Chapitre 3 : Face à face
! Attention ! Scènes de guerre !
Ce chapitre peut choquer les plus jeunes lecteurs
Un jour, pendant l'entraînement, Omura, accompagné de Brouillé, donna l'ordre à Oscar et à Hasegawa de se rendre à la province du Yoshino où étaient censés se trouver les troupes de Katsumoto. Le capitaine français tenta de leur faire comprendre que leur armée n'était pas suffisamment entraînée pour avoir une chance de tenir tête aux samouraïs… mais la haine d'Omura envers Katsumoto l'aveuglait totalement. Il voulait le détruire et cherchait tous les moyens possibles pour y parvenir, si pour cela mille hommes devaient être tués, peu lui importait.
Les troupes de l'empereur se mirent alors en route pour Yoshino. Sous les ordres, les soldats brûlaient les villages qui auraient pu abriter les terribles guerriers, mais bien souvent il s'agissait de simples paysans comme eux-mêmes, contraints de fuir avec femmes et enfants. Oscar assistait à ces destructions… il obéissait aux ordres en faisant son possible pour taire ce cœur qui se déchirait au fil des jours.
Finalement après des jours de voyage, l'armée arriva enfin dans la province où résidaient les samouraïs. Il fut décidé que les troupes prendraient place aux abords d'une sorte de forêt et qu'elles attaqueraient dès l'aube. La nuit précédant l'attaque, chaque homme restait silencieux… comme si le moindre mot pouvait réveiller un esprit malin.
Oscar avait entendu raconter du général Hasegawa que la principale arme que possédait le samouraï était le sabre ! Que le sabre du samouraï était son âme… En effet, il expliqua au capitaine que les samouraïs avaient toujours refusé d'utiliser des armes à feu et que lorsque l'ordre fut donné par l'empire de rendre leur sabre, les samouraïs refusèrent. Oscar comprit alors l'assurance dont faisait preuve Omura : comment ces quelques hommes, simplement armés de sabre, pouvaient battre une armée possédant des fusils ! Demain le sort en serait jeté…
A l'aube, les troupes avaient pris position. Comme si le sort s'était mis de la partie, un épais brouillard envahissait le lieu de rencontre. L'attente parut durer des heures… La tension était palpable… Soudain tout homme suspendit son souffle… des chevaux, on pouvait entendre des chevaux au loin… C'est alors qu'ils apparurent, émergeant de la brume, tels des esprits venus d'ailleurs. On ne pouvait dire combien ils étaient ! Certes ils étaient nettement moins nombreux que l'armée impériale… mais leur allure figeait tous les regards.
Oscar vit enfin à quoi ressemblaient ses adversaires. Fièrement montés sur leurs destriers, le visage enfoui sous un large heaume, la poitrine protégée par un plastron, des manchettes et des jambières finement travaillées qui recouvraient leurs membres. Le capitaine put aussi distinguer leurs armes : un long sabre prolongeant le bras tendu, un arc pour certains, mais tous portaient également un fourreau à la taille.
Les cavaliers progressaient rapidement vers les troupes, les hommes, foudroyés par « l'entrée » des samouraïs dans l'arène du combat, sentant la peur les tenailler et leur courage les abandonner, tentèrent de fuir. Le Capitaine de Jarjayes donna l'ordre de tenir position, de ne pas fuir, mais mis à part Alain et Hasegawa, personne ne voulait faire face aux guerriers légendaires. Le massacre commença !
Les paysans furent piétinés par les montures, égorgés par les lames tranchantes, transpercés par les flèches savamment tirées. Pas de doute, les samouraïs étaient des experts dans l'art du combat et de la guerre. De plus, même si certains essayaient de se défendre, les armures de protection faisaient parfaitement leur office : peu de samouraïs succombaient aux blessures. Alain et Oscar tentaient de repousser leur ennemi et de garder la vie sauve.
Alain épuisa son stock de munition, tirant juste, mais manquant de précision avec les armes à feu. Puis, après avoir mis hors d'état deux hommes, il dégaina son épée et embrocha deux hommes supplémentaires avant qu'un troisième ne vienne briser sa lame d'un coup de sabre. Alain se trouva alors à la merci du samouraï. « Adieu, Oscar » murmura-t-il. Le samouraï lui trancha la tête d'un revers de lame.
Comme s'il avait entendu ce dernier soupir, Oscar se retourna vers son ami… trop tard, son corps gisait au sol ! Il se rua alors vers son meurtrier qui, surpris, fut transpercé par la fine épée. Pris d'une rage sans borne, le capitaine se rua sur chaque nouvel adversaire qui osait lui faire face, les tuant les uns après les autres, à coups d'épée, de lance ou de pistolet. Tout était bon pour faire disparaître ses assassins !
Mais chaque combat lui apportait également un certain nombre de blessures et ses forces diminuaient progressivement. Au bout d'un certain temps, il sembla que le capitaine français était resté le dernier combattant de l'empire encore vivant… soit les autres étaient tous morts, soit ils essayaient encore de fuir ce lieu de massacre. Finalement, Oscar de Jarjayes se retrouva entouré de plusieurs hommes, l'empêchant de fuir ! Oscar comprit que son heure avait sonné, mais jamais il ne mourait sans se défendre, question d'honneur ! Il tuerait le maximum d'adversaires avant de périr !
Toujours lucide, le français saisit un étendard tombé au sol et s'en servit pour repousser, hors de portée, ses ennemis. Le tigre peint sur le drapeau semblait danser au rythme des mouvements de la javeline. Parmi les combattants qui faisaient front à Oscar, un homme se détachait des autres. Un samouraï dont l'armure rouge sang dissimulait l'ensemble du corps. L'homme s'avança et planta avec force une lance dans l'épaule d'Oscar, le faisant hurler de douleur et de rage. Puis pensant l'achever, il sortit son sabre de son étui. Dans un dernier sursaut de lucidité, Oscar para le coup avec la lance qui, sous le choc, se rompit en deux. Finalement, le samouraï rouge renouvela son mouvement d'attaque… son geste fut suspendu dans le temps, le reste de l'étendard venait de se planter dans sa gorge…
