Cauchemars
Chapitre 5 : Prémonition ?
Il fait noir. Je ne sais pas où je suis. Il fait froid aussi. J'ai l'impression que de la glace me transperce de part en part. Je n'ose pas bouger. Pourtant il le faut. Alors j'ouvre les yeux. Il fait toujours noir. Pas de lumière. Ma vision ne change pas. Toujours du noir où que je regarde.
Je me redresse lentement. J'ai horriblement mal partout. C'est comme si du verre explosait dans mes os. La douleur est insupportable. Je suis déchiré de l'intérieur. Et puis j'ai ce goût désagréable du sang dans la bouche.
J'ai peur… Tellement peur… Je me mets à quatre pattes et j'avance en aveugle. Au bout d'un moment, mes doigts rencontrent la base d'un mur. Je m'y appuie et je me lève. J'avance sur ma droite en espérant trouver une sortie. Mes doigts tombent sur quelque chose de froid. Je tâtonne et je me rends compte qu'il s'agit d'une poignée. Mon cœur s'emballe, j'ai le souffle court : il faut que je sorte de cet endroit inquiétant ! Je tourne la poignée et tire le battant vers moi mais rien ne se passe. Je tire encore mais elle ne s'ouvre toujours pas ! Je pousse un gémissement de désespoir, comment vais-je sortir de cette pièce maintenant ?
Il faut que j'essaie encore une fois… Mais cette fois, au lieu de la tirer vers moi je la pousse. Et ça marche ! Mais une odeur nauséabonde me prend aussitôt la gorge et je me protège le nez et la bouche avec ma main. Il y a une faible lumière dans la pièce mais je ne sais pas d'où elle provient. L'odeur me soulève le cœur et je dois m'arrêter un moment pour éviter de renvoyer ce que contient mon estomac. De plus, l'atmosphère est tendue, lourde, oppressante. Je dois absolument trouver un moyen de sortir car j'ai un mauvais pressentiment. J'ai la nette impression que je dois fuir cet endroit au plus vite, comme si un malheur allait se produire.
Je scrute autour de moi, espérant trouver la porte suivante ou une fenêtre qui me permette de sortir. Il me semble l'apercevoir, je m'y dirige aussi rapidement que mes haut-le-cœur me le permettent. Cette fois, j'arrive à l'ouvrir sans difficulté. La pièce est plongée dans le noir, mais l'odeur se fait plus forte, plus présente, comme si la source de cette puanteur s'y trouve. Mon cœur se met à battre la chamade. Mon instinct m'avertit que quelque chose ne va pas. J'ai envie de fuir mais j'ai le besoin impérial de découvrir ce qui me tracasse.
Je pénètre dans la pièce avec appréhension et me mets à la recherche d'un interrupteur. Je tâtonne sur le mur à ma droite et ne rencontre rien. Je recommence l'opération à gauche et mes recherches sont concluantes. J'appuie et je crains ce qui m'attend.
La lumière m'éblouit durant quelques secondes. Et quand ma vue redevient normale, mon cœur s'arrête. Non… Masaka… Dîtes-moi que ce n'est pas vrai… Dîtes-moi que ce n'est pas vrai ! C'est impossible ! Impossible… Ce qui s'étale sous mes yeux est tellement monstrueux que j'en tombe à genoux. Je ne peux que contempler l'horreur irréparable… Là, allongé et attaché sur une table, Kuwabara gît sans vie. Des pointes en acier le transpercent. Il en a dans les bras, les jambes, le torse. Je réussis tant bien que mal à me remettre sur mes pieds. Je m'approche tremblant et je m'aperçois qu'une pointe au diamètre aussi gros que la largeur de trois de mes doigts est enfoncée dans son crâne. Son corps est pâle et rigide. Sur ses traits je peux encore lire la douleur et la peur dans ses yeux figés. Son cadavre est là depuis un moment, sinon l'odeur pestilentielle ne serait pas aussi forte.
Je sais que je ne peux plus rien pour lui sauver la vie. Mais je ne peux décemment pas laisser son corps comme ça. Il est mon ami. Je défais les liens qui le retenaient prisonnier. Malgré mon dégoût, je retire une à une les pointes de chaque partie de son corps. Le plus dur, c'est celle qui est plantée dans sa tête. Je réprime mes envies de vomir du mieux que je peux. Une fois que c'est fait, j'enlève son corps de cet instrument de mort et l'allonge dans un coin de la pièce. Je déniche un drap et en recouvre son corps.
Je ne dois pas et je veux pas rester dans cet endroit plus longtemps. Je me dirige vers la porte qui est tout au fond de la pièce. Bizarrement, mon mauvais pressentiment se fait plus insistant, comme si quelque chose de pire m'attendait de l'autre côté du battant. Pourtant, je dois quitter ce lieu malsain le plus vite possible. Je pousse la porte et je découvre une nouvelle atrocité. Cette fois, il s'agit de Yusuke. Il est pendu par les pieds. Son corps est couvert d'entailles tout en longueur et des filets de sang caillé ont formé une flaque au sol.
Je suis tellement choqué et tellement horrifié ! Je tremble convulsivement en m'avançant jusqu'au corps sans vie de mon ami. Je fais de mon mieux pour le détacher et pour éviter de regarder sa plaie la plus horrible, celle de la gorge. Tout y est mis à nu, c'est abominable… Il n'y a même pas de mot pour décrire ça… Je hoquète pour retenir mes larmes. Il est vraiment temps que je parte.
Je pousse la quatrième porte en suppliant le Ciel pour qu'il n'y ait rien de plus derrière. Mais c'est peine perdue… Je m'effondre totalement dans l'encadrement de la porte. Complètement nue, enchaînée au mur, Kaasan est pétrifiée comme si on l'avait congelée. Je vais vers elle, le souffle court. Les larmes coulent sur mes joues. J'ai l'impression qu'on m'arrache le cœur… Je caresse sa joue, je regarde son corps légèrement bleu parsemé d'hématomes violacés. Je ne peux pas décrocher son corps, je suis obligé de le laisser tel qu'il est… Ca me déchire… Je reste là un long moment, à pleurer, à prier pour qu'elle revienne. Rien n'y fait… Alors je pars… Avant d'ouvrir la porte suivante, je la regarde encore un instant. Puis je me force à avancer.
Une fois la porte ouverte, je me sens totalement vide. Mon cœur, mon âme, tout m'est enlevé. Tous mes souvenirs avec lui défilent. Mais pourquoi… ? Pourquoi ! Pourquoi ? Je me rends compte que je crie. Je verse toutes les larmes de mon corps. Mais elles ne suffisent pas à exprimer la profonde douleur qui se répand dans mes entrailles comme le poison dans les veines. Qu'ai-je donc fait pour qu'on me prenne tout ce qui m'est le plus cher ? Ma vue est brouillée par mes pleurs et je titube jusqu'à lui. Je sanglote tellement que j'en tremble. Son corps est si pâle qu'il en est presque transparent. Il est tellement beau… Il s'est entièrement vidé de son sang… Ses jambes sont séparées de son buste d'au moins quinze mètres. L'odeur qu'il dégage est épouvantable… J'ai envie de renvoyer… Je recule le plus possible et je rends tout ce que mon estomac contient. Je retourne près de Hiei… Je me blottis contre lui et je pleure encore… Pitié reviens… Reviens ! Ne me laisse pas seul… Je t'en prie ! J'ai beau l'appeler, son expression d'intense surprise reste toujours plaquée sur son visage… Mais qu'ai-je donc fait… ? Dîtes-le moi…
Chapitre 5 : Fin
