Chapitre 28 : Une faille dans l'armure
Tous les hommes étaient sur le pied de guerre. Des éclaireurs avaient repéré un campement de l'armée d'Omura, chef militaire de l'empereur japonais en personne, établi à une trentaine de kilomètres du village. Lors d'un conseil rassemblant l'ensemble des guerriers, Katsumoto donna l'ordre à ses hommes de se préparer au départ : chacun devait préparer son paquetage, son armure et ses armes. Parmi l'assemblée, deux personnes regardaient cette effervescence ; en effet, il était de la charge d'Oscar et d'André de rester avec les villageois et de les conduire en lieu sur en cas de défaite de leurs amis.
La jeune femme regarda le visage dur de son compagnon : elle devinait qu'il trouvait la décision de Katsumoto injuste, mais elle comprenait et acceptait sa décision, aucun villageois ne méritait de mourir… leur chef leur attribuait une mission de confiance de la plus haute importance. Oscar approcha timidement sa main du poing serré du jeune samouraï et l'entoura doucement. Sans un regard, André relâcha sa poigne et entrecroisa ses doigts avec ceux de la française… ils restèrent ainsi quelques minutes, observant Nakao et ses hommes partir pour la bataille… les reverraient-ils un jour ?
ANDRE en libérant sa main et entrant dans sa maison : viens, je vais te montrer quelque chose
Oscar jeta un dernier regard sur le cortège de samouraïs et leva sa main en réponse au sourire que lui adressait Nakao. Qui aurait pu deviner qu'elle se lierait d'amitié avec un tel homme ? Une fois sorti de son champ de vision, elle regagna l'habitation pour rejoindre André. « Par ici » entendit elle. Elle pénétra alors dans une pièce qu'elle n'avait jamais visitée : la chambre du samouraï ! Facilement reconnaissable : une armure sombre trônait dans un coin de la pièce. Oscar s'avança alors timidement et vit André poser le heaume sur le support de la cuirasse.
ANDRE : je voudrais que tu essaies cette armure
OSCAR : mais je ne peux pas… c'est la tienne
ANDRE : il te faut une armure
OSCAR : mais et toi ? Tu ne peux pas te battre sans…
ANDRE : je prendrais… celle de mon père
OSCAR en baissant les yeux, repensant à la disparition du samouraï rouge : ton père…
ANDRE : oui, je n'ai pas eu le temps de te confectionner ta propre armure alors j'ai essayé d'ajuster la mienne… à ton corps.
OSCAR : pourquoi ?
ANDRE : tu ne peux pas te battre sans protection, cette armure est solide, elle te protègera bien. Je vais te laisser l'essayer à présent, voir si les ajustements que j'ai faits conviennent.
OSCAR : d'accord.
André sortit alors de sa chambre pour attendre que la jeune femme ait enfilé l'armure.
Après quelques minutes de silence, une sorte de mini vacarme se fit entendre à l'intérieur de la pièce, accompagné de jurons divers et variés dont le samouraï n'arrivait pas toujours à saisir la subtilité. Inquiet, il frappa discrètement à la porte pour savoir ce qui se passait.
ANDRE : Oscar ?... Oscar ?
Mais aucune réponse, autre qu'une succession de jurons de plus en plus sophistiqués ne venait. Intrigué, André prit sur lui d'ouvrir la porte et de se rendre compte par lui-même de ce qui se passait à l'intérieur. Il entra dans la pièce et referma la porte derrière lui. Il resta un instant, les yeux incrédules devant la tempête qui venait de ravager sa chambre.
Il serra les poings en essayant de se contenir. Le spectacle de la jeune femme aurait anéanti la résistance de beaucoup. Le portant de son armure était couché sur le sol de la pièce, le large heaume avait roulé jusqu'à l'autre extrémité tandis que le futon, préalablement replié dans un coin, trônait au milieu de la scène, à demi défait et une créature étrange était juchée dessus.
A la limite de l'étouffement, André laissa exploser sa moquerie. Oscar, enfin ce qui devait être Oscar à en juger par le bout de crinière blonde qu'il décelait, avait la tête et un bras emprisonnés dans le plastron de l'armure et ses cheveux, semblait-il, avaient lié le tout dans un enchevêtrement de chair, de cuir et divers matières.
OSCAR en hurlant au fou hilare : au lieu de te tordre de rire, tu ne peux pas venir m'aider !
André eut besoin de quelques instants pour retrouver un semblant de calme, car le spectacle était tout aussi original ! Comment avait elle pu se mettre dans une situation pareille ? Après une rapide analyse, il en conclut qu'elle avait du vouloir enfiler l'armure comme on enfilait une chemise, or il fallait séparer le plastron du dorsal avant de les ajuster sur le kimono.
ANDRE en essuyant ses larmes de rires : ne bouge pas, je viens
OSCAR : comment veux tu que je bouge, idiot !
André se doutait que la jeune femme avait un caractère en acier trempé mais là, il en avait visiblement la preuve : elle ne supportait pas cette situation et le faisait bien savoir.
ANDRE en commençant par délier les deux parties du poitrail : tu aurais du attacher tes cheveux…
OSCAR ironique : « tu aurais du attacher tes cheveux » quelle idée aussi de faire des trucs si difficile à enfiler !
ANDRE calmement en libérant les mèches blondes une à une : ce n'est pas bien difficile… il faut juste séparer les morceaux avant de les enfiler
OSCAR dont le visage réapparu enfin vers la lumière : eh bien puisque tu es si malin, tu n'as qu'à m'aider à l'enfiler cette maudite chose.
ANDRE : très bien… premièrement mets toi à l'aise
! Attention ! Passage croustillant (voire torride) pouvant choquer les jeunes lecteurs !
Il aida la jeune femme à se lever et déplia son futon pour qu'elle puisse s'asseoir dessus dans une position plus stable. Puis il prit le dorsal de l'armure et le plaça sur les épaules d'Oscar ; enfin il approcha le plastron de sa poitrine et le positionna délicatement contre le galbe de ses seins. Il avait légèrement arrondi l'avant de l'armure pour pouvoir épouser autant que possible les formes arrondies. Une fois les deux parties installées, André les lia avec de fines lanières de cuir.
Au passage, il frôla le doux tissu qui bordait son cou et dut soulever ses cheveux soyeux pour atteindre les attaches. Cette proximité, son odeur, le reflet de sa blondeur, tout éveillait ses sens. Du coin de l'œil il la regardait : elle paraissait impassible et calme ; elle ne devait pas se douter de l'effet qu'elle avait sur lui… si… il voyait ses mâchoires se contracter, créant un minuscule creux sur sa joue, il voyait ses poings serrés, sa respiration ralentir au fur et à mesure qu'il s'approchait.
ANDRE la voix trop rauque à son goût : ça va ? Je ne te fais pas mal ?
OSCAR envahie par l'émotion : non...
Une fois les épaules lacées, André glissa ses mains sur le flanc la jeune femme pour relier les deux morceaux de l'armure. Il ne put s'empêcher de frôler le gable de son sein de l'extérieur de la main, provocant un infime frisson d'Oscar. Les nerfs étaient à vif… l'ambiance était pesante, la température de la pièce semblait monter à l'infini alors qu'on était bien loin des sources chaudes. Après une concentration limite sans faille, le plastron et le dorsal de l'armure furent enfin mis en place.
ANDRE profitant de cet instant de répit pour s'éloigner un peu pour reprendre son souffle : voilà…
Mais comme si l'armure avait été envahie par le démon des tentations, la cuirasse glissa de l'épaule d'Oscar au premier geste de celle-ci, emportant avec elle une partie de son kimono. Comme si la tension n'était pas encore suffisante, la jeune femme se retrouvait à présent une épaule entièrement dénudée, le « col » de l'armure retombant sur le haut du bras.
André n'eut pas d'autre choix que de tenter de remettre la parure en position, caressant imperceptiblement la peau laiteuse de l'épaule, de la gorge, de la joue d'Oscar… Comment un essayage d'armure pouvait il être aussi difficile. André sentait que ses muscles se tendaient de plus en plus dans cette proximité, s'il ne faisait rien, il risquait de ne plus pouvoir maîtriser ces sensations qui envahissaient son corps.
ANDRE qui commençait à délacer la cuirasse pour l'ôter de ce corps tentateur : je sais ce qui ne va pas : c'est ton kimono…
OSCAR qui ne pouvait pas rester insensible à l'ambiance électrique : mon kimono ?
Voulait il qu'elle se déshabille ? Elle ressentait chacun des mouvements masculins comme une victoire sur sa résistance… sans savoir comment, ni pourquoi, elle en aurait voulu plus, elle aurait voulu oublier la guerre, cette armure… elle aurait voulu qu'il lui fasse découvrir d'autres horizons… elle rougit, les mains tremblantes du désir qui naissait dans son corps. Elle aurait voulu se jeter sur lui, l'embrasser, l'aimer …
ANDRE s'appliquant dans son rôle pour oublier son désir : oui cette armure ne peut tenir que sur un kamishimo… ton kimono de femme n'est pas assez large pour endosser l'armure.
André s'éloigna d'Oscar et ouvrir une porte dont il sortit un large vêtement aux épaules carrées et un kimono masculin.
ANDRE : déshabille toi
Envoûtée par cette voix hypnotique, Oscar commença à ôter son vêtement sans même attendre qu'André soit sorti de la pièce. Quand celui-ci se retourna il ne put détacher son regard de cette jouissance : la jeune femme, les yeux clos, avait retiré son kimono dans un mouvement de grâce si érotique, qu'il dut se pincer pour ne pas fondre sur elle. Qu'elle était belle…
Il s'approcha alors d'elle, déplia son kimono et l'aida à l'enfiler. Il rabattit les deux pans sur sa poitrine dénudée et ramassa le obi pour refermer cette boîte de Pandore. Oscar se laissa faire docilement, elle sentait le souffle chaud sur sa gorge, elle sentait la chaleur de ses mains sur ce tissu… sa respiration profonde intensifiait le mouvement de sa poitrine qui caressait pendant d'infimes instants les doigts habiles. Alors qu'il posait le kamishimo sur les épaules d'Oscar, André dut soulever les cheveux blonds pour positionner l'habit, il glissa ces doigts le long de ses omoplates, remonta sur l'épine dorsale avant de capturer la masse de fils dorés.
Mais au lieu de la libérer de ses mains, il les fit descendre du revers du kimono de la jeune femme, toucha l'infinie délicatesse de sa gorge, taquina de l'index le minuscule grain de beauté qui égayait la naissance de son sein. Croisant le regard bleu abyssal, André glissa sa main dans le repère du tissu, engloba de sa coupe chaude le sein merveilleusement tendu. Sous la brûlante caresse, Oscar se redressa légèrement, comme pour offrir davantage l'objet de tentation. Mu par cette savoureuse offrande, il glissa sa seconde main sur la taille féminine et commença à desserrer le obi, à peine noué quelques instants auparavant. Puis dans un geste infiniment lent, les émeraudes incrustées dans le saphir de ses yeux, il ouvrit la boîte de Pandore.
Leurs lèvres ne purent rester bien longtemps loin les unes des autres. Comme dans un appel désespéré, elles se trouvèrent enfin, avides, curieuses, chaudes. Le baiser timide laissa très rapidement la place à un emmêlement de langues, à une course poursuite entre deux folies gourmandes. Les mains d'André furent bientôt happées par le besoin d'approfondir encore et encore le contact : elles se positionnèrent de part et d'autre du visage de la jeune femme afin de n'autoriser aucune rédition. Mais les baisers enflammés ne suffirent plus… les larges mains débarrassèrent rapidement la poitrine dévoilée de sa prison de tissu, tant et si bien que le kimono fut abandonné au sol, inutile.
Ne pouvant pas se laisser envahir de cette manière sans réagir, Oscar entreprit à son tour la conquête de son compagnon. D'un geste, à la limite de l'impatience, elle arracha, plus qu'elle ne défit, le obi et le kimono du beau brun. Dans la foulée, elle glissa sa main sur le savant chignon du jeune homme et tira délicatement sur le lien qui maintenait l'ensemble… comme le petit nœud rouge qu'on prend si plaisir à tirer sur un cadeau tant convoité. Une pluie de boucles sombres dévala alors sur les épaules et la main d'Oscar qui ne put résister au plaisir de l'y plonger.
Mais rien ne suffisait à étancher la soif de désir, la promesse des milles et un délices qui s'offraient à eux. Dans un même mouvement Oscar et André s'allongèrent sur le futon préalablement, et judicieusement, installé. Les caresses se faisaient plus intimes. Les doigts fins jouant avec les douces boucles qui ornaient le bassin de son amant, n'osant partir à la découverte de son intimité masculine ; tandis que les mains larges se glissèrent plus audacieusement dans les plis de pantalon de la jeune femme, caressant les tendres courbes, taquinant le haut de ses cuisses de cette chaude morsure.
Les secondes passaient comme des minutes interminables, les corps s'embrasaient sous ces intolérables mais délicieuses morsures. Les respirations se précipitaient, le sang bouillonnait, dilatant chaque veine jusqu'au point de rupture. Avec des gestes presque désordonnés, les hakama et pantalon furent abandonnés. André partit à la découverte de chaque nouveau grain de beauté de sa belle, parcourant chaque courbe, inspectant chaque parcelle de peau inconnue. Bientôt, les caresses ciblèrent une nouvelle cible, un lieu sacré. Oscar subissait ces indécentes tortures mais ne voulait en aucun cas les faire cesser, au contraire, elle se tendit pour exposer un peu plus sa poitrine à la bouche chaude et aux baisers experts de son amant, tandis que d'une main novice, elle recherchait son sexe dénudé. Ils restèrent ainsi, caressant, embrassant, taquinant les lieux de jouissance intime… jusqu'à ce que, leurs râles de plaisir cèdent la place à une faim à assouvir, un désir quasi incontrôlable de communier. Dans une parfaite symbiose les deux corps purent se compléter, les sensations redoublèrent alors, franchissant sans cesse de nouvelles limites dans le plaisir… dans un même souffle, dans une même folie, les deux amants finirent par atteindre l'apogée de leur union.
