Chapitre XII
Dans les griffes du Panther's Roar
1
Jamila
L'Eagle's Claw joignit le système de Yavin et son immense géante gazeuse aux teintes orangées dans la soirée. Le soleil de Yavin commençait déjà à disparaître derrière elle et priver la quatrième lune de l'éclairage indispensable à la vie lorsque la navette se posa devant la cour de l'Académie Jedi. La voix de stentor du pilote retentit à travers tout le vaisseau, mais seule restait Jamila à l'intérieur. Les derniers passagers étaient descendus dans un système voisin, Toprawa. Elle remercia le pilote et descendit de l'appareil, se dirigeant vers l'Académie.
Une drôle de sensation la prit lorsqu'elle la vit, cette étrange bâtisse dressée dans la jungle, prête à tout subir, semblait-il… Tout comme avec le Temple, elle ressentit cette impression de n'être qu'un microbe de plus propulsé dans l'espace. Les grands murs s'élevaient devant elle, recouvert de lianes étranges et magnifiques. L'entrée principale était très sobre mais suffisamment imposante pour donner cette sensation de respect et d'humilité.
Le soleil disparaissait derrière les arbres, ne laissant qu'une trainée orangeâtre et fantômatique derrière lui, illuminant la jungle d'une multitude d'éclats dorés. Jamila se sentait mal. Oppressée. Toutes ses pensées la dirigeaient vers Sheyla : quelque chose n'allait pas. Ce n'était pas vraiment une douleur, mais elle sentait un gêne au niveau de sa tempe, comme si… comme si elle avait eu une ecchymose ou quelque chose dans ce goût-là, mais qu'il ne s'agissait pas de sa propre tête. Elle ressentait cette douleur… sans pour autant réussir à la localiser en elle. C'était ailleurs. Dans un autre système, très, très loin d'ici. À une distance presque inimaginable, trop grande pour être cernée…
Jamila se dirigea vers l'entrée de l'Académie tandis que l'Eagle's Claw reprenait son vol solitaire, partant pour faire la Voie Hydienne dans l'autre sens et emmener quelques académiciens vers Coruscant au passage, visiblement. Elle vit un vaisseau personnel décoller de la base à sa suite et disparaître dans les cieux. D'un pas ferme, elle entra par les grandes portes ouvertes de l'ancien temple massassi.
2
Le purgatoire
Ce n'est ni le paradis ni l'enfer. Le purgatoire, certainement. Pour combien de temps ? Après tout ce que j'ai fait, ça risque d'être long. Il y a un paradis pour les Jedi ?
Encore le cauchemar. Les morts ne font pas de cauchemars. Eh bien si, bienvenue au purgatoire.
J'ai mal. Dieu, ce que ça arrache. Les morts n'ont plus mal, non ? C'est quoi ça ? Du sang ? Les morts ne saignent pas. Plus, en tout cas. Haha, elle est bonne. Qu'est-ce que ça veut dire, tout ça ?
Je suis vivante, voilà ce que ça veut dire, banane. Peut-être plus pour longtemps, remarque. Merde, achevez-moi.
Mais non, arrête de divaguer – les morts ne délirent pas d'abord – tu es morte, le vaisseau a explosé et toi avec.
Tu parles, je saigne, je suis vivante.
Morte.
Vivante.
Morte.
Ferme-la.
Sheyla ouvrit un œil. Puis l'autre. Elle sentait toujours du métal contre sa joue, mais froid, cette fois. Elle passa lentement sa main sur sa tempe et en rapporta un liquide poisseux qu'elle interpréta être du sang, probablement le sien. La douleur était devenue comme sourde, atténuée. Dans un autre sens, toutes ses pensées étaient sourdes et atténuées, comme si elles passaient au travers d'un filtre épais. Il lui fallut un temps pour retrouver partiellement ses esprits, au point d'être consciente d'une, qu'elle était en vie, de deux, qu'elle n'était pas sur le point de mourir, et de trois, qu'elle se trouvait allongée sur un sol métallique et froid.
Bon. Elle essaya de se relever. La première tentative échoua lamentablement : visiblement, si sa tête savait pertinamment qu'elle était vivante, le reste de son corps préférait l'ignorer. Au bout d'un moment, elle réussit à se redresser en s'appuyant sur ses bras. Elle se tint assise contre la première paroi qu'elle trouva dans la semi-obscurité du « purgatoire ». La tête lui tournait. Probablement les coups qu'elle avait reçu quand… quand quoi, déjà ? Le vaisseau… la torpille… la vrille. Puis le mur et le feu. Oui, le coup qu'elle avait reçu en heurtant le tableau de bord quand le vaisseau était entré en collision avec le mur. Ça devait être cela – ça t'apprendra à ne pas avoir fait changer cette ceinture pourrie. Elle appuya la tête contre le mur. Le mur de quoi ? Elle se retourna. Ni le paradis ni l'enfer.
C'était une salle carrée avec une couchette sur le côté et une porte automatique, mais rien d'autre. Dans le coin du mur, Sheyla put apercevoir l'œil noir d'une holocaméra qui la fixait méchamment. Elle en détourna le regard et se releva en prenant appui sur la couchette surélevée. Au début, ses jambes refusèrent de la porter et tremblèrent sous elle, puis elle réussit à se tenir debout, adossée contre le mur. Au moins, elle n'avait pas de blessures graves. Juste une petite commotion dont les effets se dissiperaient rapidement – du moins l'espérait-elle.
Passant sa main sur la paroi de la pièce, Sheyla ne détecta rien. Les murs faisaient bien trente centimètres d'épaisseur, voire plus. Impossible de sentir quelque chose de l'autre côté, et de toute façon, ses facultés sensorielles étaient réduites au minimum. Vacillante sur ses jambes peu fiables, Sheyla avança jusqu'à la porte, comme si elle allait s'ouvrir : bien entendu, rien de ce genre ne se produisit. Pas de miracles au purgatoire, pensa-t-elle sombrement. Mais où était-elle ?
Elle se souvenait du destroyer impérial, du choc et de la baie d'arrimage, mais elle avait dû perdre conscience dans le vaisseau, car tout le reste avait disparu. Du sang lui coula sur la joue. Quoiqu'on ai fait d'elle, personne n'avait pensé à la soigner. Elle s'essuya le visage d'un revers de sa manche. Sa tunique était déchirée et visiblement brûlée en plusieurs endroits. Elle prit conscience d'une douloureuse cloque d'un rouge vif sur le dessus de la main et se souvint d'avoir prit un morceau de métal incandescent sur le bras lorsqu'elle se protégeait le visage. Elle remonta la manche en lambeaux de sa tunique et découvrit une autre plaie – beaucoup plus récente – presque à la hauteur du coude. Intriguée, elle vit un hématome bleu centré d'un point rouge et songea presque aussitôt à l'aiguille d'une seringue… Sauf qu'elle n'avait pris aucune seringue sur le bras. Une expression déconcertée passa sur son visage. De quoi s'agissait-il ? Des mots venus de sa planète, souvenirs d'une enfance lointaine, lui traversèrent l'esprit – prise de sang – pour aussitôt s'enfuir, elle n'y prêta pas attention.
Machinalement, elle porta la main à sa ceinture. Mais rien ne s'y trouvait. Son sabre-laser avait disparu, ainsi que le comlink et autres petites fournitures, cordes, champ de force portatif, boucliers thermiques… De toute évidence, elle était prisonnière du destroyer. Elle pensa qu'il lui fallait sortir d'ici : avertir l'Ordre en priorité tenait toujours. Mais qui la retenait prisonnière ? Les Impériaux ou… ceux qui se proclamaient Sith ? La seconde perspective était nettement moins agréable. Elle avait entendu des choses affreuses sur les Sith – la plupart étaient des légendes, mais pas toutes – et en avait tiré beaucoup de choses, mais la plus importante était que les Sith ne sont pas très fréquentables, surtout lorsqu'on est Jedi. Une histoire ignoble que lui avait raconté Sollen pour l'effrayer lui revint en mémoire et elle tenta de la chasser de son esprit.
Elle essaya de se concentrer. On pouvait lui enlever ses armes, on ne pouvait pas lui enlever la Force, c'était l'une des leçons favorites de Luke. Mais elle ne sentit rien. Tout était encore trop confus dans sa tête, si bien qu'elle parvenait difficilement à « écouter » ce que la Force lui disait.
Elle n'avait qu'une envie : s'allonger sur la couchette et dormir. Mais si elle dormait, qui savait ce qui pourrait arriver… Elle lutta pour ne pas fermer les yeux et attendit.
3
Shepard
Steven Lako regardait l'holocaméra qui donnait sur la cellule dans laquelle ils avaient enfermé la Jedi : un sourire passa sur son visage lorsqu'il la vit attendre que la porte s'ouvre dans un geste désespéré. Il eut un rire mauvais. Tous les prisonniers – tous, sans exceptions – essayaient toujours au moins une fois d'ouvrir la porte. Réflexe, instinct de survie, peu importe à quoi cela était dû : ça n'en restait pas moins franchement amusant. Il eut un petit rire. Shepard, toujours derrière lui, trouva ce rire inquiétant et frissonna.
— Qu'y-a-t-il d'amusant, mon commandant ? demanda-t-il d'une petite voix.
— Oh, l'habituel essai de l'ouverture de la porte.
— Je vois.
Lako jeta de nouveau un œil à sa prisonnière. Il était certain de l'avoir déjà vue quelque part. Son visage lui était familier…
— Shepard ?
— Oui mon commandant ?
— Est-ce que l'on sait de qui il s'agit ? demanda le commandant des forces Impériales, sans détacher son regard du visage de la jeune femme.
Shepard acquiesça. Il avait déjà fouillé les documents sur les Jedi et trouvé la biographie de celle-ci.
— Alors, qui c'est ? Il est hors de question que Mister J. soit le seul à le savoir, Shep.
Le lieutenant hésita. La nouvelle n'allait pas plaire à Lako, pas du tout.
— Sheyla Skywalker, lâcha-t-il d'une voix presque inaudible.
Lako se tourna vers lui, une lueur étrange dans les yeux, la bouche tordue en un rictus mi-effrayé, mi-amusé.
— C'est une mauvaise blague, dit-il finalement.
« Shep » n'avait jamais vu son supérieur dans cet état. Il tremblait presque.
— Shepard ? C'est une blague ?
— Non, mon commandant. Il s'agit bien du maître Jedi Sheyla Skywalker.
— Qui a été nommée maître après avoir détruit MA station spatiale, Shepard !
— C'était il y a un an et demi, mon commandant…
— Et ça change quoi, dites-moi ? Quand elle va savoir...
Shepard pensa qu'il paniquait. C'était une mauvaise chose, très mauvaise.
— Il ne faut pas paniquer, mon commandant. Les Jedi n'ont pas le droit de s'énerver, elle saura se contrôler.
— Je n'en suis pas si sûr. Et je m'en contrefiche, Shepard. Je vais aller la voir, et peu importe que Mister J. la veuille vivante, si elle m'attaque, je l'explose au nom de l'Empire.
— B…Bien, mon commandant.
— Bon, bon. Et niveau taux, ça donne quoi ?
— On vient d'avoir les résultats, mon commandant. Dix-neuf mille.
— Ça ne m'étonne pas. Mister J. va être content, je suppose…
— Je ne sais pas, monsieur, il avait déjà un bon nombre d'échantillons.
— Moui.
Shepard examina l'holocaméra. Il trouvait la jeune femme très belle, même si elle était salement amochée par l'accident. Il vit son regard perçant se tourner vers la caméra et le fixer, et il fut incapable de soutenir ce regard accusateur, pénétrant. C'était idiot, après tout, elle ne pouvait pas le voir, et pourtant… Il détourna les yeux de la caméra, avant d'y revenir, irrésistiblement attiré. La jeune Jedi se prit la tête entre les mains, et il se demanda si elle tentait de réfléchir ou si elle pleurait de désespoir. L'espace d'un instant, il éprouva de la pitié et de la compassion, ainsi qu'une certaine forme de… regret ?
Lako s'éloigna du tableau de bord, laissant Shepard seul avec l'image holographique de la cellule. Il fit un zoom. La jeune femme ne pleurait pas, elle se concentrait, probablement. Il la vit se remettre debout, vaciller un instant, passer sa main sur ses blessures pour les soigner. Elle saignait encore de la tempe, il pouvait le voir : une méchante commotion, peut-être même dangereuse. Il se surprit à espérer que non. Pourquoi diable s'inquiétait-il pour cette idiote ? Après tout, elle n'était pas sortie d'affaire, il ferait mieux de l'oublier.
Ce qu'il s'appliquait à faire lorsqu'elle le gratifia d'un nouveau regard, dans lequel pointait l'anéantissement. Il s'éloigna du tableau de bord, gêné. Il ne supportait pas cela. Il ne pourrait pas le supporter. Il laissa la place à un sergent qui passait par là et disparut dans les couloirs.
4
Lako et Sheyla
Sheyla s'aperçut que son œil gauche était douloureux lorsqu'elle fermait les paupières. Elle palpa sa joue et découvrit une grande coupure qui partait à mi-hauteur de son front, coupait l'arcade sourcilière et allait jusqu'à deux centimètres en-dessous de l'œil. Elle soupira. Cela lui ferait une superbe cicatrice, pas de doute. Elle réfléchit. Le silence qui régnait dans la pièce était terrifiant, sordide. Elle eut l'impression qu'elle allait finir ses jours ici, mourir de faim seule et abandonnée de tous. Elle tenta de méditer, plus d'une fois, mais l'endroit n'était pas propice à la réflexion.
La porte automatique coulissa, la tirant de ses pensées noires aussi sec que si elle avait été un pauvre poisson arraché au calme de l'eau par la morsure d'un hameçon. Elle se releva difficilement, histoire de faire bonne figure. La douleur dans le dos revint, plus forte que jamais, mais elle l'oublia.
Sheyla examina les personnes qui se trouvaient à l'entrée de son purgatoire, qui de toute évidence était une cellule du bloc carcéral. Deux personnes en uniformes des vestiges de l'Empire se tenaient en retrait, sans mot dire. L'homme qui retint son attention était devant, portait des insignes de commandant, et la regardait d'un air hautain, satisfait. Il avait des cheveux grisonnants et quelques cicatrices lui barraient le visage. Sheyla ne bougea pas. Cet homme… elle pouvait lire dans ses pensées de la peur, presque. Et autre chose… des images bougèrent en elle, des explosions… Elle reconnaissait cet homme. Sans l'avoir jamais rencontré. Il avait toujours été derrière ses cauchemars… Il brisa le premier le silence.
— Bienvenue sur le Panther's Roar, Sheyla Skywalker, dit-il avec un sourire ironique. Nous espérons que vous appréciez le voyage et vos quartiers.
— J'aime beaucoup le service infirmerie, maugréa-t-elle sans quitter l'homme des yeux.
Il lui tendit la main.
— Steven Lako, commandant des forces impériales. Enchanté.
Elle ne la prit pas.
— Vous commandez un Empire qui n'existe plus, Lako, dit-elle d'un ton cassant.
Lako explosa de rire et s'avança un peu plus dans la cellule. Sheyla s'appuyait contre le mur en serrant les dents.
— Ne soyez pas stupide, jeune Jedi, d'ici quelques temps, et vous le savez bien, votre Ordre tombera et la République avec. Alors parlons affaires, voulez-vous bien ?
— Vous êtes aussi stupide que tous les Impériaux.
— Possible. Et vous êtes aussi bornée que tous les Jedi. Je suppose qu'on vous l'a déjà dit ? Rurk Sandberg, peut-être ? C'était l'une de ses expressions favorites.
À ces mots, le sang de Sheyla ne fit qu'un tour. Elle fixa Lako sans comprendre.
— Vous le connaissiez ? dit-elle sur un ton qui se voulait détaché mais qui trembla légèrement.
— Bien entendu, répondit Lako en pouffant. D'après vous, qui finançait ses recherches sur l'arme à jet ionique que vous avez détruite ? Nous nous sommes rencontrés il y a un peu plus de cinq ans. Un jeune Jedi très prometteur. Il a passé un marché avec moi ce jour-là. Cela faisait longtemps qu'il projetait de quitter l'Ordre.
Sheyla en resta sans voix.
— Et l'échec de ce plan-ci nous a conduit à nous allier avec quelqu'un d'autre, dont vous connaissez le nom, je crois, et qui avait déjà commencer à élaborer un plan. Il avait besoin de nous comme nous avions besoin de lui.
— Julius ? risqua Sheyla en lisant dans les pensées du commandant.
— Dark Julius lui-même, c'est exact. Cette alliance nous sera profitable. Au moins un temps.
— Vous ne comprenez donc pas, s'exclama Sheyla, qu'il vous trahira dès qu'il estimera que vous l'avez assez servi ? Vous n'êtes qu'un pantin de plus, pour un Sith.
— Ne vous inquiétez pas pour moi, ma chère, inquiétez-vous plutôt pour vous, dit Steven Lako avec un sourire méprisant.
— Où sont mes collègues ? dit Sheyla d'un ton ferme.
— Aucune idée, répondit le commandant. Et je suis sincère. Quelque part sur son vaisseau, je suppose. Il en fait ce qu'il veut.
Sheyla frissonna. Sollen n'était pas mort… elle l'aurait senti… mais il pouvait très bien être en danger de mort.
— Je ne me suis pas occupé des enlèvements, si c'est cela qui vous préoccupe. Ici, nous faisons les recherches scientifiques nécessaires à l'accomplissement de notre plan. Ce qui ne devrait plus trop tarder. La dernière phase de préparation s'achève et bientôt, la Nouvelle République ne sera plus qu'un mauvais souvenir. Tout comme l'Ordre Jedi.
— C'est ce que vous croyez. Nous nous battrons.
— Je doute que vous ayez les moyens de vous battre contre ce qui vous attend, ma chère. Ou du moins, contre ce qui attend vos amis. Mister J. n'a pas précisé ses plans vous concernant, mais puisqu'il vous veut vivante, il ne devrait pas tarder à nous rejoindre. Par ailleurs, il voudra certainement vous mettre au courant de son plan avant de vous tuer… ou de vous rendre folle, ce qui revient au même en matière de neutraliser quelqu'un.
Sheyla fit une grimaçe indescriptible et repensa soudainement à quelque chose, assimilant tout ce qui lui arrivait. Elle remonta la manche de son bras droit et exhiba la plaie circulaire près de son coude.
— Qu'est-ce que c'est ? dit-elle sur un ton autoritaire et presque menaçant.
— Oh, ça…, fit Lako en souriant, juste un petit prélèvement pour nos expériences. Nous avions besoin du taux de midi-chloriens. Taux que vous avez plutôt élevé, d'ailleurs, je suppose que c'est dû à votre chère famille. Mais cela ne vous regarde pas.
— Au contraire. Je veux savoir ce que vous préparez. Vous allez me le dire.
Ce faisant, elle passa discrètement la main devant elle, appuyant ses paroles de la Force qu'elle sentait encore vibrer en elle. Mais Lako sourit et ne répondit pas. Il semblait avoir une grande force mentale. Il se contenta de la regarder, les yeux fixant un point inexistant. Puis il reprit ses esprits.
— Ce n'est pas dans mes instructions, ma chère. Je regrette.
Sheyla soupira, songeant qu'il était inutile de continuer.
— Que comptez-vous faire de moi ?
— Moi ? Je n'en sais absolument rien. Mais je le saurais très bientôt. Priez pour qu'il ne soit pas de mauvais poil lorsqu'il viendra.
La jeune Jedi déglutit. Elle préfèrait ne pas imaginer, en effet.
C'est alors qu'une chose très étrange se produisit. Elle croisa le regard de Lako, très précisément, assez pour distinguer les pupilles des yeux bleus foncés du commandant. Et dans ce regard, elle lut tout ce qu'elle avait soupçonné, tout ce qu'elle avait ressenti : cette peur inconsidérée et cette impression de regret… Et brusquement, elle comprit. Il lui suffit de sonder son esprit pour le voir, pour le comprendre, pour être sûre de ce qu'elle savait déjà. Lako recula. Elle lâcha le mur et se redressa. Sa rancœur l'étreignit soudainement, lui donnant la force de se tenir droite et faisant disparaître la douleur. Elle pensa avec tristesse qu'elle n'avait plus rien à perdre, et que retenir ses émotions n'améliorerait pas la situation, et jeta le pire de ses regards de haine à Lako.
Lui comprit immédiatement qu'elle savait. Il recula encore. Les officiers derrière lui se regardèrent. La tension était presque palpable.
— C'était vous…, murmura-t-elle dans un souffle.
Elle ferma les yeux. Revit l'explosion, le feu. Les hurlements. Elle rouvrit les yeux, ne voulant pas en voir plus. Le visage insolent de Lako était la seule chose qu'elle pouvait distinguer à travers les flammes qui rongeaient son esprit. Des fragments du Code Jedi revinrent en elle, ballotés comme des feuilles dans la tempête. Il n'y a pas d'émotion, il y a la paix.
— Je…
Il n'ajouta rien de plus. Sheyla se jeta sur lui dans un cri de rage, oubliant tous les principes Jedi, oubliant la douleur qui l'étreignait, ne pensant qu'au passé et une seule idée en tête : tuer ce salopard, l'étouffer jusqu'à ce qu'il en meure, qu'il crève et disparaisse de l'espace de la galaxie, et enfin, elle aurait la satisfaction de… de quoi ? Elle avait tenté de rester calme, elle avait échoué. Elle avait tenté de paraître de marbre, elle avait échoué. Trop tard.
Elle le saisit à la gorge, mais il la repoussa d'un revers de son bras, la frappant à la tempe. Elle poussa un gémissement de douleur et retomba contre le mur. Relevant ses yeux noirs vers lui, les cheveux en bataille, saignant de la tempe à nouveau, elle le fixa avec une haine dévorante. Les gardes dégainèrent leurs armes et les pointèrent sur la jeune femme recroquevillée dans un angle de la cellule, chargeant les cellules d'énergie. Elle n'entendit ni ne vit rien de tout cela. La seule pensée qui l'obnubilait était de tuer, d'exterminer Steven Lako pour ses péchés.
Il n'y a pas de chaos, il y l'harm –
Elle tendit la main avec une grimace haineuse, concentrant la Force dans ses doigts, prête à faire quelque chose qu'elle n'avait jamais eut l'envie de faire, mais qui aujourd'hui devenait l'envie la plus forte qu'elle ait jamais éprouvée. Il lui avait tout pris : elle était seule, acculée comme une bête traquée, prisonnière d'un vaisseau probablement lancé à pleine vitesse en hyperespace, l'Ordre et la République allaient disparaître car elle ne pouvait pas les avertir, Sollen allait certainement mourir, et cet homme avait encouragé Rurk à suivre le côté obscur. Pire que cela, c'était lui, lui qui était le responsable… lui qui… Elle mourrait peut-être, mais pas avant de s'être débarrassé de lui. Elle mourrait après avoir accompli cette vengeance.
Lako porta les mains à sa gorge, semblant manquer d'air tout d'un coup. Il tenta d'articuler quelque chose, mais ne put rien faire d'autre qu'émettre un son pitoyable à mi-chemin entre la grenouille et le corbeau. Il n'y a pas de mort, il n'y a que la F – c'est ce qu'on va voir…
Sheyla resserra son étreinte invisible, son poing aux jointures ensanglantées serré devant elle. Son pouvoir la vidait de toute son énergie, mais elle continua, même si elle sentait le côté obscur de la Force la ronger de l'intérieur et la pomper de toute réserve de puissance. Elle sentit ses yeux brûler d'une rage inouïe et Lako faiblir sous la pression de l'étranglement. Il posa un genou à terre, les mains enroulées autour de la gorge pour essayer de se défaire de la chose invisible qui le privait d'air. L'un des gardes se pencha pour l'aider, l'autre tira une salve de son blaster. Il s'agissait d'un modèle de torture plutôt efficace, non-conçu pour tuer mais très douloureux néanmoins. La décharge d'électricité qui atteignit Sheyla en pleine poitrine fut assez forte pour lui faire perdre sa concentration meurtrière et lui couper la respiration. Elle lâcha un hurlement prolongé et se rétracta sur elle-même sous l'effet de la souffrance.
Lako releva la tête, cherchant l'air autour de lui, inspirant et expirant profondément. Il se remit péniblement sur ses jambes en s'appuyant sur l'un des officiers, vacilla légèrement puis retrouva son calme habituel. Sheyla ne bougea pas, roulée en boule. La douleur lui comprimait toujours la poitrine, l'empêchant de penser normalement, courant dans ses veines comme un poison meurtrier. Elle éprouva un instant l'envie de mourir, puis se ravisa. Elle ne se rappelait même plus avoir tenté d'étrangler Lako grâce à la Force. La haine avait effacé ses blessures : à présent qu'elle redevenait consciente de ses actes, chaque hématome réclamait son dû. Le commandant souriait presque, reprenant ses airs hautains. Elle n'avait même plus le courage de le haïr à présent. Elle avait échoué pour la seconde fois, elle ne pourrait plus réussir : l'évidence lui broyait le cœur comme un hachoir.
La respiration haletante, elle essaya de se remettre debout : peine perdue. Elle resta ainsi, recroquevillée sur elle-même, immobile, laissant échapper de petits gémissements de souffrance de temps à autre. Lako l'observa sans bouger. Il finit par parler.
— Oui, c'est moi. Vous le saviez, n'est-ce pas ? Et vous savez quoi ? ajouta-t-il en se penchant vers elle. C'était moi aussi, il y a un an et demi. Le même. J'imagine que ça vous fait un choc. Mais vous ne pouvez rien faire. Je doute que la prochaine décharge soit aussi agréable que la première. Oh, une dernière petite chose : vous avez un sacré air de famille avec votre oncle, ma chère. Exactement les même manières d'avouer votre sympathie pour les gens. Au revoir.
Il se massa la gorge et lui jeta un regard méprisant. Sheyla émit un sanglot à la fois de désespoir et de douleur, tournant vers lui des yeux baignés de larmes rageuses. Il ne comprenait pas. Il l'avait fait faire quelque chose qui maintenant la rendait intangible, presque irrécupérable. Il ne comprenait pas qu'elle était au bout de ses forces, au bout de sa volonté. Elle n'avait plus le désir de vivre. Elle n'avait pas réussi à le tuer, elle s'en voulait d'avoir voulu le tuer, mais le mal était fait. Elle sentit le sang couler de sa blessure à la tempe, les ténèbres revenir dans sa tête. L'utilisation qu'elle avait faite de la Force l'avait vidée, avait aspiré ses forces vitales jusqu'à la dernière parcelle de volonté. Il pouvait faire ce qu'il voulait d'elle : plus rien ne comptait pour la jeune Jedi exténuée qui se laissa tomber au sol sans se retenir.
Lako sortit avec sa garde et ferma la porte automatique de la cellule. Pendant un instant, elle le vit et pensa qu'il avait été l'homme déclencheur, qu'il avait appuyé sur le bouton… Le bouton qui avait détruit la Terre. Il n'y a pas de passion, il y a la sérénité. Puis elle oublia.
5
Luke et Jamila
Jamila se sentit brusquement mal en entrant dans l'Académie. Il n'y avait pas grand monde. Finalement, un de ses hôtes l'accosta à l'entrée.
— Mademoiselle ? Je peux vous aider ?
Jamila hésita.
— Oui, oui, ça serait gentil.
Le jeune homme qui l'avait accueilli s'inclina.
— Bien entendu. Vous venez d'arriver ?
— En effet.
— Vous recherchez quelqu'un en particulier ? demanda-t-il. Ou bien venez-vous dans l'espoir d'être acceptée à l'Académie ?
Intérieurement, la jeune femme sourit en pensant que les deux réponses étaient peut-être bien valides. Elle se reprit.
— J'aimerais parler à Sheyla Skywalker.
Le jeune homme la regarda en fronçant les sourcils.
— Sheyla Skywalker ? L'ancienne élève de Maître Luke Skywalker ?
— Euh… oui.
Il sembla réfléchir.
— Je l'ai aperçue cette semaine à l'Académie… Je ne sais malheureusement pas où elle se trouve maintenant. Je la croyais de retour au Temple Jedi.
— Elle n'y est pas. Ils disent qu'elle s'est rendue ici… Elle est peut-être déjà partie en mission.
— C'est tout à fait possible, répondit le Jedi. Si vous voulez, vous pouvez vous entretenir avec notre maître, Luke Skywalker.
— Ça sera parfait, acquiesça la jeune femme après un instant de réflexion.
Brusquement, elle se sentit étrange. Comme vidée d'énergie. Se sentant défaillir, elle vit le monde devenir flou autour d'elle… puis reprendre lentement ses couleurs. Le Jedi l'empêcha de tomber avec un réflexe impressionant et l'aida à rester debout.
— Mademoiselle ? Qu'est-ce qui se passe ?
— Je… je n'en sais rien… je vais bien…
Elle reprit appui sur ses jambes et inspira doucement. Tout allait bien. Elle se sentait au mieux de sa forme… Et pourtant, quelques secondes plus tôt, elle avait bien cru s'évanouir de fatigue.
— Merci, merci, ajouta-t-elle.
— Vous êtes sûre que tout va bien ? demanda le jeune homme d'un ton inquiet.
— Absolument.
— Bon, et bien, je vous emmène, suivez-moi.
Jamila suivit donc le Jedi sans dire un mot. Ils passèrent dans de superbes couloirs qui, s'ils n'avaient rien de la beauté pure et artistique du Temple, donnaient à l'endroit un charme incontestable. Jamila aimait beaucoup l'ambiance de l'Académie. Après tout, elle pourrait peut-être y étudier… un jour. Deux ou trois fois, son accompagnateur lui conseilla de se baisser pour éviter de se cogner aux plafonds bas du vieux temple massassi, ou de marcher sur le côté pour ne pas tomber dans un trou. Ils prirent quelques ascenseurs et se retrouvèrent enfin devant ce qui devait être la salle d'audience de l'Académie, l'équivalent du Conseil du Temple Jedi. La porte automatique s'ouvrit immédiatement lorsque le jeune homme annonça la visiteuse : elle donnait sur une immense salle baignée de la lumière rougeoyante du couchant, dont les murs étaient escaladés par une multitude de végétaux sauvages s'entrelaçant pour grimper jusqu'au plafond. D'immenses percées dans le mur s'ouvraient sur la jungle de Yavin, diffusant les dernières lueurs du jour et répandant une subtile odeur de frais et d'herbe coupée.
Une grande estrade se trouvait en-dessous des fenêtres, reliée au sol par de larges escaliers de pierre moussue. Un homme se tenait assis en tailleur sur l'estrade, l'air perdu dans ses pensées. Il se releva immédiatement à l'entrée de Jamila et de l'autre Jedi. Jamila reconnut immédiatement dans sa démarche le port et l'allure de Sheyla, droit et fier, quelqu'un qui pendant des années en aura vu passer des vertes et des pas mûres. Immédiatement, elle sut qu'il s'agissait de son cousin et ancien maître et s'inclina modestement. Il fit de même. Jamila remarqua l'inquiétude naissante qui se lisait sur son visage, comme si la visite de Jamila confirmait des craintes refoulées.
— Bonjour, mademoiselle. Jamila Rosamud, je présume ? dit-il avec un sourire.
— C'est moi, admit-elle en le lui rendant.
— Sheyla m'a beaucoup parlé de vous.
— Vraiment ? dit Jamila avec surprise.
Elle ne s'était pas attendue à ce qu'on parle d'elle tandis qu'elle s'ennuyait ferme sur Naboo II.
— Et qu'a-t-elle dit à mon sujet ? demanda-t-elle.
— Des choses intéressantes. Nous ferions mieux d'en parler seuls à seuls. Tu peux nous laisser, Layn ? Au fait, ton maître a besoin de toi en salle d'entraînement.
Le jeune homme hocha la tête humblement et sortit de la salle. Luke conduisit Jamila près de l'estrade et s'assit sur les marches.
— C'est un peu spartiate, mais je préfère vous parler ici.
— C'est parfait, commente Jamila en s'asseyant à ses côtés sur une marche de pierre.
Elle s'était habituée au confort des fauteuils du Temple, mais une marche de pierre près du soleil couchant était tout aussi agréable, à sa façon. Luke croisa les mains et se tourna vers elle. Il tentait de dissimuler une inquiétude que Jamila n'avait aucun mal à sentir. Elle ne comprenait pas. Était-ce la proximité de Sheyla qui avait développé en elle des pouvoirs qui auparavant se faisaient dormants ? Elle avait toujours été un peu bizarre, à pressentir certaines choses avant qu'elles n'arrivent, mais appelait cela de la voyance, ou tout simplement de l'intuition. Maintenant qu'elle en connaissait la cause, elle parvenait à entendre ces fameuses voix en elle, lorsqu'elle faisait silence. Et chaque minute qui passait semblait la connecter un peu plus avec cette mystérieuse Force.
Luke sembla sentir son pouvoir et concentra ses pensées ailleurs. Il continua à parler.
— Bon. Je suppose que vous êtes venue ici dans l'espoir de trouver Sheyla…
— Qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
— Intuition.
Jamila sourit. Elle savait très bien ce qu'il entendait par intuition.
— Malheureusement, elle n'est plus là. Le Conseil du Temple Jedi et moi-même l'avons communément envoyée en mission dans le système de Tatooine.
— Tatooine…
Elle soupira. Tatooine était à l'autre bout de la galaxie, selon ses maigres connaissances géographiques.
— J'aurais voulu lui parler.
— Oui, je le sais bien.
Il la tutoya soudainement :
— Tu voudrais lui demander d'insister auprès du Conseil, de faire quelque chose, n'importe quoi pour que tu puisses être acceptée au Temple. Tu voudrais qu'elle devienne ton maître, également. Mais tout cela, tu ne le savais pas avant que je ne te le dises, n'est-ce pas ?
Jamila en resta sans voix. Elle le regarda, suprise, puis acquiesça silencieusement.
— Dis-moi… pourquoi elle ? demanda-t-il d'un ton curieux. Pourquoi ne pas venir étudier au Temple ? Pourquoi tiens-tu tant à ce que Sheyla te prenne comme Padawan ?
La question la prit de court. Elle n'en avait aucune idée ; cependant elle savait qu'il avait raison. Elle le sentait. Elle l'entendait. Le futur en voulait ainsi, la Force en voulait ainsi : quoi qu'elle fasse, tout la ramènerai à Sheyla Skywalker.
— Je… je ne sais pas. Ou plutôt, je le sais. Je sais que je dois étudier sous sa tutelle. Je sais que nous devons être réunies, que nous devons être ensemble… Je ne sais pas pourquoi. Je n'éprouve pas de sentiment particulier à son égard, si ce n'est de l'amitié légère. Je lui ai sauvé la vie, elle a changé la mienne. Nous sommes liées. Si seulement je savais quelle est la nature de ce lien… Mais elle m'échappe totalement.
Luke hocha la tête lentement, sans la quitter des yeux. Il voyait très bien ce qu'elle ressentait. Il se sentait lié lui aussi, d'une manière ou d'une autre, à cette jeune femme, sûrement par le biais de Sheyla. Elles étaient une… Ou du moins, les deux moitiés de quelque chose. Mais quoi ? Tout semblait les différencier : l'apparence physique, le caractère… Sheyla était d'un naturel assez calme et réfléchi, apanage des Jedi Consulaires, mais avait parfois quelques accès émotifs qu'elle apprenait toujours à contrôler. Elle avait de profonds yeux noirs et des cheveux chataîns mi-longs, qu'elle relevait souvent d'un chignon ou d'une courte queue de cheval pour ne pas être gênée par les mèches volages. Jamila était très différente. Elle semblait calme et passive, mais un feu bouillonait constamment en elle. Elle était le feu même. Si elle devait devenir Jedi, elle serait sûrement entraînée dans la voie des Jedi Gardiens… De plus, elle avait des cheveux d'un noir de jais, très longs, qu'elle tressait en nattes compliquées, et des yeux d'un bleu électrique, presque azur, envoûtants.
Jamila était comme la beauté incarnée, la beauté traîtresse et les apparences trompeuses. Sheyla était au contraire la force intérieure et la beauté pacifique et apaisante. Elles étaient comme… les deux tranchants d'une lame. Luke les imagina associées, maître et apprenti, et se dit qu'aucune force ne serait capable de les arrêter. Un sourire éclaira son visage. La jeune femme avait raison, elles devaient être ensemble. La Force le voulait, c'était évident.
— Écoute, Jamila. Je vais te dire quelque chose : je te crois. Il sera difficile de convaincre le Conseil que tu ne représentes aucun danger à l'entraînement… pour la simple et bonne raison que je n'en sais rien. Je fais confiance à Sheyla pour t'apprendre tout ce que je lui ai appris et je te fais confiance. Il faudra que tu résistes à l'appel du côté obscur. Ce sera dur mais je suis persuadé qu'avec Sheyla pour maître, cela ne représentera aucun problème. Mais pour le moment, nous en avons un, de problème.
Jamila hocha la tête. Elle le savait, bien entendu.
— Je suis pratiquement sûr que la mission pour laquelle Sheyla est partie sur Tatooine est un échec… ou que, du moins, elle n'est pas en route pour Coruscant avec des nouvelles sur une affaire inquiétante. Elle aurait dû me contacter. Si elle n'a pas pu, cela veut dire que sa radio est endommagée… ou que les communications ont été bloquées dans le secteur de Tatooine.
— Elle a peut-être simplement oublié, dans la précipitation, risqua Jamila.
— Oh non, crois moi, elle n'a pas oublié. Mais dis-moi, tu es fortement liée à elle, n'est-ce pas ? Comme moi, tu as dû sentir une anomalie.
La jeune femme hésita.
— J'ai mal à la tempe, sans avoir véritablement mal. Et tout à l'heure, j'ai failli m'évanouir de fatigue, mais je suis en pleine forme. Je suppose que ça vous suffit.
— C'est ce que je craignais, effectivement. J'ai également ressenti certaines choses à travers des liens formés entre un maître et son apprenti, et d'autres au travers de ceux qui relient les membres d'une famille. Sheyla est en danger, j'en suis certain… Mais comment, et pourquoi, je l'ignore. Et je sais que j'aurais besoin de ton aide, Jamila Rosamund, pour le découvrir.
— Moi ? fit Jamila, incrédule. Mais comment pourrais-je vous aider ? Je ne suis même pas Jedi, vous êtes sûrement le plus qualifié pour…
— Je sais. Mais il y a quelque chose entre toi et Sheyla qui a besoin d'être tiré au clair. Et c'est toi, et toi seule, qui est capable de la ramener.
— Mais je ne peut pas faire ça toute seule ! Et nous ne savons même pas où elle est !
Les traits de Luke se contractèrent en une expression de profonde réflexion.
— Leia ira avec toi si elle accepte. Vous vous rendrez toutes les deux dans le système de Tatooine pour retrouver Sheyla. Il faut qu'elle revienne. Je suis certain qu'elle sait déjà pas mal de choses sur… sur l'affaire qui nous concerne tous. Leia te mettra au courant de ce qu'on sait pendant le voyage. Je sais que c'est un peu rapide, mais il faut que vous partiez… maintenant. Quelque chose de terrible se trame là-bas… Et peut-être ailleurs. Tu iras voir Leia, au deuxième étage, et vous reviendrez toutes les deux me voir.
Jamila se leva.
— Merci de m'avoir écoutée…
Luke crut déceler un soupçon de sarcasme et haussa les sourcils. Il soupira.
— Ton avenir et celui de l'Ordre dépendent de Sheyla et de la réussite de cette mission. Si tu ne la sauves pas, car je sais qu'elle est en danger de mort, si tu ne la sauves pas, la galaxie sombrera dans le chaos. Je voudrais faire quelque chose pour t'aider. Mais je ne peux pas. Va voir Leia, revient avec elle et partez la chercher.
— Pourquoi ne venez-vous pas ?
— Je ne sais pas.
Ce fut la seule réponse qu'il donna.
