son amie, il avait le visage baigné de larmes. Il souffrait, ça se voyait dans son regard.
« Duo, je t'avais dit que ça te tuerait. Pourquoi tu n'as pas arrêté ? »
« Pardon, Hilde. Je suis un imbécile. Mais j'avais si mal… »
« Et tu vois où ça t'a mené. Combien de fois tu y es retourné depuis que je suis partie ? »
« Est-ce tu crois que j'ai compté ? C'est long un an. »
Elle n'osa plus lui poser de question, redoutant les réponses qu'il pourrait lui donner. Elle avait bien compris que c'était la fin et elle se dépêcha de le ramener chez lui. Quand elle entra, la vue de cette maison qu'elle n'avait pas vue depuis un an lui fit un drôle d'effet, mais elle passa par dessus et conduisit Duo dans sa chambre. Après l'avoir installé sur son lit, elle remarqua certaines choses dans la pièce qu'elle ne connaissait pas, dont une paire de chaussures affreuses que Duo, le connaissant par cœur, n'aurait jamais portées. Duo vit son regard interrogateur et lui dit :
« C'est les chaussures de Heero. »
Elle crut s'étouffer en entendant cela.
« Quoi, Heero habite ici ? Avec toi ? »
Il lui fit un signe de tête affirmatif. C'est à cet instant que Heero revint de sa promenade et, ayant passé la porte d'entrée, il entendit clairement que Duo était rentré, mais qu'il avait un visiteur. Il reconnut la voix de Hilde et se dit que Duo devait être très heureux de la revoir après son absence, mais ce qu'il entendait étaient des paroles de dispute et ne comprenait rien à la situation.
« Mais pourquoi il t'a laissé faire ? Il t'en aurait empêché. A moins que tu ne lui ais pas dit. »
« Il est là depuis quelques jours seulement et il croit que j'ai une maladie incurable qui va me faire mourir. »
« Duo, tu es ignoble. Tu dis ça comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. »
Duo se fâcha. Elle était revenue depuis même pas une heure qu'elle recommençait à lui faire des reproches.
« Comment oses-tu revenir ici après m'avoir abandonné si cruellement et me dire que ce que je fais est mal ? C'est entièrement de ta faute si je suis dans cet état. »
À ces mots, c'est elle qui se fâcha.
« Ne rejette pas la faute sur moi, tu sais très bien que tout est de ta faute. J'ai essayé de te stopper, mais Monsieur tête de mule ne m'a jamais écouté, et ça continue d'ailleurs. »
Elle sortit de la chambre en furie, sachant pertinemment que Duo ne l'écouterait pas. Quelle fut sa surprise quand elle se trouva face à face avec Heero, qui était resté dans le couloir, n'osant pas signaler sa présence. Comme elle restait plantée devant lui sans rien dire, il la prit par le bras et l'entraîna dans la cuisine. Il l'installa à la table et s'assit en face d'elle.
« Je veux des explications. »
« Toujours aussi direct à ce que je vois. »
« Tout de suite. »
Elle prit une grande respiration et demanda :
« Duo t'a dit qu'il était malade et qu'il allait mourir ? »
Le Japonais acquiesça.
« Eh bien, ce n'est pas tout à fait la vérité. Duo n'est pas malade, mais il va vraiment mourir, vu son état. »
Heero s'énerva.
« Mais qu'est-ce qu'il a, bon sang ! »
« La première année qui a suivi la fin de la guerre, on s'est installé ici, mais on avait des problèmes d'argent. Je travaillais pour un orphelinat du coin qui me payait quand ils avaient de l'argent, ce qui fait que notre vie était basée sur le salaire de Duo. Mais il s'est vite lassé de son travail et se perdait dans les heures supplémentaires. Moi, je voyais bien que sa joie de vivre s'estompait de jour en jour. Je tiens à dire que ça, c'est entièrement de ta faute. »
« Pourquoi de la mienne ? Je n'étais même pas là. »
« Justement. Enfin, Duo était revenu après une autre longue journée de travail, épuisé et découragé. Moi, je l'attendais depuis un bon bout de temps. Quand il est venu me rejoindre sur le canapé, j'ai déballé mon sac.
« Duo, tu ne peux pas continuer comme ça, tu travailles trop. »
« Et comment veux-tu que je fasse ? Je suis obligé de faire des heures supplémentaires, mon salaire avec ce que tu gagnes ne nous suffit pas. »
« Mais tu vas finir par te tuer à la tâche. Écoute, je vais me chercher un travail plus payant et… »
« Non Hilde, il n'est pas question que tu te sacrifies à cause du manque d'argent. C'est moi qui t'ai entraîné dans cette histoire, c'est à moi de régler le problème. De toute façon, je crois avoir trouvé un moyen d'augmenter nos revenus. »
« Rien d'illégal, j'espère. »
« Mais non, t'inquiète pas. Il y a une clinique en ville qui cherche des volontaires pour tester de nouveaux produits, et c'est très bien payé. »
« Duo, tu veux jouer au cobaye ? J'aime pas trop ça. Ça pourrait être dangereux. »
« Mais non, je suis solide et puis tu sais, on a dû m'en injecter des trucs dans le corps pendant la guerre et je suis toujours là. »
« Bon d'accord, mais t'arrêtes les heures supplémentaires au garage, ça te tue. »
« Oui chef. »
« Et c'est ce qu'il a fait et tout a très vite changé. Ça allait super bien au début, on avait plein d'argent et on avait beaucoup de temps pour nous. On vivait bien jusqu'à ce que… »
« Jusqu'à ce que quoi ? »
« Le volontaire, après avoir reçu le produit, pouvait rentrer chez lui et devait faire un rapport écrit de tous les effets secondaires qu'il ressentait pendant deux jours. Ensuite, il renvoyait le rapport à la clinique. Mais y'en avait qui ne supportait pas les produits et qui devaient abandonner. Heureusement, ce n'était pas le cas de Duo, du moins au début. Le problème, c'est qu'au début, Duo n'avait aucun effet secondaire et donc ne faisait pas de rapport, mais il y allait de plus en plus souvent et n'allait presque plus au garage. Puis il a commencé à avoir des maux de tête terribles et il n'en avisait pas la clinique. Alors un jour, je me suis fâchée.
« Duo, ça suffit. Tu vas arrêter ces expériences tout de suite. »
« Non, j'arrêterais pas, c'est ça qui nous fait vivre. »
« Mais t'es en train de crever. Tu peux pas continuer comme ça. Si tu n'y mets pas fin, je te quitte. »
« Ah ah, tu le feras pas, je te connais. Je te parie n'importe quoi que si tu pars, tu reviens dans les deux jours. »
« Et bien les paris sont ouverts. »
« Et je suis partie. »
« Tu l'as abandonné ? »
« Je croyais qu'il allait se ressaisir, mais je vois bien que je me suis trompée. Mais même si j'étais restée, je n'aurais pas pu l'empêcher de continuer et de s'autodétruire. »
« Alors, qu'est-ce qu'on peut faire ? »
« Rien, il est foutu. »
Elle se leva, se détourna de Heero et se dirigea vers la chambre de Duo. Elle se planta devant son lit et lui dit :
« Voilà, t'as réussi. Tu as prouvé à tout le monde que tu étais le plus fort, que tu n'avais besoin de personne pour mourir. Moi je voulais t'aider, te faire oublier ta peine. Il fallait tourner la page, recommencer. »
« Je ne pouvais pas recommencer, lui répondit le jeune homme couché. Je ne pouvais pas oublier mes sentiments. Je ne suis pas aussi fort que tout le monde le pense. Et si je veux, moi, crever tout seul dans mon lit, c'est pas toi qui va m'en empêcher. »
« Et Heero, qu'est-ce que t'en fais. »
« Rien du tout. Il ne m'aime pas. »
A ces mots, le jeune homme en question sursauta. Était-ce possible que celui qu'il aimait plus que tout au monde partage ses sentiments ?
« Et comment tu expliques qu'il est là, de l'autre côté du mur ? »
Ce fut au tour de Duo de sursauter.
« Il… il est là ? Depuis quand ? Qu'est-ce qu'il sait ? »
« Tout, je lui ai tout raconté Duo, il avait le droit de savoir. »
« Non, pourquoi tu as fais ça ? Hilde, tu m'as trahi. Hilde, Hilde… »
Mais la jeune fille ne répondit pas à celui qui l'appelait. Elle sortit de la chambre, les larmes aux yeux et revint faire face à Heero.
« Je crois qu'il veut te parler avant de… »
Elle ne put terminer sa phrase. Elle prit son sac et s'en alla en courant. Heero était complètement anéanti. Il avait été si proche de son amour, mais ne pouvait pas l'atteindre. C'était trop injuste. Tout d'abord, il prit peur. Comment pouvait-il faire face à Duo sachant que sa mort n'était plus qu'une question de minute. Mais ce fut pour cette même raison qu'il se décida à passer la porte. Par contre, il n'alla pas plus loin.
Duo n'était plus sur son lit. Heero sonda la pièce du regard pour finalement apercevoir le garçon dans le coin de sa chambre, les genoux ramenés contre sa poitrine, se balançant d'avant en arrière, les joues baignées de larmes. Il répétait comme une litanie : « Boys don't cry, boys don't cry… » mais les larmes continuaient de le contredire et ne s'arrêtaient pas.
Heero s'accroupit devant Duo et lui dit, sans qu'aucune émotion ne paraisse sur son visage :
« Duo, tu m'as menti. »
Ce dernier entra dans une colère monstrueuse et hurla à son interlocuteur :
« Oui et alors, je suis fini, je n'ai plus rien, ma meilleure amie ne peut même plus me regarder et l'homme que j'aime reste avec moi par pitié. Je n'ai plus rien à perdre alors oui, je mens, je mens comme je respire. »
« Duo, ce n'est pas de la pitié que je ressens pour toi, c'est de l'amour, de l'amour sincère. »
« Menteur. »
Duo avait dit ça, mais un sentiment l'envahit, un sentiment qu'il n'avait pas ressentit depuis très longtemps. La joie, il sentait une grande joie qui remontait du fin fond de son être et il releva la tête pour voir dans les yeux de Heero s'il était en train de s'imaginer des choses ou si c'était bien réel. Quelle joie l'envahit lorsqu'il s'aperçut que les sentiments de celui qui se tenait devant lui étaient sincères.
« Et t'aurais pas pu me le dire avant plutôt que de me laisser me tuer à petit feu ? »
Le Japonais sourit à la remarque de son compagnon. Un grand espoir l'envahissait à cet instant. Il .tait persuadé qu'il pouvait empêcher la mort de Duo. Il prit le corps frêle de l'Américain dans ses bras et le serra tendrement.
« Si je te dis que je t'aime et que je ne veux pas que tu meures, tu me promets que tu vas m'aider à te guérir ou je vais être obligé d'utiliser la force ? »
« Je… je te le promets. »
Note de l'auteur : merci à ceux qui ont envoyé des reviews et à ceux qui ont lu sans en envoyé… À cela suivra un épilogue pour… épiloguer, je ne vois rien d'autre à dire.
-Ephemeris-
