Quelques jours passèrent tranquillement, sans incidents.

Jermaine était finalement rentré chez lui, après avoir téléphoné à sa femme. Si la conversation téléphonique avait commencé sur un ton de supplications et de réprimandes, Jermaine s'était rapidement mit à rire et plaisanter et avait fini son appel par : « Moi aussi je t'aime, Hazel ! » Tout était donc apparemment rentré dans l'ordre.

Ce soir-là, lorsqu'il me dit au revoir, connaissant à présent trop bien sa manière de saluer, je courbais mon dos pour ne pas tomber après la « petite » tape amicale ; mais cette fois, il choisit de me serrer et me secouer vigoureusement la main : « Allez, à un de ces quatre. Et surveille bien Mike, qu'il ne fasse pas l'imbécile ! »

Je lui souris en me massant le poignet, mais, dans le fond, je ne voyais pas pourquoi c'était à moi de surveiller Michael – il fait ce qu'il veut, ce garçon ! – et par ailleurs, je ne comprenais pas non plus en quoi il pouvait faire l'imbécile…

Je remontais dans ma chambre, après le dîner, je m'assis sur mon lit et, en regardant autour de moi, je m'aperçus rapidement qu'il manquait quelque chose au décor : mon bon vieux sac à main n'était plus à sa place, sous la table de chevet. En le recherchant, je réalisais qu'il n'était d'ailleurs nulle part dans ma chambre.

Quelqu'un me l'avait prit !

Je réfléchis – ça n'arrive pas souvent mais ça arrive. Je ne connaissais pas beaucoup cette famille, mais je savais qu'un membre en particulier avait la manie de fouiller dans les affaires des autres lorsqu'on avait le dos tourné. Mais tout de même…pas lui ! On n'est jamais assez sûr. Je descendais l'escalier et me dirigeais vers sa chambre. Je m'arrêtais devant la porte, hésitante. J'écoutais : aucun bruit. Je pris mon souffle et ouvris la porte, sans frapper. Ce que je vis alors me cloua sur place :

Michael était assit sur son lit, et était tranquillement en train de fouiller dans mon sac.

Lorsqu'il s'aperçut de ma présence, il cacha mon sac derrière lui d'un geste rapide. Mais je l'avais vu et il le savait. Je me doutais que c'était lui, mais je ne voulais pas reconnaître qu'il fouillait dans mes affaires. L'aimant trop pour me fâcher, je ne savais pas quoi dire et je restais plantée au milieu de l'encadrement de la porte. Il avait l'air un peu honteux, mais il essaya de briser le silence en me montrant une photo qu'il avait prit dans mon sac et me demandant : « Qui est-ce ?

Michael… » commençais-je, n'arrivant toujours pas à y croire. Mais il me fit signe d'approcher. Je m'approchais lentement et m'assis à côté de lui. Je le regardais et je fini par prendre la photo qu'il me tendait : c'était une photo de lui de l'époque Thriller que j'avais glissée dans mon portefeuille.

« C'est toi. » dis-je. Je l'observais ranger la photo dans le sac, me le rendre et fixer ses pieds. J'étais déçue. Affreusement déçue. Car, pour moi, le fait de fouiller ainsi dans mes affaires, sans rien me demander, signifiait qu'il pensait que je lui cachais des choses.

J'avais envie de lui crier en pleurant : « Michael, comment peux-tu me faire une chose pareille ! Après tout ce que nous avons partagé ensemble, tu n'as donc aucune confiance en moi ! »

J'avalais ma salive et, regardant à mon tour à terre, je lui dis simplement : « Pourquoi tu as fais ça ? »

Il haussa les épaules : « Je ne sais pas… » il observa ses doigts et arracha un ongle cassé : « Je voulais mieux te connaître… » Je soupirais : « Si tu as des questions, pose-les moi ! …Tu ne me fais pas confiance… ?

-Excuse-moi… »

Après un instant de silence, je pris une de ses belles mains noires : « As-tu au moins trouver quelque chose dont je ne t'ai pas parlé, ou d'injurieux envers toi ou ta famille ?

-Non.

-Tu vois, je suis sincère avec toi ! Je ne te cache rien, Michael…

-Je sais, je ne cherchais rien de tel !

-Que cherchais-tu, alors ?

-Rien de spécial…tu sais, c'est si…excitant de fureter dans les affaires des autres ! Je sais que c'est mal, mais c'est plus fort que moi !

-Ca n'a donc rien à voir avec la confiance ? » Je me sentais soulagée. Michael fit non de la tête.

Je me mis à rigoler toute seule de la peur que j'avais eu. Puis je décidais que Michael méritait une petite punition. En souriant, je lui lançais : « Sale fouineur, va ! » avec l'intention de le chatouiller, mais il le devina et fut plus rapide que moi. Il me chatouilla avec un talent incroyable, si bien qu'en quelques secondes, je me tortillais de rire sur son lit, pliée en quatre pour l'empêcher d'accéder à mon ventre. J'essayais d'attraper ses mains ou, tout du moins, l'empêcher de me chatouiller, mais il était très habile. « Arrête, arrête ! J'arrive plus à respirer ! » ne cessais-je de répéter. Lui aussi il rigolait. J'adorais son rire. Le même que dans la cassette The Making of Thriller. Par un miracle incroyable, je réussis à lui attraper les mains et je le chatouillais à mon tour. Il était exactement comme dans la vidéo, lorsque John Landis lui chatouille les pieds ou le met sur son épaule. Il se retenait de rire trop fort, et pourtant, il n'en pouvait plus. J'avais envie d'arrêter de m'esclaffer pour entendre son rire, mais c'était impossible. Dés qu'il arrivait à me toucher, je me remettais à le chatouiller : « Non ! » criait-il en se marrant de plus belle. Il avait réussit à reprendre le dessus et me chatouillait les côtes, lorsque je lui dis, complètement essoufflée : « Arrête Mike…arrête…je ne vais pas réussir à m'endormir, sinon ! » En bon joueur, il cessa.

Nous nous souhaitâmes bonne nuit, je repris mon sac et retournais dans ma chambre. Je venais juste de mettre ma chemise de nuit lorsque le plafond craqua juste au-dessus de moi. Bon, cette fois, j'en ai ras le c.. !

Je décidais de prévenir Michael. Par chance, il n'était pas encore couché.

« Dis-moi, il y a bien un grenier, au-dessus de la chambre où je dors ?

-Oui.

-Ecoute, il y a des bruits bizarres !

-Aha…peut-être des fantômes…

-Je ne rigole pas ! Il y a des craquements, on dirait qu'il y a des bestioles !

-…j'entends rien !

-Bien sûr, c'est de ma chambre que ça s'entend ! Viens ! »

Je lui pris la main et me dirigeais vers l'escalier qui menait à ma chambre, lorsque nous croisâmes Joseph, un plateau à la main. Dessus, une assiette de nourriture et une bouteille d'eau. Michael lui lança : « Où tu vas, avec ça ? » Joe sembla furieux : « Ne pose pas de questions ! Je fais ce que je veux ici, tout de même, je suis chez moi ! Je te jure que si je n'avais pas ce plateau, je t'en mettrai une dont tu te souviendrai, mon garçon ! Dégagez-moi le passage ! » Il m'avait fait peur, mais nous fîmes semblant de nous éloigner, nous restâmes cachés derrière le mur et Michael l'observait. « Où il va ? » murmurais-je

« - Vers ta chambre !

-Qu'est-ce qu'il va faire dans ma chambre avec de la nourriture ! Il veut camper ?

-J'sais p…Non, attends…en fait, il va vers…

-Vers quoi ? Dis-moi ! »

Discrètement, je le poussais un peu pour voir ce que son père fabriquait, et je compris pourquoi Mike était resté bouche bée.

C'était étrange : Joseph avait descendu l'échelle de la trappe, était monté dessus et il hissait à présent le plateau au-dessus de sa tête.

Quelqu'un avait dû le prendre car, à notre surprise, Joseph redescendit…sans le plateau !

D'un même mouvement, Michael et moi nous nous regardâmes, les yeux écarquillés.

Lorsque nous entendîmes Joe revenir de notre côté, nous nous dépêchâmes d'entrer dans la chambre de Michael. Celui-ci referma la porte derrière nous et me fit face : « Il y a quelqu'un dans le grenier ! » La situation était tellement confuse que nous nous mîmes à chuchoter à deux en même temps :

« Mais qui cela peut être ?

-Et depuis quand il est là ?

-Et pourquoi ?

-Et qui le sait, à part Joseph ?

-Que préparent-ils ?

-Le ou la connaissons-nous ? » etc.

Nous n'en revenions pas.

« Il faut prévenir Maman ! » déclara Michael. Il allait ouvrir sa porte quand je le retins : « Non ! Imagine que Joseph apprenne que nous l'avons dit à ta mère, il devinera que nous l'avons vu ! »

La vérité, c'est que je me méfiais de sa mère, mais je savais que Michael l'aimait beaucoup et je ne voulais pas le blesser en luiavouant mon opinion.

« Il faut qu'on aille voir nous-même qui c'est, alors ! » me dit-il. Nous montâmes l'escalier et Michael leva le bras pour atteindre la poignée de la trappe, quand Joe ressurgit en bas des escaliers.

Fou de rage, il hurla : « NE TOUCHEZ PAS A CA ! » Michael se retourna : son père monta les marches : « Je vous interdis d'aller là-dedans ! Cette fois-ci, je n'ai pas de plateau. Ton compte est bon ! »

Je vis cet homme s'approcher de Mike et la peur me donna littéralement des ailes : en un temps record, j'ouvris la porte de ma chambre, y tirais Michael, m'y précipitais à mon tour, refermais la porte et fermais le verrou.

Dos à la porte, mon cœur battait à m'en arracher la poitrine : je venais d'assister, en direct, à une scène de violence familiale. Et je venais probablement de sauver Michael de la plus belle raclée de sa vie.

Joseph s'énerva quelques secondes sur la poignée : « Ouvre-moi, sale gosse ! C'est une affaire entre Michael et moi ! » mais voyant que ça ne servait à rien, puisque je n'avais aucune intention de lui ouvrir, il se calma et on ne l'entendit plus. Je me laissais glisser le long de la porte et m'assis, complètement bouleversée. Michael était resté debout, en face de moi. Je le regardais : « C'est incroyable » murmurais-je « il vous frapperait même devant témoins… »

Il allait répondre, lorsque nous entendîmes la trappe s'ouvrir. Je me levais et Michael se précipita sur la porte et colla son œil sur le trou de la serrure.

« Alors ?

-J'vois pas bien avec la clé ! …Joseph monte…il redescend le plateau et… »

Il se redressa et me souffla : « …l'assiette est vide ! »

Nos doutes se confirmaient : il y avait donc bien une personne (ou plusieurs) qui vivait dans le grenier de Havenhurst depuis on ne sait combien de temps ni pour quelle raison. Michael pensait éventuellement à la maîtresse de Joe.

« Mais pourquoi l'amènerait-il ici ? Ce ne serait pas très prudent de sa part !

-Ben justement ! C'est peut-être pour cela qu'il nous a défendu d'y aller ! »

Je n'étais pas très convaincue.

L'heure du couvre-feu étant proche, Michael était partit se coucher.

Il fallait que j'en aie le cœur net.

J'irai cette nuit !