JALOUSIES
Masque de Mort sentit une irrépressible colère l'envahir à la vue du corps à demi dénudé d'Aphrodite s'agitant entre les jambes du bélier. Il connaissait les penchants particuliers de son ami et l'avait surpris à plusieurs reprises dans des situations compromettantes avec divers apprentis chevaliers. Cependant, les choses étaient différentes alors, d'une part parce qu'il était vivant (ce qui n'était plus le cas aujourd'hui et Masque de Mort était abasourdi de constater que la mort n'avait en rien diminué la fougue du Chevalier du Poisson) et d'autre part, parce que Mû était un chevalier d'or. Plus que tout, c'était ce dernier point qui le mettait en rage. Pourquoi Mû ? Ils se détestaient pourtant !
Si Masque de Mort avait possédé la moindre once de tact, il se serait éclipsé discrètement. Il n'y songea même pas. Dès son 'réveil', il n'avait eu qu'un seule idée en tête : retrouver Aphrodite, son seul ami au Sanctuaire, le seul chevalier avec qui il pouvait discuter meurtre sans aucune retenue. Contrairement à d'autres (Saga et Shura pour ne pas les citer) il assumait sans problème son passé d'assassin et n'en éprouvait ni honte, ni regret. Il n'était pas du genre à se poser des questions existentielles sur le bien et le mal , ni même à se remettre en question. Il considérait cette introspection comme malsaine – pour preuve, Saga n'y avait pas résisté et s'était suicidé aux pieds d'Athéna pour soit disant expier ses fautes. Masque de Mort n'éprouvait que du mépris envers lui car il considérait sa mort comme une fuite un peu trop facile.
Les deux corps face à lui se tendirent dans un dernier spasme. Aphrodite roula sur le dos, un demi sourire aux lèvres. Il reprenait lentement son souffle, une main posée sur son ventre. Il avait un ait alangui et abandonné qui émut le Chevalier du Cancer. Sa colère s'en trouva renforcée – lui s'émouvoir ? – et il se décida à signaler sa présence :
-« Eh bien, on s'ennuie pas à c'que j'vois ! »
Aphrodite réagit à peine. Il se contenta de tourner la tête vers lui et de sourire franchement. Mû, loin d'être aussi à l'aise, se redressa sur ses jambes avec l'air d'un enfant pris sur le fait. Rouge de honte, il balbutia :
-« Ca n'est absolument pas ce que tu crois. Je ne sais pas… ce qui m'a pris. »
Avant même qu'il ait pu terminer sa phrase, Masque de Mort s'était jeté sur lui à bras raccourcis (NDLA : Abraracourcix – OK , elle était facile). Il saisit Mû à la gorge et lui envoya son poing dans la figure, puis dans l'estomac avant de le lâcher et de le rouer de coups de pieds. Il l'observait tenter de se protéger avec une joie teintée de sadisme. Il allait lui faire regretter d'avoir couché avec Aphrodite.
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Aphrodite avait haussé une sourcil sarcastique en entendant les maigres justifications de Mû. Il concevait avoir abusé de lui mais celui-ci ne s'était pas tant débattu et il avait même semblé éprouver du plaisir. Il aurait pu le violer mais son innocence l'avait touché et il s'était contrôlé, allant même jusqu'à faire preuve de douceur. De voir Mû dans cet état de confusion et de honte le peinait quelque peu. Non qu'il se soit attaché à lui durant le bref laps de temps qu'avait duré leur union, mais si lui réagissait ainsi, il redoutait la réaction que son ami aurait en apprenant ses sentiments pour lui. Il ne lui connaissait aucune aventure – encore moins homosexuelle. Peut-être aurait-il la même réaction que Mû, ce mélange de gène et de dégoût, et peut-être voudrait-il rayer ce souvenir de sa mémoire (ce que Mû devait souhaiter ardemment à cet instant). Cette seule pensée le faisait souffrir atrocement mais en bon chevalier qu'il était, il n'en montra rien.
Il vit Masque de Mort se jeter sur son amant mais ne tenta pas de le retenir. Ne serait-ce que pour calmer son orgueil, celui-ci méritait une petite leçon. Qu'il ne veuille par ébruiter ce qui s'était passé, soit, mais de là à le renier… Il se rhabilla donc avec nonchalance pendant que l'air vibrait des insultes que Masque de Mort hurlait à l'oreille de son adversaire.
Mû ne tentait même plus de se défendre et recevait les coups sans broncher. Il devait être en état de choc. Aphrodite s'approcha de Masque de Mort qui s'acharnait sur le corps immobile et posa la main sur son avant bras.
-« Ca suffit maintenant. Laisse le. »
Mais Masque de Mort, dans un état proche de la folie meurtrière, ne l'écoutait pas et il dû le tirer en arrière pour l'éloigner de Mû.
-« Arrêtes, te dis je.
J'en ai pas fini avec ce salopard ! »
Aphrodite ne put se retenir d'éclater de rire ce qui eut pour effet immédiat de calmer Masque de Mort.
-« Quoi ? aboya-t-il.
Pour un peu, je croirais que tu es jaloux . » murmura Aphrodite à son oreille.
Masque de Mort vira aussitôt au rouge pivoine.
-« Non mais tu plaisantes ! hurla-t-il.
Allez viens. Filons. » dit Aphrodite sur un ton indifférent.
Ils disparurent.
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Mû était prostré sur le sol en position fœtale, les yeux hagards. Il ne comprenait pas. Etait-il mort ou bien vivant ? Etait-ce un rêve ou un cauchemar ?
Pour la première fois de son existence, il avait cédé à l'appel de son corps. Mais de quelle manière ! Nonobstant le fait qu'Aphrodite soit un homme, ce qui le choquait le plus c'était l'absence d'émotion qu'il avait ressenti. Certes, il y avait eu du désir mais même ce désir semblait mécanique. C'était comme si son sexe possédait une volonté indépendante. Il se sentait trahi. Trahi par son propre corps. Pourtant, ses entraînements répétés n'avaient cessé de lui prouver la puissance du mental face au physique. Sa détermination venait à bout de la douleur et sa concentration, en développant ses pouvoirs psychiques, lui permettait d'occulter son enveloppe charnelle. Peut-être la mort l'avait-elle rendu plus vulnérable. Peut-être avait-il simplement voulu goûter ce qui lui avait toujours été interdit.
Mais jamais, dans ses rêves les plus fous, il n'aurait imaginé que sa première fois se passerait de cette façon. Ce qu'il avait fait avec Aphrodite lui apparaissait comme étant au delà de l'absurde. Ca n'avait aucun sens. Tout comme les magasines pornographiques de Masque de Mort qu'il dérobait adolescent. Cela n'avait d'autre finalité que l'assouvissement d'un besoin bestial. Il aurait voulu des mots doux, des gestes hésitants, des regards timides ; il aurait voulu que chaque attouchement soit une découverte du plaisir de l'autre. Il n'avait jamais complètement désespéré de trouver l'amour et la tendresse qui lui avaient manqué enfant et qui lui étaient interdits en tant que chevalier.
Si il avait pu, il se serait frappé pour tant de stupidité et de faiblesse. C'est pourquoi il ne s'était que peu défendu lorsque Masque de Mort l'avait attaqué ; pourquoi il s'était finalement laissé rosser. Il le méritait. Il méritait cette punition. En même temps, il éprouvait une sorte de consolation mélancolique à retrouver le contrôle de son corps, à lui imposer l'immobilisme malgré la souffrance.
Mais même les coups ne parvenaient pas à lui ôter le sentiment d'impureté qu'il éprouvait. Il se sentait sale. Non pas seulement du sperme et du sang qui s'écoulaient encore sur ses cuisses mais sale au plus profond de lui même. Et il ne savait pas si cette impression s'effacerait un jour.
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-« Ah, te voilà, prononça Shura sur le ton de la réprimande en voyant surgir Masque de Mort. Je te rappelle que nous avons tous convenu de ne pas nous séparer. »
Tous les chevaliers d'or étaient rassemblés autour d'un pique-nique sous un cerisier en fleur (un idée de Seya).
-« Je t'emm, siffla l'interpellé avec rage. J'ai jamais dit que j'acceptais de rester seul avec une bande d'abrutis comme vous tous. Même dans la mort, il faut que j'vous supporte. J'en reviens pas ! Mais qu'est ce que j'ai donc fait pour mériter ça ?
Voyons voir… réfléchit Milo d'un air pensif, les bras croisés et les yeux au ciel. Assassiner, assassiner, oh et puis assassiner, énuméra-t-il ensuite en comptant sur ses doigts.
Oh toi le scorpion, tu peux parler ! Qui est ce qui est allé s'amuser sur l'île d'Andromède, hein ? Et qui a eu besoin de l'aide d'Aphrodite pour terminer le travail, hein ? Je suis peut-être pas un saint mais vous non plus j'vous signale !
Allons, allons, calmez vous, intervint Shaka. Ca ne sert à rien de vous disputer. »
Mais Masque de Mort ne l'écoutait pas.
-« Milo, garde une seconde de plus ce sourire ironique de mes deux sur ton visage et j'te jure que je vais te le faire regretter, avertit-il. Je me sens d'humeur à casser du chevalier aujourd'hui. J'ai déjà flanqué sa branlée à Mû et rien ne me ferait plus plaisir que de régler mes comptes avec toi.
De quoi parles tu ? »
Saga, qui jusqu'alors s'était contenté d'observer la joute verbale des deux chevaliers d'un air absent, s'était brusquement redressé à cette dernière phrase et se tenait, menaçant, face à Masque de Mort.
-« Qu'as tu fait à Mû ? Et pourquoi n'est-il pas avec toi ? gronda-t-il.
Je m'en bats mes c de Mû, mon grand. J'étais parti chercher Aphrodite. Figure toi que cet imbécile était encore nu comme un ver ! » ajouta-t-il dans un grand éclat de rire.
Rire qui fut aussitôt stoppé par un coup de poing magistral, administré par le Chevalier des Gémeaux.
-« Je pars chercher Mû. » dit-il sans plus porter d'attention à Masque de Mort.
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Qu'il était beau… Et quelle classe, quelle prestance… Aphrodite s'était retenu de soupirer comme une midinette face à un Saga héroïque, prêt à tout pour sauver son ami. En quelques secondes il était parvenu à mater DM, qui était pourtant sanguinaire et cruel. On sentait l'homme de pouvoir en lui, le leader. Ah, si seulement… Si seulement Saga pouvait un jour réagir de cette manière pour lui. Mais il ne devait pas se leurrer : il ne représentait rien pour l'ex Grand Pope et si celui-ci pouvait le rayer de sa mémoire, il le ferait ; Aphrodite lui rappelait trop la face obscure de sa personnalité pour qu'il put le considérer autrement qu'avec défiance.
C'était trop injuste. Alors que lui se morfondait d'amour depuis des années, il n'avait jamais reçu en retour que de l'indifférence. Même quand ils… Lui, Aphrodite, le séducteur invétéré ne parvenait pas à se déclarer à l'élu de son cœur. Ca en serait comique si ce n'était pas si pathétique. Plus il observait Sage, son regard glissant sur les épaules larges, les hanches étroites et plus il se sentait la proie d'un désir inextinguible. Il devait le séduire. Coûte que coûte.
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A la vue de Mû, Saga comprit immédiatement ce qui s'était passé.
-« Les enflures ! » jura-t-il.
Le bélier regardait toujours fixement devant lui, ramassé en position fœtale, les bras entourant ses jambes repliées, ses longs cheveux couleurs lilas étalés sur le sol. Saga était atterré de voir son ami dans un état pareil. Lui, un Chevalier d'Or, l'un des plus sage aussi se serait laissé violer par Aphrodite ? ! Il connaissait bien les penchants de son ancien assassin mais il n'aurait jamais cru qu'il puisse un jour s'en prendre à un de ses pairs. Il serra les poings avec force. Il règlerait ça plus tard. Il devait d'abord s'occuper de son ami.
-« Mû ? » appela-t-il doucement.
Il avait vraiment l'air d'un enfant dans cette position et saga ne savait pas trop quoi faire pour l'aider. Il se sentait triste pour lui mais il savait parfaitement que cette tristesse ne l'aiderait pas. Il s'accroupit auprès de Mû et posa la main sur son épaule. Celui-ci fit un bond en arrière et ses yeux roulèrent dans leurs orbites comme si il cherchait à s'échapper. Ils me l'ont brisé, pensa-t-il.
-« Mû, c'est moi, Saga. N'aies pas peur Mû. C'est fini. »
Saga s'obligeait à parler d'une voix calme pour ne pas apeurer encore plus le bélier mais on sentait tout de même transparaître une sourde colère en lui.
-« Je les tuerai pour ça Mû. Je te jure que je les tuerai. »
Il crut entendre Mû lui répondre.
-« Tu as parlé ? »
Mû le regarda enfin dans les yeux.
-« J'étais d'accord. »
Saga ne put réprimer un sursaut de surprise. Le regard de Mû se détacha du sien.
-« J'étais d'accord. Quand j'ai vu Aphrodite s'approcher, je n'ai pas pu bouger. C'était comme si il m'avait ensorcelé. Et puis il m'a embrassé et… Je ne sais pas ce qui m'a pris, je ne comprends pas. Comment est ce que j'ai pu le désirer ? Et comment est ce qu'on peut faire ça sans amour ? »
Saga soupira, un brin soulagé. Ce n'était pas tant l'acte qui l'avait choqué mais plutôt le contexte dans lequel cela s'était produit. Mû était avant tout un cérébral, les pulsions émotionnelles lui étaient quasiment inconnues. Et quand bien même eut-il été un émotif, l'entraînement de chevalier l'aurait vite contraint à refouler ses émotions jusqu'à s'en croire immunisé. Saga eut un sourire amer. Les chevaliers n'étaient préparés ni au désir, ni à l'amour et quand l'un ou l'autre surgissait, ils se trouvaient pris au dépourvu et réagissaient un peu comme des enfants. La question de Mû était en elle même enfantine (malgré ses 20 ans). Elle dénotait d'une tendance à sublimer l'amour, comme ils sublimaient tous leur attachement à Athéna afin de pouvoir justifier le don de leur vie. Un amour pur, asexué.
Elevés au rang de Saints, les chevaliers avaient tendance à oublier qu'ils étaient avant tout des hommes. Et des hommes faillibles.
-« Mû. On n'a pas besoin d'aimer pour faire ça.
Toi tu l'as déjà fait ? »
Saga eut un nouveau sourire, amusé cette fois.
-« Oui. »
Heureusement d'ailleurs. Il n'avait pas vingt ans, lui.
-« Souvent ?
Quelquefois.
Avec des hommes ou avec des femmes ?
Les deux. »
Mû s'était assis, le menton sur les genoux. Il réfléchissait.
-« Tu les aimais ?
Non
Alors pourquoi ?
Parce qu'ils me plaisaient physiquement.
Aphrodite est beau mais…
Mais ?
Je ne trouve pas sa beauté excitante. Il est beau, certes, mais comme une statue peut l'être, ou un tableau. Mais je ne ressens rien de particulier pour lui… Tu crois que lui a des vues sur moi ? »
Saga éclata franchement de rire.
-« Aphrodite, aimer quelqu'un d'autre plus que lui même ? Je ne crois pas, non. »
Mû resta un instant silencieux.
-« J'en suis content. En même temps, je ne sais pas si je dois bien le prendre. C'est vexant. »
Il sourit à son tour.
-« Mais bon… C'était une expérience intéressante.
Pas de regrets ?
Si, un peu. D'un point de vue émotionnel. Physiquement, c'était pas mal… Je crois. Je l'ai trouvé doué. (blush). Enfin, pour ce que je peux en juger. »
Nouveau rire de Saga.
-« Tant mieux si tu le prends comme ça. J'ai bien cru un instant que tu allais te trancher les veines !
Pour Aphrodite ? N'exagérons rien. »
Silence.
-« Merci Saga, tu m'as vraiment aidé. Et puis de savoir que toi aussi tu as couché avec un homme, ca me rassure. Je ne suis peut-être pas si tordu que ça.
Mais non voyons ! Bon, si on s'occupait de toi maintenant, que tu sois présentable quand nous rejoindrons les autres.
Les autres ?
Hum, hum, acquiesça Saga. Aldébaran, Kanon, Milo, Camus, Shura, Dohko, Shaka, Aiolia, Masque de Mort et Aphrodite. Oh et puis Seya !
Ils sont tous là ? Et Shion ?
Ah oui, Shion aussi. »
Mû état heureux que son maître soit là aussi. Cependant une question le torturait depuis un moment.
-« Est ce que tu sais où nous sommes ? demanda-t-il.
Shaka pense qu'il s'agit d'un lieu transitoire entre la vie et la mort.
C'est ce que je pense aussi. Mais ? ! ! ! Qu'est ce que tu fais ? »
Saga venait de faire apparaître un lac, une serviette, un savon et du shampoing.
-« Comment ? Comment as tu fais ça ? balbutia Mû.
- C'est simple. Il suffit de le vouloir. Ca m'étonne que tu n'aies pas trouvé. La plupart d'entre nous ont souhaité quelque chose en se réveillant, ne serait-ce que s'habiller. »
Mû rougit.
-« J'étais bien, se défendit-il. Je n'avais ni froid, ni faim.
Bon allez, trêve de bla bla. Au bain ! ! ! »
Saga prit Mû dans ses bras et le jeta à l'eau. Le bélier coula net puis se redressa en toussant et crachant sous l'œil goguenard de son aîné.
-« Tournes toi ! » intima Mû.
Saga obtempéra sans un mot et attendit la fin des ablutions de son ami.
-« Saga ? »
La voix de Mû semblait quelque peu tendue.
-« Oui ?
- Avant qu'on rejoigne les autres, j'aimerai que tu me promettes de ne pas parler de ce qui s'est passé ici, s'il te plait. Ca me gênerait beaucoup.
Je ne comptait pas en parler.
Merci, souffla Mû (…) C'est bon, tu peux te retourner maintenant ! »
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-« Tu en as mis un temps Saga pour aller chercher Mû » remarqua Seya.
Il était en train de sauter sur un trampoline en faisant diverses figures. Les Chevaliers d'Or l'observaient d'un air indulgent, quoique envieux. Mais en tant qu'aînés, ils se devaient de montrer l'exemple.
-« Je lui ai montré comment contrôler ce lieu.
- Ah c'est vrai que Masque de Mort à dit qu'il était encore tout nu quand il l'a trouvé ! » s'esclaffa Seiya.
Saga chercha Masque de Mort du regard, se demandant ce qu'il avait bien pu dévoiler de plus. Il était avec son acolyte de toujours, Aphrodite. Il se dirigea vers eux et empoigna le poisson par la nuque.
-« Il faut qu'on parle. Maintenant. »
Mû observait le couple s'éloigner avec une certaine inquiétude. Il redoutait que son ami ne cherche à le venger.
-« Il a l'air en colère, nota Aldébaran.
- C'est au tour d'Aphrodite de régler ses comptes avec Saga, affirma Milo.
Il aurait dû l'aider. En tant que chevalier… » prôna Shaka.
Il fut interrompu par Seiya.
-« Eh Mû, ça te dit de faire du trampo ? ? ? »
Mû déclina poliment de la tête et s'installa sous le cerisier - qui n'avait pas bougé car Seya aimait ce qui lui rappelait son pays.
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-« Maintenant, tu vas m'expliquer pourquoi tu as couché avec Mû et ensuite ce que tu es allé raconter aux autres avec ton gigolo » siffla Saga.
Aphrodite pouvait dire qu'il était dans une rage folle rien qu'à l'éclat de ses yeux : ils lui rappelaient ceux de l'ancien Pope, quand son mauvais côté reprenait le dessus. Pourtant, malgré sa haine, son ton restait froid et coupant et il ne faisait pas un geste. Aphrodite aurait souhaité qu'il le batte à mort plutôt que de faire face à cette indifférence mêlée de mépris qu'il arborait à présent. L'ancien Pope, lui, n'aurait pas hésité à le battre comme plâtre après ce qu'il venait de faire, constata-t-il avec un sourire amer.
-« DM n'est pas mon gigolo et il ne dira rien. Pour ce qui est de coucher avec Mû, je te signale que je fais ce que je veux de mes fesses et que tu n'as pas à t'en mêler. Néanmoins, poursuivit-il avec une pointe de défi, si tu t'inquiètes tant pour ton ami, je peux t'assurer que j'ai pris grand soin de lui.
- Tu plaisantes ? moqua Saga. C'était une loque quand je l'ai retrouvé ! hurla-t-il. Est ce que tu te rends compte de ce que tu lui a fait ? C'était sa première fois !
- En tous les cas, j'ai été plus doux avec lui que tu ne l'as jamais été avec moi… Même pour ma première fois. »
Il y avait une telle amertume dans la voix d'Aphrodite que Saga en fut soufflé. Il se souvenait parfaitement de ce moment là. Aphrodite venait juste d'acquérir son armure. Ce n'était encore qu'un adolescent, intimidé par le Sanctuaire. L'autre Saga n'avait eu aucun mal à le séduire. Il était plus âgé, plus confiant. Il l'avait pris un après midi sur la plage. Pas de baisers ni de caresses, rien qu'un acte brutal de possession. L'adolescent n'avait pas hurlé mais quand Saga l'avait laissé sur le sable, ses lèvres étaient en sang et il pleurait. Il en avait fait son amant et l'avait transformé en assassin. Il soupira, toute colère désormais envolée. Jusqu'à quand serait-il poursuivi par son passé ?
-« Ce n'était pas moi, Aphrodite. C'était l'Autre, murmura-t-il tête baissée dans une vague tentative pour s'excuser. Mais comment excuser ça ?
C'était pourtant ton corps… »
Aphrodite sentait la colère monter en lui.
-« Tes mains… Ta bouche… Ton sexe… » martela-t-il.
Et tandis qu'il parlait d'une voix tremblante de rage, ses mains effleuraient chacune des parties de son corps qu'il citait avec des gestes oh, si doux… Comment pouvait-il encore y avoir de la douceur dans cet homme après tout ce qu'il lui avait fait ? C'était comme… Non, ce n'était pas possible. Il ne pouvait pas… Si jamais il… Alors, je suis un véritable salopard, conclut Saga pour lui même.
Se pouvait-il qu'il l'aime ? Saga leva les yeux vers son vis à vis. La colère, la tristesse se battaient dans son regard mais il sentait poindre un sentiment plus profond, sans cesse refoulé mais pourtant présent. Seigneur…
Les cheveux du poisson effleurèrent sa joue comme il soufflait à son oreille :
-« Tu n'es qu'un idiot. »
