UN AMOUR INOUBLIABLE
Par Mallory Quinn
Chapitre 7
« L'abîme du désespoir »
Souvent sur la montagne, à l'ombre du vieux chêne,
Au coucher du soleil, tristement je m'assieds;
Je promène au hasard mes regards sur la plaine,
Dont le tableau changeant se déroule à mes pieds.
Ici gronde le fleuve aux vagues écumantes,
Il serpente, et s'enfonce en un lointain obscur;
Là le lac immobile étend ses eaux dormantes
Où l'étoile du soir se lève dans l'azur.
Au sommet de ces monts couronnés de bois sombres,
Le crépuscule encore jette un dernier rayon,
Et le char vaporeux de la reine des ombres
Monte, et blanchit déjà les bords de l'horizon.
Cependant, s'élançant de la flèche gothique,
Un son religieux se répand dans les airs,
Le voyageur s'arrête, et la cloche rustique
Aux derniers bruits du jour mêle de saints concerts.
Mais à ces doux tableaux mon âme indifférente
N'éprouve devant eux ni charme, ni transports,
Je contemple la terre, ainsi qu'une ombre errante :
Le soleil des vivants n'échauffe plus les morts.
De colline en colline en vain portant ma vue,
Du sud à l'aquilon, de l'aurore au couchant,
Je parcours tous les points de l'immense étendue,
Et je dis : Nulle part le bonheur ne m'attend.
Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,
Vains objets dont pour moi le charme est envolé;
Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,
Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé.
Que le tour du soleil ou commence ou s'achève,
D'un oeil indifférent je le suis dans son cours;
En un ciel sombre ou pur qu'il se couche ou se lève,
Qu'importe le soleil? je n'attends rien des jours.
Quand je pourrais le suivre en sa vaste carrière,
Mes yeux verraient partout le vide et les déserts;
Je ne désire rien de tout ce qu'il éclaire,
Je ne demande rien à l'immense univers.
Mais peut-être au-delà des bornes de sa sphère,
Lieux où le vrai soleil éclaire d'autres cieux,
Si je pouvais laisser ma dépouille à la terre,
Ce que j'ai tant rêvé paraîtrait à mes yeux?
Là, je m'enivrerais à la source où j'aspire,
Là, je retrouverais et l'espoir et l'amour,
Et ce bien idéal que toute âme désire,
Et qui n'a pas de nom au terrestre séjour!
Que ne puis-je, porté sur le char de l'aurore,
Vague objet de mes voeux, m'élancer jusqu'à toi,
Sur la terre d'exil pourquoi resté-je encore?
Il n'est rien de commun entre la terre et moi.
Quand la feuille des bois tombe dans la prairie,
Le vent du soir s'élève et l'arrache aux vallons;
Et moi, je suis semblable à la feuille flétrie :
Emportez-moi comme elle, orageux aquilons!
Lamartine, L'isolement
Terry de son côté, repris sa routine au théâtre, malgré son cœur brisé. Susanna essayait de lui faire changer d'avis sur leur fiançailles, mais Terry ne voulait rien entendre. Sa mère et Mme Henderson firent de leur mieux pour lui changer les idées, mais sans succès. Il était devenu sombre et presque taciturne. Il ne faisait que broyer du noir. Il passait son temps à peindre. Ça l'empêcha de se tourner vers l'alcool, au lieu d'avoir la gueule de bois tous les matins, il mettait ses sentiments dans la peinture. Il avait vendu plusieurs de ses toiles. Il en avait fait une de Candy portant le châle de sa Grand-mère. Il voulait le lui donner en cadeau de mariage. Au début, il ne voulait pas la vendre, mais c'était trop dur de la regarder, même en peinture. Quelques jours plus tard, il reçut un coup de fil de Monica, la dame de la galerie qui lui demandait une faveur.
- Monsieur, il y a une jeune femme en fauteuil roulant qui est très intéressée par le tableau de « la jeune femme au châle », mais elle n'a pas d'argent sur elle. Mais elle aime vraiment beaucoup le tableau.
- Alors, donnez-le lui, si elle l'aime tellement, répondit Terry.
Si lui ne pouvait pas regarder le tableau, au moins il rendrait une jeune femme heureuse.
Candy se trouvait dans une galerie d'art avec son infirmière, quand elle vit un tableau. Elle se reconnut avec le châle de Yaya. Elle n'avait pas d'argent sur elle et elle ne voulait laisser passer la chance de l'acquérir, de peur que quelqu'un d'autre ne l'achète. Elle ne voulait pas non plus demander de l'argent à Albert pour acheter une toile de Terry.
- S'il vous plait, excusez-moi, madame…appela Candy.
- Oui ! dit Monica.
- J'aimerai acheter cette toile… « la jeune femme au châle »
- Elle coûte très chère…
- Je n'ai pas d'argent sur moi… mais je peux revenir avec de l'argent demain.
Monica regarda la jeune femme sur son fauteuil roulant.
« Quelle belle femm,e se dit-elle et ses beaux cheveux blonds, on dirait que c'est la même couleur que sur le tableau et les taches de rousseur, on dirait que c'est dame sur le tableau ! La pauvre sur son fauteuil roulant…. Elle me fait chaud au cœur. Je vais appeler Monsieur Granchester. »
- Mais…. commença-t-elle, non attendez un peu je reviens tout de suite.
Elle alla à l'arrière de la boutique pendant quelques minutes et revint avec un grand sourire.
- Melle, vous pouvez avoir le tableau gratuitement…
- Quoi ! Mais, non je ne voulais pas.. je peux revenir demain avec l'argent, dit Candy confuse.
- Ne vous en faites pas. Prenez ça comme un cadeau de Noël anticipé.
- Merci beaucoup, madame, Que Dieu vous bénisse, dit Candy avec son plus beau sourire.
- De rien. Allez, au revoir. Marilyn va emballer la toile pour vous.
- Au revoir et merci encore, dit Candy.
Elle avait accroché le tableau dans sa chambre. Terry avait fait une peinture d'elle. Avoir ce tableau était comme avoir un peu de sa présence dans sa chambre.
« Oh Terry, pourquoi je n'arrive pas à t 'oublier ? se demanda-t-elle, Je t'aime tellement que mon cœur en saigne ! »
Aux environ de la fête d'action de grâce, Terry reçut la nouvelle que sa Grand-mère, Yaya n'était plus de ce monde. Cette nouvelle ne fit que rajouter de la tristesse dans sa vie. La dernière fois qu'il avait vu Yaya, il était avec Candy et il avait passé une des plus belles journées de sa vie. Maintenant, il n'avait ni Yaya, ni Candy, rien que des souvenirs. Il alla en Grèce pour régler les affaires de sa Grand-mère. Et un des domestiques lui donna le foulard en dentelle de sa grand-mère, celui que Candy avait admiré.
- Votre Grand-mère voulait que vous donniez ceci à votre amie, celle avec qui vous êtes venu la dernière fois, Mlle André.
- Merci, fut tout ce que Terry trouva à dire.
Parmi les choses de sa Grand-mère, il y avait aussi les photos du bateau avec Candy. Il regarda la première ; il était avec Candy dans la salle à manger entrain de prendre le petit déjeuner. Il n'eut pas le courage de regarder les autres, tellement il avait mal au cœur. Il les rangea avec les papiers personnels de sa Grand-mère.
Il se souvint des dernières paroles de sa Grand-mère, « Candy est la femme de ta vie, ne la laisse pas s'échapper ».
« Mais elle ne m'aimait pas assez Yaya, elle ne m'aimait pas du tout, se dit-il. »
Annie et Patty venaient voir Candy régulièrement toutes les deux semaines. Le ventre d'Annie grandissait bien. Patty avait rencontré un homme appelé Joseph Connery et il l'avait demandé en mariage. Elle avait finalement mis le passé derrière elle, et décida que la vie continuait sans Alistair. Albert partit en voyage pour trois mois en Afrique et laissa Archie en charge des affaires de la famille.
Le temps passa et le temps des fêtes arriva. Candy avait préparé un spectacle avec « ses enfants » de l'hôpital. Ils devaient jouer une pièce sur la nativité et chanter quelques chansons. Candy adorait jouer les maîtresses d'école malgré son fauteuil roulant. Les enfants étaient contents de pouvoir faire plaisir à leur infirmière favorite. Elle avait toujours un beau sourire et elle était très gentille avec eux.
Le jour du spectacle, les enfants jouèrent leur pièce devant les autres malades. Malgré quelques maladresses, ce fut un succès. Le concierge s'était déguisé en Père Noël et il arriva avec un gros sac plein de cadeaux. Les magasins locaux donnaient des cadeaux pour les enfants malades, mais Candy avait demandé à Archie et Annie de l'aider à acheter des cadeaux pour « ses enfants » sans oublier ceux de la Maison Pony.
Albert était revenu de son long voyage en Afrique. Il avait passé beaucoup de temps au Congo et au Kenya. Il avait un bronzage digne du soleil brûlant de l'Afrique. Il alla à New York passer les fêtes avec Candy, au grand désarroi de la Grande tante Elroy qui trouvait qu'Albert perdait son temps avec sa petite orpheline. Il invita Candy à aller voir le ballet, « histoire d'un casse-noisette » l'avant veille de Noël.
Arrivés avec Albert au théâtre où devrait avoir le ballet, Candy se sentit mal. Elle attribua son malaise à la fatigue. A la fin de la pièce quand les gens commençaient à partir, Candy devait attendre que tout le monde soit parti pour qu'Albert puisse aller chercher son fauteuil roulant.
Elle regardait les gens sortir quand elle fit tomber son programme au même moment où un couple passait à coté d'elle, l'homme se pencha pour ramasser le programme et le redonna à Candy. Candy leva les yeux et reconnu les yeux d'un bleu profond et l'odeur de lavande.
« Terry ! se dit-elle ».
Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Le cœur de Terry fit aussi un bon dans sa poitrine.
« Candy ! se dit-il en la reconnaissant. Pas de contact ,se dit-il. »
- Merci, dit-elle encore troublée. Elle vit qu'il était avec Susanna.
« Ils se sont réconciliés ! se demanda-t-elle. »
Elle sentit son cœur se briser en mille morceaux.
Ils se regardèrent pendant un bref moment. Terry ne dit rien et pris le bras de Susanna et commença à partir.
- Bonsoir ! dit Candy qui ne savait pas quoi dire.
Il se retourna , il remarqua qu'elle était avec Albert.
« Elle l'a donc épousé se dit-il ».
Et il sentit aussi son cœur se briser en mille morceaux.
- Bonsoir, répondit-il.
Et il continua son chemin avec sa compagne, comme si de rien n'était.
Albert avait assisté à la scène sans rien dire.
- Tout ce temps sans le voir et tout ce que je trouve à dire c'est : « bonsoir » ? dit Candy encore perplexe.
- Pourquoi ne pas lui dire la vérité, Candy, au lieu de souffrir comme ça ? Je peux le faire pour toi.
- Non, merci, Albert. Je ne veux rien lui dire si je ne re-marche pas, dit-elle fermement.
Albert la raccompagna à son appartement. Ensuite il la laissa pour aller à une réception donnée par un de ses partenaires de New York.
Candy se changea et alla dormir. Elle avait vu Terry ! Comme il était beau. Il avait un peu maigri, se dit-elle. Il était avec elle ! Elle se mit à pleurer en silence. Il était avec elle ! Elle aurait dû être avec lui ! Pourquoi l'univers lui avait-il joué ce mauvais tour ? Après toutes ces années, elle avait finalement trouvé son âme sœur, le seul amour de sa vie et elle ne pouvait pas être avec lui, à cause d'un accident ! Et maintenant, il était de nouveau avec Susanna. Elle était jalouse et elle détestait ce sentiment.
Terry de son côté, décida de ne pas aller à la fête donnée à l'occasion de Noël par la troupe. Il le dit à Susanna.
- Allons Terry, tu as déjà accepté de venir à la pièce, pourquoi ne pas simplement continuer ?
- Non, j'ai pas envie de faire la fête. Je rentre chez moi. N'insiste pas, s'il te plait.
Susanna n'insista pas. Si elle voulait le reconquérir, se dit-elle, il fallait y aller doucement. Elle s'estimait déjà heureuse parce qu'il l'avait accompagné au ballet. Elle le ramena donc chez lui en taxi.
- Merci pour la soirée, Susanna. Joyeux Noël.
- Joyeux Noël, chéri, dit-elle en lui volant un baiser.
Terry ne dit rien et sortit du taxi. Il pensait à Candy constamment, mais la voir avec son fiancé ou était-ce son époux ?…C'était un peu trop pour lui. Il l'aimait tant. Bien que la voir avec un autre lui ait percé le cœur, mais en même temps il était très heureux de la revoir.
« Oh, pourquoi est-ce que je me fais souffrir de la sorte ? se demanda-t-il. »
Il passa une très mauvaise nuit remplit de cauchemar et d'insomnie.
Le lendemain, il raconta l'incident à Mme Henderson.
- Pourquoi ne pas aller la voir et mettre les choses au clair, une fois pour toute ? Vous l'aimez toujours ?
- Comme au premier jour. Mais, on s'est promis de pas se contacter avant et après…
- Ok. Mais le châle de votre Grand-mère ? Pourquoi ne pas en profiter pour aller la voir et le lui donner ? Vous avez son adresse ?
- Je peux la trouver.
- Le châle en dentelle de votre Grand-mère, voilà votre porte d'entrée !
- Merci, Mme Henderson.
- Il y a de quoi ! dit-elle pince-sans-rire.
Terry sourit. Cette Mme Henderson était une source de bonté, à sa manière très spéciale à elle bien sur, mais source de bonté quand même. Il se mit à la recherche de l'adresse de Candice Neige André. Parmi les papiers de sa grand-mère, il y avait les dernières lettres de Candy. Quand il la trouva l'adresse de New York, il prit le châle l'emballa et quelque chose lui dit de prendre aussi la bague de fiançailles. Il n'avait pas pu s'en séparer, il ne l'avait donc pas ramené au magasin.
