Silence.
Une chape lourde et menaçante s'est installée
sur la maison. Ce silence pesant m'éveille.
Etrange, plus
aucun bruit ne me parvient de l'extérieur. Comme si le monde
s'était figé dans un moment d'obscurité. Le ciel
s'est obscurci pendant que je dormais.
Alors que je m'assois dans le canapé où j'étais
étendu, j'entends une respiration calme sortir de la pénombre
du fauteuil à col de cygne.
Moment de panique. Où
est ma baguette ? Au diable, ma baguette. Je ne suis qu'un vieil
homme. Celui qui a pénétré si avant dans ma
maison aura rapidement raison de moi avec ou sans baguette.
Une
voix douce et pondérée s'élève du
fauteuil.
- Bonjour… Père.
Un instant de soulagement.
Trop court, bien trop court. Bien que la voix de mon fils soit douce,
le ton est dur et autoritaire. Il n'est pas venu pour d'affectueuses
retrouvailles.
J'essaie néanmoins de donner le change, je
joue les imbéciles.
- Sirius ? Bonté divine, tu m'as
fait une peur bleue. Ça ne va pas bien, de faire des peurs
comme ça aux gens ?
Son rire autoritaire sonne à mes
oreilles comme une menace.
- Peur ? Voyons, père, vous
n'avez pas à avoir peur de moi… du moins pas encore.
Mon sang ne fait qu'un tour.
- Ainsi donc nous nous parlons
sincèrement ?
- Oui, enfin nous nous parlerons
sincèrement.
- Qu'es-tu venu faire ici ?
- Je suis venu
vous donner quelques nouvelles et probablement aussi… vous tuer.
-
Qu'est-ce qui te fait croire que je te laisserai faire ?
- Croire
? Non, Harry, tu permets qu'on se tutoie hein, je ne crois pas. Je
sais.
- Que crois-tu donc savoir, petit morveux?
Ma haine est forte.
Car, oui, je suis un monstre et oui, je
hais mon fils. C'est son existence qui a fini d'achever notre mariage
et coûté celui de Ron.
Mon insulte ne reçoit
rien d'autre qu'un rire cristallin.
" Appelles-moi comme il te plaira, je sais que c'est la peur
qui te fait parler. Et tu as raison d'avoir peur, Harry. Vois-tu,
j'ai questionné beaucoup de monde pour connaître ton
histoire. Mon histoire. Ma mère, Oncle Ron, Oncle Neville, et
bien d'autres encore. Ils ont parlé, tous. Neville s'est
révélé plus résistant que prévu
mais Doloris finit par délier toutes les langues.
Quoi? Tu
es surpris par mes méthodes? Voyons, Harry, tu es pourtant au
courant pour le Fourchelang, la vipère et tout ça. Oui,
tu vois j'en sais beaucoup plus que tu ne le crois. Je suis un
parfait legilimens, vois-tu.
Oh, ne hausse pas les sourcils comme
ça. Je sais qu'en tant que legilimens, il me suffisait de lire
leurs pensées pour obtenir les informations que je souhaitais.
Mais je préférais, et de loin, les entendre me livrer
leurs souvenirs en me suppliant de les délivrer de leur
souffrance.
Tu vois, tu avais raison. Comment tu appelles ça
? Tendance à la cruauté. Comme c'est délicat de
ta part, si joliment dit, Quel bel euphémisme, n'est-ce pas?
Tu aurais aussi bien pu dire : amour de la cruauté. Car j'aime
ça.
Je suppose que tu as compris qu'ils n'étaient plus,
n'est-ce pas?
En bon Londubat, Neville a résisté au
sortilège Doloris aussi longtemps qu'il a pu. Mais comme son
père avant lui, son esprit s'est rompu. Je ne lui ai pas fait
l'affront de lui laisser une vie aussi pitoyable, évidement.
De toute façon, son fils n'était déjà
plus là pour s'occuper de lui.
Hermione Weasley a été
la plus difficile à maîtriser, mais…"
Alors qu'il parle, encore et encore, je me sens devenir livide. Tous, il les a tous eu. Ron, Hermione, leurs enfants, Neville et Rodolphus. Il a des partisans, des assistants. Et même Ginny. Ma douce Ginny, sa propre mère qu'il a prit soin d'éteindre de ses propres mains. Même Luna qui, dix ans auparavant, avait découvert son terrible secret.
- J'ai engendré un monstre.
- Non, non, Harry. Ne
t'attribue pas tout le mérite. Tu n'es pas le seul en cause.
Il y a dans ton sang, bien autre chose que ta propre magie. Il y a
dans ton sang, une magie bien plus puissante, une magie que tu ne
comprendras jamais. La magie de Voldemort. Il EST mon père. Le
seul qui mérite que je lui prête attention. Toi, tu n'es
qu'un pauvre gamin geignard qui a eu de la chance d'avoir une mère
et des amis fidèles. Le pouvoir de Voldemort n'était
qu'à lui. Et aujourd'hui à moi.
Un Seigneur des
Ténèbre réapparaîtra et imposera sa toute
puissance au monde des sorciers. Il y en aura toujours pour se
rallier à moi. Il n'y aura plus dans mes pattes un
insignifiant survivant pour me barrer la route. Tu n'es pas mon père.
Tu es juste Harry Potter, le garçon qui a failli.
Je me tourne vers le coin de pénombre. La voix des morts
avait raison tout ce temps. J'ai failli à ma tâche, je
n'ai pas sauvé le monde du sorcier noir. Pire, j'ai engendré
le suivant, enfant de l'amour, lui donnant la force supplémentaire
que son prédécesseur ne possédait pas.
J'observe
les flammes rouges dans les yeux de Sirius James Albus Potter tandis
que l'éclair vert jaillit de sa baguette met un terme à
ma vie gâchée.
