Toan fit un pas vers l'homme. Celui-ci l'arrêta d'un geste.

« Reste où tu es. Nous ne sommes pas dans le même monde, tu ne dois pas t'approcher

de moi, sinon tu recevras une décharge d'énergie magique.

-C'est vous qui m'avez amené ? Questionna le jeune homme.

-Effectivement. Mon portrait a été fait avec une peinture magique, qui est liée à mon

essence vitale. Elle devait répondre à ton contact. Afin d'attirer ton attention, j'ai créé

une flamme bleue magique près de l'endroit où était caché le tableau. Je devais faire

appel à toi.

-Vous avez besoin de moi ? J'en ai pourtant terminé avec la vie d'aventure… Le Génie

Obscur a été vaincu, je ne peux plus utiliser l'Atlamillia, je n'ai aucune utilité désormais.

D'ailleurs, qui êtes-vous exactement ? Comment me connaissez-vous ? Et surtout,

ajouta-t-il frappé d'une évidence… Comment un portrait de vous peut-il se trouver

dissimulé chez moi ?»

Sans répondre, l'homme se pencha et plongea son regard dans celui de Toan, avec une

intensité déconcertante.

Son regard…

Il faisait revenir des images du passé…

Tu as les yeux d'Aga, avait dit un jour un habitant du désert. C'était un grand

guerrier.

« Père… murmura Toan.

Aga, le guerrier légendaire, sourit.

-Tu as deviné. Ne demande pas pourquoi je suis parti, nous n'avons pas le temps de

discuter de ça. Comme tu t'en doutes, j'ai une mission à te confier. Tu disais tout à

l'heure que le génie Obscur avait été détruit. Ce n'est pas faux, mais son passage a

laissé des traces qui se sont combinées aux émanations maléfiques engendrées par une

autre terrifiante créature.

L'usage que tu as fait de l'Atlamillia a empiré les choses. Je sais que tu ne pouvais le

savoir, et de toute façon tu devais utiliser ta pierre pour sauver ton monde, il ne pouvait

en être autrement. Je pense qu'à présent tu va devoir repartir en aventure pour détruire

une nouvelleforme de mal encore plus puissante. Mais à mon avis, ce n'est pas pour te

déplaire…

-Effectivement, père, cette vie me manquait. Mais je pense que je devrais en savoir un

peu plus sur l'ennemi, non ?

-Je n'en sais moi-même pas grand-chose. Nous savons tout cela grâce à un oracle, et

nous savons que nous pouvons lui faire confiance. Dans quelques jours, nous t'enverrons

en mission avec tous tes vieux compagnons. Je pense que tu devrais également trouver

de nouveaux alliés un peu particuliers… »

Aga disparut, et la caverne de cristal avec lui. Toan se retrouva devant sa cheminée, un

vieux portrait à la main. Personne dans la maison ne semblait avoir rien remarqué.

« Je ne comprends pas ce qu'il a voulu dire, murmura Toan… Comment un allié

pourrait-il être plus particulier que Xiao ?

Une semaine avait passé.

Toan était dehors, près de l'étang, en compagnie de Paige, de son frère et de sa sœur.

Ils s'étaient assis et contemplaient les étoiles. Toan passa son bras autour de la taille de

Paige.

Elle soupira et posa la tête sur son épaule. Il prit garde de ne pas bouger, appréciant de

sentir la chaleur de son amie à travers sa chemise.

Il se tourna vers son frère et sa sœur :

« Eh, vous deux ! Vous savez que le maire s'est préparé des tartes aux pommes et qu'il

va les cacher dans sa cave pour les manger tout seul ? Si vous vous dépêchez, vous

pourrez en chiper une pendant qu'elles refroidissent !

-Ce vieil égoïste ! s'insurgea Goro. C'est pour ça qu'il est si gros alors qu'il prétends

faire régime ! On va lui apprendre à dire des mensonges et à ne pas partager !

-Exactement ! approuva Xiao en faisant une cabriole. Et après, on ira dans la cabane

derrière chez Dike, j'ai vu qu'il avait ramené de très jolis poissons aujourd'hui ! Je crois

que c'est pour le concours du plus grand pêcheur de tous les temps… En tout cas, ils

sont vraiment énooooormes ! Hum, allons-y, j'en ai déjà l'eau à la bouche… » ajouta-t-

elle en se léchant les babines.

Les deux enfants s'éloignèrent avec des cris et des rires.

Toan parut soulagé.

« Ouf, j'ai cru qu'ils ne nous laisseraient jamais ! Désolé pour ce pauvre Dike, je sais

que ce concours était le rêve de sa vie mais après tout, il n'a qu'à mieux cacher ses

poissons quand il sait que Xiao est dans les parages. En fait… Je voulais te dire quelque

chose…

-Oui, Toan ? murmura Paige, le regard brillant.

-Tu vois, pendant mon aventure… Je pouvais mourir à chaque instant, et à chaque fois

que je regardais un monstre dans les yeux, c'est à toi que je pensais… Je me disais que

ce serait dommage de partir sans te dire au revoir… En fermant les yeux, le soir, je

pouvais voir ton visage rayonnant, entendre ta voix mélodieuse. A chaque instant je

ressentais le manque cruel de ton absence. Tu me manquais plus que tout au monde.

-Oh, Toan… répondit Paige avec un sourire plein de bonheur. Tes mots expriment tout

ce que je ressentais lors de ton voyage, mieux que jamais je n'aurais pu le faire moi-

même…

-Paige, mon amie d'enfance, ma compagne de jeux de toujours, j'ai réalisé que ce que

je ressentais pour toi était bien plus que de la camaraderie. Paige, je…

-Chut, mon Toan… Parfois il n'est pas besoin de parler. »

Elle lui prit tendrement la main. Il lui sourit timidement, puis s'avança doucement. Les

flammes du feu de camp se reflétaient dans ses yeux. Paige ferma les siens.

Au bout d'un quart d'heure, Paige rouvrit les yeux.

-Hum… Toan ?

Elle s'étira, regarda les braises mourantes.

-Euh… Tu embrasses mal et tu as eu honte, alors tu t'es enfui, c'est ça ? Je

t'impressionne ? Ca n'est pas grave , tu sais, on peut parler hein… AU NOM DE

TOUS LES DIEUX DE CETTE FICHUE PLANETE, TOAN, EXPLIQUE-MOI

POURQUOI IL NE S'EST RIEN PASSE ! Dix ans que j'attendais ça ! DIX ANS ! Et

monsieur prend ses jambes à son cou au dernier moment !

Paige lâcha une bordée d'injures qui auraient fait dresser les cheveux sur la tête à

n'importe qui ayant assisté à cette scène, et qui étaient de toute manière peu élégants

dans la bouche d'une jeune fille. Traitant le malheureux jeune homme de tous les noms,

elle se leva et rentra chez Dike, son souteneur, qui à la nouvelle de son échec, mit de

mauvaise humeur par la perte de son poisson géant, la punit en l'enfermant à la cave au

pain sec et à l'eau, après l'avoir tabassé à coups de thon congelé (confisqué à Goro, qui

avait dévalisé la réserve de poissons le jour du remariage de tante Laura avecl'ainé des

frères Macho. Les invités en manque de poissons frais depuis trois mois avaient ravagé

l'église et terrorisé Xena, qui avait explosé les vitres du maire à coups de lance-pierres

pour passer le temps en haut du clocher sur lequel elle s'était réfugiée.).

Toan ouvrit les yeux.

A nouveau, il semblait avoir été transporté ailleurs par un sortilège.