Sortant ses clefs, Harry fit tourner la clef dans la serrure puis poussa la lourde porte qui révélait un hall en pierre, ainsi que quelques boîtes aux lettres.
— Nous sommes au quatrième, mais bon avec Poudlard je ne pense pas que les escaliers te posent problème.
— C'est plutôt à toi que je devrai dire ça, avec les trois heures de polo que tu viens de faire.
— Ne m'en parles pas je n'ai plus de dos, s'esclaffa Harry en montant les escaliers en pierre. Mais je plains surtout le pauvre Marcus qui doit avoir une migraine d'enfer.
Les deux amoureux rirent à cette blague, en souvenir du cours qui venait de se dérouler. Marcus, un peu trop près d'Harry, s'était involontairement reçu la balle de polo en bois dans la tête. Arrivé au quatrième et dernier étage, Harry ouvrit la lourde porte, invitant Draco à passer devant lui.
Avançant dans le vestibule, Draco détaille son environnement. C'était la première fois qu'il allait chez quelqu'un. Enfin, non, il était déjà allé plusieurs fois chez Blaise, qu'il connaissait depuis le collège, et le hasard avait fait qu'ils avaient fait peu ou prou les mêmes études, mais la famille Zabini était comme la sienne, propriétaire de manoirs avec plus de pièces que d'habitant.
Ce qui le frappa tout de suite était cette ambiance chaleureuse. Des cadres photos, des peintures et des décorations harmonieuses… il ne pouvait pas s'empêcher de comparer à chez lui, et force était de constater le gouffre.
— Bonsoir, désolé pour le retard ! s'exclama à la cantonade Harry, guidant Draco par l'épaule.
— Être à Serpentard, 20 minutes de retard sans prévenir, décidément je vais te retirer de l'héritage.
— Parce que tu m'avais remis entre temps ?
Sirius se mit à rire, semblable à un aboiement de chien. Draco était silencieux, se sentant de trop. Cependant, ses leçons de bienséance se rappelèrent à lui, le forçant à bouger avant de se transformer en statut.
— Bonjour Monsieur. Je vous remercie pour votre invitation.
— Monsieur ? Appelle-moi Sirius voyons ! Rentrez, vous n'allez pas rester dans l'entrée.
— Qu'est-ce que tu as fait de Rem' ?
— Je suis là, j'étais en train de vérifier la cuisson du bœuf. Bonjour, je suis ravi de te rencontrer.
— J'ai apporté une bouteille de vin.
Harry vit Sirius détailler l'étiquette, se doutant bien de ses pensées. Il croisa les doigts qu'il ne se mette pas à lui faire une de ses blagues qui mettent mal à l'aise, dont lui seul avait le secret, et dont il ne voyait jamais le problème. Heureusement, il se contenta de commenter sur le domaine, parlant cépage, pieds de vignes, météo, fût en chêne et cave à vin. Peu à peu, Draco donna son point de vue, et tout en allant au salon, ils se mirent à discuter de ce centre d'intérêt.
— Je vais chercher une carafe, informa Harry, même si personne ne l'écoutait.
Gagnant la cuisine, il retrouva Remus, ordinateur ouvert, vérifiant la recette.
— Comment ça va ? lança Harry pour faire la conversation.
— Très bien et toi ? Tes études ?
— C'est intense, mais je m'accroche. Heureusement, j'ai des amis vraiment adorables, on s'entraide.
— Ami ? lança Remus, mine de rien.
— Ne faites pas ceux qui n'ont pas deviné, rit doucement Harry en le poussant gentiment. Tu as besoin d'aide ?
— Non, ne t'inquiète pas, c'est bientôt prêt. Va plutôt apporter l'apéritif dans le salon, je vous rejoins.
Lui mettant un plat dans une main, une carafe dans l'autre, Remus le regarda partir avec un sourire. Arrivant au salon, il le vit vide, à sa plus grande perplexité. Retournant sur ses pas, il se dirigea vers le cellier, supposant à raison que Sirius avait voulu montrer sa cave à vin à Draco.
Le repas fut très agréable. Harry profitait pour rattraper le temps perdu, prenant des nouvelles de leur société de consulting, discutant des cours de Poudlard, de son job étudiant, et surtout, annonçant qu'il était devenu titulaire dans l'équipe de polo.
— Ce n'est pas un peu trop de te rajouter le polo ? s'inquiéta Remus.
— Alors en fait c'est une punition, avoua Harry, contri. Avec Draco on s'est disputé en cours de Rogue. Et quand il nous a dit que son cours n'était pas une pièce de théâtre, on lui a répondu.
— De la fermer, car on ne lui avait rien demandé, fini Draco, un fin sourire aux lèvres.
Remus et Sirius partirent en fou rire. Ils auraient tout donné pour voir cela.
— Donc on a fini chez Dumbledore, et il m'a mis dans l'équipe de polo en disant que j'allais faire des merveilles, car j'ai ça dans les gênes.
— Il n'a pas tort, ton père était vraiment très doué. Il avait même reçu des propositions pour être joueur professionnel. Ça arrive parfois que des élèves en fin d'études aillent dans une équipe pro. Je ne sais plus son nom, mais il a même fait les JO !
Après le vin, Draco se lança sur les joueurs de polo célèbres ayant fréquenté Poudlard. Remus enchaîna bien vite, appréciant de regarder les matchs, et ayant fait quelques parties à Poudlard.
— je vais chercher le dessert, lança Sirius.
— Attends je t'aide à débarrasser, déclara Harry.
— Continuez de discuter ne vous inquiétez pas, ajouta Harry en les voyant bouger.
Rassemblant un tas d'assiettes et de couverts sales, il suivit Sirius dans la cuisine, remplissant le lave-vaisselle.
— Hum, tu l'aimes bien alors ? tenta prudemment Harry, en prenant le panier à couvert.
— Ne t'inquiète pas, je ne vais pas te mettre à la porte, car tu fréquentes Draco Malfoy, sourit Sirius. Je veux juste que tu fasses attention à toi.
— Pardon ? Mais jamais il ne me fera du mal, il m'aime ! Déclara Harry choqué.
— Je ne parle pas physiquement. Mais je veux que tu gardes à l'esprit que votre relation ne sera pas aussi bien acceptée par tout le monde.
Harry le regarda d'un air interdit devant le sérieux de son parrain. C'était rare de le voir aussi sérieux hors de son travail.
— Les Malfoy font partie de la très vieille aristocratie. Ils ont un siège à la chambre des lords. Plusieurs manoirs dans plusieurs pays…
— Et alors la famille Black aussi.
— Harry, ce que j'essaye de te faire comprendre, est que la raison pour laquelle je n'ai pas pu reprendre la société immobilière Black, ai été déshérité et renié était que j'étais homosexuel. Et cela est très mal vu.
— Mais…
— Je ne sais pas ce qu'il en sera de sa famille, je ne peux faire que des suppositions, et je ne t'empêcherai pas de rencontrer sa famille. Mais ce jour-là, tu vas devoir être irréprochable en tout point.
— C'est-à-dire ? demanda Harry dans un souffle.
Sirius se passa une main fatiguée dans les cheveux. Il n'aimait pas voir cet air de détresse, mais il ne voulait pas non plus qu'il se berce d'illusions. Il savait très bien de quoi il retournait, ayant eu le même problème quand il avait commencé à fréquenter Remus.
— Bonnes manières, étiquette, maintien, art de la table… et j'en oublie sûrement. Tu vas devoir tout connaître, ou le maximum. Prouver que tu ne vas pas avoir une mauvaise influence sur Draco.
À cet instant, Harry compris que même s' il était magicien, il n'arriverait jamais à combler le gouffre qui les séparait, et dont leur amour était une planche frêle en bois jeté au travers du précipice.
