Merci à AnthaRosa pour sa correction
Chapitre 8 : Morceaux du tout
C'était officiellement le dernier jour de classe avant que les vacances ne commencent à Poudlard. La plupart des élèves prétendaient y être déjà, mais comme toujours, les professeurs furent indulgents et annulèrent des cours toute la journée. Ils devaient tous terminer leurs bagages avant la Fête qui annonçait les vacances, à quatorze heures et surtout avant le départ du Poudlard Express à dix sept heures.
Comme chaque année depuis qu'ils étaient à Poudlard, les élèves de potions grognaient et râlaient contre le professeur Snape quand il leur envoya ce mot :
Tous les cours de potions sont maintenus. Si un élève choisit d'ignorer cette remarque et de ne pas participer au cours, des points seront enlevés à leur maison et ils auront une semaine de détention dès leur retour à Poudlard en janvier….
Harry fut le seul à en rire.
« Vraiment cet homme sait comment ramener les élèves à la réalité. »
« Hé Harry, qu'y a-t-il de si drôle ? N'oublie pas que toi aussi tu as ce cours ! »
Bien entendu, Ron n'était pas du tout content, et pourtant il était l'un des rares élèves à avoir terminé de faire ses bagages.
Harry réprima rapidement son sourire. « Je sais, Ron. Je suppose que c'est moins important pour moi puisque je reste à Poudlard. »
Ron grogna et leva les yeux au ciel. Puis tous deux éclatèrent de rire.
« Merde ! Nous devrions y aller. Il est neuf heures moins dix. Je n'aimerais pas arriver en retard en double cours de potions, surtout le dernier jour. Tu sais comment il est. Espèce de salaud ! On n'aurait pas pu l'ensorceler ce matin. Fais-lui confiance pour gâcher l'esprit de vacances ! »
Harry décida de ne pas faire de commentaires et tira son ami jusqu'à l'entrée. Ron avait raison, s'ils ne se dépêchaient pas, ils arriveraient en retard en cours de potions et Snape était d'humeur meurtrière les 'derniers jours'.
« Et bien, c'est gentil à vous de me bénir de votre présence. Peut-être pouvez-vous maintenant concentrer votre attention suffisamment longtemps pour concocter une potion correcte. »
Dès qu'il était entré dans la salle, Snape avait fait l'appel et écrit magiquement les instructions au tableau. Les conversations coléreuses, représentatives des quatre maisons, qu'entretenaient les élèves de sixième année de potions s'étaient tues dès qu'il avait fait son apparition.
La plupart avait déjà décidé de terminer le cours pour pouvoir faire des choses plus urgentes et plus amusantes, comme faire ses bagages et se préparer pour la fête.
Snape espérait seulement que leur concentration couvrirait deux heures entières.
Harry lut deux fois les instructions au tableau, mais malgré ces lectures, il n'était pas certain de parvenir à se souvenir de tout dans l'ordre exact. Pour lui, elles avaient l'air d'une énigme : il devait deviner quels ingrédients ajoutés au bon moment et dans le bon ordre.
Les yeux de grenouille devaient être ajoutés exactement cinq secondes après le début de l'ébullition. Les pattes de chenille et la queue de lézard devaient être ajoutées l'une à la suite de l'autre. Cependant, il ne fallait pas les ajouter avant les crocs de chauve souris géante et les racines de bubertone, qui devaient être ajoutés toutes les minutes et toutes les trois minutes respectivement.
Harry secoua la tête. Il s'était perdu dans les instructions dès le début, dès qu'il fut question des yeux de grenouille. Il ne savait pas ce qui était censé bouillir dans le chaudron avant que cet ingrédient ne soit ajouté.
Trois minutes après, il en était à la moitié de sa troisième lecture et il vit qu'elle faisait mention de 'deux tasses de larmes de lion', 'une tasse de sang de dragon', 'dix tasses d'eau', 'six tasses de sève' et les mots 'devant être ajoutés au moment de l'ébullition' assez rapidement les uns des autres.
Harry comprit que la meilleure chose à faire était de réorganiser les instructions avant de commencer. Il prit une plume et un morceau de parchemin pour se mettre au travail.
A part Hermione, tous les autres élèves n'étaient pas encore allé jusque là et étaient plus préoccupés à essayer de comprendre les instructions qu'à essayer de travailler sur la potion Tempus Fugit.
Dix minutes après, Harry commença, comme tous les autres apparemment.
Les élèves de Sixième année devaient préparer leur potion tout seul, ce qui ne les empêchait pas de faire de rapides comparaisons entre leur potion et celle de leur voisin. La plupart se dirent que puisque leur potion était tout aussi orange que celle de leur voisin, ils avaient certainement préparé la potion correctement. Mais ceux qui avaient jeté un rapide coup d'œil vers celle de Harry, Hermione et Ron (Hermione aidait Ron du mieux qu'elle le pouvait, bien sûr), remarquèrent la couleur bleue foncée de leurs potions. Ils écartèrent leur crainte. S'ils avaient complètement raté leur potion, le professeur ne pourrait pas sérieusement penser punir la classe toute entière la veille des vacances.
Severus sentait une migraine survenir alors qu'il surveillait la préparation des potions. Il la combattit vaillamment à coups d'insultes.
« Dites-moi, certains d'entre vous ont-ils lu les instructions avant de commencer ? » Il se pinça le bout du nez puis regarda les élèves avec dégoût, ce qui les fit légèrement frémir. « Quelles atrocités préparez-vous ? »
Il avait déjà parcouru la moitié de la classe et s'empêchait de crier. Severus ne pensait pas que la classe concoctait la potion correcte, bien au contraire.
« Arrêtez tous. »
Le ton calme et froid les fit obéir immédiatement.
« Videz vos chaudrons et recommencez la potion. Je crois que vous avez encore soixante dix minutes pour essayer de la faire correctement. » Railla Severus. « Il faut exactement quatre vingt dix minutes pour la préparer et je sais que vous aurez presque tous besoin d'au moins, cent minutes. Vous feriez mieux de commencer car personne ne partira avant que votre potion ne me satisfasse. .
Hermione haleta de rage à la pensée de perdre une potion parfaitement bonne. Harry soupira de défaite.
Au moins, je sais comment la préparer…« Potter ! »
Harry sursauta et jura silencieusement. Cet homme parvenait encore en plein cours à lui faire peur au point de le laisser sans magie et pourtant, il avait l'habileté de faire palpiter son cœur en utilisant simplement sa voix.
« Oui professeur ? » Répondit-il un peu tard. Snape regardait les trois élèves avec des yeux noirs. Ron imaginait le cerveau de cet homme travailler furieusement à chercher une excuse pour enlever des points à Gryffondor.
Mais le professeur se tourna et s'en alla. « Vous pouvez tous les trois continuer votre potion et puisqu'il ne me fait aucun doute que vous aurez le temps, je veux à la fin du cours une liste des effets du Tempus Fugit sur un individu, ce qui inclut, son but. Tous les autres, remettez-vous au travail ! »
Le visage de Ron se contorsionna parce qu'il contenait sa colère. Hermione sourit et Harry soupira.
Il vaut mieux travailler cette partie pendant que la potion bouillonne.
A la fin du cours, la potion des autres était presque couleur lavande et Terry Boot sortit de la salle en poussant de petits cris et en se couvrant les oreilles alors que ses amis de Serdaigle l'aidait à sortir : Snape avait rassemblé les parchemins du trio avant de tester la potion sur Terry. Ce qui signifiait que pour lui tous les mouvements de ses camarades étaient accélérés comme s'ils étaient des supermen alors que lui marmonnait lentement et bougeait incroyablement lentement.
Quand tout le monde fut sorti, Snape se tint derrière sa table et regarda avec des yeux noirs les trois parchemins.
Harry prit congé de ses amis sachant qu'ils le laisseraient. Ils voulaient retourner à la Salle Commune et se préparer pour la fête et pour leur départ.
« Es-tu sûr de vouloir qu'on te laisse ? Ne peux-tu pas lui demander plus tard ? » Lui demanda Ron avec hésitation.
Harry secoua la tête. « Non. Je dois le faire maintenant, mais ne vous inquiétez pas, je viens vous rejoindre dès que je peux. »
« Très bien, » Accepta Ron toujours réticent. Mais Hermione fit un sourire à Harry et tira Ron.
Harry ferma la porte derrière eux avant de s'approcher du bureau.
« Oui ? »
Severus n'avait pas levé les yeux. Harry refusait de parler à une tête baissée. Il attendit patiemment que Severus détache ses yeux du parchemin de Ron suffisamment longtemps pour regarder Harry, les yeux toujours noirs.
Harry leva les sourcils. Severus le menaçait du regard. Ils restèrent dans cette position jusqu'à ce que Severus soupire et jette un sort d'insonorisation. Harry sourit.
« C'était un peu méchant, ne pensez-vous pas ? »
« Ai-je déjà été agréable ? »
Harry pensait à plusieurs occasions ces derniers mois. L'expression de Severus le mettait au défi d'en faire référence et Harry décida que ça n'en valait pas la peine.
« Puis-je venir dans vos quartiers ce soir ? »
« Depuis quand avez-vous besoin de demander ? »
Harry soupira. Severus n'était vraiment pas d'humeur festive et Harry se demanda pourquoi. Peut-être aurait-il une réponse suffisamment tôt.
N'ayant reçu aucune réponse, Severus reporta son attention sur l'écriture de Ron qu'il essayait de déchiffrer. Harry soupira presque de défaite.
Et bien, il n'avait pas encore utilisé tous ses atouts.
Severus grogna littéralement quand il sentit des bras s'enrouler autour de sa taille et un corps se presser contre le sien. Les perles émeraudes de ses yeux le regardaient avec espièglerie.
« Vous avez l'air de bonne humeur aujourd'hui, Potter. Est-ce que la pensée du départ de vos amis est si agréable ? » Grogna-t-il.
Les yeux de Harry restèrent fixés sur le visage renfrogné.
« Vous n'aimez pas Noël Severus ? Eh bien, si vous voulez savoir, j'adore mes amis, mais le silence est parfois appréciable. De plus, j'aimerais savoir s'il serait prudent que je vienne vous voir. Alors ? »
« Vous pouvez faire tout ce que vous voulez, Potter, mais lâchez-moi. Ca ne nous ferait aucun bien si un élève ou un professeur entrait et vous voyez aussi familier en public. »
Harry le libéra rapidement, mais la douleur avait remplacé les autres émotions qu'Harry ressentaient alors.
« Je pensais que ça ne vous dérangeait pas… » Il se tut doucement.
Severus décida de ne pas répondre et Harry considéra que c'était mauvais signe : son professeur s'était remis à lire.
« Je pense que ça veut dire que je ne viendrai pas vous voir aujourd'hui alors. »
Harry prit son sac qui était sur son bureau, mit la potion sur la table prés de Severus et se retourna pour partir. Il n'eut pas le temps de faire un pas que des doigts fins s'étaient refermés sur son bras.
Harry se retourna. L'expression de Severus avait changé. Bien qu'elle ne soit ni entièrement engageante ni totalement gentille comme elle l'était quand ils discutaient en privée, elle n'était plus aussi froide.
« Vous savez que vous n'avez pas besoin de demander pour venir. La porte vous est ouverte du moment que vous frappez. » Lui dit Severus.
Harry acquiesça, mais demanda quand même, « Voulez-vous que je vienne ? »
Severus ne répondit pas mais relâcha le bras qu'il tenait encore. Les yeux de Harry s'assombrirent un peu plus.
« Je suis désolé, » Dit-il doucement en regardant la pierre grise du sol. « Je ne le ferai plus…vous enlacer. Si vous ne le voulez plus, je ne viendrai plus vous voir. Vous avez certainement besoin de temps loin de moi et c'était idiot de ma part de penser que vous accepteriez ma présence dans vos quartiers quand je ne… »
Severus se détourna de cette attaque.
Harry s'arrêta de parler puis demanda légèrement plus tristement. « Vous ne voulez vraiment pas que je… »
Aucune réponse.
« Qu… Qu'ai-je fait ? Je suis stupide. Je suis désolé. Bien sûr que vous ne voulez que je…. Je… »
Harry n'alla pas au bout de sa pensée. Alors que ses larmes coulaient, il s'enfuit.
Severus regarda la porte claquer derrière la silhouette qui battait en retraite et se força à ne pas le poursuivre. Harry n'avait pas besoin d'être seul en ce moment et Severus le savait, comme il savait où il était parti et pour quoi faire. Cependant Severus ne trouva pas l'énergie de l'arrêter. Peut-être plus tard irait-il le chercher pour le soigner.
Severus soupira.
Il détestait les derniers jours avant les vacances de Noël. Il avait de très bonnes raisons et apparemment il allait devoir les expliquer à Harry, plus tôt qu'il ne l'aurait souhaité.
Harry avait l'impression que le monde tanguait.
« Harry, est-ce que tu vas bien ? »
Peut- être n'était-ce pas le monde qui tanguait. Harry espérait que non. Ron et Hermione seraient partis dans quelques minutes et comme il ne pouvait plus ni se couper ni pleurer et puisqu'il n'était pas allé à la fête, il devait conserver les apparences, et se balancer sur ses pieds n'aidait pas.
« Hermione, arrête de t'inquiéter. Je vais bien. »
Elle le prit dans ses bras et le serra tant qu'il eut l'impression qu'elle voulait lui donner son énergie grâce à cette étreinte. Harry se demandait si c'était ainsi que fonctionnaient les étreintes. L'énergie mentale est transférée de la personne qui donne l'étreinte à celle qui la reçoit ou vis versa.
Peut-être Severus détestait que son énergie mentale soit aspirée chaque fois qu'il l'enlaçait.
Harry se sentait maintenant si indigent…et égoïste.
Il avait volé à Severus du bien-être.
« Hermione tu devrais y aller maintenant. Les carrosses partent déjà. » Lui dit-il d'une voix douce.
Il se demandait le pourquoi des larmes coulaient sur son visage et pourquoi Ron s'était mis à danser d'un pied sur l'autre. Ron ne le regardait pas. Hermione pleurait. Harry se demandait pourquoi.
Le monde se remit à tanguer.
« S'il te plait, sois en forme quand on reviendra, Harry. » Une prière. « S'il te plait Harry, s'il te plait, sois toujours là. »
« Bien sûr, » Lui dit-il en essayant de revenir sur terre.
« Ne sois pas bête, » Ajouta-t-il très doucement. « Harry Potter sera toujours, toujours là. »
Hermione l'embrassa à nouveau avec autant de force que la première fois, sanglotant dans ses bras. Harry vit Ron tanguer légèrement et il se demanda si la terre tanguait aussi pour Ron.
Puis Hermione l'embrassa sur la tempe, ses yeux ruisselaient toujours.
« Bien sûr que tu seras là, » Murmura-t-elle d'une voix cassée. « Parce que tu es Harry Potter et que tu es le meilleur ami de Ron et mon meilleur ami et que nous voulons que tu ailles bien. »
Elle donna un baiser à la cicatrice en forme d'éclair puis se détacha de lui pour embrasser Ron. Tous deux se retournèrent et sourirent légèrement à Harry avant de se diriger avec les carrosses et les chevaux qui n'étaient plus aussi invisibles.
Harry se demanda si Harry Potter savait la chance qu'il avait d'avoir un monde qui l'aime.
Severus ne voulait plus voir Harry.
Severus regarda fixement son torse nu devant le miroir qu'il avait à nouveau agrandi, comme il l'avait fait pour Harry.
Il regardait son reflet avec une grande attention et imaginait les cicatrices qu'il avait vues sur les bras d'Harry sur les siens, celles de sa poitrine sur la sienne. Tel un charme d'illusion, elles apparaissaient, elles dansaient sur sa peau, légèrement rouges, quand il regardait suffisamment longtemps.
Son doigt glissa le long de sa poitrine, près de son cœur, vers un 'X' était gravé à l'endroit où son cœur bat. Il écarta ses doigts et sentit son cœur battre contre sa paume.
Les battements étaient réguliers, réguliers.
Il entendait les cris, vit le sang et regarda la lame ouvrir la chair tendre. Des lignes sur ses bras. Des lignes sur ses jambes. Du sang. Saigner. Nettoyer. Maintenant pur…
Severus secoua la tête violemment et reporta son attention sur son image. Les cicatrices étaient maintenant parties. Les cicatrices de Harry ne dansaient plus sur sa chair comme le fantôme d'une parodie.
Il grimaça et l'image lui renvoya sa grimace. Il secoua la tête, mais avec moins de violence.
Il replaça le miroir magique mais silencieux, remit ses vêtements et inspira profondément pour se calmer.
Il était temps qu'il aille chercher Harry et qu'il lui explique au moins pourquoi il n'aimait pas les 'derniers jours' avant les vacances de Noël. Il espérait vraiment qu'il n'ait rien fait de trop radical. Il n'avait pas participé à la fête. Mais Severus le savait comme il savait qu'il voudrait voir ses amis, même si ses pensées étaient instables.
Il était temps que Severus partage quelque chose de lui-même avec une autre personne.
Harry n'était pas certain de savoir ce qui s'était vraiment passé.
Tout ce dont il se souvenait était d'être assis au milieu d'un couloir, le dos appuyé contre un mur. Il ne savait pas quand il s'était mis à se balancer. D'avant en arrière. D'avant en arrière. Le mouvement l'aidait. Il l'apaisait alors même qu'il n'avait pas conscience d'en avoir besoin.
Puis c'est arrivé.
Une minute il était assis à se balancer d'avant en arrière, sans réfléchir et la suivante, on le prenait dans ses bras et on le berçait de la même façon.
D'avant en arrière. D'avant en arrière. Severus sentait les épices et la fumée comme toujours lorsque Harry était près de lui.
Harry ne s'interrogea pas sur les larmes qui coulaient sur ses joues et se mélangeait dans la cape de Severus alors qu'il appuyait son visage contre les battements réguliers de son cœur.
Ils se mariaient au sien dans une danse étrange.
« Avant que je ne vienne ici pour commencer ma première année, je pensais que ma vie était parfaite. J'avais tout ce que je voulais. Mes parents étaient heureux. J'étais heureux et je pouvais jouer avec des potions pendant mon temps libre. Je pensais que c'était merveilleux et je ne pouvais pas me détacher de l'idée que Poudlard serait tout aussi merveilleux. Et je me suis rendu compte que ça l'était. Au moins ça l'était la plupart du temps. Quelques petits incidents avec les Serpentards de première année, avaient légèrement ébranlé mes fondations, mais j'étais certain d'être chanceux. J'avais une famille parfaite et je la retrouvais à chaque vacances quand j'étais fatigué de la monotonie de l'école et de mes camarades…. »
Harry écoutait les mots qui vibraient avec lui, si bien qu'il se demanda s'ils n'étaient pas gravés dans le cœur de Severus et que c'était lui qui les diffusait.
Il parlait sur un ton uni, les paroles si douces n'étaient destinées qu'aux oreilles de Harry et celui-ci comprit qu'il y avait longtemps que cette histoire n'avait pas été racontée. Peut-être même, était-il le premier à l'entendre.
« Ma mère était la première personne à me saluer quand je rentrais à la maison pour les vacances de Noël ou pour les autres vacances. La première chose que je voyais était son sourire. Elle me souhaitait toujours la bienvenue avec un doux murmure alors qu'elle m'étreignait. J'aimais tendrement ma mère, comme je ne pouvais aimer personne d'autre. Elle était ma raison de vivre.
Le bercement s'arrêta mais ça ne dérangea pas Harry et Severus se remit à parler. Après tout, les bras le tenaient solidement.
« Quand j'ai eu treize ans, mon père m'a pris à part pendant les vacances de Noël et m'a parlé d'un très puissant Seigneur Noir qui dirigerait le monde un jour. Je n'en pensais pas grand chose. Je ne parvenais pas à me faire à l'idée qu'un homme pourrait avoir le pouvoir de faire une telle chose et j'ai écarté l'idée. Mais ce sorcier revenait de plus en plus souvent dans les conversations et mon père devenait de plus en plus un étranger. Quand je suis rentré pour les vacances de Noël au cours de ma quatrième année, mon père avait complètement changé. Il était si différent que je l'ai à peine reconnu. Il était devenu cruel et haineux. La vengeance et la douleur étaient devenues ses principales armes et contre lui ni ma mère ni moi ne pouvions nous défendre. Poudlard devint mon sanctuaire. Et chaque fois que je retournais au Manoir et que je voyais le sourire triste sur le visage de ma mère, je jurais que je reviendrais dès que je le pourrais pour la sauver. »
Severus s'arrêta et Harry savait ce qui allait suivre. Harry l'avait su dès le début de l'histoire et attendait patiemment. Severus avait besoin de la raconter à sa manière, comme Harry avait eu besoin de parler des Dursley.
« J'étais très inquiet les derniers jours précédant les vacances de Noël de ma cinquième année. J'allais revoir ma mère, mais je savais que je devrais affronter le monstre que mon père était devenu au nom de quelqu'un d'autre. Je me suis assis dans le carrosse en silence alors que je me rapprochais lentement du Manoir. Je savais que ce serait bientôt fini. Je reverrais ma mère, elle me sourirait et je rirais en courant dans ses bras. Pendant ces moments, je pouvais la rendre à nouveau heureuse. Je voulais tellement la voir, elle me manquait tant. » »
Il s'arrêta à nouveau et cette fois, Harry enveloppa ses bras autour de la taille de Severus et attendit que vienne la fin de l'histoire.
« Elle n'était pas là…Je suis descendu du carrosse et elle n'était pas là. Et je savais… Je savais dans mon âme qu'elle ne serait plus jamais là mais je… je ne voulais pas y croire. Je ne voulais pas affronter la vérité alors j'ai couru jusqu'à la maison et je l'ai appelé. Pleurant. Priant qu'elle revienne parce que j'étais à la maison et que tout irait bien, j'allais la rendre heureuse et lui rendre son sourire, comme à chaque fois que je rentrais à la maison. Bien entendu, elle n'est jamais revenue malgré mes appels, mais mon père, lui est venu. Il m'a dit d'arrêter de pleurer et de gémir et d'agir comme un homme. Il a dit qu'elle avait été malade et faible, qu'elle n'avait pas pu m'écrire pour m'en parler. Il a dit qu'elle était morte paisiblement… Je savais que c'était un mensonge. Tout n'était que mensonge. Je l'avais laissé et il l'avait tué. Il l'avait tué parce que je n'étais pas là pour la protéger quand j'aurais dû… Je voulais que ce soit moi, je voulais prendre sa place et je voulais le tuer. »
Harry leva les yeux vers Severus et les yeux de celui-ci revinrent au présent.
« Bien entendu, aucun de nous n'est mort cette nuit-là. Il vivait. Je vivais. Nous avons vécu suffisamment longtemps pour que je puisse me venger. » Dit-il dans un soupir. « Mon propre père Harry… J'ai de nombreux vilains secrets et je préférerais ne pas t'assombrir davantage avec eux. Mais tu devais le savoir et comprendre celui-ci.
« Je n'ai pas voulu te repousser tout à l'heure. J'avais simplement besoin d'être seul…pour me souvenir, » Continua-t-il d'une voix douce.
Harry acquiesça. « Ce n'était pas de votre faute Severus. »
« Je sais, » Répondit Severus. « Mais pendant très longtemps, c'est ce que j'ai ressenti. »
Harry acquiesça à nouveau.
« Je comprends, » Dit-il d'une voix douce. « On ressent souvent cela sur de nombreux sujets. »
Ils restèrent assis en silence quelques minutes de plus puis Severus bougea et sortit la crème bleue de la poche de sa robe. Harry se dégagea de Severus suffisamment longtemps pour montrer à Severus les plaies profondes qu'il avait ajoutées à son bras et dont il avait arrêté le saignement magiquement. Severus enleva gentiment le sort et appliqua la crème dessus.
Ils se balancèrent à nouveau d'avant en arrière un peu plus longtemps.
