Auteur : Yami Flo
Genre : Sérieux, peut-être un peu d'humour par moment, peut-être des passages tristes par moment.
Disclaimer : Les personnages de Harry Potter ne sont pas à moi, ils sont à JK Rowling (elle connaît pas sa chance, cette femme). En revanche, Aphélie et tous les membres de la famille Knight et de la famille Silverstone sont à moi.
Chapitre 1 : Malédiction Héréditaire
Vivre.
Qu'est-ce que c'est, vivre ?
De l'avis général, c'est respirer, marcher, penser. C'est rire et pleurer pour les plus jeunes, c'est haïr et aimer pour d'autres. C'est avoir les joues roses et le sourire, c'est s'amuser et ne jamais s'ennuyer.
Rien que pour cela, je ne suis pas sure de vivre.
Normal.
Qu'est-ce que c'est, être normal ?
Les gens en ont tous une définition différente. Mais pour tous les gens que je rencontre, la réponse est unanime. Je ne suis pas normale.
Etre normal, c'est difficile à définir, surtout pour moi. C'est rentrer dans le même moule que les autres, parler et agir comme eux, penser comme eux, parfois.
Mais je ne suis pas comme cela.
Qui suis-je ?
Rien qu'une banale élève de Poudlard, en cette année 1975. Le vent frais de la nuit apporte des senteurs de fleurs, venant du jardin de ma mère. Elle aime les fleurs plus que tous au monde. Je ne sais pas pourquoi. Parce qu'elles sont belles ? Parce qu'elles sentent bon ? Après tout, qu'importe ?
Moi aussi, je les aime. Mais pas pour les mêmes raisons, j'en ai peur.
Le vent joue avec quelques mèches de mes cheveux. Je respire profondément. Quand le vent caresse mon visage, quand il souffle violemment, quand il emporte au loin les feuilles et les fleurs, j'ai l'impression de vraiment vivre.
Vivre, ce rêve inaccessible.
Qui suis-je ?
Une adolescente pâle et silencieuse, qu'on ne souhaite pas avoir en sa compagnie. Ma propre famille m'évite. Mon père, ma mère, mes frères et mes sœurs. Seul Machiavel, mon corbeau, et Faust, mon chat, semblent trouver ma présence agréable et réconfortante.
Je me suis toujours demandée pourquoi. Après tout, les animaux sont intelligents, et ils savent que je suis dangereuse pour eux. Mais, malgré leur possible répulsion, Faust et Machiavel ne m'ont jamais abandonné. Ils sont toujours là, près de moi, prêts à me soutenir à leur façon.
Dans les couloirs du château familial, je déambule sans parler, ma cape sur mes épaules. Les murs de pierres conservent une fraîcheur incroyable. Même en été, cet endroit est une véritable glacière. Tout du moins l'aile nord, où je réside.
Elle est à demi délabrée, et mes parents ne se pressent pas beaucoup pour la réparer. Après tout, eux même ne s'y rendent jamais, pas plus que les autres membres de ma famille. Elle a toujours était réservée aux parias, comme moi.
Qu'importe, après tout. C'est mon domaine, et c'est ainsi que je l'aime.
Que suis-je ?
J'ai des cheveux noirs, longs et lisses, très fins. Ma peau est blanche comme de la craie, elle me donne l'air d'un cadavre ambulant. Mes yeux sont, curieusement, rosâtres. Mes canines ressortent un peu, alors j'évite de trop sourire ou même de rire.
D'où tiens-je ce physique si particulier ?
En dehors de ma famille, personne ne sait. Certains me croient le fruit d'une quelconque infidélité. Sottise. Je suis bien la fille de mes parents, je ressemble trop à mon père au point de vue du visage pour pouvoir se tromper.
Mais je n'ai que ça en commun avec le reste de la famille.
Mon père a les cheveux bruns et les yeux bleus. Les yeux de ma mère aussi sont bleus, mais ses cheveux sont blonds. Mes frères et mes sœurs ont tous les yeux bleus. Ils ont tous les cheveux bruns blonds. Je suis la seule qui les ait noirs.
Je ne suis pas sure d'être entièrement humaine. Je ne le suis pas, en fait. Voulez-vous savoir pourquoi ?
Je n'ai pas vraiment besoin de dormir, contrairement aux humains normaux ; je peux facilement rester éveillée une semaine sans jamais ressentir de fatigue. Mais il n'y a pas que cela.
Les humains normaux ne boivent pas de sang, eux. Et ils ne mangent pas non plus de fleurs, pas plus que le soleil ne les blesse.
Je suis un vampire. Où, tout du moins, une hybride de vampire.
Je vis avec ce secret depuis l'âge de huit ans. Je l'ai découvert par un total hasard, car mes parents se refusaient à m'en parler.
Grossière erreur.
J'ais failli en devenir folle.
Petite fille, j'aimais passer mes journées dans l'immense bibliothèque du château. Mes frères et sœurs étaient soit à Poudlard, soit dans leurs chambres à jouer à je ne sais trop quoi. Ma mère hantait le jardin, et mon père passait ses journées au Ministère.
Je n'avais aucun camarade de jeu, et les livres étaient mon seul réconfort.
Mes parents sont des sorciers de sang pur, mais néanmoins ouverts d'esprits. Ils se rendent bien compte de l'importance des demis sangs et des sorciers issus de parents moldus dans notre monde. Ils s'adaptent aux exigences de l'époque, dirons-nous. Je sais par contre que mon arrière-grand-père, lui, était un farouche opposant à ces « traîtres à leur sang et cette racaille indigne du titre de sorcier ». En accord avec la famille Black, il a même voulu faire passer une loi autorisant la chasse aux moldus. Heureusement, ce projet a été éconduit de façon plus ou moins polie. La famille n'est pas quelque chose de particulièrement joyeuse dans toutes les générations.
Mais la mienne et celle de mes parents semblent apprécier les moldus, tout du moins, leurs ouvrages littéraires. La bibliothèque familiale a un rayon spécialement consacré à ces dernières. Il y en avait un pour les livres sorciers, aussi, mais il m'intéressait moins.
Généralement, je lisais des romans et des pièces de théâtre moldues. C'est amusant, la vie. Bien des sorciers écrivent, mais leurs livres restent plats, sans envergures, sans passion. Les moldus sont les seules personnes au monde qui savent mettre de la magie dans leurs textes, les rendre « vivants ». C'est avec un vif plaisir que je m'attaquais à la littérature, même si la plupart de ces livres me laissaient perplexes. Je n'avais pas la maturité nécessaire pour les appréciés, je crois. Pourtant, cela ne m'empêchait pas de dévorer activement les œuvres de Flaubert, Shakespeare, Molière, Victor Hugo, Maupassant,…
La plupart des auteurs que je connais sont français. Mon père est issu d'une longue lignée de sorciers français, et c'est lui qui m'a appris la langue, comme à mes frères et sœurs.
Je ne suis pas normale.
Je ne l'aie jamais été, mais il m'a fallu trouver ce livre pour m'en rendre vraiment compte. Je me souviens parfaitement de sa découverte.
Il a faillit me tomber dessus, une journée de printemps, alors que je retirais des étagères un large volume, un recueil de poésies françaises, je crois. J'ai seulement eu le temps de m'écarter avant sa chute. Je me souviens parfaitement de la poussière qu'il a soulevée en tombant au sol. Mais le nuage ne m'a pas caché le titre : Anthologie de la famille Daemon - Knight. Le premier nom ne m'évoquait rien du tout. Mais le second, c'était le nom de notre famille. La famille de ma mère en fait. La famille de mon père, le nom que je portais, c'était Silverstone.
Si je pouvais prétendre tout connaître de ma famille paternelle, je n'avais jamais appris quoique ce soit sur ma famille maternelle. Enfin, j'avais obtenu des brides d'informations. J'avais les renseignements qu'on voulait bien donner aux enfants, sous prétexte de les préservés.
Je savais que ma mère avait eu deux sœurs et un frère, mais on ne parlait jamais d'eux à la maison. Je connaissais leurs noms, cependant : Manfred, Daria et Anne Lyse. Mais c'était bien les seuls renseignements que je possédais. Au départ, du moins. Cela s'est bien étoffé avec le temps…
J'avais eu l'occasion de rencontrer les deux premiers, Manfred et Daria, mais la dernière, jamais. C'était tout juste si son nom avait le droit d'être prononcé en présence de ma mère.
J'étais curieuse. Je voulais savoir ce que l'on me cachait, pourquoi ma mère semblait si désolée en me voyant, pourquoi elle tremblait de peur à la mention de sa sœur Anne Lyse. Pourquoi j'étais différente.
Et je savais que le livre pouvait me répondre, qu'il suffisait de l'ouvrir. Par la suite, je l'ai regretté. Aujourd'hui, je n'ai plus qu'un vague sentiment d'amertume. Si je n'avais pas appris la vérité de cette manière, s'aurait été bien pire.
L'Anthologie de la famille Daemon – Knight était un vieux grimoire, en lettres manuscrites, relié à la main dans une couverture en cuir rouge sang. Un livre qui faisait peur.
A la première page, commençait un arbre généalogique, montrant les premiers sorciers de la famille, vers l'an 1080. Chaque nom était accompagné d'une date de naissance et de mort, et d'une courte bibliographie ou d'un petit commentaire. L'écriture n'était pas la même partout. J'appris plus tard que l'écriture du livre se faisait à l'aide d'une plume enchantée, dont le sortilège devait être renouvelé tous les deux cents ans.
Les premiers siècles, rien d'anormal. Parfois, la naissance d'un enfant sans pouvoirs, abandonné ou tué. Parfois, de grandes découvertes réalisées par tel ou tel membre de la famille. L'achat de terre, des relevés bancaires, des noms de commerces étaient consignés également sur certains feuillets.
Ce jour là, j'appris beaucoup sur mes ancêtres. Sur ma vie telle que je la menais.
C'était mon arrière arrière arrière arrière grand-père, Marcus Knight, qui avait fait bâtir le château familial où nous résidions encore. C'était mon arrière grand-tante Aurora qui avait installé la roseraie et le jardin d'hiver. C'était mon arrière arrière grand-mère, Nyassa la Belle, qui avait enchanté les vitraux du château, les faisant bouger et parler comme les tableaux de Poudlard. Un sacré tour de magie, car faire bouger des personnages peints sur le verre s'avérait bien plus dur que faire bouger des personnages peints sur toile.
Bref, une famille puissante et riche, respectée et crainte à la fois.
Jusqu'au 16e siècle, néanmoins. Après, elle perdit une grande partie de sa fortune et n'imposa plus que le mépris ou la haine.
Ma famille portait alors un titre noble selon la hiérarchie moldue. Les hommes portaient le titre de comte.
En 1532, Conrad Knight, l'héritier d'alors, n'avait qu'une fille, Maria. La jeune femme, alors âgée d'une vingtaine d'années, n'était toujours pas mariée. A l'époque, seul les hommes pouvaient hériter des titres de la famille, ce qui signifiait qu'à sa mort, les biens des Knight reviendraient tous à son frère cadet, Joshua, tout comme le titre de comte, sauf si Maria trouvait un époux. Peu intéressée dans le mariage, elle s'y refusa, préférant laisser son oncle récupérer la fortune. Mais Conrad n'aimait pas Joshua, qu'il trouvait traître à son sang, faible et lâche. Atteint d'une grave maladie, alors incurable, il jura sur son lit de mort qu'il marierait Maria à un démon plutôt que de laisser Joshua devenir l'héritier de la famille.
Sa prière fut exaucée.
Pour le plus grand malheur de bien des générations de Knight, après lui, et avant moi, et bien d'autres encore qui me succéderont.
Peu de temps après avoir prononcé ce sermon, un homme vint au château, disant qu'il voulait épouser Maria. Conrad, ne trouvant rien à redire à cet homme, accepta le mariage, qui fut prononcé deux jours plus tard. Il mourut moins d'un mois après, vaincu par la maladie.
Son gendre se nommait Vlad Daemon, et venait d'Allemagne. Il était extrêmement pâle, gardait souvent la chambre, ne mangeait jamais en présence de quiconque et errait souvent la nuit dans les couloirs.
Ce furent ces détails qui mirent la puce à l'oreille de Joshua. Plus que tout, il se rendit compte alors que tous les miroirs du château avaient été brisés ou subtilisés. Mais un jour que Maria avait laissé traîner un miroir à main, il s'en empara et tenta de voir le reflet du mari de sa nièce. Mais Vlad Daemon n'avait pas de reflet.
Joshua reconnut par là les signes du vampire, et invita alors la Brigade Inquisitoire du Ministère à venir perquisitionner le château. Et ils y découvrirent plusieurs corps dans les souterrains et les catacombes, complètement vidés de leur sang. Vlad Daemon fut immédiatement recherché par le Ministère et ses tueurs de vampires, mais il ne fut jamais retrouvé.
Aujourd'hui encore, on le sait en vie. Les vampires sont presque immortels : ils peuvent rester des siècles dans leur cercueil, dans une sorte d'hibernation dont seul la faim peut les tirer. Vlad s'est enfuit en Europe, et nul ne sait ce qu'il est devenu. Le livre mentionné néanmoins qu'il avait formé un clan avec certains de ses descendants et quelques membres de son peuple.
Néanmoins, avant que la vérité n'éclate, dix ans s'étaient écoulés. Maria avait donné naissance à trois enfants. Si les deux premiers étaient parfaitement normaux, le troisième s'avéra être un hybride de vampire et d'humain. Comme moi, même s'il mangeait de la nourriture humaine, il se nourrissait essentiellement de sang et dévorait parfois des fleurs. Personne ne sait, même maintenant, d'où vient cet appétit pour les végétaux. Probablement une bizarrerie créée par le mélange des sang. La lumière du soleil ne lui occasionnait que des brûlures, et les objets saints étaient inefficaces sur lui. Sa longévité était également supérieure à celle des humains normaux. Il n'était pas immortel, mais il vécut près de trois cent ans.
Il s'appelait Erik. Et c'est mon ancêtre direct dans la famille de ma mère.
Les Knight sont maudits. A chaque génération née de la branche de Erik Knight, un enfant se révèle avoir le pouvoir des vampires, parfois leur besoin de sang, parfois leur longévité, parfois les deux.
J'en fais partie, comme bien d'autres avant moi.
Dans la génération de ma mère, s'était sa sœur Anne Lyse, qui a mystérieusement disparue il y quinze ans, peu après ma naissance. Je le regrette. Je crois qu'elle, elle aurait pu me comprendre, m'aider à me maîtriser, me consoler lorsque je me rends compte à quel point je suis monstrueuse.
J'ai parfois envie de hurler au monde ma souffrance, mon malheur, mais je sais que personne ne l'entendrait. Mais mon oncle Manfred et ma tante Daria ne sont pas épargnés non plus par la malédiction des vampires.
Ma tante Daria, la plus jeune de sa génération, a dix ans de moins que sa sœur Sylvianne, ma mère. Elle a donné naissance, il y a huit ans, à son deuxième enfant, qui est lui aussi atteint par la malédiction des vampires. C'est mon cousin Drake. A vrai dire, je le connais très peu. Cet enfant, non seulement touché par la malédiction, est maladif. Parfois, je me demande si c'est vrai, ou si ce n'est qu'une excuse pour cacher des faits trop…embarrassants.
Manfred, aîné de la famille, lui, n'a pas vraiment d'enfant touchés par la malédiction, mais ses deux fils ont des tendances meurtrières et sanglantes qui me font peur autant qu'a lui. Et l'aîné, Egisthe, ne cache pas sa passion pour les arts sombres et la magie noire.
Les autres membres du clan ne s'en rendent peut-être pas compte, mais nous nous dirigeons probablement vers une guerre interne dans la famille, surtout parce qu'Octavio et Egisthe n'ont jamais ressenti qu'une profonde antipathie l'un envers l'autre.
Et, moi qui ne pleure jamais, je sais que ce jour là, je ne pourrais cacher mes larmes de sang. Oui, mes larmes de sang. Car chaque fois que je pleure, je ne laisse pas échapper des larmes, mais bel et bien du sang.
Alors, mes yeux restent toujours secs.
Je suis un peu comme une poupée, pour ceux qui me voient. Je ne rie, ne pleure jamais. Je me contente de rester assise dans un fauteuil les yeux froids.
Immobile, comme un jouet d'enfant.
Sans vie, sans véritable existence. C'est triste. Mais je suis ce que je suis. Mon comportement n'engage que moi. Ma famille s'en moque.
Je monte des escaliers, passe des portes, mon pas résonnant à peine sur les pierres du couloir. Seule âme éveillée dans le manoir de mes pères.
J'atteins finalement mon but : la Tour Sud, surnommée la Tour du Pendu depuis que mon arrière-grand-oncle s'y est suicidé. Inutile de citer le moyen, le nom est assez éloquent en lui-même pour éviter de poser des questions.
Un demi vampire, lui aussi. Mais lui n'a pas supporté la vérité. Je ne pense pas que je doive le mépriser. Peut-être aurais-je fait comme lui, si je n'avais pas eu un regain de volonté.
Je me dresse sur le parapet qui borde les murs de la Tour du Pendu, observant la lune. Le vent souffle autour de moi, il emporte avec lui mes sombres pensées et mes doutes, me laissant plus calme et sereine que je ne l'ai jamais été.
Notre famille est maudite, et elle le sera toujours. A Poudlard, tout le monde l'ignore. Mais rien n'est éternel. Un jour ou l'autre, il découvriront le secret des Knight. Le secret des Silverstone, devrais-je plutôt dire, maintenant.
Je rejoins ma chambre, serrant ma cape plus chaudement contre moi. Avant d'aller m'étendre sur le lit et de fermer les yeux pour quelques heures, je jette un regard au soleil qui se lève.
Je m'appelle Aphélie Phénicia Silverstone. Nous sommes aujourd'hui le 1er septembre 1975, et je pars dans quelques heures pour ma cinquième année à Poudlard, dans la maison des lions. La maison rouge et or des courageux.
Je suis le vampire de Griffondor.
