Chapitre 6
Je vais me faire couler un bain chaud et jouer avec un rasoir…
Elle s'assit en tailleur et enfuit sa tête dans ses mains. Elle n'avait jamais été aussi mal dans sa peau et n'avait jamais été aussi proche de se donner la mort. Il y avait un temps pas si lointain où elle aimait la vie, où elle mordait à pleine dent dans toutes les friandises qu'elle lui apportait. Mais aujourd'hui, les friandises étaient gâtées et ses dents cariées. Elle avait été amoureuse de la vie et maintenant qu'elle était amoureuse de quelqu'un d'autre, la vie lui avait dit merde et par jalousie l'avait privée de ses bienfaits alors Ginny n'avait plus qu'une envie, dire merde à la vie et la rendre jalouse en embrassant la mort.
Elle se leva et, dans une espèce de brouillard, se rendit dans la salle de bain. Elle tourna le mitigeur et un flot d'eau chaude en jaillit. Puis, s'en savoir vraiment comment, elle se retrouva dans l'eau.
Elle fixa le plafond quelques instants. S'apprêtait-elle vraiment à faire ce qu'elle allait faire ? Elle aurait voulu y réfléchir encore mais la vapeur s'échappant de l'eau lui embrumait les idées. Tout lui semblait soudain si simple, elle aurait aimé rester éternellement dans ce bain. Oui…C'était à ça que devait ressembler le paradis, à un bain chaud. La vie aussi, aux premiers abords, mais on se rendait vite compte qu'il fallait inévitablement en sortir, se retrouver dehors, dans le froid…
Mais il y avait un moyen, un moyen d'y rester. Elle eut pendant un moment la vision d'elle gisant dans son bain de sang telle Elisabeth Batory, ce personnage historique qui se baignait dans le sang des vierges pour se régénérer la peau. Elle essaya vaguement de se rappeler depuis quand elle se sentait si mal dans la sienne de peau mais n'y arriva pas, elle avait beau fouiller sa mémoire, il lui semblait qu'elle s'était toujours sentie moche, bête et seule.
Elle chercha à tâtons un objet plus ou moins tranchant et réussit à mettre la main sur le rasoir de son père.
Elle pensait au délice empoisonné qu'était la mort, elle n'aurait plus jamais de soucis, ne devrait plus jamais se tracasser. Elle partirait vers la lumière comme disent les curés en laissant derrière elle tous ses tourments. Cadeau d'adieu pour les autres ! Elle n'aurait plus jamais le sentiment d'être de trop, d'être inutile. Elle avait juste peur d'une chose,que personne ne la regrette. En fait, c'était plus que probable mais elle s'en foutait…Elle était fatiguée et elle avait envie de dormir…de dormir pendant très longtemps…
Dormir d'un sommeil dont personne ne pourrait la sortir, d'un sommeil sans retour à la dure réalité…
Son corps glissa le long du bord et sa tête se cogna doucement contre la paroi. Elle ferma les yeux et essaya de tout oublier…
Une voix la sortit vivement de son demi-sommeil:
-Ginny ?
-Oui maman, bredouilla-t-elle en se redressant.
-Pourquoi tu prends un bain maintenant, il est minuit passé ?
-Oh, j'avais envie de…me laver les cheveux !
-T'aurais pu attendre demain !
-Oui, mais je ne savais pas qu'il était si tard.
-Ne traîne pas trop, tu risques de t'endormir.
-Oui, j'ai bientôt fini de toute façon.
-Très bien…Bonne nuit ma puce !
Les pas de Mrs Weasley s'éloignèrent rapidement.
« Bonne nuit ma puce »…« ma puce »…Ces mots lui trottaient dans la tête. Elle ne pouvait pas faire ça à sa mère quand même ? Elle ne méritait pas ça ! Ses yeux la piquait, elle n'allait quand même pas renoncer maintenant! Mais elle devait bien se l'avouer, elle était morte de trouille. Mais si en plus elle n'était même pas capable de mettre fin à ses jours!
Elle agrippale rasoir tremblante de rage contre elle-même et l'approcha dangereusement de ses poignets. Elle s'apprêtait à trancher quand une réalité la frappa de plein fouet. Si elle partait saluer les anges, elle perdrait en même temps tout ce qu'elle avait aimé dans sa vie.
Elle réfléchit à tout ce qui allait lui manquer et se rendit compte que ça faisait un bon paquet de choses :
-Les farces de Fred et Georges.
-Le manque de tact de Ron.
-La suffisance de Percy.
-L'impertinence de Bill.
-La fougue de Charlie.
-L'odeur de son père quand il rentrait du boulot.
-La voix rassurante de sa mère.
-Le parfum des fleurs après la pluie.
-La caresse de l'herbe sous ses pieds nus.
-Le vent dans ses cheveux.
-Rire jusqu'à s'en faire exploser les côtes.
-Prendre une douche hyper chaude pendant trois heures pour s'attirer les foudres de sa famille obligée de se laver à l'eau froide.
-Respirer.
-Courir.
-Se rouler dans l'herbe.
-Manger des frites bien grasses.
-Injurier tout le monde très fort en ayant jeté au préalable un sort d'insonorisation.
-Le vieux bonhomme d'en face qui l'appelait toujours Hortense.
-Se disputer avec sa fratrie.
-Chanter très fort (et très faux) sous la douche.
-Planifier des tonnes de régimes qu'elle ne ferait jamais.
-Le bruit de la joue de Ron quand elle le giflait.
-La vie.
Elle releva la tête et explosa de rire. Depuis quand Ginny-la-folle pensait sérieusement à mettre fin à ses jours à cause d'un garçon qu'était trop con pour l'apprécier à sa juste valeur. Parce que oui, Ginny Weasley était une fille bourrée de qualités et de joie de vivre. Il ne s'en rendait pas compte? Elle allait lui ouvrir les yeux. Et puis si après ça il ne l'aimait toujours pas, elle attendrait en silence que ça passe et si ça ne passait pas alors elle se ferait nonne ou resterait une célibataire endurcie mais jamais, plus jamais, elle ne repenserait au suicide ! La vie était trop belle et même si elle n'était pas toujours juste, même si elle faisait des caprices, elle ne mériterait jamais qu'on lui fausse compagnie.
Petite note: J'espère que certains auront remarqué que ce chapitre était plus long que les autres. En effet, je suis passée du stade "ridiculement court" à "beaucoup tropcourt" ce qui représente une nette amélioration qui j'espère suscitera chez vous de fervents remerciements.
Un grand merci à:
TOUFFUE
JAMESIE-CASS
VIRG 05
ZOFIA.CC
OCEANNE BLACK
AURELIA
LUNENOIRE
MAXIE
MICY
PHANY
MISSANIE
ALLIMA
BERU OU BLOUB
