Disclaimer : Ben voilà… C'est tout à la dame Rowling, tout tout tout… L'absence de fautes d'orthographe est à Zofia, et l'une des répliques de la fic est à elle… Et moi je prends le reste :)
RAR : J'adorerais vous répondre tous un a un, surtout que c'est le dernier chapitre, mais honnêtement… Je n'ai pas le temps. Et je suis tellement impatience de poster, vous ne pouvez pas savoir ! Bref, un milliards de mercis à G faim, OcarinaGirl, Manégaïa, flip-flop, Crookshank, Tinkerbell, marilyn manson, Ahloula, LadyRadcliffe, Lousya, Laika la Louve, Shiri, Alixe (merci pour tes conseils, je note !), Adaly, Orlina, Patacitrouille ex Alieonor, Angie Black, Florineige, Cholera, Harana, lovy, death wolf, Sith Anya, Wyneak, Angel's Eyes, Vert, SamaraXX, Titania.M, Aranyella (mon one-shot ! mon one-shot !), Floralege, Maliciamoony,Le Saut de l'Ange, Kahina, moi1992, lou, Nash, shetane, Kazy, kitou, chiffonnette, Jamesie-cass, Click La Magnifique, silversmaw et enfin à Céline, pour ses gentils mails qui m'ont troop fait plaiz !
J'eeeespère que j'ai oublié personne, pardon-pardon, sinon. Et douze millions de mercis encore !
Angoisse de l'auteuressse : Je sens que ce chapitre ne va pas plaire. Parce qu'il ne se déroule pas du tout comme les gens me l'avaient demandé. Enfin bon… On verra ;)
Spéciale dédicace : Je voudrais la dédicacer à tellement de monde que je vais en oublier pleins… D'abord et en tout premier lieu, pour KRAKY, qui le mérite bien, après tout ce qu'il m'a fait subir… Et un peu pour sa maîtresse, Zof', qui m'a tellement torturée elle aussi que je lui dois l'absence des "moins de points pour l'orthographe" sur mes copies o Ensuite, pour tous les gens de la société LJ, que j'embrasse très très fort… Et puis pour tout plein de monde encore, mais même si je ne les cite pas, ben ils peuvent ce sentir visé. Ouais. Tout le monde, il est pour toi ce chapitre.
Note de dernière minute : C'est finiiiiii ;; Et c'est bien finiiiiii… C'était ma première et ma dernière fiction. Ça me fait bizarroïde. Bref, bonne lecture quand même. ET vous savez quoi ? Chais pas si je l'ai déjà dit, mais c'est mon chapitre le plus long ! Plus de huit mille mots !
Chapitre 19
Marraines
Un courant d'air glacé traversa le dortoir des filles de Serpentard de sixième année. Il souleva les pans entrouverts dud'un lit, et arracha un grognement à son occupante qui s'enfonça dans la tiédeur de ses draps pour tenter de conserver un tant soit peu de chaleur. Ne semblant pas en trouver, celle-ci s'arracha au sommeil qui la maintenait dans son lit et se précipita vers la fenêtre grande ouverte, mais qui ne laissait pas encore paraître la lumière du jour. D'un geste rageur, elle en poussa les battants qui claquèrent avec force, ne réveillant cependant pas ses camarades de chambrée. Avec colère, la jeune fille embrassa le dortoir du regard. Pour ne pas changer, celui-ci était dans un désordre innommable. Son regard fut attiré par un des angles de la pièce, où le chaos semblait atteindre son paroxysme. Au travers des rideaux mal tirés, elle put constater que le lit était vide.
" Birds ! " murmura-t-elle hargneusement.
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La salle commune des Serpentard était silencieuse. Ce qui n'était pas étonnant, car après tout, il était six heures, et que le dimanche matin voyait rarement des élèves levés à l'aube. L'âtre de la vaste cheminée de pierres noires était sale, et une pile de parchemins, vengeance terrible d'un élève de troisième année contre un Poufsouffle coupable d'un quelconque méfait, achevait de s'y consumer.
Les reliques de la fête de la veille jonchaient encore le sol. Les elfes de maison n'étaient pas passés, et ne passeraient certainement pas, car la soirée s'était achevée à l'aube. Oui, après tout, on ne fêtait pas tous les jours une victoire 480 à 20 contre Serdaigle, chez les Serpentard. Du jamais vu à Poudlard depuis l'époque de la mémorable Hillary Green, qui avait emmené six fois Serdaigle jusqu'à la coupe, avec un inoubliable 820 à 130 contre Gryffondor. Et Serpentard, malgré sa précédente défaite, prenait la tête du championnat.
L'horloge de la salle commune siffla le quart.
Au fond de la vaste pièce, dans un recoin obscur, une élève semblait étudier.
De fait, les cheveux sombres de la jeune fille balayaient sa copie, et elle trempait d'un air pensif sa plume dans son encrier.
Cependant, son regard se perdait sur une tache que l'encre avait formée sur son devoir de potion.
Avec application, elle laissa tomber l'encre noire sur sa copie, agitant de temps à autre sa plume pour mieux éparpiller les gouttelettes.
Les sillons d'encre se rejoignaient parfois, pour se séparer plus loin. Sûrement, certaines personnes auraient trouvé cela très artistique. Peut-être que d'autres en auraient tiré quelque chose d'important. Peut-être. Ici, non.
C'était juste de l'encre en train de salir un mauvais devoir. Ça n'était qu'une mauvaise copie pleine d'encre.
Méticuleusement, elle promena son index sur la copie, traçant des cercles autour de la désastreuse note, promenant l'encre selon son gré. Elle souligna son nom avec soin, puis s'interrompit. Elle fixa une petite tache, qui s'était égarée dans l'angle supérieur du parchemin, à l'écart des autres.
" En plein dans le S de Birds " ricana-t-elle. " Sombre présage ! "
Elle s'amusa un instant à noircir d'encre l'intérieur du zéro écarlate ( " Du sang ! " prétendaient les élèves de première année, effrayés).
Elle n'avait pas sommeil. Curieusement, elle n'avait pas sommeil. Pourtant, tout son corps endolori par le Quidditch, par la longue nuit qui venait de s'écouler et par l'alcool bu quelques heures plus tôt tentait de la convaincre du contraire. Mais non. Elle n'avait définitivement pas sommeil.
Trop de choses dans la tête, peut-être. Trop de pensées, trop de sentiments, une âme peut-être trop tourmentée pour aller dormir, pour pouvoir dormir. Elle s'était crue la plus forte, la plus puissante, elle croyait que le sang de ses ancêtres, qui coulait en elle, qui faisait sa puissance et sa magie la rendait plus forte que la pierre, plus forte que la mort… Elle s'était trompée. Et elle ne commençait qu'à comprendre l'ampleur de son erreur.
Comment oublier ? Comment aurait-elle pu mettre de côté ces souvenirs si proches dans le temps, et qui pourtant lui semblaient appartenir à un autre monde ?
Il y avait quelque part, dans un autre monde, un Harry Potter qui la battait. Qui l'écrasait, même. Elle s'était crue puissante, elle s'était crue invincible, inégalable. Elle avait cru en sa victoire, elle avait cru en la facilité de cette victoire. Elle y avait cru avec une telle foi, avec une telle certitude, qu'elle n'avait pas compris la défaite. Il y avait eu quelques sorts, lancés avec mollesse, sans réelle conviction, pour s'évaluer vaguement. Puis il y avait eu la colère. La rage. La rancœur. Le dégoût. Les baguettes étaient tombées sur le sol, comme ça, sans bruit. Il y avait eu une seconde, peut-être même deux. Puis tout avait été fini. Elle n'avait rien vu venir. D'un geste brutal de la main, sa magie avait brisé la sienne. La Salamandre avait piétiné la Perdrix. Rien que d'y penser, rien que de l'évoquer, elle en rougissait. La honte la submergeait, et rien ne pouvait l'empêcher de s'y noyer. Il y avait un monde où elle perdait sans honneur ni gloire contre Harry Potter, et, bon sang, elle faisait partie de ce monde-là. Elle n'avait pas cru que la défaite ferait si mal. Elle n'avait même pas cru en la défaite.
Merlin seul savait à quel point elle s'était trompée.
Il y avait quelque part, dans un autre monde, un George Weasley qui était mort. Elle n'aurait pas cru que les jumeaux puissent lui faire aussi mal. Elle s'était crue forte, elle avait cru qu'elle pourrait mettre de côté toute son amitié pour eux pour ne pas avoir mal, elle avait cru qu'elle pourrait les oublier aussi facilement que l'on ferme une porte… Elle s'était trompée. Il y avait un monde où les jumeaux Weasley n'étaient plus qu'un, et, bon sang, elle faisait partie de ce monde-là. Elle ne pensait pas que l'absence fît aussi mal. Elle ne pensait pas que son absence ferait aussi mal.
Merlin seul savait à quel point elle s'était trompée.
Et elle se retrouvait seule.
Bien sûr, il y avait Drago et Pansy. Bien sûr. Mais ils étaient égarés face à elle, elle le savait. Ils avaient passé leur enfance ensemble, ils avaient été ses premiers camarades de jeu. D'ailleurs, Pansy avait commencé par détester Antigone. Querelles d'enfants, de petites filles égoïstes, qu'importe. L'inimitié avait été réciproque. Drago, de son côté, avait été exclusif. Lui n'avait aimé que Vidys, sa demi-sœur bâtarde tuée à l'âge de six ans par un vampire affamé.
La solitude n'avait pas touché Antigone. Elle restait seule, à les observer, jouant parfois avec Vidys, mais préférant au fond être seule.
Puis il y avait eu Poudlard, Poudlard la Grande où tout était différent, où elle était entrée laissant derrière elle tout ce qui lui faisait peur, mais qui la rassurait également. Il n'y avait plus Père, il n'y avait plus Mère. Il n'y avait plus Billie et Hailie. Juste Antigone, avec ses crises étranges, avec ses colères étranges, avec sa Magie étrange, et avec sa solitude. Il y avait eu quatre maisons, des centaines d'enfants d'horizons différents, mais elle était restée seule. On avait peut-être cru qu'elle était timide, on avait peut-être cru qu'elle avait peur des autres. Peut-être qu'elle n'avait tout simplement rien à dire, peut-être qu'elle préférait être seule. Peut-être.
Et puis il y avait eu la sixième année. Cette sixième année.
Il y avait eu la Magie, il y avait eu le Quidditch. Il y avait eu Némésis, il y avait eu une nouvelle vision de Pansy, il y avait eu la fierté involontaire de Père, il y avait eu la marque de Billie.
Et surtout, il y avait eu une amitié avec Potter, une reconnaissance de Malefoy, des lettres de Fred et Georges, un baiser de Jef.
De cela, il ne restait que des cendres.
Potter la regardait tomber, sans rien faire, sans rien dire. Il savait qu'elle tombait, il ne pouvait que savoir… Mais il ne faisait rien. Pourtant, elle avait réagi, quand lui était tombé ! Mais il ne faisait rien.
Malefoy aussi, la regardait tomber. Mais lui ne comprenait pas… Et ne comprendrait sans doute jamais.
Fred et George… Non, seulement Fred. C'est elle qui les avait chassés de sa vie. Et c'était elle qui voulait les voir… Le voir revenir.
Jef, enfin… Jef. Elle ne voulait plus de l'Islande. Elle ne voulait plus de rien, en fait. Elle ne savait absolument pas ce qu'elle voulait.
Et elle restait seule.
Un bruit, qu'elle identifia comme des pas feutrés sur le sol froid qui l'arracha à ses pensées. Des pas qui ne cherchaient pas spécialement à être discrets, mais qui n'osaient pas rompre non plus la quiétude pesante de l'aube. Puis, les pas s'arrêtèrent. Le Marcheur s'arrêta. Il y eut un temps, et enfin, le Marcheur se décida à affronter le silence de mortqui planait sur la salle commune. Sa voix s'y heurta, frêle, timide, presque inaudible, sa voix comme le glas qui sonne, sa voix troublante, dérangeante, malvenue. Le marcheur chuchota le nom de celle qui lui tournait le dos.
" Antigone. "
C'était son nom.
… Antigone.
C'est mon nom.
C'est moi. Je suis Antigone. Enfin, je crois.
Il y eut un temps, un temps où les hommes n'étaient pas des sorciers, où ils n'étaient pas des moldus, où les hommes n'étaient que des hommes. Il y eut une autre Antigone, une première Antigone. Elle mourut pour vivre. C'est idiot comme concept.
Je ne veux pas mourir, moi…
Pansy Parkinson prit place en face d'elle.
" Tu ne dors pas. " dit-elle abruptement.
" À l'évidence, non. "
" Ça n'était pas une question. "
Elles se toisèrent, puis Antigone se détourna d'elle pour se concentrer à nouveau sur sa copie.
Leurs sentiments l'une envers l'autre étaient curieux. Hier encore, il y avait entre elles ce qui pouvait le plus ressembler à une amitié. Aujourd'hui, la tension était palpable et il manquait peu de choses, elles le savaient, pour qu'elles en viennent aux mains. Alors qu'il ne paraissait y avoir aucune raison.
Pansy poussa un soupir.
" Qu'est-ce qui se passe, dans ta tête, hein ? "
Antigone redressa la tête. La question l'intéressait, car elle ne pouvait encore fournir de réponse.
Pansy attendit une réplique qui ne vint pas. Elle haussa les épaules et changea de tactique.
" Dimanche à Pré-au-Lard, ça te dit ? Drago, toi et moi. Crabbe et Goyle sont interdits de sortie depuis qu'ils ont essayé de dévaliser Zonko. "
Pré-au-Lard ? Pourquoi pas.
Elle avait raté la première balade, étant à l'infirmerie. Sortir lui ferait du bien. Elle n'avait de toute façon rien d'autre à faire, à part errer dans le château, et il était hors de question qu'un élève essaye à nouveau de lui passer au travers, la prenant pour un fantôme.
Mais elle hésitait. Elle avait peur de sortir. Peur d'affronter le monde, et sa terrible réalité. Peur de comprendre qu'il y avait une vie après Poudlard, sans doute. Mais il fallait qu'elle agisse à son tour. Il était plus que temps. Il fallait qu'elle sorte. Peut-être trouverait-elle des réponses à ses questions dehors.
Ses questions… Cette pensée lui arracha un sourire.
Depuis quand se posait-elle des questions ? À propos de quoi ? Pourquoi ? Elle ne savait pas. Elle ne savait plus. Elle ne se comprenait plus. Tous ses repères, toutes ses valeurs, tout ce pourquoi elle avait vécu jusqu'alors soulevait en elle des questions.
Et n'amenait aucune réponse.
Les heures passèrent. En attendant l'heure du départ pour le village sorcier, elle reprit malgré tout ses errances le long des couloirs de l'école, ne sachant plus où guider ses pas, ne sachant plus quel chemin choisir.
… CHOISIR…
Choisir quoi, d'abord ?
Cette pensée qui l'effleura n'était pas nouvelle. Elle devenait presque ritournelle, un leitmotiv lancinant se faufilant dans son esprit à chaque instant, revenant en écho aux battements de son cœur, aux pulsions du sang dans ses veines.
C'était un refrain qui s'était ancré en elle, et dont elle était incapable de se défaire.
Choisir, d'accord. Mais choisir quoi ?
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Une pellicule de neige sale recouvrait les rues boueuses de Pré-au-Lard. Il faisait froid. Les adolescents avaient les joues rougies, et les extrémités de leurs doigts étaient douloureuses. Les vitres des différentes échoppes étaient couvertes de buée, et celles-ci ne désemplissaient pas.
L'auberge des Trois Balais était bondée. La foule d'élèves agglutinés s'y précipitait, réchauffant tant bien que mal ses mains endolories au-dessus de grandes chopes fumantes.
" Antigone ? Tu ne bois pas ? "
Non. Antigone ne buvait pas. Antigone rêvait. Comme souvent en ce moment, d'ailleurs. La terre-à-terre Antigone se laissait emporter, et son esprit se perdait dans les conflits de son imaginaire. Pansy, indifférente, alluma une cigarette, ignorant avec superbe les reniflements désapprobateurs qui s'élevèrent des tables à proximité. Drago, l'air absent, pianotait du bout des doigts sur la table. Le bruit sembla s'intensifier autour d'eux. À leur table, le silence s'appesantit.
" Qu'est-ce qu'on s'emmerde ! "
C'était Drago qui avait parlé. Les deux autres haussèrent les épaules, indifférentes, parce que dans l'immédiat, cela leur était égal, parce qu'elles n'y pouvaient rien, et parce qu'il n'y avait, en somme, rien à dire.
C'est un instant plus tard, après qu'un silence contemplatif eût apprécié la pertinence de la remarque de Drago, qu'un Gryffondor de deuxième année surgit dans le pub en hurlant.
" Des mangemorts ! "
Et ce fut la panique.
Un sourire effleura alors les lèvres de Pansy.
" On y va ! " ordonna-t-elle en se levant.
Drago se leva à son tour, souriant lui aussi.
Antigone ne dit rien, et suivit le mouvement.
Dans le bar, l'agitation était à son comble. Avec difficulté, le trio de Serpentard se fraya un chemin parmi les étudiants terrorisés de Poudlard. Ils approchaient de la sortie quand la voix angoissée de madame Rosmerta, la propriétaire du bar, parvint à leurs oreilles.
" Où allez-vous, petits idiots ? Ne bougez pas d'ici ! Revenez ! "
Mais les avisés conseils de la femme se perdirent dans la cacophonie de la salle
"Comme si on allait porter secours à quelqu'un " marmonna Drago en poussant la porte.
Pansy pouffa. Ses yeux brillaient, ses joues étaient rouges ; l'excitation lisible sur son visage faisait plaisir à voir , et donnait presque à regretter qu'il n'y eût pas plus fréquemment d'attaques, songea Antigone.
Ils sortirent. Après tout, ce n'était pas comme s'ils couraient un réel danger… Non, ils ne risquaient rien, et ils le savaient.
Malefoy, Parkinson, Birds.
Trois noms qui faisaient trembler, trois noms qui leur assuraient protection.
La rue principale du village était déserte. " Et maintenant, que fait-on ? " semblaient-ils tous penser. D'un accord tacite, ils se dirigèrent vers l'endroit où, leur paraissait-il, provenait le plus d'éclats. Pour peu qu'il y eût autre chose que le bruit du vent.
" C'est tout de même curieux qu'il y ait deux attaques aussi rapprochées, vous ne trouvez pas ? " demanda Pansy. " Je pensais qu'Il aurait préféré attendre un petit moment que le jeu se calme, de rassembler Ses forces et de frapper ensuite un grand coup qui réduirait à néant tous les espoirs des… " Elle eut un reniflement de dédain. " Des 'gentils '. "
" C'est pour la symbolique, Pansy-chérie. Qui s'attendait à deux attaques simultanées ? Frapper sur le chemin de Traverse, c'était montrer que les sorciers n'étaient plus en sécurité nulle part, instaurer un climat de peur et de soupçon chez tous ces braves gens. Frapper à Pré-au-Lard, c'était achever de les terroriser totalement. Pré-au-Lard ! À deux pas de Poudlard, lieu ditle plus sûr au monde, où leurs progénitures sont tendrement choyées… Qui, à part les Weasley, serait assez fou pour les abandonner maintenant sous la seule protection de Dumbledore ? C'est la même ère de terreur que lors de la Première Guerre qui va s'installer. "
Pansy approuva. " Oui, cela se tient. Et puis je suppose qu'ils auraient bien aimé pouvoir profiter de l'occasion pour attraper Potter. "
" C'était un mauvais calcul, vu qu'il n'est pas à Poudlard aujourd'hui. "
" Pas à Poudlard ? " murmura Antigone.
" Oui, tu sais, parti pleurnicher avec les autres à l'enterrement de George Weasley. Voilà une tâche difficile, s'il en est, que de se débarrasser de tous les Weasley. Enfin, ça en fait déjà un de moins. "
Drago et Pansy ricanèrent. Antigone sentit ses entrailles se glacer. Que faisait-elle là, bon sang ?
Elle sentit la nausée monter en elle. Elle s'appuya contre le mur d'une maison, chancelante.
" Je vais être malade " prévint-elle. Effectivement, elle eut un haut-le-cœur et rendit l'intégralité de son petit-déjeuner.
Pansy eut un mouvement de recul, dégoûtée.
" T'es vraiment pas bien, toi, en ce moment. Tu ferais mieux de rentrer à Poudlard. "
Antigone se redressa lentement.
" Je… Non, ça va aller. " affirma-t-elle en s'essuyant la bouche du revers de la manche.
" Sûre ? " s'enquit Drago, sceptique.
" Sûre. " Soutint-elle fermement, même si tout dans son maintien, dans sa mine et dans sa respiration haletante, démentait cette affirmation.
" Alors allons-y. " Conclut Drago en haussant les épaules.
Ils repartirent, Antigone peut-être un peu plus lentement que les autres parce qu'elle avait bien trop mal au cœur pour aller plus vite.
Ils arrivaient au croisement de deux rues quand uneélève de Poudlard surgit. Il courait à perdre haleine. Sans doute n'avait-ellejamais couru aussi vite de sa vie, comme si celle-ci en dépendait - ce qui était certainement le cas, d'ailleurs. L'élève, une Gryffondor de sixième année, crut son salut arrivé quand elle les aperçut. Mais presque aussitôt qu'elle se fût allumée en elle, l'étincelle d'espoir s'éteignit. Non, ces trois Serpentard ne feraient rien pour elle.
Le mangemort surgit à son tour.
Quand Antigone le vit, un sourire effleura ses lèvres. Des mangemorts se battant au Carcon, il n'y en avait pas beaucoup.
En fait, il n'y en avait qu'une seule.
L'arme de Hailie Rosier atteignit la Gryffondor en plein dans l'estomac. Avec un cri étouffé, l'élève s'effondra sur le sol.Dans un dernier sursaut de désespoir, ou alors tout simplement grâce aux automatismes acquis en cours de Duel, celle-ci brandit sa baguette. Mais son sort n'était pas encore parti que la mort était déjà sur elle.
Le souffle court, et avec une sorte de fascination morbide, les trois Serpentard observèrent sa mise à mort.
Le Carcon s'abattit une dernière fois. Il la heurta avec précision dans le cou, presque dans la nuque en fait. Il y eut un craquement sinistre et sonore, le genre de craquement qui couvre tous les bruits, tous les cris, même ce dernier cri qu'elle poussa, et qui pourtant déchira le silence relatif de la rue, sa poitrine se souleva une dernière fois, et elle mourut.
Avec une synchronisation telle que, dans une toute autre situation, cela aurait pu paraître comique, Drago, Pansy et Antigone relâchèrent leur respiration qu'ils avaient inconsciemment retenue tout au long du combat.
Le mangemort bondit sur eux.
Toujours parfaitement coordonnés, Drago et Pansy se jetèrent chacun d'un côté, tandis qu'Antigone, sans doute grâce aux réflexes qu'elle avait obtenus au fil de ses rencontres avec la jeune aveugle, levait prestement ses deux mains pour bloquer le Carcon – l'empêchant ainsi de s'abattre sur sa tête.
Le mangemort étouffa un cri de surprise.
" Pas contre moi, Hailie ! " bredouilla-t-elle d'une voix étranglée.
La pression que le mangemort exerçait sur le Carcon s'arrêta soudainement, tandis qu'une voix furieuse sortait de sous le masque.
" Antigone ! Qu'est-ce que tu fiches ici ? "
" Venue admirer le spectacle… " Anônna-t-elle d'un air narquois.
" Tu tiens absolument à te faire repérer ? " demanda Hailie Rosier, ulcérée.
" Billie est là ? " questionna Antigone en réponse.
" Non, elle était au chemin de Traverse hier, donc aujourd'hui elle s'occupe des affaires de ton Père –et plus précisément, des transactions avec l'Islande. Si tu veux tout savoir, et bien… "
Mais Antigone avait décroché. À l'évocation des évènements qui s'étaient produits sur le chemin de Traverse, son cœur avait bondi.
Billie devait savoir. Billie devait forcément savoir.
Les mangemorts aimaient compter les cadavres qu'ils semaient, et un cadavre aussi important que celui d'un Weasley n'était sûrement pas passé inaperçu. Billie devait savoir.
Et Antigone avait besoin de connaître.
Elle se laisse emporter, suivant les deux autres sans s'en rendre compte.
George. Son meilleur ami. Son premier ami. Pour qui seul le fait de savoir rire importait réellement. Depuis quand elle-même n'avait-elle pas ri ? D'un bon rire franc et sincère ? Quelle importance… George était mort, et ne rirait plus.
Cela, soudain, la mit en colère. Elle n'aurait pas dû prêter d'importance à la mort de George, n'avoir à son égard qu'un petit souvenir nostalgique du passé. Mais non, pire que tout, il fallait qu'elle sache ; il fallait que George soit vengé, il fallait apaiser l'âme tourmentée de Fred.
Ils aperçurent bientôt trois ou quatre mangemorts combattant une McGonagall échevelée et un Flitwick furieux.
" Allez chercher de l'aide ! " leur adjurale petit professeur.
De l'aide ?
" J'y vais. " déclara-t-elle à Drago et Pansy qui hochèrent la tête, totalement indifférents.
De l'aide. Besoin d'aide.
Elle entra dans la première boutique qu'elle rencontra et se dirigea directement vers la cheminée.
" Je vais demander de l'aide. " annonça-t-elle à la vendeuse recroquevillée sous son comptoir.
De l'aide. Antigone a besoin d'aide…
" Birds' Castel " clama-t-elle avant de s'engouffrer dans les flammes vertes qui s'élevaient dans la cheminée.
… Et besoin de réponse.
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Elle surgit dans le grand Hall qui était désert, car, après tout, personne n'était attendu. Il est vrai que la plupart du temps, les visiteurs avaient le bon goût de ne pas débarquer à l'improviste chez les Birds. C'était, d'une part, le signe d'une totale incorrection et d'une grossièreté absolue, et d'autre part, très peu recommandé. Merlin seul savait sur quoi l'on pouvait tomber : Urien Birds, légèrement sensible de la baguette ; Bellorose Birds, rarement en bonne disposition avec ce qui ne faisait pas partie de son programme ; Billie, aux réactions instables (deux meurtres sur la conscience, pour peu qu'elle en ait une) ; Hailie, qui ne s'embarrassait pas de connaître le nom de ses adversaires (ou victimes) avant de lancer son Carcon.
Non, il n'était pas bon de ne pas se faire annoncer quand on venait chez les Birds.
Mais Antigone ne craignait rien. Peut-être tout simplement parce qu'Antigone était Antigone, elle ne risquait rien. Pas besoin d'explication.
Elle croisa un domestique qui parut effaré de la voir.
" Mademoiselle Antigone ? Mais que faites-vous… "
" Paix, " grogna-t-elle. " Indique-moi plutôt où je pourrais trouver Billie. "
" Mademoiselle Rosier est dans le bureau de monsieur votre père, mademoiselle Antigone. Est-ce que mademoiselle… "
" Oh, " le coupa-t-elle. " Père est avec elle ? "
" Non, mademoiselle Antigone. Monsieur votre père est avec madame votre mère dans le grand salon. Puis-je suggérer à mademoiselle… "
" Oui, allez, du vent ! " l'interrompit-elle de nouveau.
Ce court échange avec le domestique – dont elle ne connaissait pas même le nom – lui avait redonné du courage. Elle était Antigone, et elle savait ce qu'elle voulait. Et là, elle voulait savoir.
Elle espéra intérieurement que Billie serait dans l'un de ses mauvais jours. Oui, parce qu'une Billie de bonne humeur était rarement conciliante. De fait, elle prenait un malin plaisir à garder pour elle, telle une tombe, toute information tombant en sa possession, et n'en lâchait qu'avec parcimonie, en en divulguant le moins possible si cela pouvait irriter quelqu'un (surtout s'il s'agissait de sa filleule – leurs rapports étaient des plus particuliers). La mauvaise humeur lui couperait peut-être l'envie de narguer quiconque, ou lui en ôterait tout du moins la patience.
Mais Billie étant ce qu'elle était, elle en doutait fortement. Cette rencontre, qu'elle pressentait plus comme une confrontation, n'allait pas être de tout repos.
Quand elle franchit la porte du bureau d'Urien Birds, sa marraine était appuyée sur la table de bois massif, le visage penché sur ce qui semblait être une carte d'État major de l'Islande. Elle ne l'avait pas entendue entrer.
" Billie ? " l'appela-t-elle presque timidement.
L'interpellée sursauta et tourna la tête dans sa direction.
" Antigone ! " s'exclama-t-elle fortement.
Celle-ci ne savait comment réagir. Elle avait quitté sa marraine pleine de ressentiment envers elle, à cause de ce que celle-ci lui avait révélé sur les raisons de son renvoi de Poudlard, à cause du message qu'elle lui laissait, et sans doute parce qu'au fond, Antigone sentait que celui-ci n'était pas totalement infondé.
" Arrête quoi ? Tu délires, Antigone ! Ou alors tu es encore plus aveugle que Hailie ! C'est la guerre ! "
Pour ça non, Antigone ne délirait plus, ne rêvait plus, n'arrivait même plus à ordonner ses pensées. Elle venait de prendre au contraire la réalité en plein dans la figure. La mort de George avait tout balayé sur son passage. Et c'était bien en souvenir de George qu'Antigone réussit à plaquer un sourire affable et avenant sur son visage, gardant pour elle le rictus dégoûté que lui inspirait sa marraine.
" Salut Billie ! Surprise de me voir ? "
" Un peu, oui, " confirma la jeune femme. " Qu'est-ce qui me vaut l'honneur de ta visite ? "
… Un nom. Juste un nom…
" Je m'ennuyais à Poudlard, alors je me suis dit… "
" Décidément, on sort et on entre dans cette école comme dans un moulin. " Observa Billie avec un reniflement de dédain.
Antigone repoussa les idées qui lui venaient à l'esprit quant aux raisons qui auraient poussé Billie Rosier, douze ans, psychopathe, à sortir de son école. Elle s'approcha du bureau.
" Qu'est-ce que c'est ? " interrogea-t-elle en désignant la carte.
" Oh, " soupira-t-elle, " ce sont les différents accords économiques avec l'Islande, la répartition de l'administration des territoires que le pays céderait au Seigneur des Ténèbres, et les accords commerciaux entre nos deux familles. Des histoires bien trop compliquées à régler pour ce qu'elles vont réellement rapporter, si tu veux mon avis. Et puis Petra Swendenbörg prend un malin plaisir à trouver des accords avec nous et à changer d'avis au dernier moment. Ce n'est pas comme si nous en avions réellement le temps. "
" Ah bon ? Mais je croyais qu'ils nous étaient acquis, surtout depuis qu'ils savaient que je possède une force élémentaire ? C'est un atout qui a largement joué en notre faveur, non ? "
" C'était un atout, certes, mais un atout qui est entré en jeu trop rapidement. Car Petra Swendenbörg défend deux partis : celui de sa famille, qui nous est acquis, et celui de son pays, qui ne l'est pas du tout, et qui tendrait plutôt vers la neutralité. Le Maître peut beaucoup pour sa famille, mais les avantages sont moindres pour son pays.
Antigone parut étonnée : " Mais justement ! Cela assurera protection à son peuple d'être de Son côté ! "
" Oui, " admit Billie, " mais c'est l'un des rares avantages. Si être avec l'Ombre a de nombreux intérêts, notamment matériels pour les familles, cela se fait en général au détriment des populations, des enfants de moldus et des sangs mêlés. Et puis, la fin d'une guerre signifie souvent " période de crise " pour le pays, et ça, Petra Swendenbörg ne l'a pas oublié. Il est difficile pour l'Islande d'abandonner la neutralité qu'elle avait affichée lors de la première guerre, et qu'elle avait amèrement regrettée et chèrement payée pour ne pas l'avoir eue lors de l'ascension de Grindelwald. "
" Et pourtant ils ne peuvent me laisser échapper. "
" Non. " Le pli entre ses sourcils s'accentua. " Tu n'es pas unique, mais tu es le meilleur parti disponible. Il n'y a, actuellement, que quatre autres régénérateurs au monde. La seule autre femme a soixante-quatre ans. À part toi, l'unique possibilité qui s'offre aux Swendenbörg s'appelle Elizabeth, est hongroise et a vingt-deux ans. C'est une potentielle mère de régénératrice.
" Où est l'arnaque ? " demanda Antigone, intriguée.
" L'arnaque, comme tu dis, c'est que cette Elizabeth pourrait très bien avoir semé n'importe où un petit Régénérateur bâtard, et elle n'aurait alors plus aucun intérêt aux yeux des Swendenbörg. Tu es le parti le plus intéressant qu'ils aient, Antigone. Et l'Islande est ce que nous avons de mieux comme perspective, surtout en temps de guerre.
Elle hocha la tête gravement. Qu'ajouter après cela ? Elle n'avait de tout façon pas le…
Elle se souvint soudain du but de son détour par Birds' Castel.
" J'ai vuHailie, à Pré-au-Lard. C'est d'ailleurs ce qui m'a donné l'idée de passer te voir. "
" Ah oui ? Tu ne peux t'imaginer combien elle était ravie de pouvoir participer à une mission, car elle craignait d'être laissée pour compte. Elle s'entraîne depuis un mois et demi avec Bellatrix Lestrange, il ne devrait y avoir aucun souci pour elle aujourd'hui. "
" Elle a l'air de beaucoup apprécier cette Lestrange… Drago et Pansy m'ont également chanté ses louanges tout au long de l'année. "
" Oh, c'est une femme assez singulière, tu sais. C'est elle qui commandait hier le détachement du chemin de Traverse. C'était extraordinaire de la voir combattre, totalement fou ! "
Le cœur d'Antigone avait bondi. Enfin, on y était. Enfin, elle allait savoir.
Elle choisit soigneusement ses mots.
" Et alors ? Comment cela s'est-il passé ? "
" Très bien ! La population est terrorisée, le ministre est au plus bas dans les sondages, et cela sera encore pire demain. De plus, nous sommes tombés sur le groupe d'Aurors chargé de la sécurité, et pas un ne s'en est sorti. Et puis, nous avons eu Emmeline Vance, une des grosses têtes de l'Ordre du Phœnix.
Les lèvres sèches, Antigone posa avec une angoisse difficilement dissimulée la question qui la hantait.
" J'ai entendu parler d'un Weasley… ? "
" Ah oui ! L'un des jumeaux… C'est moi qui l'ai eu.
" Nous sommes en guerre, George. Si tu bases la moindre de tes actions sur la confiance, c'est mal parti. Non pas que j'aille vous trahir, loin de là, mais les choses sont claires entre nous. Je suis avec lui, et vous êtes ses opposants. L'époque où vous me souteniez et m'aidiez à résister aux colères de Père est révolue. Je suis maintenant une combattante. "
" Alors je suppose que ce sera l'une des dernières fois que nous nous verrons ? "
Elle crut qu'elle avait mal entendu. Elle avait forcément mal entendu En fait, au début, elle n'avait même pas compris le sens de la phrase. " C'est moi qui l'ai eu. " Ridicule. Aucun sens.
" Pardon ? " hoqueta-t-elle.
" Tu as parfaitement entendu, Antigone. C'est moi qui ai butté Weasley. "
Si Antigone avait réussi à sauver les apparences jusque-là, c'était maintenant fini. Elle ne pouvait que contempler avec horreur, la bouche entreouverte, Billie.
Pire que tout, elle n'arrivait pas à se persuader que cela n'était que le fruit du hasard. Elle ne pouvait se convaincre que Billie n'avait pas fait exprès de tuer George. Parce que Billie savait. Billie souriait. C'était un meurtre. Un assassinat pur et simple.
" Ça fait mal, hein ? "
… Un coup de poignard en plein cœur…
" Tu savais… Tu savais, n'est-ce pas ? "
… Les entrailles complètement gelées…
" Depuis un bon bout de temps, si tu veux savoir. J'aurais bien voulu avoir l'autre, mais il n'était pas là. Tu veux que je te raconte ? "
… Pitié… Pitié ça n'est pas possible ! Merlin !…
" Au début, il ne m'a pas reconnue. Quand je lui ai dit qui j'étais, il est resté stoïque. Quand je lui ai dit que j'étais ta marraine, c'est là qu'il a compris que quelque chose n'allait pas. "
… Mais le pire, dans cette abomination…
" Tais toi… "
… c'est de se dire que malgré tout…
" Pas envie de détails croustillants ? Tu ne veux pas m'entendre dire que j'y ai été à mains nues ? "
… j'aime Billie.
" TAIS TOI ! "
… Et cela me consterne.
" Tu es pitoyable. " éructa Billie. " Un an, Antigone ! Cela fait un an que nous t'observons, un anque tu as le cul entre deux chaises, en cherchant à faire ami-amie avec les deux camps ! Tu croyais que cela allait durer combien de temps ? "
Antigone avait les yeux qui la piquaient. C'est là qu'elle s'aperçut qu'elle pleurait. Pleurait sur quoi, pour quoi, à cause de quoi, elle n'aurait su précisément le dire. Un peu de rage, de colère, de rancœur, sans doute. Un peu de dégoût et de honte, aussi. Et également de désespoir et de tristesse. Elle pleurait sur Fred, sur George et sur tous ceux qu'elle avait comptés un jour dans ses amis : Pansy, Drago… Jeff… Harry. Elle pleurait sur Billie et Hailie qui, bordel, savaient depuis le début. Et puis elle pleurait sur elle-même, sur sa bêtise, sur sa neutralité, sur ses espoirs et ses croyances, tous aussi vains les uns que les autres, en fin de compte.
Alors, tandis qu'un éclair diffus de haine la traversait, elle fit la seule chose qui lui paraissait faisable, la seule qui lui parût logique de faire en de pareilles circonstances, dans ce genre de circonstances où l'on se rend compte qu'on n'a plus rien, que l'on est voué à l'échec.
De toute sa force, de toute son âme, de toute sa magie et de tout ce qui était en elle, Antigone se déchaîna sur Billie.
Elle était dans un tel état qu'elle ne savait guère ce qu'allait donner cette explosion, dans un tel état qu'elle se fichait de mourir d'épuisement sur le coup, dans un tel état que de toute façon elle se foutait de tout. Mais quand le flux qu'elle dirigeait droit vers sa marraine se changea en une dague d'argent, elle perdit tous ses moyens, et l'arme alla se ficher dans le mur, à un bon mètre de la tête de Billie.
Pourquoi est-ce que tout ce qu'elle avait voulu envoyer dans la figure de la Mangemort avait formé cette dague, elle n'en avait foutrement aucune idée. Mais à voir la tête qu'affichait Billie, elle, si.
Celle-ci approcha lentement sa main de l'arme enfoncée jusqu'à la garde dans le mur. Elle n'essaya pas de la toucher, ou de l'en déloger ; sa main ne fit que caresser un écrin de protection qui n'existait pas autour du poignard d'argent.
C'est là qu'Antigone reconnut le cadeau que les sœurs Rosier lui avaient fait pour ses dix-sept ans.
" Je suppose que tu te doutes que la dague vient de moi. Par contre, les sortilèges et les enchantements sont de Hailie. Je n'ai pas très bien compris en quoi ils consistaient, elle m'a parlé d'une histoire de choix… Je suppose que ça t'évoquera sans doute quelque chose.
Billie. "
" Alors… Alors c'est ton choix. Tu veux t'endormir dans des illusions, t'enfermer dans une fausse réalité ? C'est ça ? Mais tu n'as pas le droit, Antigone, tu n'as pas le droit ! Je n'ai pas fait tout cela pour RIEN ! Tu DOIS choisir ! "
Antigone bondit.
" J'ai TOUS les droits ! "
D'un ' accio ' elle rappela à elle l'arme.
" PERSONNE n'a le DROIT de me dire ce que je DOIS faire ! "
L'arme lui arriva dans la main, mais elle avait mis tellement de rage dans son sortilège qu'elle ne put que la rattraper par la lame.
" Je fais ce que JE veux ! "
Celle-ci lui entailla profondément la paume, mais elle ne sentit rien.
" Si je ne veux PAS choisir, alors je ne choisirai RIEN ! "
Puis elle attaqua Billie, le poing droit saignant…
" Et je vous EMMERDE ! "
… Et plongea le coutelas d'argent dans son ventre, s'aidant de ses deux mains du mieux qu'elle le pouvait.
Ses yeux croisèrent ceux de Billie, qui ne reflétaient rien, sinon de la souffrance, une souffrance réelle et absolue, qui faisaient seulement dire, que dans l'immédiat, le monde de Billie Rosier se limitait à cette souffrance.
Puis elle dégagea sa main du corps de Billie, et le sang jaillit enfin.
Elle en fut aspergée, l'odeur lui prit la gorge.
L'action se ralentit. Billie Rosier chancela sur le mur et finit pars'effondrer sur le sol, dans un gémissement sinistre.
Antigone se recula, dégoûtée par tout ce que sa sensibilité percevait.
Cela la dégoûtait à un tel point qu'elle se détourna du visage blême de sa marraine afin de vomir pour la seconde fois de la journée.
Puis elle se redressa, et contempla le bureau, perdue. Son regard s'égara sur la carte de l'Islande. Il y resta fixé peut-être une, deux minutes, avant qu'un bruit n'attire son attention.
C'était Billie, Billie qui se raccrochait désespérément à la vie, Billie qui avait mal, Billie qui… Sanglotait ?
Oui, Billie pleurait. Billie pleurait comme une gamine parce qu'elle voulait vivre, et que, putain, elle avait vraiment trop mal.
" Antigone… " Bredouilla-t-elle avec difficulté, parce que ses dents claquaient. " Antigone… Ne… Ne me laisse pas… Pas comme ça… T'en prie… "
Du sang et de la bave coulaient le long de son menton. Son visage, autrefois si fier, autrefois d'une beauté si arrogante, était maintenant déformé par la détresse. " Achève-moi… Pitié… Si mal… "
Antigone était pétrifiée. Elle ne pouvait la laisser ainsi… Elle sentit les larmes se remettre à couler sur ses joues. Mais il y avait George… Il y avait fort à parier qu'elle-même avait dû le laisser à une agonie atroce ; il fallait, pour que George soit vengé, qu'il y ait une égalité dans le cœur d'Antigone.
Elle lâcha enfin la dague, qui tomba sans bruit sur le sol.
Il fallait qu'elle parte. Si Père ou Mère la trouvait là, elle ne s'en sortirait pas vivante. Et si Hailie rentrait, ses options de survie s'amenuiseraient encore plus. Et, par Merlin, elle voulait vivre ! Vivre comme elle l'entendait, sans choix à faire, selon son bon vouloir.
En tuant Billie, elle vengeait Georges.
En laissant Hailie avec le cadavre de sa sœur, elle vengeait Fred.
L'égalité était respectée.
Il fallait maintenant qu'elle fuît, qu'elle parte, qu'elle disparaisse. Mais que faire ? Où aller ? Chez qui se réfugier ?
Elle se rendit compte qu'elle disposait de beaucoup de possibilités… Elle n'avait qu'à tendre la main vers l'une d'entre elles, en choisir une, et elle vivrait, et elle serait heureuse.
Mais si elle faisait le mauvais choix ?Qu'est-ce qui lui garantissait que cela ferait son bonheur ? Elle ne savait pas, et n'ayant jamais pratiqué la divination, ne pouvait pas savoir.
Et elle ne voulait pas choisir, ne voulant pas passer sa vie à brasser des regrets si ce choix se révélait mauvais.
Elle sut alors quoi faire. Cela lui parut si simple, si évident, qu'elle ne comprit pas pourquoi elle n'y avait pas songé avant.
Laissant des traces sanglantes derrière elle, elle quitta la pièce. Elle descendit l'escalier de marbre, laissant toujours des empreintes écarlates dans son sillage. Elle quitta Birds' Castel par le jardin, sans un regard derrière elle, sans se soucier de ce qu'il adviendrait du château de ses ancêtres. Elle s'en foutait.
Pour elle, une nouvelle vie commençait.
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Peut-on faire une croix sur son passé ? Peut-on tourner la page et repartir de zéro sans regarder en arrière ?
Je ne crois pas. Non, je ne crois pas.
Seize longues années ont passé depuis ma fuite des murs de Birds' Castel.
J'ai aujourd'hui trente-trois ans, et j'ai froid.
Dans le monde magique, les choses ont bougé, et bien bougé. Le Seigneur des Ténèbres n'est plus. Mon Seigneur n'est plus. C'est comme ça. Qui aurait pu croire en Potter ? Pas moi. J'avais peur de lui, mais je n'y croyais pas. Et pourtant…
Suite à la disparition du Maître, une formidable chasse aux mangemorts a été ouverte. Tous ceux que j'avais côtoyés en cours, croisés lors d'une réception, ou dont j'avais seulement entendu le nom un jour sont morts, ont été arrêtés et emprisonnés. Enfin, presque tous. Drago Malefoy et sa femme s'en sont sortis blancs comme des colombes. Un comble… Mais il ne faut pas rêver. Le système n'est peut-être pas pourri jusqu'à la moelle, mais l'argent peut tout acheter. Vraiment tout acheter. Et puis un autre Malefoy en prison, cela aurait posé tellement de problèmes… Il suffisait bien du père.
Quand Jef, à la mort de sa mère, ila été couronné, toutes les célébrités du monde sorcier étaient présentes. Notamment celle d'Angleterre, car je suis sa femme après tout.
Oui, j'ai épousé JefSwendenbörg. Cela fait maintenant quinze ans, et depuis le premier jour où j'ai posé les pieds en Islande, j'ai froid.
Nous avons un fils, Erik. Il me ressemble énormément, malgré ses grands yeux d'un brun délavé. Je songe parfois qu'il est le premier descendant d'une nouvelle lignée, mais je repousse le plus rapidement possible ces pensées, qui me ramènent à un passé que j'essaye en vain d'oublier.
Nous avons été couronnés. Il m'était étrange de réapparaître officiellement dans le monde sorcier (notre mariage ayant été célébré dans la plus stricte intimité), et d'avoir à affronter tous ces regards que j'avais essayé d'ignorer depuis tant d'années… Paradis artificiel, que celui où je vivais.
Oh, oui, qu'il a été dur, lors de cette cérémonie, où parmi tant de visages présents en un si grand nombre, il me paraissait si difficile d'esquiver le regard d'un Harry Potter, d'un Drago Malefoy, d'un Fred Weasley.
Et de ne pas contempler avec remords et regrets leurs progénitures respectives…
Le fils de Potter était alors un petit blond à l'air rêveur, affreusement timide et terriblement aimant.
Le fils de Malefoy, aussi blond que ses parents respectifs semblait tout avoir des deux amis que j'avais un jour côtoyés à Serpentard. Fier, indépendant, arrogant, sûr… Malefoy.
La fille de Fred, la peau mate de sa mère, ses yeux noirs et ses cheveux sombres, semblait assez renfermée sur elle-même, et peu versée dans l'humour. Et pourtant, un coup d'œil rapide à son père, un sourire de sa mère, une remarque de ses cousins, et la voilà qui brisait cette façade par un sourire éclatant, ou un rire magnifique.
Je crois les avoir dévorés des yeux, ce jour là, le sang pulsant bruyamment dans mes veines, tout en essayant de repousser la voix perfide qui me soufflait : " ils auraient pu être tiens, ils auraient pu être ta vie. "
Mais ce n'était pas mes enfants, ils n'étaient pas mes vies, mais en réalité rien d'autre qu'une poignante nostalgie.
Oui, je l'avoue. J'ai eu encore plus de difficultés à affronter les enfants de mes anciens amis que leurs regards. Leurs regards… Qui ne semblaient rien refléter. Ou plutôt, qui ne me parlaient pas. Ils étaient aujourd'hui devenus pour moi des étrangers.
Et, je me rends compte avec le recul, que c'est ma faute. Tout est entièrement ma faute.
Quelqu'aurait été mon choix, autrefois, ils l'auraient respecté. Mais j'ai choisi de ne pas choisir, j'ai choisi de fuir… Et j'ai disparu à leurs yeux. Je suis devenue une lâche, une inconnue, une autre.
On ne peut pas vivre sans choisir, je m'en rends compte. Pas vivre heureux, je veux dire.
Parce que l'on est heureux que lorsqu'on est libre, et parce que l'on n'est libre que lorsqu'on fait des choix.
Ce n'est qu'aujourd'hui que je comprends que ma marraine m'avait poussée de tout son être vers un choix qui n'appartenait qu'à moi, et que je n'ai su saisir. Billie a toujours cherché le meilleur pour moi, je le découvre de plus en plus chaque jour.
Billie est morte il y a seize ans, et Père est mort un an plus tard, assassiné sur l'ordre de celui à qui il avait un jour donné le titre de meilleur ami. Il faut croire que Père m'avait aimée plus qu'il n'avait voulu me le laisser croire. Mère est à Azkaban, et y survit encore, selon les dernières rumeurs. Quant à Hailie… Et bien, elle est toujours vivante, malgré la disparition de tous les gens qui avaient construit autour d'elle des murs solides ; je suppose qu'elle se languit du jour où nos chemins se croiseront de nouveau pour assouvir son besoin de vengeance. Je l'attends. J'attends ce dernier duel avec elle, où l'une d'entre nous mettra un terme à cette série de ripostes meurtrières que j'ai laissées derrière moi. Peut-être que je mourrai, peut-être pas. Ça ne me fait plus peur, aujourd'hui. Peut-être que je commence seulement à grandir…
Mais je ne suis pas malheureuse pour autant. Jef, s'il n'est pas fou de moi (ce que je lui rends d'ailleurs), est néanmoins une compagnie des plus vivables, et le trône d'Islande, malgré toutes les contraintes qu'il implique, apporte avec lui bon nombre d'aspects agréables. Et puis il y a Erik, que j'aime plus que tout. Je n'ai jamais regardé avec tant d'attention la vie d'un être. Cela me prend le cœur, de le voir grandir, s'épanouir, me dépasser et devenir homme, peu à peu. Ce n'est encore qu'un tout petit garçon, à mes yeux. Mais avec quelle rapidité me semble-t-il avoir cependant changé !
Il fait froid, ici. Depuis que je suis arrivée à Reykjavik, il me semble que j'ai froid. Et c'est sans aucune surprise que je me rends compte que je ne parviens pas à me réchauffer.
Nostalgie, quand tu nous tiens…
Malgré cela, je connais quelque chose qui va sans doute me remettre du baume au cœur. Il s'agit de Némésis Malefoy, ma filleule. Elle est devenue pupille de l'Etat, suite à la mort accidentelle de Narcissa, quand elle avait trois ans. Et –qui aurait pu souhaiter mieux pour elle ?- elle a grandi sous l'œil attentif d'Albus Dumbledore. Elle a seize ans, aujourd'hui, soit un peu plus que mon Erik. Elle doit venir, normalement, passer ses vacances de Noël au Palais. Je ne saurais dire qui, de nous deux, angoisse le plus au sujet de cette rencontre. Mais elle est importante, et essentielle, j'imagine. Et puis je pourrai enfin lui raconter des histoires. Une histoire… Mon histoire. L'histoire de cette sixième année, qui a révélé tant de choses, chez moi.
On grandit de ses erreurs, n'est-ce pas ?
Parfois, je me sens seule, face à l'immensité glacée de ce pays.
Quand Erik part pour la Confrérie des Aulnes, et quand Jefest en déplacement, alors ce vide en moi se fait ressentir de plus en plus fortement. Après tout, cela fait seize ans que Jeff me sert de bouée de sauvetage, et je me raccroche à lui désespérément un peu plus chaque jour.
Cette solitude me pèse. Je dois l'affronter partout où je vais, dans ce grand palais aux murs dénudés, où la décoration est d'une telle sobriété qu'on se croirait dans un hôpital moldu. C'est effrayant. Alors, de tout mon cœur, je cherche la compagnie de quelqu'un, je tends ma magie dans la recherche de cette personne qui pourrait m'aider à combler cette solitude. Le vent, qui bouillonne en moi, se heurte souvent au silence.
Et pourtant, quelques fois, il me semble sentir, au travers d'un lien des plus tenus, il me semble percevoir une chaleur, une flamme légère, une douceur enivrante où au cœur du silence, un ami qui m'entoure de ses bras et murmure mon nom.
- FIN –
Voilà. C'est la fin. Plus tôt que prévu, mais c'est la fin. Il fait nuit, je viens de relire la relecture de Zofia.
Je vais poster.
On se reverra peut-être, dans six jours ou dans six mois… Je ne sais pas.
Salut, et merci pour tout.
Coline la rétameuse,
MagicHappy2.
