Titre français: Malfoy, Détective Privé
Auteur: Nancy
Traductrice: Jess HDH
Catégories: Mystère, Action/Aventure, Romance, Suspense
Couple: Harry/Draco
Rating: R
Spoilers: les quatre premiers livres de HP
Etat actuel de la fic: en cours d'écriture. 10 chapitres sont pour le moment disponibles.
Où trouver la fic anglaise: Schnoogle
Résumé: "Je suis Draco Malfoy, détective privé. J'ai vu beaucoup de choses...j'ai fait beaucoup de choses, et je ressemble beaucoup à un gentil garçon de dix-sept ans. Je croyais avoir tout vu, jusqu'à ce qu'une paire de yeux verts entre dans mon bureau". Un Univers Alternatif (AU) à la manière des romans policiers noirs situé à Los Angeles où la passion et la magie se rencontrent. Slashy et sexy.
Disclaimer: cette histoire est basée sur des personnages et des faits crées et appartenant à J.K. Rowling. Aucun argent n'en est retiré. L'histoire de cette fic appartient à son auteur, Nancy, et la traduction à sa traductrice, Jess HDH.
Dédicace de la traductrice: cette fic est entièrement dédiée à une personne que j'adore: Caro alias BabyDracky alias choupi-choupinette, cette traduction est pour toi! Je sais combien tu aimes Draco et Harry (au moins autant que moi, ce qui n'est pas peu dire!) et j'espère que tu apprécieras cette fic! Gros mimis, choupi, et continue de me faire rire avec tes magnifiques fanfictions: cette fic est entièrement dédiée à une personne que j'adore: alias alias, cette traduction est pour toi! Je sais combien tu aimes Draco et Harry (au moins autant que moi, ce qui n'est pas peu dire!) et j'espère que tu apprécieras cette fic! Gros mimis, choupi, et continue de me faire rire avec tes magnifiques fanfictions!
Note de la traductrice: Salut! Merci d'être aussi nombreux à me reviewer! Bon, je vous préviens tout de suite, je pars une semaine en vacances mercredi, donc il n'y aura pas de chapitre lundi prochain, mais le lundi d'après! J'espère que vous serez toujours aussi nombreux au rendez-vous! Bon, pour ce chapitre, que dire à part que Harry va être tout retourné par le fait qu'il ne soit pas né en Californie comme il le pensait...Et Draco va se prendre encore plus la tête à propos de Yeux Verts lol. Je n'en dis pas plus, je vous laisse le plaisir de découvrir! Au fait, pour tous ceux et celles qui m'ont demandé si le Tom en question était le fameux Tom Jedusor, je dirai que pour l'instant, nous ne savons que son prénom... Je vous fait languir, hein? lol. J'ai un côté sadique, je sais! Bonne lecture!
Au fait, comme vous le savez sûrement, il n'y a pas de différence entre 'tu' et 'vous' en anglais, donc c'est un peu délicat à traduire...Vous verrez, à un moment, je suis passée au 'tu', puis je suis repassée au 'vous'. Ca me semblait logique, vu les circonstances...Si vous n'êtes pas d'accord avec mon choix, faites-le moi savoir!
Mara Jade5: pour répondre à ta question sans en dévoiler trop, je dirai que Harry ne ment pas quant à son identité. Il est vraiment persuadé d'être né en Californie. Comme tu le verras dans ce chapitre, ça va lui faire un sacré choc de savoir que ce dont il est persuadé est faux!
LolieShing: ah, tu vois, je t'avais dit que ça s'éclairerait petit à petit! Oui, c'est vrai qu'il reste encore beaucoup de brouillard, mais bon, une des catégories de la fic est 'suspense', donc c'est fait pour lol. Et puis l'enquête avance encore dans ce chapitre...Il n'y a pas que ça qui avance d'ailleurs! Bisous et merci!
Vivi Malfoy: ça, pour être originale, cette fic est originale! C'est la première dans ce genre que je vois, et pourtant, j'en ai lu un paquet! Contente que ça te plaise!
Agatha Brume: merci de me reviewer pour mes deux fics en cours! Et puis, bien sûr, je suis ravie que ça te plaise . Je ne traduis que les fics qui m'inspirent, qui font passer quelque chose, bref que moi je trouve excellentes. Alors si toi tu les trouves aussi excellentes, ça prouve que j'ai pas trop mauvais goût lol. Merci beaucoup!
Umbre77: salut! Bon, je serai sûrement rentrée avant tes exams, mais je préfère te dire un gros "MERDE" avant de partir au cas où! Oui, enfin, j'ai dit que j'avais peut-être une autre traduction en vue, ne nous emballons pas lol. C'est à dire que si je continue les trads après "Malfoy, Détective Privé", je choisirai sûrement de traduire la fic en question. C'est une Harry/Draco, évidemment, et ça parle d'un voyage dans le temps...Elle est super bien! Oui, c'est clair que Draco a de plus en plus de mal avec Harry...D'ailleurs, dans ce chapitre, ça ne va pas s'arranger lol. Moi, pour Tom, quand j'ai lu la fic pour la première fois, je ne m'y attendais pas du tout! Mais bon, comme je l'ai dit en intro, ce n'est qu'un prénom somme toute assez courant! C'est sûr que Harry est vraiment dans la mouise jusqu'au cou...Toutes les preuves sont contre lui, quoi! Voici le chapitre 4, j'espère qu'il va combler quelque peu ton impatience! Bisous!
Andadrielle: eh oui, y a plein de mystères...Voici la suite!
Ankou: ah, pour ce qui est de la présence ou non de Tom Jedusor...Je ne dirai qu'un mot: patience! grand sourire sadique. Ne t'inquiète pas, tu sauras très bientôt la réponse (mais pas dans ce chapitre, désolée!)
CMX: tu sais ce qu'on dit: "mieux vaut tard que jamais" lol. Je suis très contente que tu me laisses une review, ça me fait très plaisir de lire ce que vous en pensez. Et puis je suis encore plus contente que tu aies lu toutes mes trads et que tu les aies toutes aimées! C'est le but, après tout! Merci pour tes compliments et ton enthousiasme! J'espère que la suite te plaira autant! A bientôt! PS: oui, Baby Dracky est géniale, ce qu'elle fait est génial, et c'est ma choupi à moi LOL.
Baby Dracky: coucou! Alors, ton Word te fait des misères? Le vilain méchant pas beau! Alors que ton PC est siiiiii gentil lol. Oui, ben tu vas voir, dans ce chapitre, Malfoy va être encore plus déboussolé face à Harry...Pauvre chéri...Pour la confrontation Tom/Drago, effectivement, il va y en avoir plusieurs...Pas tout à fait tout de suite, mais il va y en avoir...D'ailleurs, il faut s'accrocher, parce qu'il est vraiment vicieux le Tom, qui qu'il soit . Ah! Toi aussi tu trouves bizarre le chat de Draco! Moi aussi j'avais pensé à McGonagall, mais petit problème, c'est un chat! Mais n'oublions pas que Draco et Harry ont 35 ans, donc ça peut être quelqu'un d'autre...D'ailleurs, tu verras, notamment dans ce chapitre, qu'il n'y a pas que le chat de Draco qui est bizarre...D'ailleurs, j'ai une idée quant à l'idée de l'autre aniomal...Gros bisous et voici la suite, choupi!
Alana Chantelune: c'est normal que tu ne comprennes pas tout, c'est fait pour lol. Oui, apparemment, on est dans une sorte de futur relativement lointain puisqu'ils ont 35 ans...J'espère que la suite te plaira!
Nagisa Moon: salut! Pour la couleur des yeux de Jedusor, je crois effectivement qu'ils sont bleus, mais je n'en suis pas absolument sûre...Moi aussi, je me demande si Marlowe ne serait pas un Animagus...mais qui? Et puis il y a un autre 'animal' dans ce chapitre qui me paraît louche lol. Et là, je suis pratiquement sûre de son identité! Merci pour tes reviews, ça me fait particulièrement plaisir d'en recevoir de toi! . Bisous! PS: "Cristal" est absolument géniale!
Mara Potter: merci beaucoup! Ouais, Draco a des pensées un peu louche sur Harry! Mais c'est si mimi! Il y a du mouvement dans leur relation dans ce chapitre! J'espère que la suite va te plaire!
Falyla: coucou! C'est vrai que l'Emily n'a pas la langue dans sa poche lol. D'ailleurs, Draco l'a bien fait remarquer! Oui, tu as plutôt bien résumé l'affaire! Bon, voici la sui-teuhlol. Merci de me reviewer! Bisous de ton UIAV. PS: Draco va en voir de toutes les couleurs avec Harry dans ce chapitre...et puis tu trouves pas que les animaux sont louches?
Ravenclaw4ever: merci! Je mets un chapitre en ligne par semaine, à part cette semaine où je pars en vacances . J'espère que le rythme te convient! Voici la suite!
Jenali: merci pour ta review enthousiaste! Voici la suite, j'espère qu'elle comblera quelque peu ton impatience!
Micloun: tout d'abord, bonnes vacances . Merci, c'est très gentil, bien qu'il n'y ait pas de quoi m'admirer! Mais c'est très gentil quand même! Ouais, c'est sûr que 'Green Eyes', ça rend mieux que 'Yeux Verts', mais bon...Oui, moi aussi je trouve cette fic très drôle! L'esprit de Malfoy est très bien respecté! Des réincarnations? Eh bien pour tout te dire, comme l'histoire n'est pas encore finie, personne ne sait vraiment le fin mot de l'histoire lol. Donc le mystère reste entier! Je choisis les fics que je traduis en fonction de ce qu'elles me font ressentir, de la qualité de l'écriture, du nombre de reviews (parce que généralement, ça donne une idée de la qualité de l'histoire, je dis bien généralement), bref, il faut qu'elle me plaise particulièrement, qu'elle ait un petit plus. J'ai décidé de traduire cette fic principalement à cause de son originalité, j'ai tout de suite accroché. Il y en très peu que j'ai envie de traduire, surtout que je ne lis que des Harry/Draco (je suis fan lol). Voilà, j'espère que ma réponse te satisfait! Bye!
Feng Shui Boy: hello! Oui, moi aussi j'aime beaucoup Agatha Christie, "les Dix Petits Nègres" m'a particulièrement marquée! Il y a une ambiance toute particulière dans les bons polars que l'on retrouve ici, je trouve! Merci pour ta review, c'est très gentil à toi de me laisser tes impressions! Bisous!
CHAPITRE QUATRE
"Je...je ne comprends pas" dit à nouveau Potter, avec lenteur. "Je...je suis né en Californie. J'ai grandi ici"
"Vous n'êtes pas allé à l'école primaire ni au collège ici. Il n'y a aucun dossier enregistré stipulant qu'un 'Harry James Potter' est allé à l'école dans cet état"
Yeux Verts n'apprécia pas cette dernière phrase. Ses mains tremblèrent, il se leva et se mit à faire les cent pas. "Ecoutez, je sais ce dont je me souviens et ceci...Tout ceci est simplement une énorme erreur. Où avez-vous trouvé ce certificat de naissance, d'ailleurs?"
Je pris une profonde inspiration, ne sachant pas quelle serait la réaction de Potter à cette nouvelle. "J'ai un ami qui est membre de la Chambre des lords. Il m'a trouvé ce document"
Potter me regarda fixement, le visage pâle excepté deux points d'une couleur vive sur les pommettes. Dehors, le vent hurlait, la pluie martelait les vitres et le tonnerre sonnait le glas de n'importe quelle paix qui restait dans sa vie. "Tout ceci est une erreur. Je ne sais pas à quoi vous jouez, et je ne sais pas ce qui vous a poussé à appeler l'Angleterre plutôt qu'un autre pays, mais vous avez tort"
Je restai silencieux. Les intuitions n'ont aucun sens quand on essaie de les expliquer, de toutes façons. La plupart des gens croient en ce qu'ils peuvent voir, sentir et toucher. Etant un détective, je suivais mes intuitions - elles m'avaient épargné des pépins de nombreuses fois - mais, avant que l'affaire Potter ne me tombe entre les mains, je ne pensais pas qu'il y avait grand chose au-delà du monde physique qui nous entourait. Maintenant, je sais que ce n'est pas le cas.
"Eh bien? Qu'est-ce qui vous a donné l'idée d'appeler un ami de la Chambre des lords? Comment savez-vous que ce 'Harry James Potter' là est bien moi, d'abord?". Il leva le menton, le regard inflexible. 'Têtu' était le deuxième prénom de Potter, décidément.
Il voulait un duel, hein? Très bien. Je bus une gorgée de ma boisson. "Ma mère était Anglaise. Vous avez la même façon de parler qu'elle. Certaines intonations sur certains mots. Certains traits de langage. En ce qui concerne ce certificat de naissance, c'est bien le vôtre". Je jetai une liasse de papiers sur le bureau. Ils firent un bruit sourd quand ils heurtèrent le dessus du bureau, ce qui contrasta fortement avec le tourbillon d'émotions qui emplissait la pièce. "Voici le dossier médical de votre mère, depuis votre naissance. Voici son certificat de décès. Voici celui de votre père. Si vous y jetez un coup, les noms 'Lily Evans Potter' et 'James Edward Potter' sont les mêmes que ceux inscrits sur votre certificat de naissance, qui est le seul ayant été délivré pour un 'Harry James Potter' en 1980"
"Ces dossiers...Comment les avez-vous eus? Ne sont-ils pas confidentiels?"
"Ecoutez, Potter, vous m'avez embauché pour faire un boulot. Vous m'avez embauché pour rassembler des informations. C'est ce que je fais. En chemin, je fais ce que je peux pour m'assurer que les informations que je rassemble sont correctes. Je travaille pour vous. De temps en temps, je suis obligé de faire une entorse au règlement, mais je le fais toujours en faveur du client. En votre faveur. J'irai au bout de la passerelle avec vous"
La seule différence était que personne ne m'attendrait au bout de la passerelle.
"Je sais qui je suis, M. Malfoy. Je me souviens de mon enfance. Ne croyez-vous pas que si j'étais allé à l'école au Royaume-Uni, je m'en souviendrais? Jusqu'à présent, la seule chose que vous avez de juste est que je suis orphelin. Pour le reste...Je sais qui je suis. Je n'ai pas besoin d'un ivrogne de détective pour me dire qui je suis"
Cette remarque me piqua au vif, mais je gardai un visage impassible. Quand quelqu'un cherche à vous blesser, la dernière chose à faire est de lui montrer qu'il a marqué un point. Car ça lui donne des munitions pour la fois d'après.
Il garda le silence un long moment. Dans ce genre de métier, on a à faire à des personnes qui sont souvent au plus mal. Les détectives privés gagnent leur vie sur la peine et la souffrance des autres. C'est dur d'affronter la peine et la souffrance tous les jours. Tous ceux qui s'y engagent en paient le prix. Quand les gens sont bouleversés, vous devez les traiter avec soin. Contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, on est tous capables d'actes bigrement épouvantables, si l'on est poussé.
Potter était un homme au bord du gouffre. J'allais lui proposer un verre mais il se mit à parler. Sa voix était calme mais décidée, ce qui tranchait avec l'orage qui faisait rage.
"Je sais qui je suis. Je sais ce dont je me souviens". Il le répéta encore une fois, cette fois avec une pointe de désespoir soulignant chaque mot. Puis il retomba dans le silence. Finalement, il leva à nouveau la tête vers moi, les yeux brillants. Sa voix avait la froideur et la dureté de quelqu'un qui sait quelque chose que vous ignorez.
"Vous êtes viré"
&&&&&&&&&&
Potter quitta mon bureau. Derrière ma porte, j'entendis Jennifer lui parler, et sa réponse énoncée à voix basse. Je ne pus saisir ce qu'il dit mais un air de désespoir silencieux avait l'air de s'accrocher à chacune de ses syllabes. Je me servis un autre verre et regardai par la fenêtre. La porte extérieure se ferma avec l'irrévocabilité d'un couvercle de cercueil. Juste à côté de mon bureau, la radio sur le bureau de Jennifer était allumée, et une note basse, comme la voix entrecoupée d'un chanteur, se fit entendre.
Potter avait fait son choix. J'avais essayé de l'aider. J'avais trouvé ce que j'avais pu, et je ne pouvais m'empêcher de penser qu'il y avait plus, bien plus sous la couche extérieure. Je n'avais pas besoin d'un médium pour me dire que cette affaire était louche. C'était mon boulot de rassembler des informations. Mais pas d'évaluer la valeur de ces informations. Je les avais données à Potter, et lui avais laissé décider quoi en faire.
Je me demandai ce qu'il allait faire ensuite. Je me demandai s'il allait bien. Je me demandai si quelqu'un allait lui rendre visite dans le Couloir de la Mort.
&&&&&&&&&&
Je quittai le bureau peu de temps après Potter. L'orage me rendait agité, alors je pris la direction du Callahan. Je ne sais pas pourquoi j'allai là-bas. Juste un besoin urgent de boire en guise de repas de midi, je suppose. Il faisait frais et sombre à l'intérieur, et je frissonnai en entrant, à l'abri de la pluie. Il faisait si noir dehors qu'il ne fallut qu'un instant pour que mes yeux s'habituent à la lumière intérieure. A ma surprise, Gary était là. Il me repéra et me fit signe depuis une table.
"Hé, Malfoy. Tu m'as l'air tourmenté, en plus d'être trempé. C'est l'affaire Potter?"
J'acquiesçai et appelai la serveuse pour un verre. Les paroles de Potter résonnaient dans mon esprit et je bus une longue gorgée.
Il me regarda avec ses yeux qui ne rataient rien. "Tout va bien?" me demanda-t-il à voix basse.
Je lui répondis sur le même ton. "Oh ouais, ça roule". Il garda le silence et je soupirai. "L'affaire s'est un peu compliquée"
"C'est ce que je vois. Tu penses toujours qu'il ne l'a pas fait?"
"Je ne sais plus quoi penser. Rien dans cette affaire n'est ce que ça semble être. Je n'ai jamais rencontré une affaire pareille"
Gary étudia son verre. "Quel est son prétendu mobile pour le meurtre?"
"Je ne sais pas vraiment. Les journaux disent que c'est la jalousie - la même vieille histoire, tu sais - mais Potter dit qu'il n'a pas vu Mike LaMorte depuis quinze ans"
Gary eut le sourire de quelqu'un qui rencontre le fils illégitime de la famille royale. "Il y a un mobile là-dessous, tu sais"
Je penchai la tête sur le côté. Les yeux de Gary étincelaient de triomphe contenu.
"Qu'est-ce que tu sais, Gary?"
"Moi? Je ne suis pas un mouchard. Cependant, je dirai que jeter un coup d'oeil à la vie de Mike LaMorte pourrait être une bonne idée"
"Oui, eh bien ce n'est plus mon affaire. C'est le problème de quelqu'un d'autre désormais"
Gary m'étudia du regard. "Qu'est-ce que tu veux dire, ce n'est plus ton affaire? Il t'a viré?"
"Il y a juste quelques minutes"
"Oh. Ca sent mauvais pour lui?"
"Disons simplement qu'il améliorera son bronzage à San Quentin en attendant la chaise électrique à moins que son avocat n'arrive à transformer de l'eau en vin" répondis-je amèrement.
"C'est dur. Un type bien...il semble juste ne pas avoir de chance, hein? Je suis navré d'entendre ça" fit Gary sur un ton pensif. "C'est trop dommage qu'il t'ait viré. Tu avançais?"
Je me penchai sur mon verre comme un vautour sur sa proie. "Plus que je ne le souhaitais"
Je ne m'étais pas senti aussi impuissant de toute ma vie.
&&&&&&&&&&
L'orage s'était un peu calmé le temps que je retourne au bureau. L'atmosphère était pesante et les nuages se balançaient, comme les nichons d'une strip-teaseuse vieillissante. A la radio, le présentateur baragouinait sur les glissements de terrain là-haut sur les collines. Potter vit sur les collines, songeai-je, mais j'écartai cette idée et me frayai un chemin à l'intérieur.
Jennifer n'était pas là, sûrement partie déjeuner, mais le répondeur clignotait. Je pressai le bouton marche. Une voix froide s'en échappa.
"M. Malfoy, ici Anne Oshlo, la secrétaire de M. Potter. Je sais qu'il avait rendez-vous avec vous ce matin, mais je ne l'ai pas revu depuis. Il y a une affaire ici au bureau qui requiert son attention dans les plus brefs délais. Pourriez-vous me rappeler?". Elle épela son numéro de téléphone deux fois, juste au cas où je n'aurais pas compris la première fois. Je m'assis sur le bureau de Jennifer et composai le numéro. Elle répondit à la première sonnerie.
"Anne Oshlo". Je suppose que je l'avais appelée sur sa ligne privée. Elle n'avait pas l'air d'être le genre à avoir un portable.
"Ici Malfoy. Vous m'avez appelé?"
Elle semblait agitée, ou du moins, aussi agitée qu'une femme comme elle pouvait être. "Je cherche M. Potter. Il est avec vous?"
"Non. Il a quitté mon bureau il y a environ trois heures. Je ne sais pas où il est allé"
"Oh. Enfin, je suis simplement inquiète à son sujet. Il y a quelque chose ici qui nécessite son attention, et ça ne lui ressemble pas d'être injoignable. J'ai essayé chez lui et sur son portable, mais je n'arrive pas à le joindre"
"Je suis sûr qu'il va revenir. Peut-être qu'il s'est accordé un jour de congé pour aller aux courses"
Son ton devint encore plus glacial. "M. Potter ne va pas aux courses de chevaux"
"Du calme. C'était une plaisanterie. Ecoutez, je ne sais pas où il est. J'aurais aimé pouvoir vous aider"
"Si vous arrivez à le joindre, pourriez-vous lui demander de me rappeler immédiatement?"
"Pas de problème". Je me retins avec peine de faire un salut militaire.
"Merci de m'avoir accordé de votre temps, M. Malfoy". Elle raccrocha.
Je me demandai ce qu'il lui était arrivé dans la vie qui la rende si dure et si froide.
J'allumai la lampe de mon bureau et m'assis. Je tapai le compte-rendu final de mon enquête, puis le déposai sur le bureau de Jennifer pour qu'elle l'inclue avec la dernière facture. Puis je me rassis et regardai par la fenêtre, tout en m'entourant de fumée de cigarette. L'air était lourd. En bas, les voitures passaient en projetant des lumières blanches sur les trottoirs déserts. Les nuages avaient l'air de chasser tout espoir de l'air ambiant.
Je me demandai où était Potter. Le bout de mes pieds me démangeait, et mon compte en banque essayait toujours de garder la tête hors de l'eau. J'avais besoin d'argent, mais je n'étais plus sur cette affaire. Je ne pouvais rien faire pour lui. Ce n'était plus moi qui m'en occupait.
Néanmoins, juste aller voir ce qu'il faisait...m'assurer qu'il allait bien...c'était simplement de la gentillesse humaine, non?
J'ai toujours été très bon pour me voiler la face.
&&&&&&&&&&
Je conduisis ma voiture dans les rues glissantes, gravissant les collines en serpentant. Il ne pleuvait pas encore, mais tout était gris et vert dans le faible demi-jour. En passant devant la maison de Potter, je ne vis pas de voiture dans le garage.
Je fis demi-tour, me garai dans l'allée de sa maison et montai les marches pour arriver à la porte d'entrée. Un portail en bois était sur ma droite, et, jetant un coup d'oeil à travers les lattes, je vis une piscine. Je sonnai. A l'intérieur, un chien aboya, un aboiement profond de gros chien, mais personne ne répondit. Personne ne fit taire le chien non plus, alors je vérifiai la boîte aux lettres. Le courrier était toujours là. Aucune lumière à l'intérieur de la maison; du moins, aucune que je puisse voir.
Je retournai à ma voiture et laissai les collines derrière moi, redescendant vers les rues minables qui étaient mon monde. Où était Potter? Je réfléchis aux possibilités, me demandant où j'irais pour échapper aux mauvaises nouvelles. L'intuition que j'avais était aussi floue que les vagues de chaleur qui s'élevaient des rues de Californie un jour de canicule.
Pour la deuxième fois de la journée, je me retrouvai au Callahan. J'entrai, regardai alentour et effectivement, au fond, dos à la porte et assis tout seul dans un box, je vis Potter. J'hésitai un moment, puis dépassai les autres tables et me glissai sur un siège en face de lui.
Il avait très mauvaise mine. Ses manches étaient relevées, sa cravate de travers, ses mains tremblaient. Il cligna des yeux en me voyant, le regard trouble.
"Malfoy?"
"Votre secrétaire vous cherche"
"Oh"
L'alcool ne lui déliait manifestement pas la langue.
"Ca va, Potter?"
Il rit. J'avais déjà entendu ce rire auparavant. C'était le rire de quelqu'un qui avait très peu à perdre. "Super bien. Extra"
Son accent anglais était évident, maintenant que je savais l'écouter. Juste une pointe, mais il était bien là. Je me retins de me pourlécher les babines, optant à la place pour un beau gémissement intérieur.
"Vous êtes ici depuis combien de temps?"
"J'sais pas...J'ai roulé un moment...j'me suis retrouvé ici. J'réfléchis. J'me souviens". Il avait du mal à articuler. Il était vraiment soûl.
"Vous vous souvenez de quoi?"
"Oh...un tas de choses...mon cousin...ma tante et mon oncle...j'arrête pas de me souvenir de quelqu'un aux cheveux roux, mais j'arrive pas à retrouver son nom...allé au collège...Tom...Mike...". Il s'arrêta de parler et vida le reste de son verre.
"Tom?"
Ses yeux devinrent prudents. Il en avait trop dit et il le savait, même ivre comme il l'était. Il commença à agiter la main pour un autre verre mais je l'arrêtai.
"Venez. Je vous ramène chez vous. Vous pourrez boire tout ce que vous voudrez là-bas"
Il protesta. "Mais...ma voiture...Je vais bien...J'ai juste besoin de dessoûler..."
"Potter, le temps que vous ayez dessoûlé, les oiseaux chanteront et une nouvelle journée aura commencé. Debout". Il obéit avec difficulté. Je me mis à côté de lui et il passa un bras autour de moi. Une fois encore, ça me rappela que nous étions presque de la même taille. Il était juste un peu plus petit, et, sous l'alcool, je sentais son désespoir. Il fouilla dans son portefeuille et jeta de l'argent sur la table. Je le fis entrer dans ma voiture.
Il ferma les yeux et s'appuya sur le dossier lors du chemin du retour. Cependant, il ne dormait pas, car je l'entendais se parler tout seul. Ca avait l'air d'être une litanie de noms, et sa voix était assurée, comme quelqu'un qui réciterait son chapelet par coeur. Aucun d'eux ne m'était connu.
Je stoppai dans son allée. Les lumières extérieures de la maison étaient allumées, baignant les environs d'une lueur argentée. "Ok, Potter. Vous êtes chez vous"
Il ouvrit les yeux. A la lumière, ils étaient si foncés qu'ils semblaient presque noirs. "Chez moi. Hum. Entrez dans le garage. Il y a une porte là-bas". Je fis comme il me l'avais demandé, puis fis le tour de la voiture pour l'aider à sortir. Une fois dehors, il trébucha et jeta ses bras autour de moi pour garder l'équilibre.
C'était agréable.
"Bon, vous avez vos clés?". Il les sortit de sa poche et me les tendit. J'essayai celle qui ressemblait le plus à une clé de maison, et elle ouvrit la porte. Nous nous trouvions devant une courte volée de marche. En haut, j'aperçus une cuisine. Une alarme clignotait et le même chien que j'avais entendu plus tôt aboyait, tout en se rapprochant des marches.
"L'alarme. Merde. L'alarme. Hum. Eteignez-là" marmonna-t-il en me montrant un tableau de commande à notre droite.
"Je ne connais pas le code de l'alarme, Potter"
"10 56"
Je tapai les numéros et la sonnerie s'arrêta. Un croisé golden retriever se tenait en haut des marches, aboyant joyeusement. Le visage de Potter s'éclaira.
"C'est Ginger (on pourrait traduire ça par 'Rouquine' ou 'Poil de carotte', mais ça sonne mieux en anglais je trouve, donc je le laisse)..." fit-il, puis il monta avec précaution les marches pour la rejoindre, en s'appuyant sur la rampe. Je le suivis. Il se baissa pour la caresser et elle le lécha de partout. Je fis la grimace. On dit que les chiens ont la bouche plus propre que les humains, mais moi j'en sais rien. Ce que je sais, c'est que je ne bois pas dans les W-C. Toutefois, elle avait l'air très affectueuse. Elle remuait la queue, un gracieux panache de fourrure dorée qui ventilait l'air. Elle s'assit en face de moi et me tendit une patte. Je la pris.
"Enchanté, Ginger". Je jetai un coup d'oeil à la cuisine. Les meubles étaient en chêne et les comptoirs en granit noir. Il y avait un petit 'îlot' au centre, avec une cuisinière, et des casseroles en cuivre accrochées au dessus. A ma droite, il y avait un débarras, et juste après, une autre porte. En face de moi, il y avait la cuisine, un coin-repas et une porte qui devait sûrement conduire à une salle à manger.
"Venez, j'vous fait visiter" marmonna Potter. Je le suivis alors qu'il sortait en titubant de la cuisine, Ginger sur ses talons. La porte débouchait bien sur une salle à manger, avec deux baies vitrées qui donnaient sur une terrasse. Il y avait du parquet par terre. La salle à manger était ouverte sur le reste de la maison, c'est pourquoi j'aperçus un court escalier en colimaçon qui menait au salon en contrebas, lequel était décoré de couleurs sombres et riches. Un passage surélevé traversait tout le salon, et on aurait dit que presque tous les murs de l'arrière de la maison de Potter, ou du moins ceux que je voyais, étaient des baies vitrées, donnant sur la même terrasse. Des escaliers se trouvaient à la fin de la passerelle, menant probablement aux chambres à l'étage supérieur. A ma droite, le passage conduisait à une pièce sombre. Elle ressemblait à la pièce dans laquelle se trouvait Potter quand je l'avais observé, la première nuit où j'avais pris l'affaire. Je pus simplement discerner un ordinateur et quelques classeurs.
Potter descendit avec précaution les marches, et s'affala sur un canapé. Il agita la main. "Salon". Le salon avait encore des baies vitrées, celles-ci donnant sur la piscine que j'avais aperçue plus tôt dans la journée, plus une cheminée en pierre qui était ouverte des deux côtés. Il fit un geste vers la gauche. "Mon antre est de l'autre côté de la cheminée". Je me dirigeai vers son 'antre'. Une bibliothèque s'étalait sur deux pans de murs et le parquet était recouvert de tapis orientaux, ajoutant de la chaleur à la pièce. Un ensemble home vidéo occupait le troisième mur, avec deux chaises longues en cuir, toutes les deux d'un rouge profond qui lui faisait face.
"Piscine" annonça-t-il. Je regardai par les baies vitrées. C'était une piscine carrée, avec des palmiers et des citronniers sur trois côtés pour servir de barrière d'intimité, une rangée d'arbres se terminant au portail que j'avais vu plus tôt dans la journée. Quelques chaises et fauteuils étaient éparpillés ça et là.
"Très belle maison. Restez ici". Je le laissai sur le canapé, et montai les marches pour aller à la cuisine. J'ouvris les meubles au hasard et je finis par en trouver un avec des verres à l'intérieur. J'en pris un, le remplis d'eau et de glaçons, puis redescendis les marches. Il commençait à faire sombre, donc j'allumai quelques lampes. La maison était chaleureuse, non pas côté température, mais côté confort. Je me sentais chez moi. Je pourrais vivre dans une maison comme ça. Mon appartement semblait très petit et miteux en comparaison.
Je tendis le verre d'eau à Potter. "Buvez ça. Après je vous mettrai au lit"
Il tapota le canapé à côté de lui. Je m'assis avec prudence. Il vida le verre, puis me regarda. "Je me disais juste...Vous savez toutes ces choses sur moi et moi je ne sais rien du tout de vous"
Aucun client ne m'avait posé un jour une question sur moi. Aucun n'avait voulu savoir. Pour eux, j'étais juste un gars de confiance, payé pour fermer sa gueule et découvrir leurs malheurs.
"Oh. Eh bien, je suis détective depuis longtemps. Fils unique, mère décédée. Je n'ai pas vu mon père depuis que j'ai cinq ans. Je suppose qu'il est toujours en vie, mais je n'en suis pas sûr. Divorcé. Vis seul, un chat. Quand je mourrai, comme c'est souvent le cas pour les types qui font le même métier que moi, personne ne se dira que son monde s'est arrêté de tourner"
Il enleva sa cravate. Je fis de mon mieux pour ne pas le remarquer. "Divorcé? Des enfants?"
Je me rassurai en me disant que, de toutes façons, il ne se souviendrait de rien le lendemain matin. "Une fille. Jessica. Elle vit avec sa mère"
"Où?"
"Baltimore"
"Vous êtes loin de chez vous, vous savez" commenta-t-il en me regardant, les lèvres entrouvertes.
Je n'étais pas sûr d'avoir un endroit que je pourrais appeler 'chez moi'. Mais je n'allais certainement pas lui dire ça.
"Je sais ce que ça fait" fit-il en se redressant.
Je commençai à lui répondre. "Comment ça-", mais je fus coupé par sa bouche sur la mienne. Il passa ses mains dans mes cheveux, et ses lèvres sur les miennes étaient chaudes et insistantes malgré l'eau froide, et je ne pus m'en empêcher, ou peut-être que je ne le voulais pas vraiment...Je lui rendis son baiser. Sa langue rencontra la mienne et je fus empli d'un feu vert. Je gémis, perdu, et mes mains trouvèrent ses cheveux...et ils étaient bien plus soyeux que je ne m'y attendais...et sa bouche était si douce...et il savait exactement comment m'embrasser...et ses mains étaient sur le point d'enlever ma cravate.
Je me reculai.
"Potter..."
"Hmmm?" souffla-t-il en déplaçant sa bouche vers mon oreille.
"Au lit"
Il me sourit, un vrai sourire. Ses yeux étaient assombris par le désir, et nous étions tous les deux à bout de souffle.
Je déglutis. "Vous avez besoin de repos. Il faut que vous dormiez pour cuver votre vin. Vous allez être une loque demain matin. Du café avec du cognac vous aidera". Je me levai et le tirai hors du canapé. "Où est la chambre?"
"Mmm, j'espérais que tu allais me demander ça" fit-il, le nez dans mon cou. "Juste au bout du couloir". Nous montâmes les escaliers et traversâmes le passage, où des marches sur la gauche conduisaient à une porte, qui semblait être une chambre d'amis, et à la chambre principale en haut des marches. Dans la lueur diffuse des lumières extérieures, je distinguai un grand lit 1,95 m de large, me précise mon dico , un autre ensemble home vidéo, encore une autre baie vitrée qui donnait sur la terrasse, et une penderie. Je le conduisis vers son lit et dégageai les draps. Il s'assit sur le lit et enleva ses chaussures. Je l'arrêtai avant qu'il n'enlève quoi que ce soit d'autre.
"Dormez"
Il fit la moue. "Tu ne te joins pas à moi?"
Dieu, comme j'en avais envie!
"Non. Vous n'allez vous souvenir de rien du tout demain matin, de toutes façons. Appellez-moi si vous avez besoin de quelque chose"
Il hocha la tête, s'allongea sur le lit et ferma les yeux. Son visage était paisible dans le sommeil, et il paraissait très jeune. Je me penchai sur lui, l'enveloppai des draps et des couvertures, et remarquai une fois de plus la cicatrice sur son front. Il la frottait tout en marmonnant. Ginger se roula en boule sur le lit près de son maître. Il finit par sombrer dans le sommeil.
Je le regardai dormir un long moment.
&&&&&&&&&&
Potter m'appela juste après neuf heures le matin suivant. Il avait l'air d'un écolier qui s'était attiré des ennuis.
"M. Malfoy? Hum, je suis navré de vous déranger, et si vous êtes occupé, je comprendrai, mais, hum, pourriez-vous m'emmener au Callahan pour que je récupère ma voiture?"
La maison de Potter n'était pas du tout sur mon chemin. Ce n'était pas mon client. Je n'étais pas payé pour ça.
"Bien sûr. Je serai là dans une minute"
&&&&&&&&&&
Je mis la radio très fort tandis que je me dirigeais vers sa maison. Il y avait une station de radio que j'écoutais souvent les matins. L'animatrice faisait passer des musiques d'une certaine décennie ou d'un certain genre, qui changeait à chaque émission. Elle avait déjà passé la musique du Vietnam, les années cinquante, les années trente, les années folles les années vingt, la musique des cocktails branchés...L'émission d'aujourd'hui semblait porter sur la musique de la seconde guerre mondiale. Un baryton commença à chanter. Je reconnus l'orchestre de Jimmy Dorsey en arrière-plan.
"...those cool and limpid green eyes... a pool wherein my love lies... so deep that in my searching for happiness I fear that they will ever taunt me... all through my life they'll haunt me...but will they ever want me? Green eyes, make my dreams come true..."
"...ces yeux verts calmes et limpides...un océan à l'intérieur duquel repose mon amour...si profonds que dans ma quête du bonheur, j'ai peur qu'ils ne me torturent à jamais...durant toute ma vie ils vont me hanter...mais voudront-ils de moi un jour? Yeux verts, réalisez mes rêves..."
J'arrêtai brusquement la radio et fis le reste du chemin en silence. Potter avait dû m'attendre, car il sortit du garage dès que j'eus avancé dans l'allée. Il portait un costume noir et une chemise blanche finement rayée de bleu et de noir, ainsi qu'une cravate à motif cachemire bleu, noir et gris. Il sentait délicieusement bon. Il s'était peut-être pris une cuite, mais sur lui, ça lui allait bien.
"Je vous suis très reconnaissant" fit-il en montant dans ma voiture et en me tendant un café au lait. Quant à moi, je lui tendis du café arrosé de cognac.
"Pas de problème. Comment vous sentez-vous?"
Il me regarda. "Comme une loque"
Je ne pus retenir un sourire. "Ca ne se voit pas. Vous vous souvenez de quelque chose à propos de la nuit dernière?"
"Je me souviens d'être allé au Callahan. Je me souviens de, hum, vous avoir viré, hier"
Je gardai les yeux sur la route. "Oui, en effet. Vous devriez recevoir votre dernière facture dans quelques jours"
Il bafouilla, ce qui était en désaccord avec l'image de l'entrepreneur confiant que le reste du monde voyait d'habitude. "Oui, eh bien, hum, je voulais vous parler de ça, justement. Je, hum, j'étais bouleversé, et je, eh bien, je ne le pensais pas. J'ai...simplement...vous voyez, un peu...perdu la tête. J'aimerai vous ré-embaucher si, hum, vous êtes encore disponible"
Yeux sur la route. "Si je continue à creuser, je vais sûrement trouver plus de choses qui vont peut-être ne pas vous plaire"
Il acquiesça. "Je sais. Mais...je...j'ai besoin de savoir. Ce que vous m'avez montré...Je ne le comprends pas mais si je ne trouve pas la réponse, ça va simplement me ronger. Vous voyez ce que je veux dire?"
Je ne pus m'empêcher de rire. "Je suis détective privé. Je gagne ma vie en fouinant. Je suis le type qui vérifie ce qu'il y a dans les armoires à pharmacie. Je l'ai toujours été. Je comprends. Si vous en êtes sûr, alors oui, je continue à travailler sur votre affaire"
Il poussa un soupir de soulagement. Dehors, un énorme éclair heurta le sol, à une quinzaine de mètres de nous, et le roulement de tonnerre secoua ma voiture.
&&&&&&&&&&
Je laissai Potter au Callahan et je me dirigeai vers mon bureau, tout en finissant le café au lait qu'il m'avait fait. Il était bon aussi. Je me demandai distraitement si c'était un bon cuisinier. Je me demandai s'il avait bien dormi la nuit précédente. Je me demandai ce qu'il portait pour dormir.
Ce ne fut qu'en arrivant au bureau que je me rendis comte que je n'arrêtais pas de faire courir mes doigts sur ma bouche en me remémorant ses lèvres sur les miennes. Je n'embrasse pas sur la bouche. Ni Jennifer, ni Emily, personne. C'est trop personnel. Trop intime. Ca montre des sentiments qui ne sont pas présents. De sentiments dont je préférerais ne pas me souvenir. De sentiments que j'ai eu une fois, il y a très longtemps.
Yeux Verts m'avait embrassé sur la bouche. Je l'avais laissé m'embrasser.
Je lui avais rendu son baiser.
&&&&&&&&&&
Pour quelqu'un qui était tombé dans la misère, comme Potter m'avait dit, Mike LaMorte avait eu un très beau logement, vraiment. Il avait habité dans une copropriété juste à côté de Culver City, un de ces quartiers de nouveaux bourges. L'extérieur de l'immeuble était une tentative ratée d'art déco. J'entrai dans l'immeuble et montai au troisième étage. Le couloir était en plâtre avec des carreaux rouge brique, et était propre. L'immeuble entier avait l'air d'être bien entretenu. Je frappai à la porte puis tendis l'oreille, mais tout semblait silencieux dans l'immeuble. Pas de réponse. Je frappai encore une fois.
"J'arrive, j'arrive, retiens-toi, je viens...". La porte s'ouvrit.
Un homme se présenta à l'ouverture, portant uniquement un short vert. Il était plus petit que moi, bien bâti, brun et avait des yeux noirs qui me regardèrent avec méfiance. Il avait l'air d'être un trentenaire bien conservé, ou un homme ayant une vingtaine d'années mais qui avait mal vieilli.
"Oui?"
Je lui tendis ma carte. "Draco Malfoy. J'enquête sur le meurtre de Mike LaMorte"
"Encore? Ils ont attrapé le gars qui l'a fait, au cas où vous seriez pas au courant"
"Je sais. Je me demandais si je pouvais vous poser quelques questions"
Il regarda ma carte et soupira. "Fais chier. Bien sûr, entrez donc"
La pièce était lumineuse et spacieuse, peinte tout en blanc, à la Marylin Monroe. Sur une table, un vase rempli de tulipes soyeuses d'un rouge vif apportait la seule touche de couleur à la pièce. Des cartons étaient éparpillés ça et là.
"Vous déménagez?"
L'homme se tourna vers moi. "Je suis Sam Pirelli. Ouais, je déménage. Maintenant que Mike est plus là, je ne peux plus me payer cette baraque"
"C'était Mike qui fournissait le revenu?"
Pirelli me désigna un canapé. "Non, Mike était une pute paresseuse qui n'a jamais travaillé un seul jour de sa vie. Il recevait de l'argent tous les mois. Je ne sais pas d'où ça venait". Un air qui se voulait rusé apparut sur son visage, ne trouva pas son bonheur et partit.
"Vraiment? Peut-être que ça venait de sa famille"
"Dix mille dollars par mois? J'en doute. Il descendait d'une famille ouvrière"
"Aucune idée d'où l'argent venait?"
"Non. Mais ça rentrait tous les mois. Alors ouais, on vivait à l'aise. Maintenant qu'il a été buté, je dois trouver une autre piaule où crécher"
Je doutais que Sam ait été l'une des quatre personnes présentes à l'enterrement de Mike.
"Que pouvez-vous me dire sur le jour de la mort de Mike?"
"Un jour normal. Je suis allé travailler, je suis rentré ici, je l'ai trouvé mort. Dans la chambre...là-bas". Il me désigna l'endroit du doigt.
"Qu'avez-vous fait?"
"Je suis allé faire un tour sur la plage. Qu'est-ce que vous pensez que j'ai fait? J'ai appelé les flics. Je...Mike...vous voyez, toute cette moquette blanche..."
Je pouvais imaginer. "Pensez-vous que ce soit Harry Potter qui ait assassiné Mike?"
"Je ne sais pas. Je n'ai jamais vu Potter moi-même mais Mike le voyait de temps en temps"
"Oh? A quelle fréquence?"
"Tous les deux mois environ. Ils se rencontraient, mais c'était en privé"
"Vous avez une idée du motif de ces entrevues?"
"Aucune. Mais Mike jubilait toujours en parlant de ça. Il disait que grâce à Potter, on était à l'abri à vie. A part ça, il me traitait comme un champignon: il me gardait à l'ombre et me donnait de la merde à manger"
Dix mille dollars par mois. Rencontrait Potter régulièrement. Mike à l'abri à vie. Quel que soit l'angle sous lequel j'y regardais, ça ressemblait à du chantage.
"Est-ce que Mike faisait chanter Potter?"
Pirelli réfléchit un instant à la question. Je pouvais voir l'effort que ça lui coûtait. "Je...je me demande. Parce que, vous voyez, à chaque fois que Mike revenait de voir Potter, il faisait le fier et tout ça. Mais qu'est-ce que Potter pourrait bien avoir à faire avec Mike? Mike était une ordure. Un voyou. Mais il taillait super bien des pipes. Il n'y en a pas de meilleur"
"Donc vous étiez son colocataire?"
Il secoua la tête. "Non, c'était juste une piaule où dormir et un type à baiser"
Vous remarquerez l'ironie de tout ça. Il semblait bien que Mike se servait de Potter, et que Sam se servait de Mike. Le cycle de la vie.
"Etes-vous tombé sur quelque chose appartenant à Mike qui semblait suspect?"
"Juste un truc. Mike est un voyou, d'accord? Il n'a pas de compte en banque, car si c'était le cas, il aurait dû déclarer les dix mille dollars comme étant un revenu, vous voyez. Mais j'ai trouvé cette clé par hasard...cette toute petite clé. J'savais pas ce que c'était. Alors j'me suis renseigné. C'est pour un coffre fort. Mais qu'est-ce que Mike pouvait bien avoir dans ce machin-là? J'me suis dit que ça avait quelque chose à voir avec les dix mille dollars qu'il recevait tous les mois. J'ai découvert qu'il avait loué un coffre fort à mon nom. J'suis tombé par hasard sur le contrat de location"
"Vous l'avez ouvert?"
Ses yeux noirs me dévisagèrent avec méfiance. "Ouais"
"Et qu'est-ce qu'il y avait dedans?"
"Une réserve à vie de préservatifs. Qu'est-ce que ça peut vous faire?"
"Je suis juste un type qui essaie de résoudre une affaire. Vous n'aimeriez pas voir le tueur de Mike amené devant la justice?"
Pirelli embrassa la pièce du regard. Après une inspection plus rapprochée, je vis que les canapés était aussi élimés que le manteau d'un comptable. La moquette était tachée par endroits. La poussière recouvrait toutes les surfaces. Je gardai le silence. Poser des questions aux gens est une forme de séduction verbale. Il faut que vous leur donniez envie de vous parler, et souvent, les gens sautent ensuite sur l'occasion pour remplir un silence.
"Mike était un connard fini. Il aimait faire du mal aux gens. Physiquement"
Je me demandai si Mike n'était pas un converti aux enseignements du Marquis de Sade.
"Il me faisait du mal. Il trouvait ça drôle"
Je ne pouvais rien répondre à ça. Je me dis que le refrain du "Tango Masochiste" n'était pas très approprié.
Il finit par se lever, et se dirigea lentement vers la chambre. Il en revint avec un classeur, qu'il me tendit. "C'était ça qui était dans le coffre. C'est des dossiers d'un certain genre. Des dossiers sur les clients de Potter, d'après ce que j'en sais. J'sais pas ce qu'ils ont de si spécial. Les noms me disent rien. Tout le reste, c'est des tonnes de chiffres. Le reste, j'sais pas ce que c'est, à part des...assurances"
Je feuilletai le classeur, puis leva la tête vers Pirelli, le coeur battant. "Je peux en faire des photocopies?". Je sortis un billet de cinquante dollars et le déposai sur la table. "Pour le coût des photocopies"
Pirelli me regarda, puis finit par acquiescer. "Vous avez accès à des trucs que je n'ai pas, et vous avez un cerveau que je n'ai pas. Mike m'a trompé. Mike a trompé tout le monde. Enfin, il aimait sa mère. Personne ne mérite de mourir de cette façon, mais personne n'en perd le sommeil ni ne verse des larmes sur sa mort"
Du coin de l'oeil, je vis la silhouette de Pirelli...onduler.
C'était trop facile. C'était bien trop facile.
&&&&&&&&&&
Après m'être confortablement assis dans mon fauteuil de bureau, je parcourus les photocopies que j'avais faites. Je sursautai lorsqu'un éclair déchira l'après-midi et qu'un coup de tonnerre secoua le décor. Je lus le contenu des fichiers de Pirelli attentivement, en notant les dates. La plupart dataient de treize ou quatorze ans. Il y avait quelques dossiers sur les clients de Potter. Puis un nom attira mon attention. Je regardai tous les noms avec plus d'attention et j'en reconnus la plupart. Des gens de la pègre. La situation appelait les injures. J'en utilisai quelques-unes.
Harry Potter était un conseiller financier, oui. Il aidait la Mafia à blanchir de l'argent.
Mike LaMorte avait fait chanter Potter.
Le chantage. L'un des plus vieux mobiles pour un meurtre.
La vie peut être si douce du côté louche de la rue.
TBC...
