Scène 4

- Salut Kudô ! Quoi de neuf !

- Heiji !

- Bon, je vais être bref, j'ai droit qu'à un coup de fil...

- Ok, vas-y, je t'écoute, fit Conan après avoir calmé les cinq personnes derrière lui qui s'étaient agitées à l'annonce de son nom.

- Bien. Ici ça barde un peu, on me tanne pour que je crache le morceau, mais ils peuvent toujours rêver...

- Dis-moi pourquoi tu étais dans cet hôtel, cette nuit...

- Pas question, je te l'ai déjà dit, j'ai juré le secret. Je suis désolé...

- Ecoute, Heiji, si tu m'aides pas, je peux rien faire pour toi. Je te demande pas les détails... Juste si tu étais là par intérêt personnel, ou si tu devais rejoindre quelqu'un, qui pourrait à l'occasion témoigner pour toi... Est-ce que quelqu'un t'a vu, hier soir ?

- Non... A part le type, à l'entrée... Le majordome... Mais je suppose que tu le savais déjà, si tu as suivi les interrogatoires... Bref... C'était personnel... d'ordre "privé", si tu vois ce que je veux dire...

Il imaginait la tête de Kudo, à l'autre bout du fil…

- Non, pas trop... Explique-toi mieux... Je pourrai croire que tu t'étais arrangé une petite soirée…

Heiji prit une profonde inspiration, et baissa la voix.

- D'accord... mais c'est tout ce que je peux te dire... : je suis allé récupérer une disquette...

- Quoi ! Mais pourquoi...

- Kudô, je peux pas t'en dire plus ! J'ai juré ! Et puis il y a plus grave : j'ai tout compris.

- Quoi ? Tu sais qui a fait le coup ?

- Non, idiot, sinon je te l'aurai déjà dit, et je ne serai pas au bout du fil ! Aho... Un piège. On m'a tendu un piège, ou plutôt : je suis tombé dedans... On aura tué le gars et mis en place un stratagème quelconque, et il aura fallu que je tombe dedans... Maintenant, je préfère espérer cette hypothèse plutôt que la première, car ça me fait froid dans le dos de penser qu'un type barge me fasse accuser de meurtre alors que c'est plutôt mon rôle de dénoncer les crimes...

- Je vois...

- J'ai dû quitter la chambre précipitamment, Kudô. Et on aura choisi ce moment pour me faire tomber dedans...

- Pourquoi as-tu dû fuir...?

- Ah... ça... ben, euh... disons que la nuit ne fut pas de tout repos...

- Heiji..., gronda Conan

- Ok, j'ai entendu un bruit qui m'a fait flipper, voila tout.

- Quel genre de bruit ? Chute d'objet ?

- Oui. C'était le Katana... Il était tombé de son présentoir, je l'ai ramassé en vitesse, rangé, et déguerpi au plus vite. Et c'est dans ma fuite que j'ai laissé tombé ma casquette. J'ai pas pu la récupérer car quelqu'un approchait : je voyais son ombre dans l'angle du couloir de l'étage... J'ai couru direction les escaliers pour ne croiser personne, puis j'ai posé le pass sur le comptoir du concierge qui était introuvable. Puis je suis rentré à moto.

- Heiji, répète tout ça aux agents qui sont avec toi : si tu ne le fais pas, ils vont finir par t'inculper du meurtre...

- Non, car je devrai m'expliquer sur la disquette, et je ne le peux en aucun cas... Je devrais même pas savoir ce qu'il y a dessus...!

- Et où est cette disquette, à présent ?

- En sécurité. Et elle ne prouve rien, au contraire...

- Que veux-tu di...

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase. Heiji entendit un petit brouhaha dans le combiné, et une voix féminine qu'il connaissait très bien vint résonner à son oreille.

- Heiji ! C'est moi, Kazuha ! Ecoute, je sais pas dans quel pétrin tu t'es fourré, mais écoute Conan. Il a raison, tu dois tout dire ! Je croyais qu'en tant que détective, tu saurais ce genre de choses...!

- Kazuha, c'est bon, tu vas pas me faire la morale...

- Non, mais ta mère et moi on s'inquiète vraiment pour toi ! Ici c'est aussi la panique... Dis-nous au moins quelque chose qui pourrait nous aider !

- Kazuha... la personne à qui j'ai juré de garder le secret est quelqu'un de très important pour moi... Je ne peux pas trahir sa confiance... Mais c'est promis, un jour, tu sauras tout...

- J'espère bien ! Et puis je sais que tu n'es pas coupable, alors écoute moi bien, le détective Mouri et l'inspecteur Otaki vont te sortir de là, je te le jure !

Puis réalisant qu'elle s'était emportée :

- Enfin, ce que je veux dire... C'est qu'on pense tous à toi, et qu'on va faire notre maximum pour trouver qui est l'idiot qui a eu la mauvaise idée de s'en prendre à toi...

A l'autre bout de la ville, Heiji crut déceler quelques trémolos dans la voix de son amie d'enfance. Il réalisa une nouvelle fois pourquoi il tenait tant à elle. Elle l'encourageait, mais elle tremblait de peur à l'idée de le perdre. Il tenta de la réconforter.

- Mer..., commença-t-il.

- Bon, je te laisse, on doit aller chercher la preuve de ton innocence !

Elle raccrocha. Heiji mit deux longues secondes avant de comprendre, puis réalisa.

- Argh ! C'est pas vrai ! Mais quelle crétine, cette fille !

Il raccrocha de rage le combiné, sous l'oeil médusé du gardien posté à l'autre bout de la pièce, dix mètres plus loin. Réalisant qu'il était observé, Heiji se retourna et fit un mince sourire gêné envers le gardien pour s'excuser...

- Idiote ! Pourquoi as-tu raccroché ! hurla Mouri.

- Il avait certainement d'autres choses à nous dire ! l'accompagna Otaki. On ne sait même pas s'il a un avocat...

- A mon avis, je pense que si, intervint Conan pour diminuer la tension. Certainement un commis d'office... Mais ça n'est pas le plus préoccupant...

- Ah bon ? Et qu'est-ce qui ne va pas, Conan ? fit Ran en s'approchant de lui.

- Heiji a parlé d'une disquette...

- Il m'a aussi dit qu'il avait juré le secret à quelqu'un, et que cette personne était importante pour lui..., poursuivit Kazuha.

Conan et Shizuka restèrent songeurs. Otaki se demanda qui pouvait autant d'influence sur Heiji, au point de lui faire risquer la potence...

- Je ne sais pas qui est cette personne, mais elle pourrait innocenter Heiji, réalisa Kogoro.

- Oui, mais il ne veut pas trahir son secret, donc encore moins le nom de cet inconnu..., déduisit Ran.

- En tout cas, proposa Conan, si nous allions voir un peu ce qu'on peut tirer de l'ordinateur de Nagao... On trouvera sûrement quelque chose.

Tous acquiescèrent. Otaki, Kogoro et Shizuka laissèrent les enfants dans le couloir. Conan voulu les suivre, mais Ran désapprouva sa présence dans une pièce où gisait un cadavre.

- Pourquoi n'évacuez-vous pas le corps, alla demander Kazuha à l'agent en faction devant la porte de la chambre.

- A cause du défilé, lui répondit-il. Les routes sont bloquées, et l'ambulance ne peut pas circuler. Ils sont coincés dans les bouchons... Ca fait deux heures qu'on les attend... J'espère qu'il ne va pas pourrir ici...

- Non, car si la mort remonte à hier soir, vingt-trois heures trente, la rigidité cadavérique empêche toute décomposition avant la soixante-dixième heure après le décès...

Trois têtes scrutèrent d'un oeil hagard le petit garçon qui venait de parler.

- Ah... Tu te souviens, Ran, chez Monsieur Kanaya... C'est Heiji qui m'avait appris ça quand on était à la réunion des fans de Sherlock Holmes...

Ran tenta de se rappeler quand Kazuha se mit soudain à pleurer. Ran courut la réconforter, ce qui permit à Conan de respirer un peu. Mais il s'inquiéta pour Kazuha. Eclater en sanglot dès qu'on parlait de son ami ne résoudra pas le problème. Pourtant il ne pouvait rien faire en sa qualité d'enfant. Seul Heiji aurait pu la réconforter – à sa manière – mais hélas ! il n'était pas en mesure de le faire…