Auteur : Arsinoé de Blassenville

Traduction : benebu, avril 2005

Alors que Harry et Drago volent à la rescousse, que vont faire Rogue, Lucius et Hermione ?

Chapitre 17 : La Chambre des Morts

Rogue appréhendait la réaction de Lucius à la nouvelle, et il appréhendait plus encore celle de Narcissa. Mais l'appréhension qu'il ressentait n'était rien comparée à sa peur pour Lily. L'idée insupportable le taraudait : Elle est probablement déjà morte. Il connaissait de nombreuses formes de tortures, mais il n'en avait jamais subi de plus exquise : la balance atroce entre espoir et désespoir. Il devait agir en suivant l'espoir maintenant. Plus tard, il aurait tout le temps du monde pour le désespoir.

Les Malefoy étaient en train de dîner quand il fit irruption dans leur salon. Ils levèrent les yeux vers lui, virent son visage, et sortirent immédiatement leurs baguettes, pensant que le Seigneur des Ténèbres était là, à Poudlard, et sur les talons de leur ami.

Il était impossible d'être délicat ou de faire preuve de tact. Le mieux qu'il pouvait faire était de parler avec cohérence. « Drago est parti, » leur annonça t'il brusquement. Ils s'entre-regardèrent, pleins d'incrédulité et de confusion. Rogue prit une inspiration. « Lily a été kidnappée par Portoloin depuis le Grand Hall. Sa destination est évidente. Le fils Zabini est avec elle. On a envoyé une lettre à Lily et il l'a touchée en même temps qu'elle. Drago est à sa recherche. »

Lucius réussit à produire un petit rire incrédule. « A la recherche de la fille ? Non, c'est impossible ! Il ignore où est le Seigneur des Ténèbres. »

Rogue ne l'épargna pas. « Harry Potter le sait. Drago l'a suivi. Je les ai vus voler vers le sud depuis la Tour d'Astronomie. »

« Potter ! » Ce nom fut prononcé comme une injure.

Narcissa se tenait debout à côté de la table, silencieuse. Un cri lui échappa, aigu et sauvage. Lucius avança à ses côtés, et le cri cessa. Narcissa eut une longue inspiration saccadée, et se remit à crier, une plainte horrible et angoissée qui aurait bouleversé les murs de pierre. Il aurait duré plus longtemps si son mari ne l'avait pas attrapée par les avant-bras pour la secouer.

« Ce n'est pas le moment ! »

« Je ne peux même pas Transplaner ! » gémit-elle, avant de vomir sur le sol.

« Narcissa ? » interrogea son mari, conjurant rapidement une serviette de soie pour essuyer le visage de sa femme. « Je pensais que tu attendrais que tout soit fini ? »

« On pourrait être morts d'ici là, » dit-elle sans expression. « A quoi bon attendre ? Nous vivrons ou nous mourrons. Je n'ai rien d'autre à quoi penser, et j'y pense tout le temps. Et maintenant Drago est… » Elle frissonna. « Je ne suis pas malade à cause du bébé. Je suis malade de peur. Je veux juste que ça s'arrête. » Elle prit la serviette des mains de Lucius, s'essuya une dernière fois, et la fit Disparaître. Lucius remit debout l'une des chaises qui était tombée dans leur inquiétude. Elle s'assit, tremblante, et but une longue gorgée d'eau.

Lucius fixa le sol puis secoua légèrement ses cheveux, et avec le fantôme de son rictus, dit à Rogue. « Je te fais confiance pour ne pas me retenir. Remercie Dumbledore pour son hospitalité, mais si je pars maintenant, je peux Transplaner avant que Drago n'arrive et empêcher le désastre. »

« Je n'avais pas l'intention de t'empêcher d'y aller. J'y vais moi-même, mais je dois emmener quelques objets. Viens avec moi jusqu'au donjon et je te ferai part de mon plan. McGonagall m'a montré un bon point d'Apparition il y a quelques jours. » Il regarda Narcissa avec ce qui ressemblait à de la compassion. « Je suis désolé que tu doives rester seule, mais il faut que nous y allions si nous voulons sauver Drago. »

Elle acquiesça rapidement et se leva. Elle passa les bras autour du cou de Lucius et l'embrassa gravement. Puis fermant le poing, elle le frappa à la poitrine et cria, « Tu me le ramènes ! »

Lucius prit sa main, l'embrassa, et sortit sans un mot. Narcissa retomba sur sa chaise, la tête dans les mains.

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Hermione était debout dans le couloir, essayant de calmer les idées paniquées qui se bousculaient dans son esprit. Réfléchis ! S'admonesta t'elle. Tu es douée pour ça !

Nerveusement, elle lissa la carte. Elle pouvait l'utiliser pour guider Lily hors de la Maison Jedusor. Mais Harry était déjà en chemin, ne répondant pas à sa mornille. Pourquoi ? Elle ne pouvait pas le voir, et elle ne pouvait pas voir la mornille au bout de son cordon de soie noire, volant dans le vent de la nuit, hors de la robe de Harry pendant qu'il poussait son balai à sa vitesse maximale.

S'il ne répondait pas , il était tout à fait probable qu'il entre dans la maison Jedusor. Drago Malefoy était avec lui. Elle ne savait pas comment ça allait tourner. Harry avait une copie de la carte et on pouvait penser qu'il serait prudent, mais si Lily était retenue prisonnière ? Il risquait bel et bien de se retrouver une fois de plus face à Voldemort.

L'incantation ! Harry connaissait l'incantation, mais elle était inutile sans la potion ! La potion ! Il faut que je fasse parvenir la potion à Harry d'une façon ou d'une autre !

Elle regarda brièvement les yeux anxieux de Ron. Il pouvait l'emmener là-bas en balai ! Non ! Ce devra être quelqu'un d'autre. Il y a quelque chose que Ron doit faire pour moi immédiatement.

« Ron, écoute-moi, c'est important ! Il faut que j'amène ça au donjon, mais pendant ce temps, j'ai besoin que tu retournes à Gryffondor. Envoie Ginny dans ma chambre, à mon coffre. Le mot de passe est 'Heathcliff'. Il y a une mornille sur un cordon de soie noire. Tu dois l'apporter à Dumbledore immédiatement. C'est un moyen de communication, et il peut l'utiliser pour discuter avec Harry, avec moi ou avec Lily. » Elle vit son expression qui changeait, et cria frénétiquement, « Ce n'est pas le moment de te mettre en colère parce qu'on ne t'en a pas parlé ! Je t'en parle maintenant. Je pense que le Professeur Lupin en a une également, mais je n'ai pas pensé à vérifier. » Une pensée lui traversa l'esprit. « Peut-être que le Professeur Rogue en a une. Je ne suis pas sûre. (J'appelle Severus…) « Bref, » conclut-elle, sortant sa propre mornille pour la lui montrer. « Ça ressemble à ça. Tu vois, il y a un miroir sur l'autre face. Elle chauffe si quelqu'un a besoin de te parler. Harry ne répond pas à la sienne en ce moment. Je ne sais pas pourquoi, mais si Dumbledore a ça, il pourra parler à ceux qui répondent. Allez ! » Il était bouche bée, submergé par la quantité d'informations. Elle lui donna une pousse. « Maintenant ! » Avec hésitation, il se mit à courir, et elle lui cria, « Il peut taper dessus trois fois ou dire 'la mornille de Harry'. » Ron était presque au bout du couloir, il lui fit signe qu'il avait compris. Elle cria de nouveau, « Souviens-toi, Heathcliff ! »

Elle se mit à courir elle-même. Elle devait trouver le Professeur Rogue. Ils pourraient décanter de la potion dans une bouteille qui se briserait quand on la jetterait. Elle prendrait une paire de pinceaux, sa contribution à l'effort. S'ils en étaient réduits au pire, ils auraient au moins quelque chose. Le Professeur Rogue pouvait Transplaner, et soit arrêter Harry, soit lui donner la potion comme arme.

Elle courait dans le couloir, essoufflée, avec un point de côté. Elle le pressa, chiffonnant la carte. Mais et si il ne trouve pas Harry ? S'il a la potion et qu'il trouve Voldemort ? La potion ne sert à rien sans l'incantation ! Oh, non ! Le Professeur Rogue ne connaît pas l'incantation !

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Rogue avait rassemblé le nécessaire, et passait une cape sur ses épaules, quand ses doigts se prirent dans un cordon de soie noire. Automatiquement, il se mit à le lisser, et se souvint ce qu'il était, et se rendit compte que la mornille était chaude.

Il l'attrapa, la retourna pour voir la face réfléchissante, et siffla, « La mornille de Lily ! »

Il faillit éclater en sanglots quand son visage apparut. « Oui ! Severus ! » Faible et métallique, la voix de Lily venait de la mornille. « J'essayais désespérément de te joindre ! Blaise et moi allons bien. Je crois que nous sommes quelque part dans la cave. Hermione cherche une copie de la carte. »

Avec fougue, Rogue lui ordonna. « Reste où tu es, nous venons te chercher. »

« On ne peut pas rester là indéfiniment, » protesta t'elle. « On a Pétrifié le type qui nous attendait, mais quelqu'un pourrait venir à sa recherche. On m'a dit que Harry et Drago arrivaient. »

« Oui ! » l'interrompit Rogue avec impatience. « Ces imbéciles sont sur leurs balais, et ils vont se faire tuer ! Le père de Drago et moi allons Transplaner sur place, et nous serons là avant eux. Lucius connaît la maison. Décris l'endroit où vous êtes. »

Lucius le dévisageait, sa curiosité piquée au plus haut point. Avec réticence, Rogue lui fit signe d'approcher et souleva la mornille pour que Lucius puisse entendre Lily parler.

« C'est une pièce sans fenêtre avec un plafond bas. Les murs sont en pierre. Il y a une porte de bois massif qui donne dans un couloir. Il y a des caisses vides, et une longue table avec des chaises vertes en bois. Il y a une autre porte qui donne dans un couloir étroit. Il y a beaucoup de portes dans ce couloir. Je crois que j'entends quelqu'un approcher ! Je dois me taire ! » Le silence se fit, et l'image disparut.

Rogue jura. Puis il vit Lucius, un sourire d'intelligence aux lèvres, de toute évidence convaincu d'avoir résolu une énigme.

« Jones, en vérité ! » Lucius rit amèrement. « Est-ce que je peux te féliciter pour la naissance de ta fille ? C'est malin de ta part, de l'avoir cachée pendant toutes ces années ! J'aurais dû m'en douter quand Narcissa m'a dit qu'elle te ressemblait. »

Rogue le dévisagea, abasourdi, mais ne chercha pas à le détromper. Quand Lucius pensait à autre chose qu'au danger qu'encourrait Drago, il était assez fier d'avoir percé le secret de Severus. Alors comme ça la fille avait été élevée à l'étranger par la mère et le prétendu père. Avec leurs morts, Severus avait été forcé de la faire venir à Poudlard. Illégitime, donc, mais quoi qu'il en soit une sang-pur, et la fille de son vieil ami. En ces conditions, elle n'était que plus convenable encore. Oui, si la fille survivait à cette aventure, elle serait tout à fait convenable. Lucius avait toujours donné à Drago tout ce qu'il voulait, et il ne comptait pas s'arrêter.

Rogue lui donna un pinceau curieux. « Poils de chat, » fut sa seule explication. « Absolument essentiel. » Avec conviction, Lucius le plaça dans une poche, et suivit son ami hors des donjons. Au premier tournant, l'intolérable Granger faillit leur rentrer dedans. Les cheveux plus en bataille que jamais, elle agitait un parchemin. Elle était à bout de souffle, et attrapa avec insolence la robe de Rogue, mais Severus fut bien plus clément qu'il ne l'aurait été, et prit le temps de l'écouter.

« J'ai une copie de la carte, » haleta t'elle. Severus la saisit, comprenant immédiatement sa valeur.

Il se tourna furieusement vers elle. Le parchemin était vide. « C'est une blague ? » hissa t'il.

Exaspérée, elle renifla et tapa le parchemin avec sa baguette « Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises… »

Les détails complexes se révélèrent. Les deux sorciers étaient ébahis, et impressionnés à leurs corps défendant. Lucius connaissait bien la carte de base, mais des points se déplaçaient sur le parchemin, surmontés de leurs noms. Rogue chercha les donjons. Lui et Lucius arrachèrent la carte des mains d'une Hermione indignée.

« Là ! » dit Lucius avec triomphe. « Dans la cave est. Blaise Zabini et Lily… » il leva un sourcil moqueur vers Rogue, « Jones. »

Le cœur de Rogue avait failli s'arrêter. Il avait craint un moment que la carte ne révèle le nom de « Evans. » Apparemment, Lily avait pris ses précautions contre cette éventualité. Il marqua une pause, et dit, « Merci, Mademoiselle Granger. Cela se révélera utile. » Il s'éloignait à grands pas avec Lucius, quand elle les rattrapa.

« Attendez ! » cria t'elle d'une voix rauque. « Vous avez la potion ? »

« Bien sûr que j'ai la potion ! Vous me prenez pour un idiot ? »

« Comment allez vous asperger Oldyfart avec ? »

« Oldyfart ? » demanda Lucius.

« Ca, » aboya Rogue avec impatience, « ce n'est pas votre problème. Vous nous retardez. Otez vous du chemin. »

Elle attrapa de nouveau sa robe. « Je viens avec vous. »

« Certainement pas. »

« Vous ne connaissez pas l'incantation. »

Rogue s'arrêta. Lucius lui lança un regard interrogateur, et sourit doucement. « Alors vous avez une arme contre lui. »

« Oui, » dit brusquement Rogue. « Nous avons une arme… »

Hermione l'interrompit. « … mais elle est inutile sans l'incantation. Je la connais. »

Rogue marmonna, « Je-sais-tout. »

Hermione ne se laissa pas démonter. « Oui. C'est vrai. Je suis une je-sais-tout. Je sais tout. Je connais l'incantation qui va nous débarrasser d'Oldyfart pour de bon. Je sais comment utiliser la potion. Vous savez ce qu'il faut faire avec la potion, et Harry connaît l'incantation. Mais je suis Mademoiselle-je-sais-tout, et je connais les deux… Alors vous feriez mieux d'arrêter de discuter et de m'emmener avec vous ! »

Lucius haussa les épaules. « Emmène-la. Le pire qui puisse arriver est que le Seigneur des Ténèbres la tue. » Lui et Rogue se remirent rapidement en marche vers les limites de Poudlard, Hermione trottinant derrière eux.

Elle demanda, « Vous avez les pinceaux de poil de chat ? »

Les hommes qui marchaient devant elle sortirent les pinceaux de leurs poches, et les lui montrèrent. Lucius murmura doucement, « Elle est pire que je l'aurais pensé, une vrai petite harpie qui nous harcèle. »

Rogue grogna en réponse. « Tu peux dire ce que tu veux, c'est la meilleure assistante que j'aie eu et que j'aurai jamais. Si nous survivons, je lui proposerai un apprentissage. »

Lucius était poliment incrédule. « J'aime autant que ce soit toi que moi. »

Rogue le regarda dans les yeux. « Oui, moi aussi. »

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La voix appela « Rookwood ! » du bout du couloir. Blaise posa une main sur le bras de Lily, et elle murmura à la hâte, « Je crois que j'entends quelqu'un approcher ! Je dois me taire ! » Elle fit glisser la mornille sous sa robe, et elle et Blaise s'aplatirent contre le mur, dissimulés par une pile de caisses, et retinrent leur souffle alors que des bruits de pas approchaient.

« Est-ce que la saleté de gamine a fini par se montrer ? » demanda le nouveau venu, en se penchant dans la pièce. « Rookwood ? » Le sorcier ratatiné et grisonnant jura. « Espèce de crétin, il va t'écorcher vif si tu t'es pris une pause. » Il fit un autre pas dans la pièce. « Rookwood ! » souffla t'il. « T'es ivre? »

Lily entendit Blaise déglutir, et tous les deux levèrent lentement leurs baguettes. Le Mangemort marqua une pause, marmonna quelque chose d'inintelligible, et sortit.

Ils prirent tous les deux une profonde inspiration. Lily sentit sa mornille chauffer de nouveau.

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Hermione était indignée d'être transportée comme un sac de pommes de terre. Le Professeur Rogue l'avait attrapée sans lui demander son avis, les avait fait Transplaner, et ils étaient maintenant au pied d'une colline, cachés par des arbres. Rogue la laissa tomber sur ses pieds sans cérémonie, et lui et Malefoy se concentrèrent immédiatement sur la carte.

« Ils sont toujours dans la cave. Avec Rookwood. Ça doit être lui qu'ils ont pétrifié. Nott est dans le couloir. »

« D'accord, » dit Rogue. « Quel est le chemin le plus rapide vers cette cave ? »

Lucius ricana. « J'imagine que le plus rapide serait de frapper à la porte d'entrée, mais j'admets que je préfèrerais une approche plus subtile. Il y a un tunnel qui mène près de la rivière, et il n'est pas loin, regarde, » dit-il, le désignant sur la carte. Rogue acquiesçait et Hermione était sur la pointe des pieds, essayant de voir entre eux. « Les garçons ne seront pas là avant quinze bonnes minutes. Si nous pouvons nous faufiler et faire sortir la fille, nous pourrons arrêter Drago avant qu'il ne devienne un héros mort. » Il considéra Hermione, la tête penchée de côté. « Je suppose qu'elle peut rester là pour avertir Potter et Drago quand ils arriveront. »

« Toute seule ? » protesta Hermione.

La bouche de Malefoy se tordit en un sourire à moitié amusé. « J'ai bien peur que ni l'un ni l'autre ne soyons disponibles pour tenir votre main moite. »

Elle plissa les yeux et répondit. « Ce n'est pas une bonne idée de me séparer de la potion, si nous sommes forcés de l'utiliser. Je vous l'ai dit. Je connais l'incantation. » Elle fit un pas en avant. « En fait, je dirais que nous devrions vous laisser ici, pendant que le Professeur Rogue et moi allons au secours de Blaise et Lily. »

Elle élevait la voix, et Rogue la fit taire furieusement.

« C'est ridicule. On y va tous, si vous arrêtez de vous chamailler. Le tunnel est vide en ce moment. Il est protégé ? »

Lucius avait un rictus. « Notre marque nous permettra de passer, et la… Mademoiselle Granger aussi, tant que l'un de nous la touche. A l'intérieur, il y a des barrières anti-Transplanage, malheureusement. »

Rogue rendit la carte à Hermione. « Allez. Apparemment il n'y a personne sur notre chemin avant que nous n'atteignions la maison et que nous n'entrions dans la serre. Rabastan et Rodolphus y sont en ce moment.»

Elle examina la carte, cherchant les mouvements, puis dit, « Je vois Voldemort. Et Bellatrix Lestrange. Ils sont à l'étage. Ils sont… très proches… Beurk. » C'était une chose à laquelle elle préférait ne pas penser.

Malefoy étouffa un rire moqueur. « On y va ? »

Lui et Rogue, leurs baguettes à la main, ouvrirent la route. Rogue se tourna vers elle, « Et vous, Mademoiselle Granger, vous nous guidez. »

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Les estimations de Lucius étaient erronées. Il n'avait aucune idée de la vitesse à laquelle Harry pouvait pousser son Eclair de Feu, ni de celle à laquelle Drago volait pour garder le contact avec lui. Qu'il ait été conjuré par leurs souhaits ardents, ou simplement dû aux forces de la nature, un fort vent du nord les poussait vers la frontière, puis vers le village de Little Hangleton. Après avoir étudié la carte si longtemps, Harry n'eut aucun mal à reconnaître la place vue du ciel, et, Drago sur ses talons, il se posa délicatement sur le toit de la Maison Jedusor.

Le vent soufflait toujours violemment, trop violemment pour pouvoir regarder la carte dans cet endroit découvert.

Il la déplia partiellement, et Drago ne put s'empêcher d'admirer le travail qu'elle avait demandé. Ils étaient au dessus de l'ancien quartier des domestiques. Il y avait une chambre vide sous eux. Avec précautions, ils avancèrent jusqu'au bord du toit et regardèrent en bas. Ils pouvaient juste se glisser à travers la fenêtre en s'entraidant. Ils réduisirent leurs balais et les rangèrent dans leurs poches, et, surmontant leur répugnance à se toucher l'un l'autre, basculèrent. L'un d'abord, puis l'autre, se retrouvèrent dans une chambre à coucher vide, ne contenant qu'un petit cadre de lit en fer sans matelas. Se tenant dans la faible lumière de la fenêtre, ils regardèrent de nouveau la carte.

Les petits points étaient immobiles, ou allaient de long en large. Drago fut le premier à voir les noms 'Blaise Zabini' et 'Lily Jones', dans le coin est des caves. Ils virent également 'Augustus Rookwood' à quelques mètres.

« Tu penses qu'ils sont prisonniers ? » Drago se sentait mal. Il avait eu l'occasion de rencontrer Rookwood. Un homme grand et sec, qui n'avait pas l'air tout à fait fini. Il avait fait grand cas de Drago quand il était petit : il voulait toujours le toucher, le prendre sur ses genoux, le serrant toujours un peu trop avec sa mauvaise haleine et ses yeux avides. Drago l'avait craint étant enfant, et en vieillissant, il avait compris que d'être un Malefoy avait été sa seule protection contre une sorte de prédateur particulièrement abjecte. Maintenant qu'il avait ouvert les yeux, il avait également compris que c'était exactement le genre de personnes que l'on pouvait s'attendre à voir graviter autour du Seigneur des Ténèbres : une personne dont les désirs étaient hors de la norme acceptée socialement, et qui trouverait à son service la possibilité de répondre à ses appétits sans contrainte.

Harry était inquiet lui aussi. « Il ne bouge pas, » dit-il lentement. « Peut-être qu'il les menace de sa baguette. » Il regarda de plus près. « Mais eux, ils bougent un peu. Peut-être que ce sont eux qui l'ont fait prisonnier. Et regarde, ils ne peuvent pas sortir de la pièce, parce que Nott est dans le couloir à quelques mètres de là. »

« Nott n'est pas un problème, c'est un vieux pantin pathétique. Une fois que nous y serons nous le Stupéfierons, et nous sortirons par le tunnel qui mène à la rivière, là… »

« D'accord, mais d'abord… »

« D'abord ? D'abord vous allez mourir, bébé Potter et le bébé chéri de ma petite sœur. »

Bellatrix Lestrange était à la porte, avec l'air réjoui de quelqu'un qui découvre que Noël est en avance.

Certaines personne se figent sous la panique, comme des moucherons autour du réverbère de la fatalité. Harry Potter n'avait jamais été du nombre. Il avait déjà sa baguette à la main, et envoya immédiatement un sort à son ennemie jurée. « Stupefix ! »

Elle évita le sort sans difficulté, avec un rire cristallin. « Il sait que vous êtes là, petits bébés imbéciles ! Vous pensiez que vous pouviez entrer dans la maison de Notre Seigneur comme une paire de petits vandales moldus ? Diffindo ! »

Harry roula hors de la trajectoire, pendant que le sort tranchant s'abattait sur les murs. Il pouvait déjà entendre des cris dans les étages inférieurs.

Drago érigea un bouclier. « Tu dois être ma tante Bella. J'ai entendu parler de toi. » Narcissa lui avait vraiment parlé de sa sœur : combien elle l'avait tourmentée, comment elle avait ruiné tout ce à quoi elle tenait, elle avait menti pour lui créer des problèmes, et avait manipulé leurs parents pour obtenir ce qu'elle voulait. Il décida que de continuer la discussion pourrait la distraire, si seulement Potter pouvait comprendre son intention.

« Tu as raison, petit dragon. Baisse ta baguette et viens embrasser tante Bella. Nous allons tant nous amuser, rien que tous les deux. Je te renverrai en petits morceaux à la méchante Narcissa, comme ça elle saura qu'elle ne peut pas cacher ses jouets à Bella. »

Harry prit appui sur le mur opposé, attendant son ouverture. Alors que Bellatrix tournait les yeux vers Drago, il s'écria, « Expelliarmus ! »

Elle couina, « Protego ! » mais trop tard. Harry lui lança un sort qui ricocha, la déséquilibrant. Elle boitilla vers sa baguette, et la leva pour lancer un autre sort, mais Drago enchaîna immédiatement avec un autre « Expelliarmus ! »

Elle était debout devant la fenêtre, et le second sort la frappa, la faisant reculer et basculer par la fenêtre. La main étendue qui tenait sa baguette cogna contre le mur en passant, et la baguette vola dans la main gauche de Drago avec un petit bruit. Sa silhouette se dessinait dans la lumière de la lune, semblant suspendue en l'air. Puis elle chuta brusquement, roulant sur la pente puis le long du mur du jardin jusqu'à la route.

« Nous ne pouvons pas rester là ! » s'exclama Harry. Il aurait voulu poursuivre Bellatrix et se débarrasser d'elle pour de bon, mais ils n'en avaient pas le temps. Il lissa la carte et la regarda. « Dolohov et Mulciber montent l'escalier ! »

Drago y jeta lui aussi un coup d'œil, et dit. « Ce serait idiot d'attendre qu'ils viennent nous trouver. Je prends Mulciber. »

« Ca marche. » Ils prirent leur inspiration, et se précipitèrent dans le couloir.

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« Stop ! » chuchota Hermione. « Crabbe descend dans le tunnel. Il est juste au prochain tournant à gauche. »

Lucius lâcha avec dédain, « Crabbe. » Il croisa le regard de Severus avec un air moqueur. « On peut s'en occuper en silence. »

Rogue acquiesça brièvement, et les deux hommes se glissèrent vers la courbure du tunnel. Avec l'habitude née de leur longue collaboration, ils passèrent en mode de combat, apparaissant sans sommation avant que Crabbe ait eu la temps de les reconnaître. Il s'écroula au sol, et fut immédiatement ligoté par des cordes qu'ils conjurèrent.

« Ca en fait deux en moins, » annonça Lucius avec satisfaction. Crabbe fut lévité hors de leur chemin, et ils continuèrent leur progression dans le tunnel jusqu'à l'entrée de la maison.

Hermione murmura, « Les deux Lestrange sont toujours là. Ils ne bougent pas. »

« Dans le jardin d'hiver, » dit pensivement Lucius. « Ils jouent aux échecs. »

C'était ce qu'ils faisaient. Dans la pièce au haut plafond, traversée de courants d'airs et emplie de plantes mortes depuis longtemps, les deux sorcier étaient assis de part et d'autre d'une petite table, entièrement absorbés par leur jeu. Rogue et Lucius les observèrent avec attention depuis la porte avant d'entrer et de les mettre hors de combat. Eux aussi, ils furent ligotés et dissimulés derrières de grands cache-pots.

« C'est presque trop facile, » susurra Lucius. Il regarda les deux frères sans aménité : tous les deux avaient soutenu Bellatrix quand elle avait formulé ses accusations contre lui. C'était toujours satisfaisant de faire comprendre aux gens quel ennemi redoutable il était.

Hermione étudiait la carte avec un malaise grandissant. Elle chuchota, « Chut ! Peter Pettigrow est de l'autre côté du mur ! On dirait qu'il fait les cents pas. » Elle désigna le milieu du mur, qui les séparait de la petite salle à manger. S'ils pouvaient atteindre le couloir qui sortait du jardin d'hiver, ils devraient être capables de trouver un chemin qui les mènerait à la cuisine, et de là à la cave. Une fois dans le couloir cependant, Pettigrow pourrait les voir s'il regardait de leur côté.

En silence, ils traversèrent le jardin d'hiver, se dirigeant vers la porte. La maison craquait affreusement, et un soudain courant d'air froid traversa la pièce. Hermione regarda autour d'elle, cherchant une fenêtre ouverte.

Soudain, il y eut des cris à l'étage. La plainte d'une femme résonna à travers la maison avec un faible écho. Ce ne pouvait être que Bellatrix Lestrange. Malefoy et Rogue s'entre-regardèrent, horrifiés.

« Ils sont déjà là ! » cria Lucius. Il se mit à courir vers la porte ouverte.

« Lucius ! » Rogue le suivit. Hermione essayait de regarder la carte, qui se pliait dans le courant d'air.

« Attendez ! » cria t'elle, essayant de les rattraper. Lucius était quasiment à la porte quand retentit un « Expelliarmus ! », et il s'écroula sur le côté, laissant s'échapper sa baguette. Rogue se tourna brusquement, la baguette à la main, mais il y eut un autre « Expelliarmus ! » et il vola jusqu'aux pots de fleurs près de la fenêtre.

Peter Pettigrow était dans la pièce d'à côté, leur envoyant une volée de sorts. « Stupefix ! Stupefix ! » Hermione courut se cacher derrière un palmier en pot desséché, mais le petit homme vicieux la vit, et envoya un « Incendio !» en direction de sa cachette. Le palmier s'embrasa comme une torche, et d'autres plantes suivirent, comme des allumettes. Elle bougea, lui envoyant un « Expelliarmus ! », essayant de le désarmer. Rogue était derrière les plantes, immobile. Elle regarda vers la porte, où Lucius était étendu, apparemment inconscient. A l'étage, elle pouvait entendre les hurlements et les sorts que l'on criait. La mornille contre sa poitrine était si chaude qu'elle la brûlait, mais ce n'était pas le moment de s'arrêter pour discuter. Elle se cacha dans un coin de la pièce, et Pettigrow le fit voler en morceaux. Elle roula sur elle-même et essaya de courir, mais ses jambes ne la portaient pas. Elle s'écroula par terre, et après un « Expelliarmus ! » elle se retrouva privée de sa baguette et vulnérable. Un sort de Jambencoton, se dit-elle, mortifiée. Il doit penser que je suis absolument méprisable. Elle se retourna, essayant de voir un peu la pièce.

Pettigrow s'approchait, avec un grand sourire. « Pour une fille si intelligente, tu as la sale habitude de mal choisir tes amis. Je ne me serais jamais attendu à te voir en compagnie de Lucius. Il mange des petites filles comme toi pour son petit déjeuner. Mais pas cette fois. » Il eut un rictus. « On dirait que tes amis sont là-haut. Je vais laisser Bella s'occuper d'eux. Si ce sont d'autres de tes camarades de classe, j'aime autant ne pas les tuer moi-même. J'ai le cœur trop tendre. C'est ce qu'il y a de pire en moi. »

Hermione le regarda avec un visage impassible, essayant de ne pas lui laisser voir ce qu'elle pensait. Il ne sait pas ce qui se passe. Est-ce qu'il sait seulement que Lily est dans la maison ? « Je ne pense pas que ce soit le pire, » le contredit-elle. L'horrible petit homme avait sa baguette, et ramassait celles de Rogue et de Malefoy.

Il revint vers elle, la regardant pensivement. « Non, tu te trompes. Je suis vraiment désolé pour toi, tu sais. Ces deux-là méritent le châtiment que le Seigneur des Ténèbres choisira de leur infliger, mais toi tu n'es qu'une petite fille. Je n'aime pas que les enfants souffrent. »

Hermione se mordit la lèvre. Elle se mit prudemment en position assise, positionnant ses jambes endormies de façon plus confortable. « Alors laissez-moi partir. Personne n'a besoin de savoir que je suis venue. »

« Non, » dit-il, secouant la tête avec compassion. « Il le saura. Il sait tout. Et quand il interrogera ces deux-là, » continua t'il en désignant les deux sorciers inconscients d'un signe de tête, « ils lui parleront de ta présence. Et qu'est-ce qui m'arrivera ? Non. » Il réfléchit une minute, puis, l'air généreux, annonça. « Je vais te faire une faveur, parce que tu es vraiment une gentille petite fille, pour une sang-de-bourbe. Je vais te tuer maintenant. Il ne sera pas content, mais il sait qu'il y a parfois des accidents pendant les duels. Ce sera mieux pour toi, et je n'aurai pas à te voir souffrir. »

Il leva sa baguette, avec un sourire d'excuse, puis son visage se transforma et il eut une horrible expression. « Avada … »

Il fut plaqué au sol par une masse grise et rugissante. Abasourdi, il tenta de se redresser, et fut de nouveau plaqué au sol par une patte puissante.

« Professeur Lupin, » cria Hermione. « Il a nos baguettes ! Ne le laissez pas s'échapper ! »

Pettigrow rétrécissait déjà. Son corps rapetissait, il tombait à quatre pattes : il se transformait en rat, essayant d'atteindre la sécurité en passant par un trou dans le mur. Lupin bondit après lui, dans un mouvement irrépressible et horriblement rapide. Le rat changea de direction, essayant de se débarrasser de son poursuivant, mais la distance entre lui et le mur était simplement trop grande. Les mâchoires du loup-garou claquèrent, et le rat fut pris. Couinant, se débattant, il fut secoué au point d'en devenir flou. Il y eut un craquement d'os distinct, et la créature cessa de bouger.

Le loup-garou jeta le rat au loin, et resta là, furieux et haletant, pendant que le cadavre reprenait sa forme initiale. Peter Pettigrow état mort, le cou brisé, la tête pliée à un angle peu naturel, et une expression d'angoisse sur le visage.

Extrêmement effrayée, Hermione rampa vers l'animagus mort, et chercha dans ses poches les baguettes confisquées. Elle n'en trouva pas trois, mais six. Hermione se demanda à qui appartenaient les autres, puis regarda à deux fois l'une d'entre elles. Elle était identique à celle de Lily. Peut-être que c'est la sienne. Peut-être que c'est la baguette de l'autre Lily, et que Pettigrow l'a volée quand elle a été tuée par Voldemort. Elle prit toutes les baguettes, et utilisa la sienne pour mettre fin au sort qui l'affectait. Elle fit un signe prudent de remerciement à Lupin, et se mit à la recherche de Rogue derrière les pots de fleurs.

« Ennervate ! » Rogue ouvrit grand les yeux, et il fut sur pied à une vitesse étonnante, malgré ses blessures apparentes. Elle lui tendit sa baguette. « C'était Pettigrow, mais il est mort. » Elle vit qu'elle l'avait impressionné, et remua la tête. « Ce n'est pas moi qui l'ai tué. C'est le Professeur Lupin. »

Rogue vit alors le loup-garou, qui se tenait dans le clair de lune que l'on voyait par les fenêtres. Il se figea, réprimant un tremblement de peur involontaire. Lissant sa robe, il se domina et fit à Lupin un signe de tête imperceptible.

Hermione annonça, « Je vais contacter Lily, et voir si elle va bien. » Rogue la regarda avec étonnement alors qu'elle sortait sa mornille. Il n'avait pas vraiment réalisé jusque là que d'autres en avaient. Mais oui, Lily a dit qu'elle avait discuté avec quelqu'un au sujet de la carte. Il aurait dû se douter que la mademoiselle-je-sais-tout tremperait là-dedans elle aussi. Il s'avança vers Malefoy et le secoua. Lupin grogna sourdement.

« Il est de notre côté maintenant, » lui dit-il froidement. « Ne me fais pas de reproches si le Directeur ne partage pas ses informations. Lucius et Narcissa sont cachés à Poudlard de puis près d'un mois. »

« C'est vrai, Professeur Lupin, » ajouta rapidement Hermione. « Harry et moi les avons vu avec le Directeur la nuit où ils sont arrivés. C'est la raison pour laquelle Drago a été attaqué. »

Le loup-garou arrêta de grogner, mais il se pencha sur Lucius alors qu'il se réveillait. Le sorcier eut un cri étouffé en voyant le museau baveux si près de son visage.

Rogue le rassura. « Ce n'est que Lupin. Il s'est finalement révélé bon à attraper les rats. »

« Ah, » dit Malefoy en regagnant sa composition. Il se leva et jeta un regard satisfait sur le corps de Pettigrow. « Très bien de sa part. » il regarda de nouveau vers le couloir avec inquiétude. « Il faut qu'on aille aider Drago. Ma baguette, s'il vous plait. »

Hermione la lui donna, et par réflexe, il l'essuya sur sa robe. Elle le regarda furieusement, et il se rendit compte de ce qu'il venait de faire. Il haussa les épaules dans un geste d'excuse dénué de sincérité, puis il se retourna et s'apprêta à sortir de la pièce.

« Attends ! » s'écria Rogue. « Vérifions ce qui se passe à la cave ! »

Lucius s'arrêta pendant qu'elle dépliait la carte, et Rogue appela doucement « La mornille de Lily. »

Lily apparut immédiatement. « Où êtes-vous ? Qu'est-ce que c'est que tout ce bruit à l'étage ? »

Rogue répondit à la hâte. « Nous sommes dans le jardin d'hiver. Nous avons maîtrisé quatre des Mangemorts. » Il regarda par dessus l'épaule d'Hermione. « Nott est monté parce que Drago et Potter sont entrés dans la maison par une fenêtre de l'étage. Sortez de la pièce et tournez à gauche. Montez les escaliers vers la cuisine. Tournez deux fois à droite, et suivez le couloir. Nous vous retrouvons là. »

Pendant ce temps, Hermione essayait de joindre Harry. « La mornille de Harry. S'il te plait, Harry, réponds-moi ! » Sa mornille restait chaude, et soudain Dumbledore apparut, l'air inquiet.

« Mademoiselle Granger ! Pourquoi le nom de Peter Pettigrow a t'il disparu de la carte ? »

« Il est mort, Monsieur. Nous allons dans le couloir et Lily et Blaise viennent à notre rencontre. Je n'arrive pas à joindre Harry, mais nous les voyons lui et Drago se déplacer à l'étage et ils font beaucoup de bruit. »

Lucius Malefoy était impatient et furieux. « Nous n'avons pas le temps de discuter avec le vieux fou ! J'y vais ! »

Dumbledore sourit calmement. « Ah, oui, bonjour à vous, Lucius. Faites attention en montant l'escalier du fond. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais le nom de Voldemort a également dis… »

Il y eu un craquement inhumain à l'étage. Lupin bondit devant eux, et Lucius Malefoy courut derrière lui. Hermione agrippa la carte et suivit Rogue, qui avançait rapidement mais plus prudemment dans le long couloir qui menait à la cuisine et à la salle à manger des domestiques. Dans sa robe, il attrapa un objet noir, ovoïde, qui s'adapta bientôt à la forme de sa main. Il murmura « Caldus ! »

Cela attira l'attention d'Hermione. « Est-ce que c'est…? »

« Silence ! » la coupa t'il. Il s'arrêta dans le couloir, et se tourna vers elle. « Quand ils arriveront dans ce couloir, emmenez-les par le jardin d'hiver et le tunnel pour les mettre en sécurité. Vous rappellerez Dumbledore. Il enverra quelqu'un de l'Ordre pour les chercher. Je ne peux pas laisser Lucius et Drago se battre seuls. »

Ni Harry et le Professeur Lupin, pensa Hermione, rebelle. Surtout maintenant que vous avez envers le Professeur Lupin une Dette de Sorcier. Il y eut un cri d'homme rauque à l'étage, et Hermione se sentait déchirée. « Moi non plus je ne peux pas laisser Harry ! »

« Mademoiselle Granger, pour une fois dans votre vie, essayez d'obéir à vos aînés ! Je n'ai pas le temps de rester me disputer avec vous. J'étais prêt à vous offrir un apprentissage après votre diplôme, mais si vous ne pouvez pas faire ce qu'on vous demande ! » Il leva les yeux vers les escaliers, puis retourna le regard vers elle, lui disant, « Il faut que vous aidiez Lily et Blaise. Il n'y a personne d'autre. »

Il tira sur le coin de la carte, et elle la leva pour qu'il puisse y jeter un dernier regard. Hermione, essayant d'entendre Lily approcher, la regarda à peine. Rogue s'éloigna, comme une grande ombre noire, et le coin de la carte se replia de nouveau. Elle eut à peine l'occasion de remarquer un nom. Nagini. Je connais ce nom. Puis elle fut de nouveau distraite par le bruit du duel à l'étage. Il y eut un rugissement sauvage et terrible, alors que Lupin se précipitait sur les Mangemorts, et des cris de frayeur. Hermione pensa entendre des gens qui couraient.

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Blaise avait attrapé la main de Lily, et ils s'étaient mis à courir dans le couloir souterrain au plafond bas. Il y avait quelques marches menant à une porte. La porte était fermée, mais ils la forcèrent et la franchirent comme si leur vie en dépendait. Ils étaient dans la cuisine. Une pièce grande, lugubre, dans laquelle flottait l'odeur douce-amère de la nourriture que l'on a laissé moisir depuis longtemps. La saleté encrassait les fenêtres. Des toiles d'araignée se trouvaient sur leur chemin, des filandres gluantes s'enroulant autour d'eux alors qu'ils traversaient la pièce en courant. Il y avait deux portes devant eux.

« A droite ! » s'exclama Blaise, et il ouvrit la porte à la volée, faisant grincer ses gonds. Ils étaient dans un couloir aveugle qui ne menait nulle part.

« Encore à droite ! » se souvint-il. Ils continuèrent à courir, respirant l'air humide et fétide. Il y avait une odeur de brûlé devant eux. Quelques rubans de fumée flottaient dans le couloir.

« Hermione ! » appela Lily. Son amie était là, la carte et sa baguette dans les mains, mais elle leur fit un sourire de soulagement en les apercevant.

« Par là ! » leur indiqua Hermione, en désignant la source de l'odeur de brûlé.

« Où est Severus ? Où est Harry ? » demanda Lily en regardant autour d'elle avec agitation.

« A l'étage, ils retiennent les Mangemorts. Le Professeur Rogue m'a demandé de vous faire sortir d'ici ! »

Lily s'arrêta, « Je ne me sauve pas en les laissant se faire tuer ! Allez-y, vous deux. »

« Bien sûr ! » convint Blaise dans un sarcasme. « Je vais me sauver en te laissant me protéger. » Il regarda la carte mal en point qu'Hermione serrait dans ses mains. « Qu'est-ce que c'est ? »

Rapidement, Hermione la déplia. « Regarde, » dit-elle en les désignant, « Harry et Drago sont là. Son père et le Professeur Rogue montent l'escalier derrière le Professeur Lupin. On dirait que les Mangemorts sont coincés au milieu. »

« C'est courageux, » murmura Blaise en levant les sourcils.

« C'est de la chance, » répondit Hermione. « Le Professeur Lupin est sous sa forme de loup-garou, il est imperméable à la magie. Il est plutôt impressionnant. » Elle attrapa la manche de Lily. « Le Professeur Rogue m'a donné l'ordre de te faire sortir. Ça compte beaucoup pour lui. »

« Mais ça compte pour moi de l'aider, lui. »

Lily et Blaise s'entre-regardèrent. Il vit quelque chose dans ses yeux, et eut un sourire étrange. « Oui, tu as raison. Nous n'aurons jamais de meilleure occasion. »

Hermione savait que c'était peine perdue. D'un même mouvement, ils se tournèrent vers l'escalier et commencèrent à le gravir.

Alors qu'ils tournaient sur le palier de l'étage supérieur, Blaise fit tranquillement remarquer à Lily, « C'est ton père, pas vrai ? »

Abasourdie, Lily faillit trébucher dans les escaliers. Pourquoi le contredire ? Laissons-le croire ça pour le moment. Ils atteignirent l'étage suivant, et tournèrent pour prendre la prochaine volée de marches.

Hermione trébucha, et elle laissa tomber la carte. Elle avait oublié un détail important. « Attendez ! » s'exclama t'elle. « Où est Voldemort ? »

« Derrière vous. »

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Harry était assis par terre, à l'abri d'un morceau de mur, la carte étalée sur ses genoux. Mulciber était hors d'état de nuire, gémissant et privé de sa baguette dans un coin, mais Dolohov était un bâtard vicieux et intelligent, et il restait en mouvement, en leur envoyant un sort de temps en temps. Drago saignait à cause d'un 'Diffindo' qui avait ricoché, mais il était toujours alerte et capable de se battre. Ils devaient mettre Dolohov sur la touche. Harry, à l'aide de la carte, pouvait voir l'endroit où Dolohov s'était replié.

Il n'y avait rien d'autre à faire. Il commença à envoyer des sorts pour détruire le mur derrière lequel se cachait le Mangemort. Drago en fit autant, et bientôt le mur s'écroula devant leurs yeux. Il y eut du bruit à l'étage inférieur, et un grognement lointain. Harry se demanda ce qui allait leur tomber dessus.

Il regarda de nouveau la carte. « Attends ! » cria t'il à Drago, avec une joie soudaine. Il désigna frénétiquement la carte, et Drago traversa la pièce, à couvert. L'index sale de Potter désignait des points marqués 'Severus Rogue', 'Remus Lupin' et mieux encore, 'Lucius Malefoy'. Drago sourit à Potter, oubliant un instant de le détester.

Dolohov envoya un autre « Dirumpi ! » dans la pièce, faisant tomber plus de plâtre, et envoyant des échardes et des morceaux de verre partout. « Protego ! » cria Potter, les protégeant tous les deux.

A l'extérieur, il entendit un autre sorcier demander à Dolohov en criant, « Où est Bellatrix ? Et où diable sont Rodolphus et Rabastan ? »

Dolohov répliqua, « On n'a pas besoin d'eux pour tuer deux gamins ! »

Harry aurait voulu pouvoir appeler Hermione à Poudlard pour demander de l'aide. Il entendit des bruits de course en dessous, et prit une profonde inspiration, s'essuyant le visage sur sa manche. Une petite mornille d'argent sur son cordon de soie noire se prit dans un bouton, et Harry tira dessus. Il se souvint de son usage et tapa dessus.

« La mornille de Lily ! » Il n'y eut pas de réponse. « La mornille d'Hermione ! » Essaya t'il avec exaspération. Le visage du Professeur Dumbledore apparut. « Professeur ! » s'exclama t'il, soulagé. « Drago et moi sommes dans la maison Jedusor. La carte montre Remus, Rogue et Malefoy qui viennent vers nous. Nous retenons deux ou trois Mangemorts… »

Dumbledore l'interrompit, l'air inquiet. « Je sais où tu es, Harry. Je vous vois tous sur la carte. J'ai envoyé tous les membres de l'Ordre que j'ai pu trouver vous rejoindre, mais il leur faudra un moment pour arriver. Ecoute, Harry ! Je ne vois plus le point de Voldemort. Peut-être qu'il a Transplané, ou alors il s'est rendu compte qu'il était surveillé, et il trompe délibérément la carte. Soyez sur vos gardes. Nagini est là aussi, un étage en dessous de vous, et très près de Hermione, Lily et Blaise. Il faut que vous les sortiez de là le plus vite possible. »

Il y eut une autre chute de plâtre, puis un hurlement à pleine gorge et un cri de surprise. Drago le regarda, terrifié.

« Oui, » confirma Harry avec un sourire de triomphe. « C'est le Professeur Lupin une nuit de pleine lune. »

Des pas se précipitaient dans l'escalier. Un voix s'écria « Avad… » et se tut. Un corps dévala les escaliers, la tête cognant chaque marche.

Dolohov se précipita dans la pièce, lançant des sorts comme un malade. Il démolit le bouclier de Drago, et tourna sur lui même, cherchant une issue. Il lança un autre sort, et se précipita vers la fenêtre. Harry et Drago crièrent « Expelliarmus ! » au même moment, et l'homme s'écrasa contre le mur la tête la première. Il s'écroula à genoux, le nez pissant le sang, et loucha en voyant un loup-garou dans l'encadrement de la porte. Il tomba de côté sur le sol, et fut ligoté un instant plus tard par Rogue, qui avait repoussé Lupin.

Lucius Malefoy se précipita vers son fils. « Drago ! Tout va bien ? »

« Père ! » Il eut un sourire gêné. « Nous sommes venus pour aider Lily… »

Lucius eut un reniflement hautain, puis un autre en voyant Harry serrer Lupin dans ses bras. Drago grimaça. C'était vraiment à vous donner la chair de poule.

Rogue leva les yeux au ciel, et tapa sa mornille. « Lily, où es-tu ? Granger, je vous avais ordonné de les faire sortir ! »

Harry lâcha Lupin, et dit, « Professeur Rogue ! Je viens de parler au Professeur Dumbledore. Le nom de Voldemort a disparu de la carte. Il pense qu'il a Transplané ou qu'il a réussi à tromper le sortilège de la carte. Nagini est à l'étage du dessous. »

Lucius marmonna, « Ca ne me dit rien qui vaille. »

Harry continua précipitamment. « Le reste de L'Ordre est en route. Est-ce que vous avez la potion ? »

Rogue plongea la main dans une poche profonde de sa robe. Il en sortit un objet souple, noir et ovoïde, qu'il donna à Harry.

C'était chaud, à peu près à la température du corps. Harry regarda Rogue, interrogateur.

Rogue expliqua, en exprimant son mépris dans chaque mot. « C'est une Bombe d'eau du bain Weasley. Elle explose lors de l'impact, et chaque bombe contient 200 litres. C'est bien assez pour asperger le Seigneur des Ténèbres. » Il distribua des bombes à Drago et Lucius, et en garda une pour lui même, en disant, « On peut les ouvrir avec les mots 'eau du robinet'. » Il croisa le regard de Lucius. « Une fois qu'il a été mouillé par la potion, nous devons utiliser de cette même potion pour dessiner une porte avec l'un des pinceaux. »

Lucius étouffa un rire incrédule. « Quel genre de porte ? Tu crois que le Seigneur des Ténèbres va se tenir tranquille pendant qu'on dessine des portes ? »

Rogue grommela, « N'importe quelle porte fera l'affaire. Elle n'a pas besoin d'être grande, elle doit seulement être dessinée avec un pinceau en poils de chat. Une fois mouillé de potion, il sera quasiment immobilisé. En théorie. Ensuite Potter récitera l'incantation, et elle devrait envoyer le Seigneur des Ténèbres dans un endroit dont il ne pourra pas s'échapper. » Une fois son explication terminée, il se dirigea vers l'escalier à grandes enjambées.

Lucius regarda Drago avec autorité. « Reste derrière moi. Si les choses tournent mal, essaie de trouver une issue. Sauve-toi. Ne joue pas les héros. »

Drago lui répondit, la tête haute. « Il faut d'abord que je retrouve Lily. »

Lucius grogna de dépit, et suivit Rogue.

C'est à ce moment qu'ils entendirent les cris.

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Ils s'étaient arrêtés en entendant la voix fluette, glaciale. Le cœur d'Hermione battait à tout rompre. Contre son gré, elle regarda les petits yeux rouges de leur interlocuteur. Lily retenait sa respiration. Elle et Blaise étaient sous le choc.

« Bonjour, les enfants. Vous jouiez à cache-cache ? Eh bien, je vous ai trouvés. » Le visage horrible se tordit dans une parodie de sourire. « La partie est finie, mais vous avez toujours un rôle à jouer. » Il les étudia pensivement. « L'amie au sang-de-bourbe de Potter, la petite amie du rejeton Malefoy, c'est si touchant… Et un autre. » Il regarda Blaise, sans lui accorder d'intérêt. « Il ne m'en faut que deux. »

Blaise sortit sa baguette. « Incendio ! » Les flammes s'élevèrent, grondant autour de Voldemort, enflammant sa robe. Blaise cria, « Lily ! Attrape Hermione et courez ! Je vais le retenir ! » C'était un sort puissant, mais il suffit d'un mot et d'un mouvement de baguette à Voldemort pour éteindre le feu et s'emparer de leurs baguettes. Un autre mouvement, un Impedimenta, et ils furent incapable de s'échapper. Hermione trébucha, et se cogna la tête contre la balustrade si fort qu'elle vit des étoiles.

« Ca m'a fait mal, » dit Voldemort avec d'un ton surpris et froid. « C'était déplaisant. Je dois vraiment te retourner le compliment. » Un flot de sifflements échappa de sa bouche dépourvue de lèvres.

Blaise eut un souffle de surprise, puis se mit à crier de douleur. Lily et Hermione se retournèrent et crièrent. Un énorme serpent se tenait derrière elles, il avait déjà immobilisé Blaise. Blaise lança à Lily un regard d'incrédulité et de regret, et se remit à crier, son dos se tordant de douleur. Ses yeux se révulsèrent, et il s'évanouit, saignant et convulsant à cause de l'empoisonnement de son système nerveux.

« Eh bien, » demanda Voldemort placidement, « à qui le tour ? Votre ami Potter ne devrait pas tarder. »

Hermione essaya de trouver quelque chose, n'importe quoi pour gagner du temps. Sa tête la lançait, et sa vision était floue à cause du choc. Lily tomba à genoux, tenant la main de Blaise. « Non, personne d'autre ne subira jamais ça ! » cria t'elle avec ferveur. « Pas Harry ! »

Voldemort cligna lentement des yeux, son attention soudain éveillée. Il s'approcha de Lily et lui jeta un regard perçant. Ses yeux s'élargirent, et il siffla furieusement en direction du serpent, qui s'éloigna des jeunes filles.

Semblable à un serpent lui-même, Voldemort sortit sa langue et se lécha les lèvres avec avidité. « Comment tu as fait ? Comment ? Il faut que je sache ! » Il tendit la main vers elle, presque caressant. « Intelligent, très intelligent ! »

« Ne la touche pas ! » s'écria une voix jeune.

En même temps, une autre voix commanda en Fourchelangue. « Nagini ! Regarde par ici ! » Voldemort leva le regard pour voir quatre sorciers et un loup-garou qui montaient les escaliers à sa rencontre. Malefoy, le traître, et son rejeton. Son assembleur de Potions personnel, Rogue. Le toutou de Dumbledore, Lupin. Et bien sûr, son ennemi juré, Harry Potter.

C'était une alliance qu'il n'avait jamais imaginé, même dans ses pires cauchemars, et il se donna une demi-seconde pour y penser. Ce n'étaient pas de pathétiques Aurors du Ministère mais une alliance de sorciers aux pouvoirs terribles et sans restreinte. Malefoy lança un sort à Nagini. Le serpent fut éjecté, repoussé au bout du couloir, ses os craquèrent. Les deux garçons et Rogue levèrent la main. Ils ne tenaient pas leurs baguettes, mais d'étranges objets noirs. Ils les lancèrent, et ils volaient vers lui. Il se prépara à les écarter d'un sort, quand la fille aux cheveux noirs s'accrocha à sa robe et anéantit ses efforts.

Furieux, il lui lança un sort, et se retourna, prêt à tuer. Un instant trop tard. Deux des objets noirs le touchèrent directement, et un autre explosa à ses pieds, l'inondant d'eau chaude, parfumée. Son premier réflexe paniqué fut de lancer un sort de coup de vent, une sphère bleue qui s'élargissait, qui mit à terre ses adversaires, et qui fit trembler la maison.

L'escalier et une partie du plancher, déjà affaiblis par des dizaines d'années sans entretien, se désolidarisèrent des murs, et s'écroulèrent jusqu'au rez-de-chaussée en blocs. La pierre et le bois, coupant comme des rasoirs, explosèrent dans toutes les directions et leur retombèrent dessus en pluie. Ils tombèrent tous, amis et ennemi, emmêlés ensemble, et s'écrasèrent douloureusement à l'étage inférieur. Des litres de la potion parfumée se répandirent de l'étage supérieur, comme une cascade de myrrhe et de lotus, qui détrempa non seulement le Seigneur des Ténèbres, mais aussi ceux qui étaient tombés à côté de lui, Lily et Blaise.

Lily reprit progressivement conscience. Elle regardait le trou dans le plafond, et ressentit une vive douleur à la poitrine, mais rien plus bas. Essayant de ne pas gémir, elle regarda le bas de son corps et vit le morceau de rampe brisée sur lequel elle était empalée. Blaise était étendu sous elle, et elle saignait dans ses blessures. La douleur aurait été bien pire sans la potion, pensait-elle. Le parfum emplissait l'air, la remplissant d'une impression de détachement incroyablement paisible.

Blaise était en train de mourir, réalisa t'elle. Les spasmes avaient cessé, et sa respiration n'était plus qu'un faible râle. A moins de deux mètres, Voldemort essayait désespérément de se relever. Il avait lancé un sort amortissant pour protéger sa chute, mais lui aussi était sous l'emprise de la potion. Un bourdonnement sourd emplit la pièce. Lily le trouva réconfortant. Elle se demanda où était Severus. Elle se demanda si elle pourrait le revoir. Il n'y avait pas signe d'Hermione. Comme Lily, elle n'avait pas eu de baguette pour protéger sa chute. Comme de très loin, elle entendit Lucius Malefoy essayant avec anxiété de réveiller son fils, et elle l'appela.

« Il y a une porte ? »

Il y eut un silence. « Mademoiselle Jones ? »

Elle essaya de nouveau, sachant que sa question semblait irrationnelle. « Il doit y avoir une porte, ou ça ne fonctionnera pas. Que quelqu'un ouvre la porte. »

La voix d'Hermione, qui toussait à cause de la poussière, vint la soutenir. « Qui a un pinceau ? »

Elle s'évanouit un moment, mais entendit la voix de Lucius Malefoy qui disait, « Je m'en occupe. »

Le bourdonnement se changea en une vibration qui élança ses blessures. Elle sentit la main de Blaise. Est-ce que je meurs aussi ? Non…

Il lui restait quelque chose à faire. Elle toussa et essaya de s'éclaircir la gorge.

Dans un murmure rauque, elle commença :

« Salut à Toi, Dieu Anubis, Qui Ouvre les Chemins,

Salut à Toi, Dieu Anubis, Qui Ouvre les Chemins,

La voix d'Hermione, faible et cassée, se joignit à la sienne.

Salut à Toi, Dieu Anubis, Qui Ouvre les Chemins. »

La maison commença à trembler à cause des vibrations. Les bords arrachés de l'étage supérieur devinrent flous et disparurent. Une grande chambre ornée de piliers se dessina, brillante d'étoiles. Les couloirs crasseux et nauséabonds de la Maison Jedusor firent place à la vaste et noble Chambre des Morts.

« Jugez-le, vous les Douze qui siégez auprès de l'éternel Pharaon Osiris !

Car il a fomenté la guerre,

Il a entretenu les conflits,

Il a créé des démons,

Il a utilisé la magie contre des innocents,

Il a massacré,

Qu'il soit voué à la destruction,

Et aux prisons de la Déesse Serq. »

Comme de très loin, elle entendit Harry s'écrier, « Non ! Lily ! Il faut qu'on la débarrasse de la potion ! » et s'écrouler au sol. Il essaie de venir jusqu'à moi, pensa t'elle. Il ne faut pas qu'il me touche ! Elle ne pouvait pas interrompre l'incantation, et elle luttait. Blaise était immobile maintenant, sa poitrine ne bougeait plus. Il est mort. Ce n'est pas juste. La voix d'Hermione était faible, mais elle continuait à réciter avec elle :

« Qu'il soit jugé par la plume de Ma'at.

Laissez-le franchir le seuil… »

Harry se joignit enfin à elles, prononçant l'incantation comme si chaque syllabe le blessait :

« Que son âme soit dévorée.

Car les purs s'élèvent jusqu'au trône d'Isis,

Mais les âmes mauvaises sont dévorées. »

Elle pouvait à peine murmurer maintenant. Harry pleurait. Il sanglotait l'incantation sur un ton de défi. Drago avait été réveillé et demandait qu'on lui explique ce qui se passait. Sa voix était jeune et effrayée. Elle se sentait très vielle. Où était Severus ?

« J'ai parlé en Vérité.

J'ai parlé en Vérité.

J'ai parlé en Vérité.

Djedeni em Ma'at ! »

Elle se sentait devenir légère. Severus la regardait, le visage anxieux et couvert de poussière, sa robe trempée de potion. Elle s'élevait, et Blaise avec elle. Nous avons mélangé notre sang, apparemment, à cause de nos blessures. J'espère qu'il ne m'en veut pas trop. Voldemort s'élevait lui aussi, et ils traversaient le grand Hall, vers le personnage éclatant et ses balances, vers la momie verte sur son trône et le monstre qui les attendait. Elle remarqua à peine Tom Jedusor, qui avait déjà un air très différent, luttant en vain contre le pouvoir de Ma'at. Blaise lui toucha la main, et elle se sentit vivante et pas du tout blessée. Elle jeta un regard derrière elle, et vit ses amis, très, très loin. Elle leur fit un petit signe d'adieu.

Blaise était surpris, mais pas effrayé, et demanda, « Qu'est-ce qui va nous arriver maintenant ? »

Elle répondit dans un sourire. « Une fabuleuse aventure. »

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Hermione était recroquevillée par terre, et ne réussit à s'asseoir que progressivement, en s'aidant des marches. L'incantation lui avait demandé toute sa force, et après en avoir récité le dernier mot, elle fut renversée par le vent qui traversa le rectangle de lumière dans le mur écroulé. Les silhouettes indistinctes venues du hall aux piliers ornés de lotus étaient passées à côté d'elle, laissant un murmure dans leur sillage. Son cœur avait failli s'arrêter en voyant les Juges, mais ils étaient trop concentrés sur ceux qui approchaient d'eux pour s'occuper d'elle. Elle s'assit dans une stupeur de choc et de chagrin, essayant d'admettre ce qui venait de se produire.

Rogue avait une jambe brisée, et il avait rampé jusque Lily pour la voir partir à jamais. Elle et Blaise n'étaient plus que de petite silhouettes brillantes, déjà lointaines. Lily se retourna pour leur faire signe, et la porte se referma.

Le bourdonnement se changea en un rugissement, et la maison s'écroula. Chaque poutre, chaque mur porteur, chaque pièce de la structure trembla violemment, et l'inexorable affaissement commença.

Lupin fut le premier à se relever. Il avait cloué Harry au sol, sachant que pour lui, toucher Lily pendant l'incantation aurait signifié qu'il partagerait son destin. Harry se leva avec difficulté, se frottant les yeux. Il avait perdu ses lunettes, et voyait Hermione dans le flou. Le sol bougea sous leurs pieds.

« Hermione ! » Il courut vers elle, vérifiant qu'elle allait bien. « Tu peux marcher ? Je vais te faire sortir ! »

Drago criait de façon incohérente, frappant son père, qui l'immobilisa sans façons, et le jeta sur son épaule. La porte du jardin était la plus proche, et il se mit à courir.

« Ma baguette ! » se souvint Hermione. « Accio baguette ! » Elle était rayée, mais en un seul morceau. Elle prit appui sur Harry, et vit Rogue, toujours recroquevillé au sol, indifférent au chaos qui l'entourait.

« Harry ! Professeur Lupin ! Il faut qu'on l'aide ! » Rogue vit le loup-garou qui approchait, et le repoussa avec rage.

« Non ! » cria t'il. « Laissez-moi ! » Ses lèvres étaient blanches de douleur, et il était trop faible pour résister quand on le lévita. Rogue renonça et resta passivement allongé, fermant les yeux alors qu'il flottait hors de la maison Jedusor qui s'écroulait. Granger faisait la plupart du travail, sa petite main chaude protégeant sa tête pour qu'il ne se cogne pas contre un mur ou le cadre d'une porte. La maison craqua et grogna comme un objet mourant, mais Rogue resta silencieux.

L'air extérieur était frais, il sentait la terre et les feuillages gelés. Ils sortaient sous la lune, et laissèrent derrière eux les odeurs de sang et de ruine, de poussière et de cendre, de myrrhe et de lotus. Des voix approchaient d'eux, des voix soulagées et inquiètes de leurs blessures, qui poussaient des exclamations reconnaissantes qu'ils s'en soient sortis sains et saufs. Rogue garda les yeux obstinément fermés, avec l'intention de conserver le plus longtemps possible l'image d'un grand hall et d'un silhouette brillante, qui s'éloignait.

Il avait envie de pleurer, mais il sentait son cœur plus vide qu'un désert.

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NdA : « Mourir serait une formidable aventure, » d'après Peter Pan de J M Barrie.

La dernière phrase est une paraphrase de La Symphonie Pastorale, d'André Gide.

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Ndt : plus qu'un chapitre, et ce sera fini. Merci pour les reviews.