Auteur : Arsinoé de Blassenville Traduction : benebu, avril 2005

Chapitre onze : samedi à Pré-Au-Lard.

Hermione se réveilla dans un mélange d'anticipation et de pressentiment. La semaine qui avait suivi le bal avait vu quelques ajustements dans sa vie personnelle. Hermione avait été surprise de recevoir le genre d'attentions qu'elle avait toujours cru réservées aux autres filles, plus jolies. Certaines des plus jeunes filles, de Gryffondor comme de Poufsouffle, l'avaient arrêtée dans les couloirs pour lui dire combien elle était belle ce soir là, et quelques garçons en avaient fait autant, curieusement des Serdaigles pour la plupart. Harry et Ron marchaient sur des œufs avec elle, perturbés par son apparition extraordinaire, et le fait qu'elle continuait à répéter qu'elle la devait à Rogue.

Hermione avait répété le charme de Cendrillon, et elle l'avait appris à Lavande et à Parvati pour faire taire leurs cris de 's'il te plait, s'il te plait, steplait, steplait ! » Ginny s'était jointe à elles, et Hermione devait admettre que Rogue avait raison : le résultat dépendait totalement du goût et de l'imagination de celui qui le lançait. Quelques uns de ceux qu'elles obtinrent étaient ridicules, d'autres carrément obscènes. Les fille avaient trouvé même ces derniers amusants, et elles étaient restées éveillées tard le dimanche, tremblantes d'horreur et de rire, lançant de temps en temps des 'ooohh' et des 'aaahh' devant une tentative réussie. Hermione se rendit compte qu'elle pouvait facilement recréer l'allure que Rogue lui avait donné pour le bal. C'était attirant, dans un genre 'je suis une sorcière maléfique : tremblez !' Ginny se débrouillait bien, faisant montre d'un flair intéressant pour trouver les couleurs qui lui allaient. Elles avaient utilisé beaucoup de talent et de pouvoir pour un sort qu'Hermione aurait habituellement considéré comme une frivolité, et elles avaient dormi si profondément après ça que toutes avaient failli manquer leur première classe du lendemain.

Mais ce n'était pas si frivole, elle le comprenait maintenant. Etre si belle donnait à une fille un certain pouvoir, et ce pouvoir lui apportait de la confiance et de l'assurance.

Elle riait encore toute seule en repensant à la tête horrifiée de Malefoy au moment où il l'avait reconnue. D'autres Serpentards avaient réagi différemment ce soir-là. Blaise Zabini l'avait frôlée délicatement, en murmurant suavement « Très joli, Granger. » D'autre membres de la Maison du Serpent encore avaient exprimé leur appréciation de façon moins sophistiquée. En cours de Potions, le lundi, il y avait eu des remarques assez peu discrètes sur une certaine Gryffondor qui était plus à son avantage 'quand elle ne couvrait pas ses atouts'. Harry serrait les dents, prêt à exploser, mais Lily avait calmé la situation en demandant à Nott de lui donner du venin d'acromantule, et en lui murmurant quelque chose qui ressemblait à un reproche. Nott avait été sur le point de répondre par une blague idiote, quand Rogue était apparu de nulle part, et les avait regardés, faisant taire la salle.

Quand elle et Harry avaient vu Lily après le cours de Transfiguration du mercredi, elle les avait informés que Rogue avait parlé aux Serpentards à propos d'Hermione. Il leur avait dit que Dumbledore la lui avait assignée comme assistante, qu'il ne pouvait rien y faire, qu'il apprécierait que sa Maison ne lui complique pas la vie en donnant à une Gryffondor une raison d'aller se plaindre au Directeur. Mademoiselle Granger était officiellement intouchable, et à moins qu'elle ne les provoque la première, ignorer cette consigne était à leurs risques et périls.

Le vendredi, toute l'école savait qu'Hermione Granger était l'assistante du Professeur Rogue. Ron et Harry, qui le savaient depuis le début, n'en avaient pas parlé, et Harry avait apparemment réussi à persuader Ron que de continuer à s'en plaindre n'y changerait rien. Ses autres camarades Gryffondor, et les autres maisons n'étaient pas si discrètes, et elle était en permanence irritée par les regards bienveillant de compassion et les remarques bizarres d'encouragement. Certains des Serdaigles de septième année, à son étonnement, étaient jaloux. Les Serpentards, loyaux envers leur Directeur, ne disaient rien, absolument rien.

Certains aspects de sa situation s'étaient améliorés ces deux dernières semaines. Flitwick et Chourave s'étaient un peu remis de leur choc et la traitaient presque normalement. Lupin s'était toujours montré gentil, et McGonagall continuait à prétendre qu'elle et Lily étaient invisibles. Ses autres enseignants, ignorant le drame secret, étaient surpris de la nouvelle fonction d'Hermione. Vector, en particulier, semblait un peu déçu. « Si j'avais su que vous cherchiez un poste d'assistante, Hermione, il vous suffisait de venir me voir… »

« Oh, Professeur Vector ! Je n'ai rien demandé au Professeur Rogue ! Le Directeur m'a dit qu'il souhaitait que je l'assiste, et je ne pouvais pas refuser… »

Son Professeur d'Arithmancie était toujours déçu, mais il admit qu'Hermione n'aurait pas pu s'opposer à une décision du Directeur. « Quoi qu'il en soit, ma chère, si les choses ne se passent pas bien avec le Professeur Rogue, vous savez, s'il y a des difficultés, je serais très content d'avoir de l'aide. Peut-être que vous n'avez pas envisagé une carrière dans l'Arithmancie, mais vous pourriez très certainement le faire, et il y a tant d'opportunités dans ce domaine. Au Ministère, à Gringotts, dans les affaires, il y a même des sociétés privées d'Arithmancie qui seraient ravies d'avoir du sang neuf, je veux dire… » Le professeur était de plus en plus embarrassé, « que le fait que vous ne soyez pas en relation avec les plus vieilles familles ne serait pas un tel handicap qu'il pourrait l'être… oh, mon Dieu. »

« Je crois que je comprends, Professeur, » dit tranquillement Hermione.

Vector prit une profonde inspiration. « Ce que j'essaie de dire, de ma façon si maladroite, c'est que les Arithmanticiens de talent sont rares, tout aussi rares que les préparateurs de Potion de premier ordre. L'Arithmancie, comme me le répètent mes élèves, c'est difficile. Une sorcière fille de Moldus peut parfois être vue avec certains préjugés, quand elle se cherche une place dans le monde des adultes, ces gratte-parchemin du Ministère tendent à être pointilleux sur la pureté du sang, mais une arithmanticienne de qualité, surtout si elle a le titre de Maître, trouvera toujours du travail. »

« C'est bon de le savoir, Professeur. Je vous promets d'y réfléchir. »

Dans l'ensemble, cette conversation avait plutôt remonté le moral d'Hermione. Elle avait été plus effrayée et déprimée qu'elle ne l'avait admis devant personne par les prédictions de Rogue sur son manque d'opportunités pour une future carrière. Elle avait investi tant d'elle-même pour devenir une élève au dessus du lot. Dans le monde moldu, elle aurait travaillé pour être admise dans la meilleure université possible, et elle aurait eu encore quelques années pour être une étudiante exceptionnelle. Cependant, il n'existait pas d'université magiques, la population magique n'était pas suffisante pour de telles institutions. Au lieu de ça, on pouvait commencer à travailler au bas de l'échelle, comme l'avait fait Percy Weasley, ou entrer à Sainte-Mangouste pour apprendre le métier de Médicomage, ou chercher une place d'apprenti auprès d'un Maître dans son domaine de prédilection. Fred et Georges Weasley, elle s'en rendait compte, s'étaient distingués du lot en ouvrant leur propre commerce.

Le cours de Potions du vendredi avait été étrangement calme. Ils finissaient une préparation de Tonique Sanguin, et l'air du donjon était lourd de vapeurs de fer, qu'on pouvait goûter autant que sentir. Hermione entendit les murmure excités des Serpentards, qui prévoyaient de profiter au maximum de leur sortie à Pré-Au-Lard le lendemain. Depuis la grande évasion d'Azkaban, il n'y avait pas eu signe de Voldemort et de ses Mangemorts, et les gens commençaient à se complaire dans l'idée qu'ils se terraient quelque part ou qu'ils avaient fui à l'étranger, et bon débarras.

Dumbledore ne semblait pas de cet avis, cependant, et il avait pris des mesures compliquées pour assurer la sécurité des élèves. Harry et Hermione savaient que des Aurors feraient des ondes dans Pré-Au-Lard, et les Professeurs comme les élèves étaient prévenus d'être sur leurs gardes en cas d'activités suspectes.

Son vendredi soir avec Rogue fut également tranquille. Il lui parla sèchement, mais poliment.

« Voilà, » avait–il dit, en lui désignant une table de travail couverte de fleurs d'aconit.« Retirez les étamines en remuant aussi peu de pollen que possible. Réduisez-les en fine poudre avec le mortier d'or numéro 3. Pourquoi portez-vous une bague ? C'est de l'argent ? »

« De l'or blanc, Monsieur. »

« De la bijouterie moldue, » avait-il reniflé. « Retirez-la. Elle contient probablement de l'argent et du nickel, comme vous devriez le savoir. Si vous devez porter des bijoux, l'or pur est le plus stable chimiquement, et par conséquent un bien meilleur choix. Ensuite lavez-vous soigneusement les mains, si vous voulez apprendre comment préparer de la potion tue-loup. »

Elle apprenait à le connaître dans une relation face-à-face, quand il n'y avait pas de Serpentards aux alentours qu'il devait cajoler. Lentement, mais avec difficulté, elle parvenait à arrêter les questions qui lui venaient aux lèvres. Est-ce que c'était pour le Professeur Lupin ? Evidemment, Hermione, se sermonna t'elle. Ne pose pas à Rogue de questions stupides, tu sais bien que ça l'irrite. Essaie de réfléchir avant de parler.

Au lieu de babiller sur le procédé, elle passa l'heure et demie qui suivait à méticuleusement détacher les étamines et à les écraser, jusqu'à ce qu'elles soient en petits morceaux, mais pas en poudre. Puis, elle montra le mortier et son contenu à Rogue, en silence. Il le regarda avec attention, et acquiesça. « Ca ira pour le moment. Couvrez-le et posez-le là. Maintenant, » avait-il continué en attrapant son journal de potions vert, « copiez les ingrédients et les procédures dans ce livre. Je veux que vous étudiiez la procédure avec attention, afin que vendredi prochain, vous compreniez ce que nous faisons, et que vous puisiez participer intelligemment. »

Il avait marqué une pause, hésitant, et lui avait dit. « Je dois passer chez l'apothicaire de Pré-Au-Lard demain matin, pendant votre sortie. Si vous voulez apprendre quelque chose, j'y serai vers dix heures et demie, et vous auriez l'opportunité de voir l'arrivage d'imports Africains. »

Elle pensa les gens vont faire des réflexions idiotes, et je suppose que je serai traitée comme une enfant idiote. Néanmoins, elle répondit immédiatement, « Ca a l'air très intéressant, Professeur. J'y serai. »

Maintenant on était dimanche et elle était nerveuse au sujet de son rendez-vous avec Rogue, mais assez excitée en même temps. Elle se disait qu'il la considérait comme quelqu'un digne de son enseignement.

D'abord, pour apaiser ses amis, elle les accompagna à la succursale de Pré-Au-Lard de Fourniture de Qualité pour le Quidditch. Harry, de retour dans l'équipe après son interruption forcée de l'année précédente, était un Attrapeur qui avait quelque chose à prouver. Il avait tranquillement et généreusement fait profil bas pour que Ron puisse être capitaine. « Ca signifie tellement plus pour lui, Hermione, » lui avait-il confié. « En plus, un gardien voit beaucoup mieux le jeu qu'un attrapeur. C'est déjà bien que je puisse voler. » Ron n'était pas au courant du sacrifice de Harry, et il avait un peu la tête qui tournait de joie à sa nouvelle position de 'Roi du Quidditch'.

Hermione sourit malgré son ennui. Forçant ses yeux à rester ouverts pendant que les garçons listaient les qualités des gants Accrocheurs pour balai, elle regarda quelques curiosités en pensant à leurs cadeaux de Noël. A travers le vitrine, elle vit un groupe de Serpentards de sixième année qui riaient, sur le chemin de Gaichiffon. Lily était au milieu, son expression figée en un sourire réservé qu'elle arborait presque en permanence maintenant. Elle devait voir Harry et Hermione le lendemain après-midi dans la salle de lecture, pendant que Drago et les autres Serpentards seraient à l'entraînement de Quidditch. Elle avait promis à Harry de lui en dire plus sur ses premières années à Poudlard, et Dobby, maintenant au courant du secret de la salle de lecture, leur fournirait sans aucun doute un thé extravagant.

Lily en disait peu sur sa vie quotidienne avec les Serpentards, au delà du fait qu'elle s'entendait raisonnablement bien avec les autres filles. Harry avait ri de Parkinson 'face-plate', mais Lily avait fait remarquer qu'elle n'aimait pas qu'il se moque de Pansy à cause de son physique.

« Si tu penses que c'est une mauvaise personne, dis-le. Mais n'attaque pas une fille sur son apparence. C'est très méchant. Elle n'a pas choisi son visage, et si je t'accorde qu'elle serait plus agréable à regarder si elle souriait, je n'aime pas entendre un garçon se moquer des imperfections des filles. »

Hermione était d'accord. « Je déteste ça quand les gens se moquent de mes cheveux, de la même façon dont ils se moquaient de mes dents. »

« Qu'est-ce qui cloche avec tes dents ? » demanda Lily, qui ne comprenait pas.

« C'est une longue histoire, » soupira Hermione.

En s'en souvenant, elle riait encore de l'indignation de Lily en entendant l'anecdote du 'je ne vois aucune différence'.

L'entendant, les garçons se retournèrent. Ron était outragé.

« Ne ris pas Hermione ! Les Cannons vont arriver en tête du championnat cette année ! »

« Désolée, Ron, » s'excusa t'elle. Ils passèrent ensuite à Honeydukes, où elle acheta ses habituelles pastilles à la menthe dentifrices, mais au moment où les garçons s'apprêtaient à visiter Zonko, elle vit qu'il était presque dix heures et demie.

« Il faut que je fasse un saut chez l'apothicaire. Je vous retrouve aux Trois Balais pour déjeuner. »

« Qu'est-ce que tu vas faire chez l'apothicaire ? »

« Le Professeur Rogue voulait que je voie leur nouvel arrivage. J'ai pensé que ce serait intéressant. »

Harry se contenta de lever les sourcils, mais Ron jura pendant dix bonnes secondes, et avant qu'il ne puisse former une phrase intelligible, Hermione leur avait fait un petit signe et était sortie.

La boutique de l'apothicaire de Pré-Au-Lard sentait un peu comme la classe de Potions, en plus vert et plus poussiéreux. Des bocaux s'alignaient sur les anciennes étagères de chêne, et des conserves, apparemment ouvertes, mais protégées contre la contamination, contenaient des dizaines d'articles fascinants. Hermione vit Rogue, déjà en grande conversation avec le propriétaire quand elle entra. Il lui fit un léger signe de tête, et l'apothicaire, une sorcière replète, ridée, d'un âge indéterminé, lui fit un grand sourire.

« Ah, vous devez être Mademoiselle Granger ! Je suis Madame Sangsue. Le Professeur Rogue me parlait de sa nouvelle assistante. Eh bien, approchez, ma fille, je ne mords pas. »

Hermione s'approcha du comptoir, et fit un bond quand la tête rugissante d'un Tebo apparut devant elle, montrant les dents.

« Mais lui, si ! » grinça la vieille sorcière en pleurant de rire.

« Oh ! » s'écria Hermione en mettant une main sur son cœur. Elle remarqua que Rogue n'avait pas sorti sa baguette, ni même fait un mouvement.

Au lieu de ça, il la regardait calmement, et lui fit remarquer avec aigreur « Humour d'apothicaire. »

Madame Sangsue donna un autre coup à l'horrible tête empaillée montée sur ressorts, puis la repoussa dans un coin. Alors qu'elle s'essuyait les yeux avec un énorme mouchoir rouge, Rogue reprit de sa voix profonde, « Madame Sangsue, si vous avez fini de terroriser Mademoiselle Granger, j'espérais me procurer du fluide explosif urticant. »

Aussitôt, l'apothicaire redevint sérieuse, leur montrant toute une variété d'imports africains, dont certains qu'Hermione connaissait pour avoir lu leurs propriétés, mais n'avait jamais vus. Contrairement à l'ennui sans fin de FQQ, c'était intéressant, et elle trouva le rude marchandage de Rogue avec l'apothicaire tout aussi intéressant que les articles qu'elle leur montra. Elle posa à Hermione quelques questions complexes, et, faisant un signe de tête à Rogue, lui affirma, « Elle est bien cette petite. » Ensuite, rien ne pouvait faire plus plaisir à Madame Sangsue que d'appeler son assistant pour qu'il tienne la boutique, pour emmener Rogue et Hermione dans une pièce où elle gardait 'les vrais bons articles'. Que les 'bons articles' comprennent une immense phallus de serpent de mer empaillé, suspendu au plafond par magie, fut la cause d'une nouvelle hilarité.

Son marchandage terminé, et les dispositions prises pour les livraisons, ils quittèrent la boutique ensemble. Rogue était silencieux, et Hermione se sentait un peu mal à l'aise. Un groupe d'élèves, les voyant ensemble, se donnèrent des coups de coudes.

Hermione prit une inspiration, et lui dit, « Merci pour cette opportunité, Monsieur. Je sais que Madame Sangsue vous aurait envoyé ce dont vous avez besoin, et qu'il n'était pas nécessaire que vous vous déplaciez en personne… »

Rogue l'interrompit brusquement. « J'aime aller chez l'apothicaire. » C'était dit abruptement, mais avec une franchise et une sincérité qui la surprit. Rogue semblait un peu surpris lui-même, et Hermione réalisa qu'elle savait maintenant quelque chose de personnel sur son professeur redouté.

Il aime aller chez l'apothicaire.

Elle lui fit un petit sourire. « Moi aussi. »

Son visage se referma et il lâcha. « Je ne doute pas que vous retrouviez vos amis pour déjeuner, Mademoiselle Granger. Je vous suggère d'y aller maintenant. » Il se retourna et s'éloigna à grands pas, silhouette noire haute et solitaire.

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Drago l'avait invitée à déjeuner. Lily trouvait que c'était gentil de sa part, mais un peu trop. Elle avait abandonné tout espoir de pouvoir se promener un peu avec Hermione et Harry. Drago était collé à elle comme par un charme collant, et elle ne put accorder à ses amis secrets qu'un sourire discret quand le rassemblement d'élèves avait quitté Poudlard.

Pré-Au-Lard était semblable à ce qu'il était la dernière fois qu'elle était venue, un mois auparavant dans son esprit, mais il y avait vingt ans en réalité. Certaines choses avaient un peu changé, il y avait de nouveaux propriétaires dans des endroits autrefois familiers. Elle fixa les yeux sur la Cabane Hurlante, constante dans un univers qui changeait. Ils firent les magasins, visitèrent Gaichiffon, Zonko et Honeyduke (qu'elle avait toujours aimé) ; puis ils s'arrêtèrent à la librairie. Elle était tellement absorbée par les nouveautés qu'elle sursauta quand Drago lui parla, puis lui donna une petite tape amicale sur l'épaule.

« il est l'heure d'aller déjeuner. »

Elle leva les yeux, une peu choquée. « Déjà ? » Elle s'était plongée dans la lecture de l'anthropologie des la Magie Aborigène d'Australie jusqu'à en oublier où elle était.

Drago sourit, « Il est presque midi. Tu étais ailleurs. »

Elle secoua la tête pour retrouver ses esprits. « C'est vrai. »

Les Trois Balais étaient exactement comme dans son souvenir. Elle eu un petit choc en voyant les changements dans le visage de Rosmerta. Elle a pris de l'âge, mais elle a toujours de l'allure, décida t'elle.

Rosmerta leur fit un sourire professionnel, un peu effacé, et dit à Drago, « Tu peux y aller directement. »

Drago prit Lily par la main, et l'entraîna à travers la grande salle. Quelques personne se hérissèrent à la vue de Drago, d'autres chuchotèrent ; certains firent mine de ne pas le voir et tournèrent le dos. Drago les ignora, et continua son chemin jusqu'à une porte fermée.

« Un salon privé, Drago ? » demanda tranquillement Lily. « Je ne crois pas. »

Il lui fit un rictus amusé, et tint la porte pour elle. Une voix féminine, aristocratique, appela doucement de l'intérieur, « C'est toi Drago ? »

« Oui, Mère. » Il fit signe à Lily d'entrer, et alla embrasser la svelte et élégante sorcière dont le sourire parfait les accueillait tous les deux. « Et je vous présente Lily. »

Sa mère. Lily sentit ses joues rougir alors qu'elle approchait timidement la jolie femme, qui était habillée suivant la mode, mais sans ostentation. « Comment allez-vous, Madame Malefoy ? »

« Je suis si contente de vous rencontrer, ma chère, après tout ce que Drago m'a raconté sur vous. » Elle serra chaleureusement la main de Lily et lui désigna un siège à la table bien arrangée.

Sa mère ! Elle était déterminée à ne pas se laisser impressionner par Mme Malefoy, ni par ses vêtements, ni par son air supérieur de sang-pur, ni par la richesse qui transparaissait dans ses bijoux, sa coiffure, et sa façon d'offrir un déjeuner dans un salon privé pour son fils et… sa petite amie. Les lèvres de Lily se serrèrent. Il allait falloir qu'elle mette les points sur les i avec Drago, et vite.

Rosmerta elle-même fit le service : de la nourriture de bistrot élevée au paradis. Ce fut un long déjeuner. Lily se forçait à manger, même si son estomac faisait des nœuds, et si la nourriture descendait dans sa gorge comme si elle avalait des cubes. Mme Malefoy, sous couvert de bavardage poli, l'interrogeait sans merci sur sa famille, son ancienne école, ses études, ses ambitions, ses impressions sur Poudlard. Drago les regardait avec amusement pendant qu'il appréciait son repas. Lily comprit qu'elle était évaluée et examinée, et décida qu'il ne servait à rien de le prendre mal. Au lieu de ça, elle décida d'étudier discrètement Mme Malefoy à son tour.

La mère de Drago n'était pas différente des femmes de la haute société que Lily avait rencontrées dans le monde moldu. Elle se souvenait de la visite de Lady Wentworth à son école primaire, pour parler de son travail à l'étranger, et elle avait vu la famille royale à la télévision pendant toute sa jeunesse. Mme Malefoy avait la même apparence polie, méticuleusement soignée. C'était une femme pomponnée et privilégiée dont la carrière, si on pouvait appeler ça comme ça, était d'être une femme bibelot : un atout social de valeur, donnant des fêtes de choix, et patronnant des bonnes œuvres.

Quoi qu'il en soit, elle n'était pas idiote. De toute évidence, elle attendait d'une éventuelle épouse Malefoy qu'elle remplisse certains critères, mais elle n'était ni insupportablement arrogante, ni faussement amicale. L'un d'un l'autre, en tant que potentielle belle-mère, Lily supposait qu'il existait pire.

Ne lui accorde pas tant de crédit, se reprit t'elle. Elle est gentille parce qu'elle croit que je remplis son critère numéro un : elle pense que je suis une sang-pur. Elle est prête à me pardonner d'être une sorcière canadienne de province sans influence familiale, et peut-être sans fortune ; d'être une étrangère arrivée à Poudlard dans des circonstances mystérieuses. Ce qu'elle ne pardonnerait pas, ce serait qu'une sang-de-bourbe danse avec son précieux Drago : même si j'étais aussi belle que Titania, ou aussi puissante que la Reine Mab. Ce qui compte c'est que je sois une orpheline au sang-pur avec un bon pedigree. Quelle connerie.

Mme Malefoy était évidemment consciente que les perspectives de mariage de Drago s'étaient réduites de façon alarmante. Vrai, il était un Malefoy, mais il était également le fils d'un traître en fuite. Si Lucius Malefoy avait été un homme libre et un des arbitres du monde magique anglais, Lily savait que l'accueil aurait été bien plus réservé.

« C'est un endroit charmant, » observa Lily en regardant autour d'elle.

« Oui, » approuva distraitement Narcissa Malefoy. « Et c'est plus intime comme ça. Je déteste être dévisagée, maintenant que… » sa voix mourut, et elle regarda fixement son assiette.

Lily ressentit une bouffée de compassion. Quoi qu'ait fait le père de Drago, ça semblait injuste que sa famille ait à en souffrir. Oui, mais si quelques regards de travers sont tout ce qu'elle subit, elle s'en sort mieux que les victimes des Mangemerdes ! Oh, mon Dieu, il faut que j'arrête de penser à eux par ce nom. Je vais le dire tout haut au pire moment.

Mme Malefoy leva les yeux un instant plus tard, avec un grand sourire. Drago pressa la main de Lily sous la table, et le reste du déjeuner se passa sans incident.

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« Un déjeuner avec Mme Malefoy, Lily ? » s'esclaffa Harry. « Alors on traîne dans la haute société maintenant ? » C'était un thé complètement fou, échevelé dans la salle de lecture. Dobby ne savait pas faire les choses à moitié : la table était couverte de scones, de crème, de merveilleux biscuits au chocolat, et de délicieux sandwiches. Chacun était de la taille d'une bouchée, mais le plateau était si énorme que ça faisait un certain nombre de bouchées tout compte fait. Hermione se demanda si elle serait capable d'avaler quoi que ce soit au dîner.

Lily était rose d'embarras et de rire. Hermione remarqua qu'elle s'asseyait toujours dos au tableau de la bibliothèque de Poudlard. Le tableau avait l'air abandonné, sans son occupante, et Hermione ne se demanda pas pourquoi Lily évitait de le regarder. Si j'avais passé vingt ans dans une bibliothèque à lire Orgueil et Préjugés, j'en aurais marre moi aussi.

« Elle n'a pas été si méchante. »

« Je peux comprendre pourquoi, » affirma Harry. « Dans le petit cercle des personne qu'elle juge digne de vivre, elle est certainement très bien. Je me souviens l'avoir vue à la Coupe du Monde de Quidditch. Je me suis dit qu'elle était belle, sauf qu'elle se comportait comme si elle quelque chose sentait mauvais. Certainement que cette chose, c'était moi. »

« Au moins rien d'horrible ne s'est produit. Pas de Mangemorts qui lançaient des sorts ! » Hermione frissonna, et rappela à Harry. « On était sur le point de parler à Lily du retour du Club de Défense. »

Le visage de Harry s'éclaira. « C'est vrai ! Nous aurons des réunions régulières maintenant que le club est officiel. Le Professeur Lupin a accepté de le superviser, et nous nous réunirons les mardis soir. »

« Harry est un merveilleux professeur, » dit Hermione à Lily, en ignorant le visage soudain rouge de plaisir de Harry. « Tous les membre du club de Défense ont eu de super notes à leur BUSE de Défense. »

Lily commença à être contaminée par leur excitation. « J'ai vraiment hâte de venir ! Je trouve que Poudlard devrait avoir plus de clubs. Ca permettrait aux Maisons de se mélanger plus, et les élèves pourraient mieux se connaître. »

Harry et Hermione échangèrent un regard gêné. Que diraient les autres en voyant arriver une Serpentard ? Hermione allait expliquer la situation délicate à Lily, qui comprendrait certainement. Harry, cependant, prit une autre décision.

Il dit avec conviction, « Nous serons ravis de t'y accueillir. J'espère que ça ne te créera pas d'ennuis : Malefoy risque de t'envoyer ses sbires. » Et il perdra son intérêt pour toi s'il se rend compte que tu n'es pas une potentielle Mangemort. C'était une chose de savoir que Lily essayait de gagner la confiance des Serpentards, et c'en était une autre de la voir danser avec Drago Malefoy.

Lily commençait à comprendre, et Hermione expliqua posément, « Nous n'avons jamais eu de membres de Serpentard. Ça devait rester secret l'an dernier, alors nous n'avons invité que des gens que nous pensions fiables. »

« Et tous ne l'étaient pas, » lui raconta amèrement Harry. « Hermione a créé la plus jolie malédiction que j'aie vu sur ce rat de Marietta Edgecombe. »

Lily leva les sourcils, interrogative. Hermione expliqua. « Quand elle est allée tout raconter à cette révoltante Ombrage, des boutons sont apparus sur son visage formant le mot CAFARD. »

Lily éclata de rire. « C'est brillant ! Tu es une vicieuse, et mon idole ! » Elle se calma, et demanda, « Vous êtes sûrs de vouloir que je vienne ? C'est comme faire entrer le loup dans la bergerie. Tant qu'on y est, je peux amener du monde ? Je peux feindre d'ignorer la politique de ma Maison, et dire que je veux améliorer mes capacités en Défense. »

Harry grimaça. « Ca me semble idiot d'entraîner mes pires ennemis. » Dans un flash de souvenir, il vit devant lui un Rogue en colère, hissant « Vous lui donnez des armes ! »

Lily dit gentiment, « Harry, ça me semble encore plus stupide de laisser croire à tous les Serpentards qu'ils n'ont nulle part où aller mais dans les rangs de Voldemort. Ils ne disent rien, mais je sens bien que tous ne sont pas des supporters de Oldyfart. »

Il haussa les épaules. « Sois prudente. Quand tu seras venu à une réunion, ça se saura. Peut-être que ce serait une bonne chose que tu amènes du monde en renfort. »

« Ou pour surveiller tes arrières, » ajouta Hermione avec un frisson.

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Le mardi soir, les anciens membres de l'Association de Défense ( nom public de ce groupe) se réunirent dans la salle de classe de Défense. Harry fit un signe de tête distant à Cho quand elle arriva, nerveuse, et sans Marietta. Hermione savait qu'il n'avait pas pardonné à Cho pour ce qu'il considérait comme sa trahison de l'année passée, mas elle était bonne élève, préfet en chef cette année, en fait, et par conséquent elle était non seulement une bonne publicité pour le club, mais aussi un membre dont le Patronus en forme de cygne avait inspiré les autres.

Harry approcha le Professeur Lupin, qui regardait sans s'interposer du bord de la salle. « Professeur, quand allons-nous commencer ? Je pense qu'on n'attend plus que quelques personnes… »

« Harry, je suis juste ici pour vous soutenir. C'est un club d'étudiants. C'est une bonne opportunité pour vous de pouvoir travailler ensemble, et je ne veux pas changer ce qui a si bien fonctionné l'année passée. » Il regarda pensivement autour de lui, et poursuivit. « Si j'étais toi, je commencerais à discuter avec eux, pour voir un peu comment ils veulent s'organiser. »

« Dieu du ciel ! » s'écria Ron, qui était près de la porte, avec surprise. « Stupefix ! »

« Ron ! » le gronda Lupin, trop tard. « Baisse ta baguette tout de suite ! »

Hermione et Harry jouèrent des coudes dans le groupe qui se formait devant l'incident, et virent Lily, Blaise Zabini, Millicent Bullstrode, et quatre Serpentards de cinquième année, la baguette à la main, se défendant contre l'attaque soudaine.

« Protego ! » contra Lily, son charme de bouclier les protégeant, elle et ceux qui se trouvaient derrière elle. A ses côtés, Blaise Zabini avait lancé un autre contresort, dont le reflet bleu métallique se reflétait lividement sur leurs visages.

Harry arriva derrière Ron, tirant en arrière le bras qui tenait sa baguette. « Ron ! Tout va bien ! Ils ont le droit de venir ! »

Ron se retourna vers lui, son visage déformé par la colère. « Des Serpentards ! Tu es devenu fou ? Ils sont tous de son côté ! »

Lupin était venu s'interposer. « Ecoutez maintenant ! Vous tous ! C'est un club officiel de Poudlard. En tant que tel, tout élève qui le désire peut y participer. C'est ce qu'à décrété le Directeur, et j'attends de chacun de vous que vous respectiez sa décision. » Les élèves rechignaient et chuchotaient entre eux. Lupin fit un regard encourageant à Harry, puis se tourna vers les Serpentards, qui se tenaient sur le pas de la porte avec inquiétude.

« Mademoiselle Jones, Monsieur Zabini, Mademoiselle Bullstrode. Et Lark Moran, Strabo Bletchley, Améthyste Grimstone, et Caius Llewellyn. »

Harry fit un pas vers eux, et dit, suffisamment haut pour couvrir les murmures. « Bienvenue à l'Association de Défense. »

« Merci, » répondit Lily avec un grand sourire, et seulement une légère retenue dans la voix.

Blaise Zabini, avec un aplomb sans faille, tendit la main à Harry. « Je vois que vous ne plaisantez pas avec les retardataires, Potter. Ça ne se reproduira plus, je te l'assure. »

Ron renifla avec dégoût.

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nda : JKR est ma source concernant le fait que tout comme il n'existe pas d'écoles primaires pour les sorciers, il n'y a pas non plus d'universités. Peut-être qu'elle a changé d'avis depuis que j'ai lu cette inteview, mais c'est vrai, lapopulation magique de Grande-Bretagne est simplement trop peu nombreuse. Il suffit de regarder la taille du Chemin de Traverse, la taile de Pré-Au-Lard, qui est le seul village magique d'Angleterre, et le fait qu'il n'existe qu'un seul hôpital magique. JKR ne donne pas à penser qu'il puisse y avoir une autre éole de magie en Grande-Bretagne, et je ne crois pas me tromper en pensant qu'il n'y en a pas d'autre. C'est une très, très petite population isolée, qui ne comporte pas plus d'individus en tout qu'une petite ville. A cause de la durée de vie des sorciers, la répartition des âges de la population est différente de celle des moldus. Le monde magique est dominé, et gouverné, par les plus âgés, qui sont probablement en poste depuis plusieurs dizaines d'années. Je me suis toujours demandé si Tom Jedusor, en quitant l'école pour voyager dans le monde au lieu de suivre le chemin habituel et de devenir apprenti ou de commencer à travailler au bas de l'échelle dans une institution, ne cherchait pas autant à trouver un moyen de contourner la gérontaocratie qu'à trouver une façon de repousser la mort.

Prochain chapitre : débat à Serpentard. La maison Serpentard se dispute au sujet de l'Association de Défense. Lily expose quelques une des ses idées sur les véritables motivations de Voldemort à ses camarades.