Vous vous demandez sûrement pourquoi je n'évoque jamais le souvenir de ma famille. Ce n'est pas parce que je ne les aimais pas, non, bien au contraire, je les adorais. A vrai dire, pas un jour ne se passe sans que je ne repense à eux. Je nous revois, Kyle et moi à rigoler de nos bêtises et ma mère nous grondant gentiment. Et lorsque je tends bien l'oreille je peux même entendre encore le son de leur voix résonner dans mon esprit. Oui ils me manquent et j'ai eu tout le loisir de penser à eux durant mes huit années à Azkaban. Peut-être est-ce ce qui m'a sauvé de l'emprise des détraqueurs finalement… Le souvenir de leur mort est quelque chose que je ne veux pas garder en moi et j'aimerais ne garder que les instants de joie et de bonheur qu'ils m'ont apporté durant mes plus belles années d'innocence.
Le ciel se couvrait ce soir là, l'orage grondant au loin semblait m'indiquer de ne pas sortir en balade et ce ne fut qu'avec un soupir que je regardais la pluie commencer à tomber doucement à travers les carreaux du hall d'entrée. Curieusement je m'étais sentie assez fatiguée toute la journée, un bourdonnement agaçant dans les oreilles et Rogue m'avait d'ailleurs souvent reprise sur le sujet. Moi qui n'avais jamais été malade durant ces huit dernières années, je n'arrivais pas à m'expliquer le phénomène. Je tournais les talons, ma volonté oscillant entre la bibliothèque et un bon livre, ou ma chambre et un bon lit qui n'attendait que moi. Je pesais le pour et le contre, Arès m'observant curieusement en dodelinant sa petite tête mais une voix pris la décision à ma place.
« Il vaudrait mieux à en juger votre état que vous alliez vous coucher. »
Rogue m'observait impassible, appuyé sur le chambranle de la porte, les bras croisés. Comment faisait-il pour toujours me surprendre au juste ?
« Je vais bien, merci. » J'avançais d'un pas mal assuré en direction de la bibliothèque mais j'eus la désagréable sensation de sentir mon esprit couler complètement hors de moi, un voile se posant devant mes yeux et me plongeant dans une obscurité effrayante.
La seule chose dont je me souviens de cet instant furent les bras forts qui m'arrêtèrent dans ma chute et me transportèrent jusque dans ma chambre. Je serais bien incapable de dire à quel moment ma conscience s'est complètement envolée et j'aurais franchement préféré qu'elle ne s'en aille pas.
Ce cours instant de catatonie s'est révélé un des pires depuis… en fait depuis la mort de Kyle et de ma mère. Je me revoyais, la gamine terrorisée devant les corps de ceux que j'aimais le plus au monde et je voyais le regard fou de mon père, braqué sur moi tout comme la baguette qu'il tenait dans la main. Je voulais crier et partir, fuir ce cauchemar mais quelque chose m'en empêchait. J'avais comme l'impression qu'une force invisible voulait me forcer à regarder la scène et à accepter les faits. Je pouvais ressentir le coup que mon père me porta à la tête et c'est à ce moment là que je compris que je n'étais plus moi-même. Mon corps ne m'obéissait plus, j'étais comme une marionnette en prise à une entité dont je ne savais rien. Etait-elle bonne ou mauvaise ? C'était comme voir mon corps agir à travers les yeux de quelqu'un d'autre, ma main qui se levait doucement en direction de mon père et cette lumière blanche, qui l'envoyait voler et s'écraser contre un mur. Un miroir se brisa sous sa chute et je pu apercevoir l'espace d'un instant mon reflet, ou plutôt celui de mon corps. J'étais saisie par cette vision de moi que je ne reconnaissais pas. Mes yeux verts n'avaient plus rien de la couleur des prairies et ressemblaient plutôt à un bleu turquoise. Qui avait-il de réellement surprenant dans cette couleur ? Et bien pour tout dire ce n'était pas la couleur qui me dérangea sur le coup mais mes yeux n'avaient plus rien d'humain. Cela ne dura qu'une fraction de seconde mais je compris bien que je n'étais plus moi même. Mon père se releva avec difficulté du coups que je lui avais assénés, ses yeux me fixant avec incrédulité et horreur. J'étais aussi surprise que lui je crois.
Je le vis s'enfuir, aussi vite qu'il le pouvait et mon corps (car ce n'était pas moi) resta là, immobile pendant de longues minutes à scruter les corps de ma famille. Etrangement, je me sentais bien. J'étais comme enveloppée d'une douce chaleur, comme dans un cocon et en parfaite sécurité. Cela pouvait paraître impossible à la vue de cette scène et c'était en partie vrai, je venais de revivre un des pires cauchemars de toute mon existence. Et pourtant, oui, pourtant je me sentais bien, comme si une voix m'apaisait intérieurement, me dictant de continuer à vivre, puis ce fut le néant.
Lorsque je repris plus ou moins conscience, la première chose que je sentis fut la petite langue chatouilleuse d'Arès sur ma main. Puis des voix et des sons me parvinrent doucement au oreilles tel un crescendo, une ascension, un retour vers la normale et les souvenirs vaporeux de ce rêve encore bien encrés dans mon esprit me dérangeaient plus que tout à vrai dire. Je n'en comprenais pas la signification. Arès se releva sur ses quatre petites pattes, lové au creux de mon bras et entreprit de me lécher le bras dans sa totalité. Je le caressais doucement pour le calmer, mes yeux clignant doucement pour s'habituer à la lumière du jour. Je regardais Arès deux secondes avant de réaliser que je n'étais pas seule et que trois regards étaient braqués sur moi. Il y avait Rogue, Dumbledore et une petite femme habillée… étrangement.
« Que s'est-il passé ? » J'avais la bouche pâteuse et j'avais du mal à pousser ma voix. C'était comme si l'on m'avait subitement privé de mes forces.
Je vis Rogue regarder Dumbledore, un air un peu gêné ou inquiet, impossible de savoir mais je savais que quelque chose n'allait pas et il ne fallait pas avoir fait l'ESS (l'Ecole Supérieure de Sorcellerie) pour savoir que cela me concernait.
« Désolée je ne dois pas parler clairement, et à vrai dire je ne suis pas en super forme… » Je me relevais doucement, m'asseyant sur mon lit. « … mais si vous pouviez m'expliquer ce qu'il se passe ça éviterait à cette fichue migraine de me laminer le cerveau en lambeaux. A oui, et j'allais oublier, bonjour tout le monde. »
Mon dieu, j'avais vraiment osé dire ça ?
« Mary, voici madame Pomfresh, elle est infirmière. Hier tu as fait un malaise et Severus m'a contacté moi et Pompom pour te guérir vu qu'il n'a pas le matériel adéquat pour soigner ce genre de… hum, maladie. »
Ok, il y avait vraiment un truc qui n'allait pas et ils ne savaient pas comment aborder le sujet. Je regardais Severus, et me heurtais pour la énième fois à son regard noir et insondable.
« Vous me cachez quelque chose… »
« Vous êtes perspicace Mary. » Waow, première fois qu'il m'appelait par mon prénom, ça cachait décidément quelque chose.
« Severus, Pompom, j'aimerais parler à Mary, seul s'il vous plaît. » Dumbledore se tourna vers moi, un air grave qui n'avait rien de l'air rieur et chaleureux qu'il prenait d'habitude. Pas très rassurant tout ça…
Rogue sortit sans un mot de plus et j'étais je dois bien l'avouer un peu déçue de le voir partir aussi simplement que ça. En revanche la petite femme émit quelques objections avant de sortir.
« Elle ne doit pas se lever avant trois jours monsieur le directeur, elle est trop faible. »
« Oui Pompom. »
« Et je veux qu'elle prenne les potions que j'ai préparé, il faudra le dire à monsieur Rogue. »
« Oui Pompom. »
« Et il lui faut du repos donc pas de cours pendant quelques temps, je sais que… »
« Oui Pompom, ne vous inquiétez pas j'en informerais Severus. Maintenant j'aimerais m'entretenir avec Mary, SEUL. »
Dumbledore sourit en direction de la dénommée « Pompom » qui quitta finalement la pièce d'un pas rapide en prenant soin de fermer la porte derrière elle. Dumbledore soupira et se tourna vers moi avec un sourire contrit.
« Il faut l'excuser, elle est comme ça avec tous ses patients et elle est assez… pointilleuse. »
Je savais ce que c'était à vrai dire, ma mère était comme elle.
« Mary, je sais que tu n'aimes pas en parler et que cela t'est douloureux mais j'ai besoin de savoir… Sais-tu ce qu'il s'est réellement passé la nuit où ta mère et ton frère sont décédés ? »
Droit au but.
« Je… je crois savoir. Mon père a tué Kyle et Maman avec l'avada kedavra et il m'a frappé à la tête… » J'hésitais à parler, si je racontais ce que j'avais vu dans mon rêve il me prendrait certainement pour une folle.
« Il y a autre chose, tu le sais… »
« J'ai… rêvé quelque chose tout à l'heure, c'était bizarre. Je me revoyais ce soir là et je n'étais plus moi-même. »
« Tu as donc vu l'essentiel… »
« Mes yeux étaient différents, quelque chose contrôlait mon corps… C'était bizarre mais je me sentais bien. »
Ils étaient morts et c'est la seule chose que je trouvais à dire, pathétique.
« Mary, tu sais que tu n'es plus exactement la même qu'autrefois et ce que tu as vu dans ton rêve était réel. Ces évènements ont réellement eu lieu. » Il s'assit sur mon lit sans cesser de me regarder.
« Je ne comprends plus rien… »
« Connais-tu la légende des dragons d'Anthrim mary ? » Cela me disait vaguement quelque chose oui mais je ne voyais pas franchement le rapport.
« Il y a longtemps, une population de dragon protégeait vaillamment leur territoire, défiant quiconque d'en approcher. Les humains voulaient par leur soif de pouvoir et de richesse s'accaparer leur pouvoir et une lutte sans merci les opposait. Puis un jour, alors qu'un groupe de chasseur entrait sur leur territoire, ils y eut inévitablement un combat qui mena le groupe d'humain à leur perte, pas un n'en réchappa sauf un. Ce n'était alors qu'une enfant et on raconte que le dragon qui les avait attaqué ce jour là refusa de lui faire subir le même sort et l'accepta comme l'une des leur. Elle grandit avec eux et reçut leur héritage. Malheureusement, un jour l'inévitable se produisit et un sorcier plus puissant que tous les autres, chasseur de dragons de surcroît, parvint à ses fins et décima le clan des dragons dans sa totalité. On dit qu'avant de mourir, les dragons confièrent leurs pouvoirs à la jeune fille qui réussit à s'enfuir en leur promettant de ne s'en servir que pour une juste cause. Le temps passa et la jeune fille qui avait été abandonnée une fois le fut une seconde fois et partit sans que l'on ait de nouvelles d'elle. Beaucoup racontent que son pouvoir est immense et il est évidemment très recherché par beaucoup de sorciers. La légende raconte qu'elle se réincarne dans le corps d'un nouveau né chaque millénaire, et qu'elle vient faire justice auprès des dragons. »
« Ravissante histoire… » Je me frottais les tempes pour calmer ma migraine et les pensées qui se mettaient doucement en place dans ma tête.
« Mary, sais-tu quelle était la particularité de cette enfant après avoir reçu les pouvoirs des dragons ? »
« Non. »
« Ses yeux étaient… particuliers et ceux qui l'ont vu les ont décrit comme étant d'un bleu azur très profond. »
« Et en quoi cela me concerne ? » Je levai les yeux vers lui, sentant la fatigue m'envahir doucement.
Aucune réponse. Si l'absurdité de ce qui m'arrivait ne m'avait pas complètement sidéré sur le coup, j'aurais pu dire qu'au moins c'était très clair comme réponse.
« Non… Ce n'est pas possible. Ca ne peut pas être… »
Pourquoi tout ça me tombait dessus ? Je n'avais rien demandé à personne.
« Mary… »
« Non ! Vous vous trompez ! Ce n'est pas possible, je ne veux pas ! »
Je regardais Dumbledore avec une colère non dissimulée et ma voix semblait revenir peu à peu, guidée par cet élan de désespoir qui m'enfonçait dans mes retranchements.
« Mary, tu n'as pas à avoir peur ni à être en colère contre tout ce qu'il t'arrive. J'imagine à quel point c'est difficile à accepter mais il ne faut pas que tu oublies que tu restes toi même malgré tout. »
« Je ne veux pas de ça ! Si comme vous le dîtes elle était si juste et puissante, pourquoi n'a t-elle pas empêché tout ce qui m'est arrivé ? Pourquoi elle ne les a pas protégé !? »
« Je n'en sais pas plus que toi Mary. Je pensais que tout cela n'était qu'une légende avant que je ne te rencontre et que je comprenne... »
« Vous vous trompez peut-être, ce n'est pas moi mais quelqu'un d'autre. »
Dumbledore me regarda quelques secondes dans les yeux et je réalisais qu'il y avait quelque chose qui avait changé mais que je n'avais pas remarqué depuis mon réveil. J'arrivais à voir n'importe quel petit détail de la pièce, aussi infime et lointain qu'il soit. C'était une sensation très… étrange.
« Mes yeux… » Dumbledore me tendit un petit miroir que j'hésitais à prendre de peur de voir ce que j'y avais vu dans mon rêve.
Je restais sidérée devant le reflet que me renvoyait le miroir, mes yeux n'avaient strictement plus rien d'humain. Ils reflétaient une quiétude, un bleu apaisant et brillant qui me coupèrent le souffle. Je clignais des yeux pour voir que de minces paupières protégeaient mes yeux, mais ça n'avait rien de normal ou d'humain non, celles-ci se refermaient orizontalement.
« Ce qu'il t'arrive ne permet aucun doute sur ce que je suspectais Mary. »
« Laissez moi s'il vous plaît… »
J'avais besoin d'être seule et je sentais la fatigue s'insinuer en moi. Dumbledore se leva, toujours aussi calme, pareil à lui même et me regarda une dernière fois.
« Si tu as des questions ou une simple envie de parler je reste à ta disposition, ne l'oublie pas Mary. »
Je n'avais plus la force de parler, trop absorbée dans mes pensées, voir même empêtrée et perdue. Arès qui était présent depuis tout ce temps émit des gémissements plaintifs et je tournais mon regard vers lui. Il blottit sa petite tête sous ma main, cherchant les caresses et je fut rassurée de voir qu'au moins sur cette terre il me restait un petit quelque chose de réconfortant, un espoir dont j'arrivais à peine à voir la couleur malgré mes toutes nouvelles aptitudes.
Je m'endormis difficilement cette nuit là.
ReviewsGensi : lol, qui sait ? Peut-être qu'un jour Sevy craquera pour Arès… ) Ca serait super trognon c'est vrai ^^
Antigone : Merci :D
Moony013 : ptdr ! oui la bière fait des ravages et là c'en est un. M'en fiche c'est ma fic j'fais c'ke je veux ! Na ! :p Merci pour les encouragements, c'est vrai que j'ai tendance à stresser et me demander sans arrêt ce que les lecteurs vont penser, s'ils vont aimer etc… Pourtant vu le nombre de reviews pour cette fic je devrais être tranquille mais bon… je suis comme ça ^^;
Blood-Countess : Merci beaucoup, ça me fait plaisir d'avoir l'avis d'une auteur aguerrie. Tiens je ne sais même plus si j'ai déjà reviewé sur ta fic ou non, faudra que je vérifie… non parce qu'elle est géniale quoi ^^ Merci beaucoup (et vive la langue française, à mort les fautes d'orthographe etc etc…) Sinon pour le site, (encore merci ^_^) tu voudrais bien me prêter ta fic Moonlight Shadow (j'adore aussi Mike Oldfiel, ça a fait tilt quand j'ai vu le titre lol) pour que je la mette en ligne lorsque je m'occuperais de la section Fanfics ? ^_^
Lihou : Merci #^_^#
Cyngathi : Merci merci merci ^_^ (je suis également en manque d'imagination lol)
