auteur : Arsinoé de Blassenville
traduction : benebu, Avril 2005
Chapitre treize : des invités inattendus.
« Narcissa ! »
Le cri fit sursauter Narcissa Malefoy dans son luxueux lit solitaire. Elle était sûre que c'était un rêve. Elle entendait souvent sa voix dans ses rêves, et il était difficile de faire la différence aux heures les plus noires de la nuit.
« Narcissa ! »
Elle se leva dans le noir, saisissant sa baguette. « Lucius ? »
La porte de la chambre s'ouvrit à la volée, et elle voyait sa silhouette contrastant avec l'éclairage des chandeliers du couloir. « Lumos ! » cria t'il avec impatience. « Nous partons ! »
« Lucius ! » Elle jeta ses bras autour de lui. « Tu vas bien ? » Elle l'inspecta, et décida que ce n'était pas le cas. Blessé, échevelé, et du sang coulant d'un blessure à la tempe, il était dans un état de concentration intense qu'elle ne lui avait vu que peu de fois dans leur vie commune.
« Lucius ! Tu ne peux pas être là ! Tout le monde te cherche… »
il eut un rire forcé, et balaya la chambre du regard, et alla jusqu'à un pied de lit duquel il retira quelques objets qu'il plaça dans sa cape souillée.
« Tu as raison, et pas qu'un peu. Ta saleté de sœur a convaincu le Seigneur des Ténèbres que nous complotions contre lui ! » Il la regarda, elle était vêtue d'une chemise de nuit fine, à moitié transparente. « Tu as ta baguette ? Ca ira ! Approche ! » Il l'attrapa par la main et l'attira dans le grand couloir orné de tapisseries. « Accio Nimbus ! »
En quelques secondes, un coûteux balai apparut, flottant directement vers eux. Malefoy le saisit d'une main experte et serra sa femme contre lui, un bras autour de sa taille. Dehors, il y avait des clameurs et les barrières de protection de leur demeure grinçaient en protestation.
« Il est là ! »
Les premier 'pop' se faisaient entendre autour d'eux, quand Malefoy les fit Transplaner ailleurs tous les deux. En l'espace d'une seconde, Narcissa Malefoy se retrouva pieds nus dans l'herbe, un vent violent rabattant une pluie glaciale. Le paysage arboré lui semblait familier. Rapidement, elle se lança un charme de réchauffement, et regretta de n'avoir pas pris le temps de mettre ses pantoufles.
« Je peux Transplaner moi-même, tu sais, » fit-elle remarquer d'assez mauvaise grâce.
« Oui, oui, oui, bien sûr que tu peux, mon amour, » répondit-il avec impatience, en montant sur son balai. « Monte sur le balai comme une gentille fille et on file. »
« On file où ? » Se sauver était une attitude d'adolescents, et non de piliers de la société magique anglaise. Surtout un pilier vêtu de façon aussi inappropriée qu'elle l'était. Dans un endroit chaud, j'espère.
Il cria, à bout de nerfs. « Monte sur cette saleté de balai ! »
Elle obéit instantanément, rassemblant les pans déjà trempés de sa chemise de nuit pour chevaucher le balai. Instantanément, douloureusement consciente qu'elle ne portait pas de sous-vêtements, elle lança un charme matelassant, et entendit avec indignation son mari ricaner. Il décolla brusquement, dans un élan qui la força à se cramponner à lui.
Le vent froid les fouettait, claquant les cheveux de Lucius dans le visage de sa femme. « Où allons-nous ? » demanda t'elle de nouveau.
« A Poudlard ! »
C'était leur seule chance, avait-il conclu. Ses caches à Malte et à Bali ne feraient que repousser l'inévitable, ou au mieux, ne lui permettraient qu'un existence diminuée et disgraciée, loin de tout ce qui lui était cher. Il avait des informations. Il pouvait passer un marché avec Dumbledore, il pouvait se sauver, sauver sa famille, et retrouver une vie qui méritait d'être vécue. Aller au Ministère était hors de question : il était miné de suivants de Voldemort, et il serait renvoyé à Azkaban, cette fois-ci en compagnie de Narcissa.
Il poussa son balai jusqu'à ses limites, avec un peu du panache de ses jours en tant qu'Attrapeur. Son plan improvisé fonctionnait à merveille : apparaître à la limite de Poudlard, puis voler vers le château aussi vite que possible. Ses liens avec le Seigneur des Ténèbres étaient irrémédiablement coupés, et il était habité d'un glorieux sentiment de liberté. Après tout, un sorcier, un sorcier puissant comme lui-même, n'avait besoin que de peu. Il avait sa baguette, son balai, et sa femme : il pouvait charmer, invoquer, transfigurer ou conjurer tout le reste. Filant à travers le vent, les bras de Narcissa autour de lui, il pouvait apercevoir, difficilement au début, mais de plus en plus nettement, les lumineuses tours de sa destination.
-------
« Oh, crotte, crotte, et re-crotte ! » La pulpe gluante lui échappa de nouveau, se répandant en une tache humide sur le sol. Rapidement, Hermione la ramassa, espérant que Rogue n'avait pas vu ses tâtonnements. Elle jeta un regard vers sa table de travail, où il remuait patiemment une potion. Il ne l'avait pas réprimandée pour sa maladresse, mais elle croyait détecter l'ombre d'un sourire au coin de ses lèvres. »
« Surveillez votre langage, Mademoiselle Granger. »
« Désolée, Monsieur. »
Elle devrait éplucher un autre quarbal, le désastre qui lui restait était maintenant inutilisable. Eplucher les grains humides lui procurait une substance comparable à de la gelée de raisins fondue. Comment était-elle supposée la découper en dés ? Les gants de protection rendaient ses mouvements encore plus compliqués. Elle avait besoin de regarder une fois de plus les instructions, mais elle n'osait toucher ni ses notes ni sa baguette avec de la bouillie violette qui lui coulait des doigts.
Il était définitivement en train de sourire. Quel homme insupportable. Il avait fini de remuer, et décantait sa potion parfaite avec l'air vertueux d'un génie forcé de supporter ses inepties. Il doit y avoir un moyen plus facile de faire ça ! La mâchoire serrée, elle nettoya sa surface de travail, détacha un autre grain, et prépara son couteau. Une coupe franche, comme ça…
Un jet de jus violet visqueux l'éclaboussa dans l'œil. Elle poussa un petit cri, et courut se laver le visage.
Rogue fut à côté d'elle en un instant, penchant sa tête en arrière. « Laissez-moi voir. » Il la tenait fermement, et ouvrit son œil papillonnant. « Pas de mal, mais vous aurez un iris d'un violet radieux pendant quelques jours. »
Il était à quelques centimètres, l'examinant avec attention. Son odeur lui était familière. Ça faisait des années qu'il se penchait sur elle, et elle aurait pu identifier cette odeur de Roguité aux essences alcalines d'herbes et d'huile les yeux fermés. Son nez paraissait encore plus grand, vu de si près. Elle réfréna un rire à la vue de ses vastes narines.
« Ô joie ! »
Il la relâcha et sourit légèrement. « Ca donne une physionomie remarquable. » Il prit un livre sur son bureau. « Lisez le chapitre intitulé : 'Comment éplucher un quarbal'. Vous le trouverez révélateur. »
Elle retira ses gants et prit le livre, le posant avec le reste de ses affaires.
« Non, » observa sèchement Rogue. « Ne l'ajoutez pas à votre montagne de livre. Lisez-le ici. Il est très rare, et je ne veux pas m'en séparer. »
« Il doit être rare. Je n'avais jamais entendu parler d'un quarbal avant aujourd'hui. »
« C'est une plante obscure mais utile, que l'on ne trouve qu'aux Comores. Il n'y a qu'un fabricant de potions sur cent qui en ait entendu parler, mais c'est un parfait substitut à l'euphorbe, sans toutes les toxines. »
« Sauf que ça rend les gens violets. »
« Il y a ça aussi. »
Elle s'était adaptée. Au début elle endurait ces vendredis. Puis, elle les avait trouvés stimulants. Maintenant, elle les attendait avec impatience, comme le point d'orgue de sa semaine. Rogue lui criait parfois dessus quand il pensait qu'elle se montrait particulièrement obtuse. Généralement, elle faisait un effort considérable pour éviter cela et se préparer pour les efforts du vendredi soir.
Elle avait été si fière d'apporter la production du mois de Potion Tue-Loup au Professeur Lupin. « C'est toi qui l'a faite ? » avait-il demandé, et elle avait acquiescé, incapable de cacher son triomphe. Il l'avait regardée avec tant de gratitude et de respect, et l'avait remerciée si sincèrement, que toutes les critiques de son Professeur de Potions lui parurent en valoir la peine. Le Professeur Lupin l'avait bue immédiatement, avait réfléchi un instant, et dit, « Je crois que tu as réussi à la rendre moins mauvaise. Mais ne t'inquiètes pas, je n'en dirai rien à Severus ! »
Elle avait ri un peu, et il lui avait semblé que leur ancienne complicité était presque rétablie.
Elle repoussa ces pensées et lut le texte que Rogue lui avait donné. Quelques minutes plus tard elle protestait avec indignation.
« Vous auriez dû me dire de ne pas utiliser de couteau… »
Rogue était content de lui. « Vous n'oublierez jamais, jusqu'au jour de votre mort, d'utiliser la magie pour éplucher cette plante. Vous retirez la peau avec 'Pellem Detrahe', et vous le coupez avec un classique 'in tesseras'. Il ajouta sans y penser, « Un peu comme pour un avocat. »
Elle grogna et lut le reste du passage. Jetant un regard au reste du livre, elle découvrit qu'il avait été écrit au 17ème siècle, par un explorateur sorcier appelé Boethius Lestrange. Son style suggérait qu'il avait été un homme assez étrange, mas il s'y connaissait certainement en ce qui concernait les ingrédients pour potions. Apparemment, c'était également un journal de ses aventures, et Hermione pensa que ça avait l'air très intéressant.
« C'est assez remarquable, une étude de la flore et de la faune de l'Océan Indien ? Je suis surprise de ne pas l'avoir trouvé dans la librairie de Poudlard. » Elle commença à le feuilleter, quand Rogue vint et le lui prit des mains, l'air curieusement embarrassé.
« C'est un ouvrage remarquable, mais il n'a jamais été publié. C'est la seul copie, qui me vient de la famille de ma mère. Certains passages ne sont pas convenables pour des élèves. » Il marqua une pause, de plus en plus mal à l'aise. « Le Directeur me couperait les oreilles s'il savait que je vous ai laissé lires les escapades les plus exotiques de Lestrange. »
Maintenant plus curieuse encore, Hermione se demanda comment elle pourrait persuader Rogue qu'elle était suffisamment mature pour ce que pouvait avoir expérimenté un sorcier du 17ème siècle. Préparant ses arguments, elle prit une profonde inspiration, quand son professeur se tint le bras en soufflant.
La bouche ouverte et les yeux écarquillés, elle lui demanda, « Vous êtes convoqué ? »
Il lui intima de 'retourner à son travail !' et alla jusqu'à la cheminée. « Monsieur le Directeur ! »
« Oui, Severus ? »
« Je me vois dans l'obligation de sortir de manière impromptue. »
Même déformée par les flammes, l'expression de Dumbledore était évidente. « Ca ne ma surprend pas. Passez par mon bureau, et apportez moi du Veritaserum. Ça ne vous prendra pas longtemps. »
Hermione se précipita vers la réserve. Elle prit une petite fiole sur un portant, et la ramena à Rogue, qui grommela en guise de remerciement. Il lui donna une série d'ordres brefs. « Finissez l'Aglanoema, et mettez-là en bouteille. Surveillez mon Aiguise-Méninges, et mettez-le à refroidir. Nettoyez les lieux et mettez en place les protections avant de partir. » Il la regarda, et eut un rictus. « Peut-être que vous voudrez utiliser de la pulpe de quarbal sur l'autre œil pour assortir. Qui sait ? Vous pourriez faire l'envie de Mademoiselle Brown et lancer une nouvelle mode ! » Il plongea dans les flammes et disparut.
« Bonne chance, Monsieur, » dit Hermione à la cheminée vide. S'inquiéter était inévitable, mais inutile. Je ferais mieux de lui montrer qu'il peut compter sur moi pour suivre ses instructions.
Elle se remit rapidement au travail. Le quarbal fut épluché et coupé en quelques secondes, puis ajouté à sa potion. Pendant qu'elle se terminait, elle s'occupa de l'Aiguise-Méninges, et commença à ranger. Après quelques minutes, elle mettait en bouteille sa crème violette épaisse. Elle vérifia dans le petit miroir au dessus de l'évier et fit un bond alarmé à la vue de son œil gauche, qui brillait… eh oui, d'une couleur lavande. Peut-être que c'est le fait qu'il n'y en ait qu'un qui est si perturbant. Je ressemble à Maugrey Fol-Œil ! Elle y pensa un moment, puis avec un soupir coupa un autre quarbal. Quelques gouttes, et elle se regarda à nouveau dans le miroir. Peut-être que ce n'était pas une si bonne idée. J'ai à peine l'air humaine, et maintenant le Professeur Rogue va penser que je suis une idiote. Elle grogna. C'était fait, et elle ne voulait pas aller voir Madame Pomfresh pour lui raconter. Elle en profiterait pour crâner un peu.
Elle se ragaillardit en pensant au livre. Elle n'osait pas le sortir du donjon, mais il n'y avait aucune raison de ne pas s'autoriser un peu de lecture maintenant. Elle termina le nettoyage, et se sécha soigneusement les mains avant de toucher le précieux volume. Il était épais, et elle n'avait pas espoir d'en venir à bout ce soir, mais elle ferait de son mieux.
-------
Ils s'étaient retrouvés dans la salle de lecture, pour une soirée à se raconter des histoires et à regarder des photos. Harry avait apporté son précieux album, et avait montré à Lily ses photos d'elle même en adulte qui le tenait dans ses bras. Elle était là, amoureuse… de James Potter. Secouant la tête d'étonnement, Lily parcourut lentement le volume, puis revint en arrière.
« Eh bien, » dit-elle avec ironie. « Tu étais certainement un bébé adorable. »
Harry eut un grand sourire, et tourna la page. Noël à Godric Hollow. Elle se souvint que c'était le nom de la maison familiale des Potter. C'était déconcertant, mais agréablement. Les photos lui donnaient un stade intermédiaire entre le Remus adolescent dont elle se souvenait, et le Remus prématurément vieilli qu'on lui avait soudainement présenté. Elle aurait voulu qu'il y ait des photos de Severus. Les photos de Sirius étaient saugrenues. Mis à part le fait qu'il harcelait Severus, il avait toujours été horriblement agaçant, et elle ne l'aimait pas particulièrement. Pourtant elle était là, un bras autour de Potter, et l'autre autour de Black. Remus et Peter étaient derrière eux. Tous lui faisaient signe, apparemment interrompus dans un moment de joie partagée. Elle repoussa l'album.
« Allons à la bibliothèque à l'occasion, pour trouver les livres d'or. Je voudrais vraiment voir ma septième année. » Elle tapota paresseusement la table. « En fait, ça fait un moment que je pense aux livres d'or. Ils pourraient nous en apprendre beaucoup sur le passé. J'aimerais faire des recherches sur les années 1938 à 1945. »
Harry la regarda, intéressé. « C'est l'époque où Voldemort était là. Qu'est-ce que tu espères trouver ? »
« Oh… Qui est allé à l'école avec lui, qui était à Serpentard avec lui… J'ai une théorie sur lui. Je n'ai pas eu le temps de vérifier cette semaine. »
« Allons-y maintenant ! »
« Ce n'est pas une bonne idée. » Elle secoua la tête. « Ca ne serait pas une bonne idée d'être vus ensemble le soir, encore moins en train d'étudier tous les deux à la bibliothèque. Ce ne serait pas bon pour ton image, ni la mienne. »
« Personne n'a besoin de le savoir. Nous utiliserons ça ! » il se leva et attrapa sa cape d'invisibilité. Il l'utilisait souvent pour se glisser dans la salle de lecture, et Lily ne fut pas surprise d'apprendre qu'il s'agissait d'un héritage de Potter. Pas étonnant qu'il ait pu faire tant de bêtises !
« Tu es sûr qu'il y a de la place pour nous deux ? »
« Bien sûr ! Hermione et moi l'utilisons souvent ! Viens ! Rien ne vaut le présent. »
Lily prit plume et parchemin pour le cas où elle aurait besoin de prendre des notes. Harry plaça la cape autour d'eux, et ils se glissèrent avec précaution hors de la pièce dérobée, entrouvrant la peinture pour voir s'il y avait quelqu'un dans le couloir. Ils étaient seulement à quelques pas de la bibliothèque.
Lily se sentait horriblement exposée. Le calme de la bibliothèque, avec ses bruits de chuchotements occasionnels et de plumes qui grattaient le parchemin, était énervant. Sa propre respiration lui résonnait dans les oreilles, et elle faillit trébucher sur les grands pieds de Harry. Elle sentit, plus qu'elle n'entendit, qu'il riait en silence. Madame Pince surveillait les lieux avec son habituel dédain suspicieux. Oh, mon Dieu ! Théodore et Daphné n'étaient pas à un mètre, et la regardaient ! Ils traversèrent lentement la bibliothèque, se dirigeant vers le mur du fond. Une Poufsouffle de deuxième année se leva tout-à-coup, et faillit leur rentrer dedans. Harry entraîna expertement Lily de côté, et la Poufsouffle s'immobilisa, étonnée un moment, sentant le mystérieux courant d'air causé par un pan de la cape qui la frôlait.
Ils étaient finalement hors de danger immédiat, cachés par un réconfortant mur de livres. Lily savait à peu près où chercher les livres d'or, mais une fois trouvés, ils se révélèrent placés d'une façon peu pratique. Les volumes de 1935 à 1949 étaient placés en haut d'une étagère, et avaient l'air de livres qui savaient que plus personne ne se souciait d'eux.
« Il faut que je les attrape avec un 'accio', » murmura Lily.
« Non, je vais le faire, » répondit Harry sur le même ton. « Je suis doué pour attraper les choses. Lequel en premier ? »
Lily choisit au hasard. « 1942. »
« Accio livre d'or de Poudlard 1942 ! » Le volume se dégagea de ses semblables, et tomba doucement dans les mains de Harry, amorti par la cape d'invisibilité. Rapidement, il le glissa sous la cape, et ils s'assirent par terre ensemble, le livre sur ses genoux, pour le feuilleter dans la pénombre.
Harry reconnut le Directeur Dippet, son visage doux et inexpressif se penchant vers eux avec bienveillance au début du livre. Il avança vers la partie montrant les enseignants. « Je veux voir Dumbledore. »
Dumbledore était là : plus jeune, mais toujours un vieil homme aux yeux de Harry. Le futur Directeur le regarda avec amusement, et lui fit un clin d'œil. Harry rit tourna les pages pour trouver la partie des élèves. L'usage généreux de la couleur verte lui signala qu'il avait trouvé les pages de Serpentard. Les élèves le regardèrent avec méfiance. Quelques uns des garçons les plus âgés firent de l'œil à Lily, qui leur rendit leur regard, à leur amusement. Parmi les quatrième année se trouvait le visage allongé, séduisant de Tom Elvis Jedusor.
Il est vraiment beau ! pensa Lily sans le vouloir. La photo de Tom les regardait assez amicalement. Il semblait être un gentil garçon, bien élevé, calme, sérieux dans ses études. Il fit un sourire courtois, réservé à Lily quand il remarque qu'elle l'étudiait avec attention. Très perturbée, elle se força à étudier ses camarades. Il y avait huit autres Serpentards de la même année.
Harry regarda Tom Jedusor de travers, et il sembla un peu blessé par son hostilité. Après un instant, son visage se durcit dans un masque froid et sans expression. Je ne me suis jamais autant trompé sur personne que sur lui. Je pensais qu'il était vraiment bien. Je pensais qu'il était un ami venu du passé. Je pensais qu'il m'aiderait à sauver Ginny. La haine et le ressentiment l'envahirent, et il eut du mal à ne pas refermer violemment le livre.
Il étudia les noms des camarades de promotion : Mulciber, McKinnon, Flint… c'étaient des noms familiers… Non, il y a un Correcteur d'orthographe. Je n'ai jamais entendu ce nom avant… Greengrass… Hmmm.
Lily sortit son parchemin, et commença à noter les noms. Quand elle eut fini, elle chuchota, « Regardons les cinquième années. »
Et ils continuèrent. Des noms, connus ou pas, des visages, dont beaucoup ressemblaient à des gens qu'il connaissait. Ils s'arrêtèrent tous les deux et échangèrent un regard quand ils trouvèrent les préfets de sixième année. Parmi eux, blond, beau garçon, et arrogant, était un visage pâle et pointu qui regarda Lily avec approbation et ignora Harry en même temps. Apollonius Malefoy.
Un vrai nom de sorcier, convint Lily. Comme Apollonius de Tyana. J'aimerais pouvoir te demander ce que tu penses de Tom Elvis Jedusor. Rapidement, elle l'ajouta à la liste. Il y avait d'autres noms bien connus : deux Goyle, un Nott, un Crabbe curieusement grand et efflanqué, un élégant Avery, et un certain Perseus Black. Harry se demanda s'il était le père ou l'oncle de Sirius. Il pouvait être l'un ou l'autre. Les cheveux noirs, bien sûr des yeux bleus, et une allure folle. Il fit un petit sourire à Lily qui ressemblait tellement à celui de Sirius qu'un sentiment de perte traversa Harry.
Précipitamment, il ferma le livre, mais Lily chuchota, « Il faut qu'on voie les septième année, et les première à troisième, aussi. »
Madame Pince fermait la bibliothèque. Les élèves sortaient, et commençaient à parler à haute voix dès qu'ils arrivaient dans le couloir. Madame Pince fit un rapide tour de la bibliothèque, vérifiant derrière les étagères et les regardant sans voir leur présence. Elle éteignit les lumières, et verrouilla la porte derrière elle. Après un moment, Lily illumina sa baguette sous la cape, et ils continuèrent leur lecture.
Ça ne s'arrangeait pas. Il y avait un Roderick Lestrange en septième année. Il y avait un autre Black en deuxième année, Antarès. C'était un beau petit gars avec un air combatif. Il faisait des grimaces si grossières qu'ils faillirent manquer le première année sombre et boudeur au bas de la page. Un trop grand nez pour le petit visage, et les marques d'un ricanement permanent. Tiberius Rogue.
« Au moins Rogue est vraiment de lui, » fit remarquer Harry.
Lily lui donna un coup de coude, et inscrivit le reste des noms. Harry les regarda. C'était pratiquement un catalogue de Mangemorts.
« Ils n'ont pas changé beaucoup. »
« Je ne sais pas. » Lily balançait sa plume pensivement. « Je me demande si Severus est vraiment le seul à ne s'être jamais remis de ses rancunes d'écolier. »
« Contre les autres Serpentards ? » Harry y pensa un moment, et dit simplement, « Oh. »
Il pouvait le concevoir. Si Malefoy pouvait se moquer des Weasley concernant leur manque de fortune, il pouvait imaginer le traitement réservé à l'orphelin de demi-sang Tom Jedusor. Et ils l'avaient laissé à l'orphelinat, année après année. Comme ils m'ont laissé dans le placard.
Il feuilleta le reste du livre. Il y avait des photos d'élèves en groupes et des photos des équipes de Quidditch. L'équipe de Serpentard était particulièrement intéressante. Apollonius Malefoy, Diotimus Nott, Gregory et Gérald Goyle, Roderick Lestrange, Perseus Black, et Caradoc Avery. Ces garçons faisaient montre d'une élégante langueur qui rappelait irrésistiblement à Lily les poses de mannequins dans les catalogues. Les remplaçants n'étaient pas aussi pomponnés, mais ils étaient tout aussi sûrs d'eux : le petit Antarès Black était là, leur souriant ironiquement, avec Mulciber, Flint, le grand et mince Crabbe, et une jolie jeune fille appelée Electra Rosier.
« Maintenant, » dit Lily, « cherchons plus de renseignements sur ces gens. »
Le Who's Who des Sorciers et Sorcières Britanniques les mentionnait tous, naturellement. L'article concernant Apollonius Malefoy était particulièrement long. Il était bien engagé pour avoir une carrière spectaculaire au Ministère quand il avait trouvé la mort dans un tragique accident en 1971. Assez curieusement, toute l'équipe était morte assez jeune, tous dans des accidents, ou de maladies magiques rares. Plus personne n'était en vie après 1973, à l'exception peut-être d'Electra Rosier, qui avait disparu dans de mystérieuses circonstances en 1954.
Lily frissonna. « Quand nous en aurons le temps, nous vérifierons pour les autres Serpentards. Et pas seulement pour l'année 1942. »
Harry réfléchissait. « Il faudrait vérifier les vieilles éditions de la Gazette du Sorcier, pour en apprendre plus sur les circonstances de leurs morts. »
« D'accord, mais pas ce soir. Je ne pourrais pas le supporter. » Elle finit ses parchemins, les roula et les mit dans sa poche. « Ils les a tous tués et il a fait de leurs enfants des esclaves. Ça fait paraître Severus remarquablement clément. » Drago doit savoir ça, pensa t'elle. Blaise aussi. Peut-être que Dumbledore lui même n'a pas fait le rapprochement. Tout le monde doit savoir.
Ils quittèrent la bibliothèque, refermant derrière eux. Le château était plein de bruits étranges après le couvre-feu. D'immenses ombres dansaient sur les murs lointains. Le nombreux animaux familiers du château s'agitaient sans cesse, leurs griffes raclant la pierre. Ils devaient traverser la hall d'entrée pour que Lily retourne à son dortoir. Alors qu'ils avançaient dans le couloir adjacent, ils virent Hermione qui revenait du donjon. Harry attrapa la main de Lily, et ils coururent, de façon ridicule sur la pointe des pieds, pour la rattraper.
Hermione était plongée dans ses pensées, et semblait totalement indifférente à ce qui l'entourait jusqu'à ce que Harry lui souffle « Hé ! Hermione. »
Elle se retourna, et en la voyant Harry et Lily firent tous deux un bond en arrière. Lily trébucha, et s'emmêla dans la cape. Elle tomba à genoux, entraînant la cape et les découvrant tous les deux.
« Bon Dieu, Hermione, qu'est ce qui t'est arrivé ? » Harry se demanda un instant si c'était bien Hermione, ou une version Polynectarisée qui avait affreusement mal tourné.
Lily leva les yeux vers elle, et étouffa un rire. « Est-ce que tu sais que tes yeux sont violets ? Plutôt d'un lavande vif, en fait. »
« Accident de potions, » résuma Hermione. « Ne me sautez pas dessus comme ça, j'ai failli mourir de peur ! »
Des voix résonnèrent au bout du couloir qui menait au bureau du Directeur.
« Quelqu'un vient ! » Hermione saisit frénétiquement la cape. Harry, avec plus de présence s'esprit, releva Lily et les couvrit tous les trois. Ça les cacherait, mais il leur était maintenant impossible de se déplacer de façon normale. Ils réalisèrent qu'ils pouvaient se déplacer en cadence, en faisant de petits pas du même pied : droit, droit, droit, gauche, gauche, gauche. Lily était prête à éclater de rire. « C'est comme une danse, » chuchota t'elle, « sauf qu'on transpire plus. Et qu'il n'y a pas de musique. »
« Chut ! » Harry surveillait les ombres qui approchaient. Il poussa les filles du coude (droit, droit, droit) derrière une statue de Virgilius le Sorcier.
Les voix approchaient. Le timbre apaisant de Dumbledore était à nul autre pareil. Deux autres ombres l'accompagnaient.
Les ombres se transformèrent en corps. Une femme parlait à voix basse. « Ce n'est vraiment pas possible de mettre Drago au courant ? »
Lily attrapa le bras de Harry. Il lui mima un nom, et elle hocha la tête. Mme Malefoy ! Avec précaution, ils se penchèrent pour voir qui approchait, et Harry retint son souffle en reconnaissant l'homme derrière elle. Que faisait Lucius Malefoy à Poudlard, parlant sérieusement à Dumbledore ? Encore des secrets ! Il eut l'idée horrible et soudaine que Malefoy était un espion pour L'Ordre, et que personne ne lui en avait rien dit. Non, c'est impossible ! Et pourtant il savait que Dumbledore avait des secrets qu'il ne confiait à personne.
Il attira les filles derrière la statue. Dumbledore pouvait voir à travers les capes d'invisibilité. Il espérait que le Directeur était trop occupé avec les Malefoy pour regarder avec attention dans les recoins du Hall. Il disait, « Vous serez parfaitement à l'abri ici, en attendant. Il est essentiel que votre présence soit un secret pour tout le monde, et ça inclut également Drago. Par conséquent, je vous demanderai de rester dans vos quartiers, à moins d'être appelé par moi ou par Severus. Vous pouvez nous joindre directement par la cheminée. Avec de la chance, Voldemort croira que vous avez quitté le pays. Le mieux serait qu'il le croie le plus longtemps possible. »
Il osa un autre rapide coup d'œil. Les longs cheveux blonds de Mme Malefoy étaient détachés, lui arrivant presque à la taille, et elle était enveloppée dans un long manteau noir d'homme. Elle se retourna, marchant au côté de son mari, et le manteau s'ouvrit un peu, révélant qu'elle portait une chemise de nuit presque transparente. Harry roula des yeux, rougit, et réalisa qu'il lorgnait le (très joli !) corps de la mère de Drago.
Lily se pencha pour regarder elle aussi, et Harry essaya sans succès de la repousser. Il savait qu'elle souriait, et il savait qu'elle et Hermione lui en reparleraient longtemps.
Hermione se pencha de l'autre côté, se demandant ce qu'ils regardaient. Elle fit une moue désapprobatrice. Autant pour le code vestimentaire de Poudlard ! Lucius Malefoy semblait totalement désinhibé, et sa conversation avec le Directeur était inaudible. Le Veritaserum ! Dumbledore avait demandé que le Professeur Rogue l'apporte à son bureau. Il devait avoir questionné les Malefoy. Ils avaient de toute évidence abandonné Voldemort, et cherchaient refuge à Poudlard. Et pendant ce temps, qu'est-ce qui arrive au Professeur Rogue ? Voldemort doit être furieux !
Les pensées de Lily étaient un peu différentes. Alors comme ça c'est le père de Drago ! Quelle famille ! ils sont tous beaux. Ils sont mauvais, bien sûr, mais agréables à regarder. Drago ressemble beaucoup à son père. Et ils vont se cacher à Poudlard. Plutôt osé de la part de Malefoy, après tout ce qu'il a fait. Il faudra que je me souvienne à l'avenir ne jamais sous-estimer l'insolence d'un homme insolent. Elle se souvint des parchemins qu'elle avait en poche. Pas ce soir, mais au cours du week-end elle trouverait une opportunité de partager ces informations avec ses amis Serpentards. Ce n'était pas une preuve, mais c'étaient toujours des indices circonstanciés de la malignité de Voldemort à leur égard.
Dumbledore et les Malefoy disparurent en haut d'un escalier. Les trois élèves restèrent silencieux jusqu'à ce que les derniers bruits de pas s'éteignent.
Harry était horrifié. « Qu'est-ce qu'ils font là ? Comment Dumbledore peut-il leur faire confiance ? »
Hermione posa une main apaisante sur lui. « J'étais avec le Professeur Rogue quand sa Marque des Ténèbres s'est mise à brûler. »
Lily eut l'air inquiète, et Hermione leur raconta le reste. « Il a appelé le Professeur Dumbledore, qui lui a demandé d'apporter du Veritaserum à son bureau avant de partir. Dumbledore a dû le faire boire aux Malefoy avant de les interroger. »
« Malefoy connaît certainement l'Occlumancie, » fit remarquer Harry, l'air dégoûté.
« Quoi qu'il en soit, ce qu'ils ont raconté à dû le convaincre, s'il les laisse rester ici. »
Lily réfléchissait. « Je sais que c'est pour leur sécurité, et je sais que les Aurors les embarqueraient au moment où ils apprendraient qu'ils sont ici, mais c'est une honte que Drago et les autres Serpentards ne puissent pas être mis au courant de la défection de Malefoy Senior. Beaucoup d'entre eux se demandent quoi faire, et ça leur donnerait une bonne poussée dans notre direction. »
Harry haussa les épaules. « S'ils sont tellement indécis, ils ne nous servent à rien. »
« Eh bien, il serviront peut-être à Voldemort, » répliqua Lily.
Hermione approuva. « C'est vrai, Harry. Tous ces secrets font croire aux gens que Voldemort a plus de soutien qu'il n'en a en réalité. » Sa principale inquiétude refit surface. « Et maintenant le Professeur Rogue est avec Voldemort. Il va certainement lui demander s'il sait où sont allés les Malefoy, et essayer de l'envoyer à leur recherche. Il doit être terriblement en colère. »
Calmé, chacun d'eux reprit sa respiration, et Harry changea de sujet. « Bien. Escortons Lily jusqu'à son donjon, avant qu'ils n'envoient une expédition à sa recherche ! »
----------
Narcissa Malefoy s'assit sur le bord du lit à baldaquin orné, brossant vivement ses cheveux emmêlés par le vent. Elle supposait qu'ils étaient enfermés là pour la nuit. Ça aurait pu être pire. Au moins elle était prisonnière avec Lucius, et personne ne les envoyait à Azkaban pour le moment. La routine familière de se changer et de se préparer à se coucher était réconfortante, mais également étrange dans un endroit si différent. Elle n'avait pas dormi à Poudlard depuis le dernier jour de sa septième année, quand elle était partie avec de si grands espoirs pour son avenir.
Elle regarda Lucius, qui avait pris un bain et se relaxait avec bonheur à ses côtés sur l'immense lit, un genou replié. Elle ne pouvait pas même commencer à imaginer ce à quoi il pensait. Elle y avait renoncé depuis longtemps. Elle l'aimait, mais il lui restait un étranger sur de nombreux points. Elle refusait de l'en blâmer, préférant en rendre responsables les autres, et en particulier sa sœur, Bellatrix, au nom de laquelle elle associait depuis de nombreuses années le qualificatif de garce folle à lier.
Ça n'avait pas suffi à Bella de faire de son enfance une misère de tyrannie et de méchancetés. Bella était le centre de la famille : son caractère, ses opinions tranchées, ses demandes avaient occupés beaucoup du temps de leurs parents. Et quand finalement Bellatrix avait mis fin à la ronde dramatique de ses romances pour se décider à épouser ce Lestrange sans caractère, Narcissa avait espéré être débarrassée d'elle. Elles se verraient graduellement de moins en moins, et Narcissa n'aurait qu'à supporter l'agonie annuelle des repas de famille pendant les fêtes.
Elle avait été si heureuse avec Lucius pendant leur première année. Elle avait un mari adorable, une maison adorable, mais inexorablement Bellatrix s'était insérée dans leur paradis.
« Lucius, je connais un sorcier fabuleux que tu dois absolument rencontrer. » Ca avait commencé comme ça. Bellatrix avait planté ses griffes dans Lucius, pas en utilisant le sexe, mais avec la politique. Elle était devenue incontournable dans leurs vies. Elle et Lucius allaient à des réunions ensemble. Ils partageaient des secrets ensemble. Même dans les premiers jours où ce Lord Voldemort avait vécu avec Rodolphus et Bella, partageant apparemment l'intimité de chacun d'eux de la façon la plus révoltante, Lucius leur avait trouvé des excuses, emballé par les thèses et le charisme de Lord Voldemort. Narcissa avait écouté en silence, sans rien en approuver, mais ils étaient tous trop forts pour elle. Ensuite, elle avait eu Drago, et Bella s'était penchée sur son berceau, donnant à Narcissa des conseils erronés et condescendants, essayant de l'éloigner d'elle lui aussi. Narcissa l'avait haïe et détestée, et n'avait jamais été si heureuse que le jour où sa sœur avait été enfermée à Azkaban avec les autres ordures.
Maintenant Bellatrix voulait plus que contrôler leurs vies. Elle voulait leur mort. Narcissa le comprenait, à son avis, mieux que Lucius. Bella n'a jamais pu supporter la compétition. Elle veut le Seigneur des Ténèbres pour elle toute seule. Je plains ceux qui restent.
Lucius parla soudain.
« Qu'est-ce que c'est que cette histoire que Dumbledore a raconté à propos de Drago et d'une Jones ? »
« Oh, c'est vrai. Drago s'est trouvé une petite amie ici à l'école. Ils sont allés au bal d'Halloween en Oberon et Titania, et il m'a envoyé une photo adorable, je l'ai quelque part… Quoi qu'il en soit, mon chéri, c'est touchant de voir combien il est fier d'elle. Elle s'appelle Lily. Elle est assez jolie et charmante, et il l'a trouvée tout seul. Je les ai invités à déjeuner la semaine qui a suivi le bal pour voir si elle était convenable ou non. Je l'ai trouvée bien. » Elle interrompit l'interminable brossage de ses cheveux, et se tourna vers son mari, avec un sourire. « Elle a des fossettes ravissantes, et elle a la même allure que Severus : les yeux et les cheveux noirs, et une peau très pâle. Remarque ça lui va mieux qu'à lui ! Bien sûr, on ne sait jamais avec les Jones, il pourrait y avoir une bonne raison à cette ressemblance… »
« Qu'est-ce que tu sais d'elle ? »
« J'ai tiré quelques ficelles, et j'ai obtenu son dossier scolaire de ce ridicule endroit, Medicine Hat. Elle était leur meilleure élève, évidemment. »
Lucius ricana.
« Oui, d'accord, pas de quoi se vanter. Il ne doivent pas compter plus de trente élèves ! Plutôt douée pour les Charmes et l'Histoire, apparemment. Drago dit qu'elle se débrouille bien à Poudlard. Elle est à Serpentard, et elle a fait mieux que cette horrible sang-de-bourbe une fois ou deux. Son arbre généalogique remonte jusqu'en 1652, c'est correct, sans être impressionnant. Elle n'a plus de famille, à part un grand-oncle reclus et repoussant qui déteste les sorcières et l'a envoyée hors du pays pour en être débarrassé. Les parents sont morts, c'étaient des excentriques quelconques qui voyageaient sans arrêt et qui ont été tués par une bombe de moldus. Oui, oui, je sais. Pas de quoi être fière là non plus, et pour ainsi dire pas d'argent. Pansy a raconté à Olivia Parkinson que Lily a quelques jolis bijoux anciens, des vêtements convenables, et quelques objets de valeur, un nécessaire de toilette avec un miroir Silverthorn du 18ème, en fait. Pas grand'chose d'autre, cependant. Mais la fille est jolie, et intelligente, et dans l'ensemble, je crois qu'elle pourrait faire l'affaire. L'absence de famille est un avantage, nous ne serons pas ennuyés par des parents sortis de leur campagne, et nous n'aurons pas à partager d'éventuels petits-enfants. Drago est assez épris. La fille, elle, l'est un peu moins. Elle pense d'abord à ses études et à sa future carrière. »
« Elle ressemble à quelqu'un que je connais. »
« Oui, c'est vrai. » Narcissa se regarda dans le long miroir qui faisait face au lit, et se demanda ce qui était arrivé à la fille qui voulait devenir Ministre de la Magie. Nous discutons ensemble comme si nous avions un avenir. Oh, faites que ce soit le cas !
Lucius caressa paresseusement le bas de son dos. « Elle a une opinion politique ? »
« Si c'est le cas, elle n'en parle pas, mais je pense que c'est bon signe, non ?… Oh ! »
« Nox, » murmura son époux.
--------------
Le Professeur Rogue était absent au petit-déjeuner. Hermione était descendue tôt, et regardait sa place vide avec inquiétude. Il sautait souvent le petit-déjeuner, surtout le week-end, et son absence ne voulait rien dire. Lily était à la table de sa Maison, encadrée innocemment par Drago Malefoy et Blaise Zabini, comme d'habitude. Hermione essaya d'attirer son regard, mais Lily regardait son assiette et jouait avec sa nourriture, indifférente aux bavardages de ses camarades.
Ron arriva, s'assit à côté d'Hermione, et se jeta sur la nourriture qui était devant lui. Il avalait ses œufs quand il réussit à marmonner « Viens voir l'entraînement, 'Mione ! Tu as passé tellement de temps dans le donjon avec la vieille chauve-souris que tu as l'air toute pâle toi aussi. »
« Ron, » dit Hermione avec reproche, « Fais attention à ce que tu dis. »
Harry contourna Hermione pour donner un coup de coude à Ron.
« Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ? »
« J'essaierai de venir plus tard, » concéda Hermione, « mais il faut que je fasse un saut au donjon pour jeter un œil sur une potion. »
Ron grimaça, puis se tourna vers elle et la regarda.
« Dieu du ciel, Hermione ! Est-ce que tu sais que tes yeux sont violets ? »
Hermione et Harry répondirent en même temps, « Accident de Potions. »
Hermione ajouta gaiement, « Et ils ne sont pas violets, ils sont lavande. »
Ron fit une grimace de compassion. D'autres regards curieux se posèrent sur elle, venant de camarades mal réveillées aux paupières lourdes.
Harry lui fit un signe de tête, comprenant. « Vas-y, alors. Ron, tu sais qu'elle ne sera pas satisfaite tant qu'elle ne verra pas par elle-même que c'est parfait ! Laisse-la vivre ! »
Hermione se sauva, se pressant derrière les autres élèves, les yeux discrètement baissés. Il fallait qu'elle sache si Rogue était revenu sans dommages. Si Voldemort avait eu le moindre doute à son égard, il serait mort, et l'Ordre aurait perdu une arme importante. Elle avait un autre intérêt, secret et plus égoïste. Si quelque chose arrivait au Professeur Rogue, ce serait la fin de mes vendredis soir avec lui. C'était honteusement mesquin et intéressé, mais la relation qui se tissait entre eux pendant ces soirées était devenue importante pour elle. Il arrivait, pas souvent, mais de temps en temps, qu'il fasse une remarque sur un livre ou sur ses recherches qui la fasse ses sentir comme une de ses collègues, une adulte. Il n'y avait aucun espoir qu'il se comporte ainsi en classe, pour un certain nombre de raisons, mais quand ils étaient seuls, ce moment d'harmonie magique était toujours possible.
Peut-être également qu'elle pourrait continuer à feuilleter le livre de Lestrange, Autour de l'Océan Indien. Elle rougit. Le Professeur Rogue n'avait pas exagéré en disant que ce n'était pas une lecture convenable. L'exploration que Lestrange avait fait des gens, des animaux, et même de certaines plantes, étaient parfois à la limite du supportable. Personne ne pourrait dire que ses recherches n'étaient pas rigoureuses !
Elle était devant la porte de son bureau. C'étai samedi et il était tôt. Même s'il était revenu, il se pourrait qu'il ne réponde pas. Elle prit une inspiration, et frappa quand même. Une minute s'écoula, et elle frappa de nouveau.
La porte s'ouvrit brusquement vers l'intérieur, et le Professeur Rogue, dans une chemise blanche à moitié boutonnée, se tenait devant elle. Il avait l'air affreux : les cheveux dans tous les sens comme sil venait de se lever, des ombres sous les yeux, et la langue mouillée d'acide.
« Qu'est-ce que vous voulez ? »
Faiblement, elle répondit, « Je voulais vérifier l'Agla… Je ne savais pas… » Elle prit une autre inspiration et cracha le morceau. « Je voulais seulement voir si vous alliez bien. »
Il la regarda avec méfiance, puis, se rendant compte, il éclata de rire. Il fallut à Hermione un moment pour le réaliser, parce qu'elle ne l'avait jamais entendu rire auparavant.
Il sourit en regardant son allure extravagante. « Même moi je n'aurais pas cru que vous teindriez vraiment votre deuxième œil en violet. »
Hermione s'éclaircit la gorge, et essaya de se rattraper. « C'est plutôt lavande, en fait. Il semble qu'il pourrait y avoir une application commerciale, dans le domaine cosmétique… »
Il s'esclaffa. « Il ne faut jamais, Mademoiselle Granger, et j'insiste sur le jamais, faire d'expérimentations sur soi-même. Je veux soixante centimètres de parchemin détaillant les raisons pour lesquelles c'est une méthode idiote et dangereuse pour vendredi prochain. Et maintenant, disparaissez, espèce d'idiote. Vous m'avez vu, je vais bien, la potion va bien, les donjons sont sous contrôle sans que vous vous en mêliez, c'est samedi et je ne devrais pas avoir à vous supporter ! »
Assez refroidie, elle tourna les talons, alors que les Serpentards revenaient du petit-déjeuner. Lily la vit, et vit Rogue. Elle fit au Maître de Potion son plus joli sourire, soulagée.
« Bonjour, Professeur. »
Les autres firent leurs propres salutations. Rogue grogna un remerciement, et claqua la porte. Hermione se retrouva à contre-sens, bousculée par des élèves qui faisaient mine de ne pas la voir.
Elle se retrouva face à Drago, regardant fixement sa poitrine, sans oser lever les yeux.
« Mais c'est l'assistante enfant de moldus du Professeur Rogue, » miaula t'il. « Tu ne peux pas te tenir à l'écart, même un samedi, petite bêcheuse prétentieuse ? »
Hermione bouillait de rage, et lui lança un regard haineux. Ses yeux firent leur effet. Malefoy fit un bond en arrière, surpris, et se mit à rire.
« Est-ce que tu sais que tes yeux sont violets ? »
Lily s'interposa. « Laisse-la tranquille, Drago ! Tu te souviens de ce qu'a dit le Professeur Rogue ! »
Blaise, avec un geste impatient mais un grand sourire, lui fit signe de déguerpir.
Lily ajouta, un sourire lui creusant irrésistiblement les fossettes. « Et puis, ce n'est pas vraiment violet… Je dirais plutôt… voyons… lavande ! »
En écumant, Hermione s'éloigna, des rires retentissants et insupportables résonnant dans ses oreilles.
-------
ndA : Le miroir Silverthorn est un hommage à une de mes histoires préférées, Mirror of my Dreams, par Lady Jenilyn. Les réflexions de Lily sur l'impudence de Malefoy sont tirées de Orgueil et Préjugés.
