Aux reviewers :

Alieonor : Un peu plus long cette fois-ci, fait trop chaud pour allumer un ordinateur.

SamaraXX : Des rafles, ce sont des enlèvements, ou des « arrestation » (le genre d'arrestations qu'on faisait pendant la seconde guerre mondiale). Poudlard, c'est pour la fin du prochain chapitre, pas le château, mais au moins la forêt.

Théalie : Merci beaucoup ! J'espère que t'aimeras autant la suite !

Bunny Anoushka Kalika : sacré pseudo, j'espère que je n'ai pas fait de faute. J'espère que la suite te plaira, merci pour ta review.

Pona : Merci. Voilà la suite !

Merci aussi à Onarluca, Ielena, Leila et Black-sun.

Et sinon, juste par curiosité, est-ce que quelqu'un sait à quoi correspond la colonne « Hits » de la page « Story stats » dans les comptes ?

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PARTIE II :LE SILLAGE DES TENEBRES.

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4.Les larmes des enfants.

2ème partie.

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Ca commence comme une tempête.

Il y a d'abord un calme, un silence absolu qui s'insinue dans la nuit. Le vent s'éteint, les arbres se figent, chaque âme se tait. Toute lueur de vie semble soufflée comme un bougie mourante.

Mais le silence ne dure qu'un temps.

Parce qu'ensuite la foudre s'abat, et le choc retentit sûrement à des kilomètres à la ronde.

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Drago a déjà les yeux grand ouverts quand l'épais pan de toile qui sert de porte à sa tente est brutalement écarté.

Si Vincent Gorgone avait été plus fort, il l'aurait probablement arraché sous le coup de la panique.

Drago se redresse calmement. Il sait déjà ce qu'il se passe, ce que Vincent vient lui annoncer, avant même d'avoir lu la terreur qui obscurcit ses yeux bruns.

Lui n'a pas vraiment peur. Tout juste une légère inquiétude.

Et beaucoup de colère.

« Il sont là Drago. Il faut bouger d'ici tout de suite. C'est pas une attaque ! »

« Je sais. »

Il se met lentement debout, repoussant Vincent qui s'agrippe à son bras.

« Tu comprends pas ! », continue le petit garçon, sa voix montant d'une octave. « C'est pas une attaque, je te dis ! Ils viennent nous prendre. »

« Je sais. », répète Drago, un ton plus haut.

Sans l'entendre, Vincent s'empare de nouveau de son poignet, tirant de toutes ses forces pour l'entraîner à l'extérieur.

« C'est ta mère qui m'a dit de venir. Il faut aller se réfugier dans la mairie, la plupart des enfants sont déjà… »

« Mais tu ne comprends donc rien ! »

Cette fois, Drago le repousse si violemment que Vincent bascule en arrière. Il atterrit comme un pantin sur la paillasse, les yeux arrondis de stupeur, sa crainte momentanément oubliée.

« JE SAIS, tu m'entends ? », rugit Drago. « Je savais déjà qu'ils allaient venir, je le savais ! »

« Et tu l'as pas dit ? », souffle Vincent.

Lentement, il s'assoit. Puis il tente de se redresser, mais son pied se prend dans les couverture et il retombe, hébété.

Drago l'observe, le regard froid, sans bouger d'un pouce.

« Et comment t'as su ? », demande finalement Vincent.

Il parvient enfin à se remettre sur ses pieds. Drago le jauge de ses yeux gris, vaguement méprisant.

« Le message, espèce de crétin. La lettre de ton frère. C'est lui qui savait. »

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La porte de la chambre s'ouvrit si brusquement que Ginny poussa un cri de panique.

« Par ici, et vite. Il ne faut pas rester là ! »

Harry soupira de soulagement en reconnaissant la voix de Charlie Weasley.

« Jude, écarte-toi de cette fenêtre ! »

Le petit garçon obéit, les yeux toujours fixés sur le volet.

« Qu'est ce qu'on fait, maintenant ? », demanda Ginny dans un souffle.

« Il ne faut pas rester là. », répéta Charlie en attrapant sa main.

Il les entraîna dans le couloir, tirant sur le bras de Ginny. Harry sentit la main de Jude se glisser dans la sienne.

Ils traversèrent la minuscule cuisine, jusqu'au cellier, une petite pièce sombre et fraîche, qui dégageait une vague odeur de moisi.

« Passez par le soupirail, et foncez vers la forêt. Là-bas vous ne risquerez rien. »

« Et toi, tu vas faire quoi ? », souffla Ginny.

« Je descends en ville. Des gens auront sûrement besoin d'aide. »

Ginny secoua farouchement la tête.

« On vient avec toi ! », rugit Ron.

« Non. », répliqua Charlie, catégorique. « C'est beaucoup trop dangereux, et puis vous ne feriez que gêner. »

D'un coup de poing, il fit céder le verrou du soupirail.

« Mais… », commença Ginny.

« Tout ira bien. », l'interrompit Charlie. « Ils ne me verront pas, ne t'en fais pas, va, je saurais les éviter, ils ne sont pas franchement discrets… »

« Et ma mère… », murmura Harry.

Il imagina Lily, toute seule là-haut, trop faible pour quitter la maison en cas d'attaque, et sans doutes folle d'inquiétude pour ses fils.

« Je ne pense pas qu'on s'en prendrait à elle, tu sais… », Charlie hésita un moment. « Elle est malade Harry, elle ne servirait à rien. »

Harry sentit l'angoisse lui nouer le ventre. A quoi cela servirait-il, de trouver cette pierre magique, si elle se faisait tuer ou enlever avant même qu'il ne soit parti ?

« Filez, maintenant. », ordonna Charlie. « Il n'y a pas de temps à perdre. »

Harry sortit le premier. Le soupirail donnait sur l'arrière du petit jardin à demi-sauvage des Weasley. Tout au fond, le vieux mur s'était effondré. Au delà des pierres éparses on devinait le sentier qui s'éloignait du village.

Jude et Ginny sortirent derrière lui. Ron hésitait en arrière, son regard allant de Charlie au soupirail, indécis.

« Dépêche-toi, Ron. », grogna Charlie. « Si je veux aider les autres, c'est maintenant qu'il faut le faire ! »

A regret, Ron se glissa à son tour dans l'ouverture.

« Et comment on te retrouvera… Après ? »

« Je viendrais vous chercher. Mais quoi qu'il arrive, ne quittez pas les bois avant le lever du jour, c'est bien compris ? »

Il regarda Ron, puis Ginny. Tous deux acquiescèrent, la mine sombre.

« Très bien. Alors on se voit plus tard. Tout ira bien. »

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Drago émergea de la tente, Vincent sur ses talons.

Des cris retentissaient, mais ils semblaient encore lointains. La lumière, par contre, avançait. Un lueur flottante, sinistre, qui enveloppait les fragiles structures de bois et les pans de toile qui ondulaient comme des voiles.

Le campement était désert.

« C'est de ta faute. », souffla Vincent. « Je t'avais dit qu'il fallait faire vite ! »

« Merde, il se sont tous tirés ! », siffla Drago. Il se tourna vers Vincent, moqueur. « Tes frangins sont partis sans toi, ils doivent vraiment t'apprécier ! »

Vincent crispa les poings, son front pâle vira au rouge brique.

« Eh, ta mère aussi, elle s'est barrée. Apparemment, elle s'en foutait de savoir si tu suivais. »

« Petit con. », cracha Drago.

Il fit quelque pas entre les tentes. Les voix se rapprochaient. Pas vraiment des voix, plutôt un clameur sourde, qui montait, chassant la nuit aussi sûrement que ces lueurs fantomatiques.

« Drago ? », souffla Vincent.

Le bruit montait du cœur du village. Drago se demanda brièvement si l'un d'entre eux avait fait disparaître l'horrible Mme Milson, qui tenait l'épicerie.

« Drago, on fait quoi, maintenant ? »

A la mairie. Ils se planquaient dans la mairie. Cécrops avait sans doutes négocié un accord, du genre prenez ce que vous voulez, mais ne touchez pas à ma précieuse Cour des Pierres.

A la mairie.

Il se tourna vers Vincent.

« Autant aller rejoindre la fête. », laissa-t-il tomber.

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« Bon sang, on n'y voit rien du tout ! », jura Ron en trébuchant pour la troisième fois sur une racine.

« Franchement, je crois que ça vaut mieux. », grinça Harry en désignant le village en contrebas.

La lumière pâle avait envahi les rues, formant un halo au dessus des maisons. On devinaient les silhouettes, noires, qui courraient en tous sens, en proie à une terreur sans nom. Et parmi eux, il y avait Charlie. Et peut-être Rémus ? songea brusquement Harry.

Et Rogue, également.

Et ce fut comme si un flot se libérait. Des dizaines de noms et de visages, qui avaient comme disparu de sa mémoire quelques minutes auparavant, envahissaient son esprit.

La vieille mme Milson, Neville Londubat et son grand-père, Conan Treps et ses sœurs…

« Hé, il y a quelqu'un… »

La voix de Ron le ramena à la réalité avec un sursaut.

« Quelqu'un ? Où ça ? »

Et il les vit. De l'autre côté de la colline, les formes sombres semblaient minuscules.

« Des mangemorts ? », souffla Ginny d'une voix tremblante.

« Je ne pense pas. », répondit Harry. « Les mangemorts transplanent, en général. Ceux-là se planquent sûrement, comme nous. »

« Espérons qu'il ne viennent pas du campement. », murmura Ron. « Je n'ai vraiment pas envie de croiser John Cécrops ce soir. »

John Cécrops n'a sûrement rien à craindre des mangemorts…, avait un jour dit Lily.

Alors qu'elles se rapprochaient, Harry réalisa que les silhouettes étaient trop petites pour être appartenir à John Cécrops ou à un quelconque membre du conseil.

« Ce ne sont pas des adultes. », dit-il aux autres. « Regardez, je crois que c'est Conan, devant. »

Ron leva le poing vers le ciel sombre en guise de signe de reconnaissance. Un garçon, à la droite de Conan, répondit. En courant, la petit troupe rejoignit Harry, Ginny, Ron et Jude sur le sentier. Alors qu'ils s'approchaient, Harry reconnu divers enfants du village.

« Qu'est ce qu'il se passe, en bas ? », lança Ron dès qu'ils furent assez proche pour l'entendre. « Vous avez vu quelque chose ? »

« On nous a fait dégager avant que les lumières atteignent les rues derrière l'église. », haleta Mitchell Barnes, un garçon blond qui avait perdu sa mère lors des dernières raffles. « Les autres sont coincés en bas. », il baissa la voix et désigna Conan du menton. « Les petites sœur de Treps sont encore là-bas. »

Les poings dans ses poches et son visage pâle cadenassé, Conan donnait des coups de pied rageur dans les mottes de terre.

« Il y en a qui se planquent dans l'église. », ajouta quelqu'un.

« Et les gosses du campement, », souffla Mitchell. « où est-ce qu'ils se sont planqué ? »

« Parce que tu crois qu'ils se planquent ? », grinça Conan.

« Il ne vaut mieux pas rester là, vous savez… », fit une des filles. « Ils ne vont sûrement pas tarder à monter de ce côté. »

Les lueurs s'étalaient au-delà du village, à présent. Elles commençaient à remonter vers collines. Harry réalisa avec un frisson qu'elles n'étaient plus qu'à quelques mètres de la cabane des Weasley.

« Mon frère Charlie est en bas. », disait Ron à Mitchell. « Tu l'as vu ? »

Ils s'étaient remis en marche, une fois de plus vers la forêt. Les plus jeunes, terrifiés, couraient devant, trébuchant tous les quelques mètres dans les cailloux et se relevant aussitôt, sans même penser à pleurer.

« Non. », répondit Mitchell. « Mais je n'ai rien vu, de toutes façons. Pas eu le temps. »

Tout près de Harry, Jude s'effondra brusquement dans l'herbe, avec un hoquet. Harry, surpris, se pencha pour l'aider à se relever.

Ginny s'arrêta derrière eux.

« Ca va, Jude ? »

Le petit garçon se redressa lentement. Il semblait indemne, mais son visage était blanc comme la craie.

« Jude ? », fit Harry d'un ton incertain.

Sans un mot, Jude se tourna tendit le bras vers le nord. Vers la maison, réalisa Harry qui sentit son sang se glacer.

« C'est maman ? », souffla-t-il, la voix rauque.

Impossible, impossible ! Elle est trop malade, avait dit Charlie, elle ne les intéresse pas…

Jude acquiesça, les yeux agrandis par la peur.

« Comment pourrait-il… », commença Ginny.

« Il dit la vérité. », coupa Harry, qui sentait la panique le gagner. Il suivit du regard les lumières qui montaient vers le nord, cherchant à distinguer si oui ou non elles avaient déjà atteint la maison.

Mais il était impossible de le savoir. La maison était invisible d'ici.

« Je retourna là-bas. »

Jude ouvrit des yeux encore plus grand, Ginny eut un sursaut.

« Quoi ? Mais tu es fou ! Harry, ils vont te… »

« Ecoute. », l'interrompit Harry. « J'étais venu dire quelque chose à Ron, ce soir. Emmène Jude et vas le rejoindre, ensuite, allez vers le sud, dans les bois. Vers les grottes, tu sais ? »

Elle acquiesça en silence.

« Suivez les rochers. A un endroit, vous verrez un cercle bleu sur la roche. Attendez-moi là. »

« Un cercle… ? Comment tu sais tout ça ? Et pourquoi est-ce qu'on doit t'attendre là-bas ? »

« Je n'ai pas le temps de t'expliquer maintenant ! ».

Les lueurs grimpaient toujours, vers le nord. Peut-être était-il déjà trop tard…

Il tira fermement sur le bras de Jude, pour le forcer à lâcher sa manche. Un peu plus haut, Ron s'immobilisa, fit quelques pas en arrière.

« Hé ! », lança-t-il. « Qu'est ce que vous fabriquez ? »

« Il faut que j'y aille maintenant, Ginny. », souffla Harry.

« Mais tu feras quoi, là-bas ? », objecta-t-elle.

Il pressa doucement la main de Jude avant de s'écarter.

« Je ferais ce que je peux. », répondit-il simplement.

Et il fit demi-tour et s'éloigna au pas de course, sous le regard stupéfait de Ron.

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« On pourras jamais arriver jusqu'à la mairie. », haleta Vincent.

Drago s'immobilisa contre le mur. Il a raison, songea-t-il à contre-cœur. La lumière était omniprésente, par ici. Drago savait ce que ça signifiait : il n'y avait nulle part où se cacher.

Les cris retentissaient de partout. Les gens courraient, éperdus. De temps à autres, une silhouette, noire de la tête aux pieds, auréolée de ténèbres, apparaissait, comme issue du néant, et un homme, une femme, ou un enfant disparaissait avec lui.

Et plus personne ne le reverrait.

« Eh, d'où tu sors, toi, petit con ? »

La voix, aiguë, lui vrilla douloureusement les oreilles. Une douleur fulgurante traversa son ventre, et un bras, poisseux et glissant, lui plaqua le cou contre le mur.

« T'es du campement ? Vous êtes avec eux ? »

Un visage se rapprocha du sien. Sur la peau, blanche comme la craie, le sang semblait presque noir. Les yeux bleus, fous de l'homme roulèrent dans leurs orbites, et Drago commença à suffoquer.

« Vous êtes de leur côté, pas vrai ? »

Le bras pressa plus fort.

« Ils ont embarqué ma gamine ! Tu peux dire où elle est ? Réponds ! Qu'est ce qu'ils ont fait de ma gosse ? »

Drago se débattit. La main moite dérapa contre son cou, et l'homme planta son coude entre ses côte pour le maintenir en place. La douleur s'insinua dans sa poitrine, lui coupant le souffle.

« Mais lâche ce petit, à la fin ! »

La pression se relâcha, et Drago fit un bond de côté, toussant et haletant. Un autre homme avait agrippé son assaillant par le col, le projetant au sol. Vincent fixait la scène, la bouche entr'ouverte.

« Dégagez de là, les mômes. »

Drago fit quelque pas en arrière, portant sa main à son cou. La substance, tiède et glissante, qui avait maculé les mains de l'homme, était toujours là. Du sang.

Le type se redressa, et poussa un hurlement, prostré contre la pierre. Comme en écho, un autre cri retentit au bout de la rue.

Et puis ça arriva, sans prévenir. Tout juste un frémissement dans l'air chargé de poussières. Un secousse, puis le monde s'ouvrit, une fraction de seconde, et il apparut. Sombre. Deux fentes, derrière le tissu noir qui servait de visage, et Drago eu l'impression que le regard, s'il y en avait, s'insinuait au plus profond de lui ; dardant ses rayons jusqu'à son nombril.

Puis tout s'effaça.

La créature et l'homme disparurent.

Et Drago, se retenant de hurler lui aussi, détala en courrant, sans prendre la peine de vérifier si Vincent suivait.

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Harry ralentit sa course en entrant dans le village. Ses poumons étaient brûlants, et l'air, sec et poussiéreux, lui nouait la gorge.

Les mots de Mitchell Barnes lui revinrent en mémoire.

On nous a fait dégager avant que les lumières n'atteignent les rues derrière l'église…

L'église, il la voyait de là où il était. Ici, il n'y avait déjà plus personne.

Il y en a qui se planquent dans l'église, avait dit quelqu'un.

Il plongea la main dans une des poches du sac à dos, et en sortit le couteau de Lily. Lentement, retenant son souffle, il remonta la rue vers l'église.

Un cri retentit, de l'autre côté du cimetière.

Puis des pas, un bruit de course, derrière lui. Il se retourna d'un bond, le couteau pointé devant lui, taillant dans l'air épais.

« Malfoy ? »

Il eut juste le temps de les apercevoir tout au bout de la rue, Drago Malfoy, et le gosse qui se planquait derrière lui. Puis d'autres cris se firent entendre, puis d'autres pas, plus lourd.

Et l'alerte monta, suraiguë, vers le ciel, encore sombre au-dessus des lumières.

« Ils sont dans l'église ! »

Il y a qui se planquent dans l'église…

D'autres voix firent échos, propageant l'onde de choc. Le bruit de la cavalcade s'intensifia, les talons frappant le sol, presque en rythme. Harry eut l'impression que les pierres tremblaient, sous ses pieds.

« Ils sont dans l'égliiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiise ! »

Malfoy était toujours là, à l'autre bout de la rue, figé. Sa silhouette ondoyait dans les volutes de poussières. Son regard rencontra celui de Harry, qui pour une fois ni lut ni mépris, ni haine. Mais quelque chose d'inédit, qu'il n'y avait jamais vu avant.

De la peur. Une trouille bleue, même.

Puis une femme déboucha dans la rue, échevelée, brisant le contact. Son visage désespéré agit comme un électrochoc, et Harry fit un bond en arrière.

« Ils sont dans… »

Une quinzaine d'autres personnes apparurent à leur tour, formant une masse sombre et compacte, dans la lumière pâle.

Harry rangea le couteau dans sa poche, et recula lentement.

« L'église… L'église… L'église… »

Tous se ruèrent vers le cimetière. Une femme avec un bébé dans les bras trébucha à l'entrée. Harry remonta la rue à toute vitesse, évitant de regarder en direction de Malfoy, ignorant s'il était encore là. Des pas claquèrent à côté de lui. Un homme, dont l'une des manches était couverte de sang, le doubla en courant et disparut à l'angle.

Une seconde plus tard, Harry tourna à sa suite, et le percuta de plein fouet.

L'homme ne parut même pas s'en rendre compte. Immobile, les yeux écarquillés, il fixait le vide, devant lui.

Harry se redressa lentement, sentant une terreur froide le gagner.

Les cendres se figèrent dans l'air.

Il eut une vibration, comme un grésillement, et le vide claqua, puis il apparut. Grand, immense, même. Harry voulut faire un pas en arrière, mais quelque chose le retint.

L'homme, à côté de lui. Paralysé, le regard vide. Sa main fermement accrochée au sac a dos.

« Lâchez-moi ! », grogna Harry en se débattant.

L'homme ne bougeait pas.

La créature fit un pas en avant. Harry rua en arrière, faisant pivoter ses épaules pour tenter de faire glisser les lanières du sac.

Puis il se souvint du couteau, dans sa poche.

Derrière les fentes du masque, on ne voyait que de l'ombre. Il était impossible de savoir qui. Lequel des deux, de l'homme et de l'enfant.

Qui elle regardait.

Elle avança encore, comme au ralenti, amorça un geste vers l'avant. Harry plongea sa main dans sa poche, saisissant le couteau par le milieu, moitié-bois, moitié-métal contre sa paume. Aveuglément, il lança son poing en arrière. La lame déchira le tissu, et la lanière céda dans un craquement, puis elle heurta la main de l'homme, tranchant la chair. Le bras se rétracta violemment, et le sac tomba dans la poussière.

La créature se pencha encore, effleurant la poitrine de l'homme.

Et Harry se mit à courir.

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« Maman ? »

Il ouvrit la porte si brusquement qu'elle alla cogner contre le mur. Les lueurs, telles une armée de serpent, se glissèrent dans la cuisine.

« Maman ? », cria-t-il, plus fort cette fois.

Toujours pas de réponse. Mais peut-être était-elle trop épuisée ; ça ne voulait pas nécessairement dire que…

« Maman ? »

Et la voix de Lily, faible, à peine plus qu'un murmure, monta du couloir.

« Harry ? »

Une vague de soulagement, tiède, l'envahit. Jude s'était trompé !

« J'arrive, maman ! », rugit-il.

Il traversa la cuisine, prêt à s'engager dans le couloir, quand…

Il se figea sur le palier, brusquement inquiet. Il posa sa main droite sur sa cuisse, sentant le couteau à travers le tissu de son short.

Avait-il vraiment replacé la planche avant de partir ?

Il se voyait encore, poussant et tirant le bois lourd.

La planche était de nouveau posée sur le planché de la cuisine. L'ouverture formant un carré parfait, rempli d'ombres. Il plongea sa main dans sa poche et ressortit le couteau. Avec un pincement au cœur, il réalisa que la baguette était toujours dans le sac à dos, abandonné derrière le cimetière.

Il fit un pas en avant. Le couteau, pointé devant lui, lui semblait de plus en plus minuscule à mesure qu'il avançait.

Puis la silhouette, haute, fine et inquiétante, apparut dans l'ouverture.

Et Harry reconnu John Cécrops.

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