Chapitre 9 : La mort du Monstre

Sephiroth se tenait devant l'ex-sergent. Encore une fois, il allait falloir verser le sang mais ce salaud le méritait. Avec Hojo de la Shinra.inc, Arawn était l'un des hommes que Sephiroth considérait comme lui ayant fait le plus de mal.

La mort serait encore une punition trop douce.

Mais il n'aimait pas la violence gratuite. Arawn méritait une mort douloureuse, mais Sephiroth n'avait pas pour habitude de torturer les gens. Il tuait d'ailleurs très rarement de sang-froid. Mais là l'ex-sergent ne lui donnait pas vraiment le choix. Il était une menace pour plus tard. Cette fois, le jeune homme n'aurait pas la faiblesse de lui laisser la vie sauve. Trop de mal avait déjà été fait

Cependant, cela le gênait de tuer quelqu'un au sol ainsi, désarmé. Mais il le fallait. Tout à l'heure, il avait voulu tester sur Arawn sa Limite " Destinée du Dragon Noir ", mais cela avait finalement attiré Bahamut, rendant son attaque contre Arawn impossible. Désormais, l'énergie qu'il avait accumulée pour sortir sa " Limite " s'était évaporée. Il fallait trouver un moyen plus simple.

Arawn, quant à lui, réfléchissait à toute vitesse. Qu'est-ce qui pourrait bien le sauver en un instant pareil ? qu'est-ce qui pourrait faire hésiter Sephiroth ? mais rien dans le regard de glace du jeune homme ne semblait vouloir donner de concessions.

Mais soudain, quelque chose lui vint à l'esprit.

La Pierre Nécromancienne.

Cette pierre qui lui avait fait faire tant de cauchemars cette pierre qui semblait receler un indescriptible pouvoir avait-elle assez de valeur pour l'échanger avec sa propre vie ? Il regarda une nouvelle fois les yeux de son ennemi, et le peu d'espoir qu'il avait réussi à accumuler s'envola en un instant. Pourtant, au point où il en était, rien ne coûtait d'essayer

" Sephiroth ! "

-

- Sephiroth, qu'est-ce que ma mort pourrait t'apporter, hein ?

- de la satisfaction. Du soulagement. Savoir qu'aucun autre pauvre gosse ne se fera fouetter demain, ou poussé dans un escalier pour se fracasser la tête contre une marche.

- Ce ce n'est pas de cela dont je voulais parler. Réfléchis, réfléchis me tuer ne te rendra pas la gloire, ni ce que tu aurais dû devenir mais j'ai quelque chose qui pourrait te mener sur la bonne voie ! je

- Arrête ces mensonges. Tu es pitoyable

- Je t'assure ! la Pierre celle qui m'a donné mes cauchemars ! elle elle révèle ce qu'il y a dans l'autre destin. J'en suis certain ça a de grands pouvoirs !

L'expression de Sephiroth changea légèrement. Arawn eut soudain un peu plus confiance en lui-même.

- Quelle Pierre ? où est-elle ?

- Je pense qu'elle s'appelle la Pierre Nécromancienne. Je l'ai mise dans le tiroir de la table de nuit, je

Soudain, il s'aperçut que son soudain enthousiasme l'avait mené trop loin. Sephiroth avait désormais un faible sourire. Le sourire que n'importe qui aurait à sa place. Un sourire qui signifiait " Tu t'es bien fait avoir. Rageant, hein ? "

Sephiroth s'approcha lentement de la vitre cassée du logement de l'ex-sergent, ne le quittant pas des yeux. Aucune parole n'était nécessaire : Arawn savait que s'il bougeait, il ne ferait qu'accélérer l'heure de sa mort. Pourtant

Le jeune homme, de son côté, cherchait des yeux la table de nuit. Dans un moment pareil, Arawn ne se serait pas amusé à lui divulguer une fausse information. Il l'avait vu à son visage. Quand il s'était aperçu qu'il avait fait une gaffe, en parlant trop

Il vit bientôt le petit meuble. Le tiroir était entrouvert Jetant un regard furtif à Arawn, Sephiroth se glissa de l'autre côté du lit et fouilla la table de nuit. Elle était presque vide, à part quelques mouchoirs sales et un objet dur et à la surface irrégulière il le sortit. La Pierre. Au premier abord, une simple roche grise et rugueuse, mais une rune y était gravée. Deux spirales opposées l'une à l'autre, séparée par une sorte de vague. " Les deux destins " se dit Sephiroth. Mais, occupé à ses réflexions, il n'avait plus pensé à garder un il sur le vieux militaire

Ce dernier s'était glissé jusqu'à la remise à côté de l'appartement, et sortit un pistolet d'un petit coffre. Vacillant, il se tourna vers Sephiroth.

" C'est fini, morveux. "

Le jeune homme se retourna, surpris. Il s'était fait avoir... et il était trop loin pour utiliser sa masamune tout nouvellement retrouvée. Arawn, par contre...

L'ex-sergent tira. Il rata sa cible la première fois, mais toucha son épaule la deuxième. Le sang gicla, et Sephiroth poussa un grognement de douleur.

" Arawn... c'est toi qui va... "

Le vieil homme ricana.

" Si tu bougeais moins, je pourrais viser mieux et t'aider à crever plus vite. "

L'adolescent cracha du sang. Puis il vit le vieil homme viser à nouveau.

Pas de coup de masamune.

Mais de la magie, oui.

" FEU 2 !!! "

Arawn fut pris par surprise. Le pistolet lui tomba des mains pendant que le feu gagnait tout son corps. Il poussa un cri horrible et courut dans tous les sens, la peau se carbonisant peu à peu, hurlant de douleur. Sephiroth regarda la torche humaine se cogner contre un des murs, puis trébucher dehors sur les bouts de verre tranchants.

Une mort dans la souffrance et l'agonie, c'est ça que Sephiroth avait souhaité... pour se venger de tous les coups de fouet, de tous les coups de pieds dans le visage, des semaines de torture dans les cachots de la pension... mais il aurait aimé le faire lui-même. Et bizarrement, il se rendit compte qu'il aurait finalement répugné à se salir les mains à tuer cet homme de sang-froid.

Le feu... le feu faisait ça à sa place, et bien mieux que lui. Les flammes n'ont pas de mains, et pas de conscience non plus. Qu'elles se salissent, elles.

" Sephirooooth " gémissait Arawn, se roulant à terre. " Sephiiiirr...ooooth.... ne me laisse pas... comme çaaaaa.... "

Mais l'adolescent le fixait, immobile, du mépris sur le visage.

L'ex-sergent se tordait de douleur, et son visage était à présent entièrement noir, comme ses mains. Ses habits avaient brûlé, mais son corps restait indiscernable des horribles cloques de cendre et de sang qui le parsemaient.

Le temps semblait soudain passer avec une horrible lenteur.

" Seppphhiiiii...rrooo... "

Le jeune homme avait l'impression que toutes ces années passées à subir les pulsions sadiques d'Arawn défilaient devant ses yeux.

Quand il était enfant... ces humiliations, ces coups...

Sa famille adoptive à qui il n'avait pas pu souvent penser ces derniers temps. Ces gens qui l'aimaient et dont il n'avait plus eu aucune nouvelle... Arawn interdisant tout courrier et toute visite...

Le combat qu'il avait failli gagner contre lui.

L'entraînement qui lui avait été interdit.

L'espoir de partir faire des études à Midgar.

Puis Morak, mort la tête fracassée par ce vieux pourri...

Les professeurs qui avaient tous peur de lui...

Le Gordog, Bahamut...

Puis maintenant, l'espoir de pouvoir enfin partir par la grande porte, là-bas, sans personne pour l'arrêter...

Les pensionnaires et les professeurs devaient tous être aux fenêtres à présent, mais à la vue du spectacle, personne n'avait osé descendre.

Arawn continuait de se rouler à terre, sans parvenir à se débarrasser des flammes.

" Sephhhhiiiii... rooootthh... pitiiiéééé.... "

Son corps se tordant sous l'effet de la douleur immense, sans jamais pouvoir s'évanouir... brûlé vif...

Et cette voix d'homme déjà mort, plus roque que jamais, les cordes vocales se carbonisant peu à peu...

" Seeepphiiii...r..rrr..oooo...tth.... "

L'adolescent ne put en supporter plus. Il s'avança vers lui, et d'un geste, lui enfonça la masamune dans le cur.

Arawn bougea encore un peu, puis s'affaissa subitement, les flammes lui dévorant encore le visage.

Sephiroth crut entendre un dernier murmure.

" mer...ci... "

Le monstre était mort.

Dans les flammes de son propre enfer.

* * * * * * * * * * *

La plage était plus déserte que jamais, et Vincent fixait d'un air étrange la brume qui s'étendait sur la mer. Il y avait quelque chose de bizarre... quelque chose qui ne collait pas. Intyre, à côté de lui, était assis sur un rocher.

" Le sol sablonneux est trop meuble " avait-il prétexté. Il ne supportait plus aucun contact terrien. Il disait que ses jambes se dérobaient sous lui... Kargin, de son côté, continuait de trembler comme une feuille, et Gadjaya ne faisait que jeter des regards inquiets au ciel au moindre grondement de tonnerre. Véga, quant à elle, ne disait rien. Elle semblait épuisée et perdue dans ses pensées...

Puis quelque chose attira le regard de Vincent. Là-bas, parmi la brume sur la mer... quelque chose se détachait.

" Regardez ! " lança-t-il aux autres le doigt pointé, qui suivirent aussitôt son geste du regard.

" C'est... une masse noire... " murmura Intyre.

" C'est un bateau... " lâcha sombrement Véga.

Ses membres s'étaient raidis. Elle savait quel bateau c'était... oui, ils venaient la rechercher, lui et ses occupants...

" Mais il va s'échouer s'il approche trop près de la plage ! " s'exclama Gadjaya.

" Non, vous n'avez pas compris " murmura Véga. " C'est le Zelbess. Un bateau fantôme... ne peut pas s'échouer. "

Vincent ouvrit grand les yeux. Il s'était bien douté que quelque chose ne tournait pas rond, mais pas à ce point là...

Lentement, le bateau approchait, révélant sa proue à moitié détruite par le carnage qui provoqua la mort de tous ses voyageurs...

Et sur le pont, des formes mouvantes étaient à nouveau visibles... dont une qui se détachait du reste. La silhouette floue et sans jambes lévita quelques instants, puis sembla regarder dans la direction de Véga.

" Te revoilà... " murmura-t-elle dans un souffle étrange. " On ne se débarrasse pas de moi si facilement. Nous avons à... discuter. "

Véga la fixa d'un air indécis, puis sembla soudain résignée.

" Approche. Mais jure que tu ne feras de mal à personne ici. "

Quelques secondes de silence suivirent, puis le spectre dit : " Je le jure. "

Gadjaya et ses amis ne comprirent pas le sens de la conversation qui suivit.

" Comment as-tu osé prononcer ce nom, tout à l'heure ! cracha l'ombre grise. Tu savais donc...

- Je ne le connais pas mais je m'en suis souvenue, répliqua Véga.

- Tu m'as fait très mal, tu sais. Tu utilises les cauchemars que tu fais comme arguments contre moi ! tu sais qui je suis. Je vois à tes yeux que tu as deviné.

- Explique-moi mes souvenirs sont partiels, j'ai les images sans les paroles, sans les bruits et sans les sentiments

- Les sentiments viennent peu à peu. Ce sont eux qui réveillent la terreur en toi. Les sons, par contre tu ne rates rien, il n'y avait que des cris et le bruit de la mer

Le spectre regarda pensivement au loin et son regard triste se perdit à l'horizon.

- et sa voix.

- Comment ? il n'est pas monté à bord

- Si. Il s'est entretenu avec le commandant et ensuite est reparti. Je n'avais pas compris sur le coup qu'il ne reviendrait pas

- Tu lui en veux ? demanda faiblement Véga.

Le fantôme eut un petit rire nerveux.

- Lui en vouloir ? oui et non. S'il avait été là, qu'est-ce que ça aurait changé ? il n'aurait pas pu éviter que je devienne ce que je suis

- Il aurait pu éviter la catastrophe. Sauver le bateau.

- Non. Tout avait été prévu. Il serait mort. Je suis heureuse qu'il ait pu rester en vie. Mais ce n'est pas l'avis des Autres ils veulent se venger ils ont cette haine en eux, qui les suivra jusqu'en enfer.

- N'y sont-ils pas déjà

Le fantôme plongea son regard blanc dans les yeux de Véga.

- Tu es vivante, mais tu ne " le " connais pas. Tu perds beaucoup tu as raté cette époque de gloire et de sang, d'action et de combat mais tu as la vie, oui. Je ne sais pas quel destin était le meilleur, tout compte fait. Tout a été réécrit, différemment mais aboutissant à la même chose, au fond.

- Je le verrai peut-être un jour

- Mais ce ne sera pas le même.

- Si. Si son autre âme se réveille en lui, il sera une seule et même personne.

- Alors je te le souhaite. Mais il attire la Mort, fais attention et il court en ce moment un grave danger.

L'ombre lui montra la foule grise et floue sur le pont du bateau fantôme.

- Regarde ces êtres emplis de la soif de vengeance tous veulent sa mort. Et il n'y a pas qu'eux.

Son regard se dirigea vers Intyre et Gadjaya.

- Eux, ils vont bientôt comprendre. Entendez-vous le tonnerre ? sentez-vous le sol qui bouge sous vos pieds ? et l'autre, a-t-il froid, même en plein été? il y en a encore un, il me semble, mais il n'a pas l'air d'être ici. Il aura toujours peur de se retrouver encerclé par le feu. Il aura une peur panique des dragons. Ah ! la belle affaire. Véga, tes cauchemars te suivront si tu ne m'acceptes pas.

- Comment sais-tu tout cela ?

- On apprend beaucoup au royaume des morts, tu sais. Chacun en arrivant a sa petite histoire à raconter si je viens en toi, tu sauras.

- Tu vas me donner tous tes soucis et tes remords

- Non. C'est le moyen pour toi et pour moi d'oublier ces peines qui nous poursuivent si on le rencontre enfin, tous nos malheurs disparaîtront.

- Es-tu franche ?

- Parfaitement. Après tout, pose la question à toi-même, et tu auras la réponse. Es-tu franche ? si tu l'es, je le suis aussi. Puisque nous sommes une seule et même personne

Intyre put déceler dans les yeux de Gadjaya une profonde surprise. Ainsi, elle n'avait pas remarqué l'étrange ressemblance de visage entre le spectre et leur amie le visage du spectre paraissait tout de même plus âgé. Une vingtaine d'années, peut-être Véga regarda alors le fantôme et lui dit :

- Vas-y. Reviens à moi. "

Avec un sourire triste, l'ombre se fondit en la jeune fille, formant une sorte de tourbillon tout autour d'eux. de petits débris volaient dans tous les sens, et Intyre et Gadjaya durent fermer un instant les yeux. Quand ils les ouvrirent à nouveau, le bateau fantôme avait disparu. Un brillant soleil chauffait le sable de la plage, inondant les visages d'une lumière éblouissante

" Véga soupira Intyre. Peux-tu nous expliquer ce qu'il s'est passé ? "

La jeune fille sourit.

" Normal que vous n'ayez rien compris à cette conversation mais ce serait trop long à tout expliquer. Je ne sais pas ce qu'elle a voulu dire par le sol qui bouge et le tonnerre mais ce que je sais, c'est que l'histoire n'a pas toujours été ainsi. Un jour, le destin a été changé. Je pense que cela a dû causer pas mal de chamboulement, et l'autre destin, celui d'origine, a continué à exister en parallèle au nôtre, sous forme de spectre en quelque sorte. Parfois, les âmes de ce destin originel sont tellement pleines de rancune et de sentiments forts que des brèches s'ouvrent dans le temps et dans l'espace pour les laisser passer. C'est ainsi que ce spectre que vous avez vu, c'est moi, dans l'Autre destin. Mais il est mort là-basce " moi " était sur ce bateau, le Zelbess, qui a naufragé. Maintenant nos deux âmes sont réunies. Je faisais sans cesse des cauchemars, revoyant ce bateau, que je n'avais pourtant jamais connu dans cette vie-ci.

- Elle parlait d'un homme important, dit Intyre. Qui était-ce ?

- Sephiroth... je me souviens de son visage comme si j'y étais. Il était sensé voyager sur le Zelbess, mais un imprévu l'a fait décommander. Quelques heures plus tard, le bateau a été englouti par les eaux... comme si la fureur de la mer s'était déchaînée. Une énorme vague nous a fait naufrager. S'il avait été là, il serait mort lui aussi...

- Et les fantômes des morts le tiennent pour responsable, en quelque sorte ? ils pensent que s'il avait été présent, il les aurait protégés ?

- C'est à peut près ça, en effet...

- Eh bien c'est très complexe, soupira Gadjaya. Je ne suis pas sûre de m'y retrouver... les morts vont le rechercher. Il est en grave danger. "

* * * * * * * * * * *

Sephiroth avait quitté Darkmoan depuis plusieurs heures déjà. Il voulait mettre autant de distance que possible entre ses possibles poursuiveurs et lui. Mais après le combat contre les deux monstres géants et Arawn, il doutait que quelqu'un vienne le rechercher... ou même l'approcher.

Le paysage était plat. Il ignorait où il se trouvait. Loin de Kalm et loin de Midgar... Au nord de Junon, sûrement. Mais Junon était peut-être à plus de 500 kilomètres, il n'en savait rien. Grâce au soleil, il savait qu'il marchait vers le nord. Il fallait atteindre Midgar. C'était une grande ville, il trouverait sûrement un moyen d'y survivre, de communiquer avec sa famille adoptive... mais sur la route, il y avait des montagnes, des marais, le... Zolom, ce serpent géant. Il fallait reprendre des forces en attendant.

Soupirant, il s'assit sur un rocher parsemant la forêt qu'il traversait. Une source coulait non loin de là. Il y trouverait sûrement aussi du gibier... Mais il se rappela qu'il avait toujours la pierre. Cette Pierre Nécromancienne qui l'intriguait tant... Il la prit dans ses mains.

La pierre changea brusquement de couleur. Le jeune homme la sentit, presque brûlante, entre ses doigts. Il eut envie de la lâcher mais sa main refusait de faire le moindre mouvement. C'est alors qu'il sentit son esprit se faire envahir par une sorte de brume un peu floue...

" Je dois partir pour Meridian. "

La jeune femme brune resta quelques secondes à le regarder, le regard triste.

" Vous partez pour Meridian, mon Général ? mais c'est loin... vous venez à peine de revenir de mission... "

Sephiroth fixa le ciel de Midgar quelques instants, puis soupira.

" Capitaine... je vous ai déjà dit cent fois de m'appeler par mon nom, pas par mon grade. Ça fait tellement... artificiel. "

La jeune femme esquissa un sourire et répondit : " Tant que vous vous entêtez à m'appeler " Capitaine "... "

Il tourna la tête vers elle, un peu surpris, puis sourit à son tour.

" D'accord... Ninsun. "

Ils se fixèrent quelques secondes, puis tous deux détournèrent les yeux, un peu gênés. Un silence pesant se fit, puis la jeune femme déclara :

" J'ai entendu des choses que je n'aurais jamais dû entendre... "

Sephiroth reporta les yeux sur elle, visiblement inquiet. La Shin-ra avait beaucoup de secrets, parfois bien peu nobles. Même en tant que général, il n'était pas au courant de grand chose. Son statut de " héros " que voulaient entretenir les dirigeants le mettaient à l'écart de la plupart des décisions. Il n'était envoyé que sur des missions claires et précises, en général des coups d'éclat, pour entretenir sa réputation... le reste ne lui était pas divulgué. Pourtant... il soupçonnait beaucoup de choses. Si au moins il avait le temps de faire des recherches, collecter quelques informations... mais le Président semblait ne jamais vouloir lui donner de répit. Justement peut-être parce qu'il redoutait que son Grand Général n'aille fourrer son nez d'un peu trop près dans les affaires de la Shin-ra...

" C'est une histoire grave ? " demanda-t-il, plongeant ses yeux bleu-vert dans les siens.

Elle regarda autour d'elle, méfiante. " Je préfère qu'on aille dehors. "

Il acquiesça. La Shin-ra était capable de mettre les bureaux sur écoute...

Une fois à l'air libre, elle murmura : " Vous vous souvenez de cette histoire tragique, à Corel ? la petite ville minière... "

Sephiroth hocha la tête. Il s'en souvenait hélas trop bien... il se remémorait aussi sa rage quand il s'était aperçu que tout ça lui avait filé entre les doigts. Schwarz s'était fait un plaisir de laisser filtrer l'information à l'intention de Sephiroth... une façon de lui dire " Alors, le Grand général n'était même pas au courant du carnage ? on se demande bien à quoi il sert : juste une belle façade de la Shin-ra pour cacher la misère. " Le pire était qu'il avait sûrement raison... à quoi cela servait-il qu'il aille sauver des villages des dragons, ou des innocents des bandits ? si la Shin-ra détruisait tout par derrière...

" Cette fois, ils sont prêts à recommencer avec un autre village " dit Ninsun, le regard douloureux. " J'ai entendu parler Schwarz au bar du quartier des officiers... il était totalement saoul... il disait des atrocités, mais on ne peut pas prendre de risques. Dans deux jours, il va lancer une offensive sur Sogal, un village minier, encore une fois. Le Président veut les punir pour avoir refusé de leur donner un plus gros pourcentage de leur production de mithril... il dit que c'est un signe de rébellion... "

Sephiroth ferma les yeux. Tout ça n'en finirait donc jamais...

" Sogal est sur la route de Meridian. Si vous y passez à temps... les soldats préfèreront obéir à vous plutôt qu'à Schwarz... "

Le jeune homme acquiesça.

" J'espère... "

Quand il arriva à Sogal, Sephiroth avait à peine une dizaine de soldats. La mission qu'il devait faire à Meridian ne demandait pas beaucoup de force militaire... mais maintenant, il était aux portes du village, et voyait les troupes de Schwarz arriver au loin. Plus de deux cents hommes... Il ne fallait pas d'affrontement. Mais côté intimidation, Sephiroth ne pouvait plus compter que sur lui-même...

Les villageois affolés ne savaient quelle attitude adopter. D'un côté, il y avait Sephiroth, le héros de guerre. Celui qui avait encore sauvé un village d'un dragon géant il y a à peine une semaine... mais de l'autre, il y avait tous ces soldats, qui approchaient considérablement... et à leur tête, cet homme aux traits ingrats et cruels...

" Tiens tiens... mais qui voilà... " ricana Schwarz en jaugeant Sephiroth de la tête aux pieds. " Tu as envie de te salir les mains, pour une fois ? "

Le Général lui jeta un regard glacial.

" Elles ont déjà été assez salies avec cette saloperie de guerre... Mais on dirait que tu cherches à me rattraper à ce niveau là. Tu dois être frustré d'avoir été écarté de tes fonctions à Wutai..."

Schwarz eut une grimace de rage.

" C'est toi qui as tout fait foirer. Mon plan aurait marché. Il a fallu que tu fourres encore ton nez là-dedans... Mais monsieur voulait s'accaparer toute la gloire à lui seul... le Grand Héros de guerre, avec sa petite gueule d'ange..."

Sephiroth eut un sourire cynique. " C'est sûr qu'avec la tienne... "

Le Colonel fit un geste pour le frapper, mais le Général resta immobile.

" Va crever, petit héros de pacotille... " cracha Schwarz.

Sephiroth empoigna sa masamune et répondit : " Permets-moi de mettre en doute tes dernières paroles... "

Schwarz baissa le poing, fixant l'arme impressionnante avec colère et peur à la fois.

" Sephiroth, je suis ici pour exécuter une mission... et les ordres viennent d'en haut. Tu ne pourras pas t'interposer. Si mes soldats chargent, que vas-tu faire ? tous les tuer ? pour apaiser ta petite conscience tachée de tout le sang que tu as fait couler pendant la guerre ? "

Cette dernière phrase était de trop, et Schwarz s'en rendit compte trop tard. Il avait touché le point sensible... c'était mauvais. Très mauvais pour lui. Le poing de Sephiroth se serra sur la poignée de la masamune, mais il sembla faire un effort surhumain pour se contrôler.

Schwarz recula hors de portée de l'arme et cria à ses soldats : " Ces villageois sont des rebelles ! ils ne valent pas mieux que des terroristes ! tuez-les, il faut donner l'exemple !!! "

Les militaires commencèrent à armer leurs fusils et à avancer vers le village, comme des robots télécommandés. Des cris se firent entendre dans les rues, des femmes, des enfants paniquaient, se bousculaient pour courir s'enfermer chez eux.

" NON, SCHWARZ ! ARRETE ÇA !!!! " hurla Sephiroth. Mais le Colonel continuait de le fixer avec un petit sourire en coin.

" ARRÊTEZ TOUS, C'EST UN ORDRE !!! " ordonna-t-il en se tournant vers les soldats.

La plupart stoppèrent, indécis.

" NE L'ECOUTEZ PAS ! " cria Schwarz à son tour. " C'EST MOI QUI COMMANDE ICI ! "

Mais Sephiroth était rentré au milieu du groupe de soldats. Plus personne n'osait bouger.

" MAIS QUOI, SAQUEZ-VOUS BANDE DE LARVES !!! " hurla Schwarz de plus belle.

Sephiroth lui jeta un regard assassin. " La ferme... " murmura-t-il en lançant un Foudre 3 sur le Colonel, qui s'affaissa à terre, toussant et suffoquant.

Puis le jeune homme se tourna à nouveau vers les soldats, qui le regardaient d'un air hésitant. Ceux-là sortaient directement de l'entraînement déshumanisant de Schwarz. La plupart des entraînements à la Shin-ra était un aggloméré de propagande, mais celui du Colonel était le pire de tous.

" Et ALORS QUOI ??!! " hurla soudainement Sephiroth, faisant sursauter quelques hommes. " VOUS NE VOUS DEMANDEZ PAS POURQUOI JE VOUS EMPÊCHE DE FAIRE VOTRE BOULOT ??!! ÇA NE VOUS VIENT MÊME PAS A L'ESPRIT ?! "

Silence total. Puis un des soldats dit faiblement :

" On nous en a donné l'ordre... "

Sephiroth le fixa de son regard glacial, et l'homme baissa aussitôt les yeux.

" On vous en a donné... l'ordre... " répéta l'officier supérieur en les toisant un à un du regard. " La guerre, c'est toujours sale. On ne verra jamais une guerre propre... mais dans une guerre, le devoir d'un soldat est de se battre pour un idéal, sa patrie, sa famille, sa vie... je ne vais pas vous refaire un topo là-dessus. Dans une guerre, un soldat doit se battre contre un autre soldat. Armé, prêt à mourir comme vous le seriez. Mais... "

(il se retourna et désigna la foule de gens terrorisés regroupés près de la mairie)

" ... PAS CONTRE DES CIVILS SANS DEFENSE, MERDE !!!! "

La plupart des soldats baissèrent les yeux.

" Parce que je sais que bon nombre d'entre vous ont une femme ou peut-être même des enfants, là-bas, à Midgar... " continua Sephiroth en passant devant chaque soldat. " Et alors, si en rentrant enfin chez vous, votre femme vous demande : " Tu as passé une bonne journée, mon chéri ? " et que votre gosse court pour se jeter dans vos bras, et demande : " Papa, raconte-moi ce que tu as fait ! ", qu'allez-vous leur répondre ? hein ? " Papa a passé une très bonne journée. Il en a tué des dizaines comme toi aujourd'hui, et le refera peut-être demain si on lui en donne stupidement l'ordre. " C'est ça que vous leur direz !? "

Devant le silence pesant, Sephiroth éclata :

" MAIS BON DIEU, EST-CE QUE VOUS ARRIVEZ ENCORE A VOUS REGARDER DANS LA GLACE APRES ÇA ??!!! "

Schwarz, qui s'était péniblement relevé, ricana.

" Et toi Sephiroth, tu y arrives encore ? une guerre menée à grands coups de sabre, ça a fait couler assez de sang pour repeindre en rouge les 36 étages du palais du Président... "

Le Général lui jeta un regard méprisant.

" Moi, je ne porte pas ces morts comme un trophée. C'était le sang d'hommes armés qui savaient ce qui les attendait. Mes ennemis à moi n'étaient pas des veuves et des gosses tétant encore le sein de leur mère... "

Schwarz eut un horrible sourire que détesta Sephiroth.

" Tu as dû en faire, des conneries, pour vouloir te rattraper à ce point là... "

Comme une lame de couteau en plein cur.

Pourquoi est-ce que cela...faisait si mal...

Puis il sentit une violente secousse, comme si la terre grondait.

Sephiroth ne répondit rien. Son regard disait tout...

Il y eut un silence, puis il demanda à un de ses propres soldats d'appeler le Haut commandement. Il lui fallait l'ordre du Président de retirer les troupes de Schwarz... il ne pouvait s'occuper de cela tout seul : il avait une mission à accomplir à Meridian, et il savait que dès qu'il tournerait le dos, Schwarz lancerait une offensive contre le village et massacrerait les habitants.

L'accord du Président, après maintes discussions et toute l'influence de Sephiroth, parvint enfin le soir venu. Pas question de voyager jusqu'à Meridian de nuit : il faudrait attendre le lendemain...

Quelle ne fut pas sa surprise lorsque Sephiroth, après une journée entière de voyage, découvrit Meridian-la-magnifique entièrement... rasée.

" Un tremblement de terre " déclara un des soldats en regardant d'un air atterré les immenses fissures dans le sol, et les rochers sortis de terre pour défoncer les maisons. Tout n'était plus que ruines et poussière...

A terre, des corps gisaient, sans vie...

Un caporal retourna un des corps et regarda la montre dernier cri cassée. Elle était arrêtée à la date de la veille, 14h27.

" Si nous étions arrivés dans les temps... s'il n'y avait pas eu cette histoire avec Schwarz... on serait morts nous aussi. " murmura-t-il avec un certain serrement au cur. " Le destin est... étrange, parfois. "

Sephiroth regardait l'étendue du désastre. C'était donc ça, la secousse qu'il avait ressentie la veille, à Sogal... Plusieurs soldats revenaient de leur mission d'éclaireurs : il ne semblait y avoir aucun survivant. Ou alors, ils se trouvaient sous les éboulis, et personne n'avait ici les moyens de les sortir de là.

" Et dire qu'on était venus pour tuer la Guivre qui terrorisait le village... " soupira Sephiroth. " Elle ne fera plus peur à personne... Caporal, appelez le QG à Midgar. Il faut des équipes de secours et de fouilles. "

Son regard se posa sur le corps d'un jeune homme qui gisait à terre, recroquevillé sur lui-même. Comme s'il craignait quelque chose...

" La secousse a dû être énorme. Ça a vraiment dû être traumatisant... " pensa le jeune Général en ramassant machinalement le portefeuille qui dépassait de la poche de l'homme.

Il en sortit divers papiers et une carte d'identité.

Sephiroth eut un regard triste.

" Repose en paix... Intyre Garick. "

Notes :

J'ai décidé que cette fois, je ne mettrais pas l'illusion en italique. Elle est longue, et en italique, ça fait vraiment mal aux yeux ^^'' je remettrai les illusions en italique quand il y aura des risques de confusions, mais dans ce chapitre-ci, je ne pense pas que ce soit le cas. Il n'y a qu'une seule illusion ^^