Auteur : Caramelon

Titre : Mondes alternatifs

Résumé : 5 chapitres plus ou moins longs. Dans chaque chapitre, un des pilotes de Gundam n'est pas un pilote de Gundam.

Sous-titre : sans Trowa

Genre : POV Trowa et comme il devrait pas avoir de problèmes particuliers ce ne sera qu'un POV Trowa. AU et shonen ai

Couple : le couple central sera Trowa et Quatre. Quant à savoir qui fera le premier pas… vous le saurez à la fin de la fic car je le sais pas moi-même.

Résumé : comme pour Duo mais avec Trowa. Peux pas mieux faire comme résumé.

Disclaimer : gros problème. J'ai voulu acheter Trowa. Mais ce dernier n'était pas trop chaud bouillon pour venir me rejoindre. Donc j'ai fais un deal avec lui. Je lui révélais sa véritable identité et il venait avec moi. Je lui ai donc dis qu'il s'appelait Triton Bloom et qu'il était le petit frère de (non pas d'Orlando Bloom) Catherine Bloom. Et voilà que tout content il partit rejoindre sans sœur avec un seul merci. La prochaine fois j'établirai un contrat en bon et dû forme parce qu'il y en a marre de se faire avoir… Je le jure, un jour je les aurais !

Merci pour leurs reviews à Sekiei, Kaorulabelle, Misao Maxwell, Yat (la calvitie n'est pas contagieux, simplement génétique, lol) Moonfree (régale-toi) et Kelidril (désolé de ne pas avoir répondu par mail, mais merci beaucoup pour ta review)


POV Trowa

Je parcours le champ de bataille à la recherche de cadavres, ou avec un peu de chance, de survivants. C'est un travail comme les autres. Je le fais parce qu'il faut bien le faire. Et puis, je suis le chef d'une unité de mobile suit, il est donc de mon devoir de récupérer les corps de mes soldats pour leur famille…

Cette bataille a été, à mon sens, un fiasco total. Je ne crois pas que j'ai jamais vu quelque chose d'aussi peu loyal. Mais ce n'est pas mon rôle de critiquer les agissements de Lady Une. Je me contente de lui obéir. C'est la seule chose que je puisse faire. Obéir et me battre.

Je ne sais pas qui je suis. Je ne connais même pas mon propre nom, le visage des mes parents, de mes frères et sœurs si j'en ai eu. Je n'ai pas perdu la mémoire. Tout ce que je sais, c'est qu'à l'âge de 2 ans peut-être j'ai été recueilli par des mercenaires qui combattaient l'Alliance Terrestre. Ils m'ont appris tout ce que je sais aujourd'hui. L'art de faire la guerre. L'art de survivre…

J'hausse les épaules. Ce n'est pas le moment de penser à ce genre de chose. Ca n'a pas de sens. Je contourne, avec ma jeep militaire, la carcasse encore fumante d'un Aries. A l'intérieur, un corps carbonisé. Il n'a pas dû souffrir beaucoup. Je relève le numéro de l'Aries en cochant une case dans la liste des soldats sous mes ordres. Aries n°2004 194 345. Pilote Vincento Dice. Une nouvelle recrue…

Ces pilotes de Gundam ne font vraiment pas de cadeaux. Remarque, ils doivent eux aussi se contenter de suivre les ordres de leur supérieur, notamment cet homme bizarre qui est apparut dans chaque écran de MS.

Lady Une a tendu un piège aux pilotes de Gundam en leur faisant croire que deux convois transportaient des nouveaux MS, les Taurus. Un convoi aérien et un convoi terrestre. Moi, je m'occupais avec d'autres équipes du convoi aérien.

Les Gundams sont tombés dans le piège mais nous n'avions pas prévu qu'ils puissent être aussi fort. Le 03 nous a littéralement noyé sous les tirs pendant que le Colonel Zechs affrontait le Gundam 01. La bataille tournait à l'avantage des rebelles quand Lady Une a prit les colonies en otage.

Tous les Gundams sont partis après que le pilote du 01 se soit autodétruit avec son armure. Je ne comprends pas du tout leur motivation. Mais je suis peut-être trop préoccupé à essayer de trouver un sens à ma propre vie pour mesurer les actes des autres.

Je remonte dans ma jeep et me dirige vers une autre carcasse. Toujours pas de survivants. C'est à peine étonnant. Je regarde autour de moi. Au loin, j'aperçois les hommes du Colonel Zechs ramasser les débris du 01. Je me demande vaguement à quoi ça pourrait bien leur servir… Mais tout ça n'a aucune importance.

Je finis ma macabre tournée. Il est temps de rentrer faire mon rapport, donner la liste des disparus définitifs, ceux dont on est sûr qu'ils soient morts…

Mon regard est soudain attiré par quelque chose d'inhabituel. Un corps est allongé un peu plus loin.

Je m'approche du jeune homme. Une immense marre de sang l'entoure. Je doute qu'il soit encore vivant mais je suppose que ça ne coûte rien de vérifier.

Je descends donc de ma jeep. Je n'ai jamais vu ce garçon. Il ne porte pas l'uniforme des soldats de Oz. Un débardeur vert, une sorte de cycliste noir, et des chaussures jaunes. Il n'y a aucun doute : ce garçon ne fait pas partie des militaires.

Je réfléchis. Que pouvait bien faire un garçon qui doit avoir mon âge sur un champ de bataille ? C'est sûrement le pilote du Gundam 01 qui s'est fait exploser. Je ne vois que cette explication. Le plus proche village est à environs une centaine de kilomètre. Ça m'étonnerait grandement que ce soit un de ses villageois…

Je m'agenouille près du corps et pose ma main sur son cou. Je sens son cœur battre. Lent, irrégulier, mais il est là. Le pilote est vivant.

Je porte ma main vers mon talkie-walkie.

« - Ici le Lieutenant », j'annonce. « Blessé grave. »

« - Roger. Activez la balise ! Une équipe arrive. »

Je range mon talkie-walkie et active le signal qui permettrait au secours de nous retrouver. Je l'examine partiellement. Le tout c'est de le maintenir en vie jusqu'à l'arrivée des médecins. Après, ce ne sera plus mon problème.

J'entends une voiture qui s'approche de moi à vive allure. Un véhicule militaire bardé d'une croix rouge.


Trois mois plus tard

Il s'est réveillé. Le pilote de Gundam, dont le nom de code serait Heero Yuy. Je trouve ça assez ironique. Prendre pour nom de code, le nom d'un leader pacifique des colonies est vraiment risible. Mais pas du tout dénué de signification.

Je sors tout juste du bureau du Colonel Lady Une. Je ne sais pas pourquoi mais cette femme m'est totalement antipathique. C'est peut-être ce visage austère. Ou bien ses lunettes qui cachent, ou du moins essayent, la folie qui a envahi cette femme.

Beaucoup de personne se demande jusqu'où ils peuvent aller par amour. Le colonel Lady Une en est la réponse : très loin. Jusqu'à détruire des milliers de vies innocentes pour réaliser les rêves de son Excellence Treize Kushrénada. Tout ça pour faire le bonheur d'une autre personne. Je n'ose même pas imaginer ce que ça aurait pu être si elle avait été égoïste !

Mais je peux me tromper. Ce n'est peut-être juste qu'un trait spécifique à toutes les femmes portant Une comme nom. Cette gamine, Midy Une, nous avait tous trahit pour pouvoir prendre soin de sa famille avec l'argent de la récompense…

Comme quoi, c'est peut-être très triste de n'avoir personne à protéger ou à aimer, mais au moins, cela évite de nuire aux autres. Non. Ce n'est pas vrai. Je n'ai rien à protéger, personne à aimer, il n'empêche que je suis devenu un soldat de Oz, et donc par ce fait un assassin déguisé en « sauveur », pour trouver un vague sens à ma vie.

Alors, je me demande vraiment qui de nous deux, Lady Une ou moi, est le plus pathétique. Et je me demande vraiment si une réponse est nécessaire. Tout comme ma vie, cette interrogation n'a aucun sens.

Je parcours les couloirs de l'aile ouest de la base, aile réservée à l'infirmerie. Lady Une tient à ce que ce soit moi qui interroge le pilote. J'entre donc dans la chambre où il est retenu. A première vue, je dirai que cette chambre est normalement prévue pour les cas de soldats psychologiquement instables. Autrement dit, des fous. C'est bien connu : la guerre nous rend tous fous. Aucun soldat ne revient jamais aussi sain d'esprit qu'avant son départ. Le reste c'est juste une affaire de force morale et probablement d'anti-dépresseur.

Le dénommé Heero est donc enfermé dans une chambre aux murs capitonnés, la porte blindée et deux soldats qui gardent la porte férocement, et une relève toutes les deux heures. Le pilote est lui-même solidement attaché sur le lit, sanglé aux poignets et aux chevilles. Une perfusion au bras droit, reliée à une poche d'un liquide transparent libère sans aucun doute un puissant calmant.

Et même avec tout ça, je ne suis pas persuadé que ça arrêterait un pilote tel que lui, si bien sûr il n'avait pas encore ses multiples fractures. Après tout, une personne qui est capable de se faire exploser avec son armure pour ne pas se rendre à Oz, ferait absolument n'importe quoi pour justement se sortir des griffes de Oz. J'ai donc bien peur que notre pensionnaire nous fausse compagnie d'ici quelques jours. Ou bien je ferai mieux de demander à ce qu'aucun objet tranchant ne soit à sa portée. Je suis persuadé qu'il pourrait très bien mettre fin à ses jours.

A mon entrée, Heero garde les yeux fermés, la tête toujours bien droite. Je m'assois sur une chaise à son chevet.

« - Je suis le Lieutenant. »

« - … »

« - … »

« - Tu n'as pas de nom ? »

« - Et toi ? Heero Yuy, c'est ça ? Ce n'est pas un nom très courant. Mais je suppose que tes parents avaient un sens de l'humour assez particulier… »

Le dénommé Heero Yuy ébauche un sourire en coin.

« Je suis ici pour t'interroger », je l'informe.

« C'est assez ennuyeux. Tu peux tout aussi bien commencer les séances de torture… »

« Je vois. »

Je me lève. Je suppose que j'en tirerai rien aujourd'hui. Et la torture, ce n'est pas mon truc. Tuer ou être tué sur un champ de bataille, oui. Mais torturer, non. De toute façon, la torture, ce n'est pas très efficace. Immanquablement, à la fin de la séance, le prisonnier est soit trop mal en point pour dire quoique ce soit, soit il nous claque carrément entre les doigts.

« C'est tout ? » me demande Heero.

« Je ne vois pas l'intérêt de poursuivre. Je reviendrai plus tard. »

« Ça ne changera rien. »

« On verra bien. »

Je m'apprête à sortir mais je m'arrête subitement.

« Heero Yuy, pourquoi tu te bas ? »

Pour la première fois, Heero ouvre les yeux et m'observe directement. Cette question m'obsède. Pourquoi se battent-ils ? Pour qui ? Et moi, pourquoi je me bats ? Je ne comprends pas la raison d'un tel combat. Pourquoi sont-ils mes ennemis ? Qu'est-ce qui me permet, qui nous permet de classer les pilotes de Gundam dans la catégorie ennemie ? J'ai subitement envie de savoir. C'est peut-être moi qui ne suis pas dans le bon camp. Lady Une, Treize, je ne me rappelle plus quelles salades ils nous avaient racontés pour nous motiver… A ce moment-là, ça m'était complètement égal. Je savais me battre. Et bien. Et ils avaient besoin de moi. J'étais nourri, logé, blanchi… Qu'est-ce que je pouvais demander de plus ?

Un sens à ma vie.

« Je n'en sais plus rien », me confie Heero après un moment d'hésitation. « Au début, c'était pour les Colonies, mais depuis que… »

« Ce n'est pas ce que je veux savoir », je l'interromps. « Ce sont de grands idéaux. On se bat tous pour de grandes phrases du genre, pour préserver la paix… Pour moi, ce leitmotiv est juste une hypocrisie de plus. »

J'ouvre la porte pour sortir. Je me sens quelque peu déçu. Alors même les pilotes de Gundam combattent avec des idées hypocrites. Se battre pour libérer les Colonies. C'est hypocrite. Aucun être humain ne peut faire preuve d'autant d'abnégation. Je n'y crois pas une seule seconde.

Je m'éloigne et me dirige vers le bureau de Lady Une pour faire mon rapport. Je lui annonce que le pilote Heero Yuy était trop faible pour répondre à mes questions. Elle me suggère la torture. Je rétorque aussi indifféremment et calmement que possible que ce serait le faire replonger dans un profond coma et ainsi perdre une précieuse source d'information. Je continue en lui suggérant la patience. Une affaire de deux ou trois jours. Lady Une me congédie.

Je ne sais pas pourquoi j'ai menti. Surtout que je n'ai aucune raison valable de le faire. Peut-être que je veux absolument obtenir une réponse de sa part. Mais, à quoi elle allait me servir ? Peut-être que j'essaye de me convaincre qu'il n'existe aucun soldat se battant pour rien. Je cherche peut-être une réponse au sens de mon combat.

Beaucoup de mes pairs se battent pour leur famille, pour leur maison. Lady Une et Lucrézia Noin se battent pour protéger l'homme qu'elles aiment. Le colonel Zechs se bat, lui, pour lui-même. C'est peut-être la raison la plus satisfaisante à mes yeux. Sauf que je n'ai toujours pas l'impression de me battre pour moi-même, pour me donner la sensation d'être le meilleur. Je ne ressens pas non plus cette exaltation que nous décrit Zechs…

Donc, ça ne peut pas être ça, la vraie nature de mon combat. Mais je finirai bien par trouver quelque chose ou quelqu'un pour qui me battre. Parce que se battre pour rien, c'est ridicule.

La cloche annonçant le repas retentit dans tout les bâtiments. Déjà, une troupe de soldats sortent des dortoirs pour se diriger vers le réfectoire. D'ailleurs, derrière le bâtiment, j'aperçois une grande tente rouge. Un cirque ?

Les dirigeants de Oz manipulent leurs soldats de cette manière : avec des belles paroles, des divertissements comme le cinéma ou bien des jolies jeunes filles pas farouches et certainement grassement payées. Tout ça m'écoeure. Mais un cirque, c'est la première fois.

Je ne sais pas pourquoi mais j'adore les animaux, surtout ceux qui sont sauvages. J'ai une étrange affinité avec ses animaux.

Pendant mes réflexions, mes pas m'ont conduit au milieu des coulisses du cirque, près des cages aux lions. C'est le puissant rugissement du seul lion mâle qui m'a sorti de mes pensées. Machinalement, je passe la main entre les barreaux.

« Viens là mon beau ! »

Le fauve rugit de plus belle. Mais je reste impassible. Je ne ressens aucune peur. Juste une certaine confiance en moi. J'ai l'impression qu'on se comprend lui et moi. C'est idiot. Cependant, j'ai le sentiment de comprendre ce qu'il ressent. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu cette faculté : d'établir de solides liens de compréhension avec des animaux. Par contre j'ai toujours autant de mal avec les êtres humains.

« Attention ! » j'entends crier une voix féminine.

« Il ne me fera rien s'il sent que je ne suis pas un ennemi. »

Pour confirmer mes paroles, le félin s'approche des barreaux. Je fourre ma main dans sa crinière.

« Alors ça ! Ça tient du prodige ! » s'exclama-t-elle.

Je pose mon regard sur elle. Une jeune femme sans doute à peine plus âgée que moi qui porte deux seaux.

« Tiens ! » me dit-elle en me tendant les deux seaux. « Puisque tu as fais de Pacha un véritable nounours, tu n'as qu'à aussi le nourrir. Je m'appelle Catherine. Et toi ? »

« Lieutenant. »

« Tu n'as pas de nom ? »

« … »

« Bon, tu ne veux pas répondre, fais comme tu veux ! Tu es un soldat de Oz ? »

« Oui. »

« Je vois. Pas bavard. J'espère que tu viendras nous voir ce soir. Mon lancer de couteaux est à couper le souffle ! Sans vouloir me vanter… »

Je ne sais pas pourquoi cette fille tient tellement à entamer une conversation avec moi. Je me contente de donner à manger aux lions en silence. Etrangement, cela m'apaise. Je sens le regard de la dénommée Catherine dans mon dos. Même si elle essaye à tout prix de parler avec moi, cette fille ne me dérange pas. Mais, il est vrai que j'aimerai qu'elle se taise. J'ai toujours préféré le silence.

« Le cirque reste ici pendant une semaine. Si tu veux tu peux revenir donner à manger aux lions, quand tu ne seras pas en mission… »

Je ne dis rien. Je me contente d'hocher la tête.

« Ils mangent tous les jours à 19 heures. Je t'attendrais ici. »

J'acquiesce vaguement. Catherine se retourne et s'en va.

Je caresse paresseusement la tête du lion. Puis je me détourne. Il est temps de rentrer au dortoir. Peut-être que je vais manger un morceau avant. Je n'ai pas plus faim que ça. Puis j'irai sûrement à la salle d'entraînement, histoire de martyriser un peu ce punching-ball.

J'irai peut-être aussi faire un tour au cirque.

J'entre dans mon dortoir que je partage avec trois autres lieutenants. Je prépare mes affaires de sport et celles pour la douche.


Je me défoule sur le punching-ball. Dans ses moments-là, je préfère ne penser à rien. Si bien que généralement, je ne vois pas le temps passer. Et quand je regarde enfin la pendule accrochée à un mur d'un blanc laiteux, il est 21 heures passées. Je file sous la douche.

J'ai décidé d'aller voir cette fille. Se distraire un peu ne me fera pas de mal. Surtout que demain, ce n'est pas une journée très agréable qui m'attend. Je devrai retourner voir ce Heero Yuy, bien que je sache parfaitement que cela ne servira à rien. La probabilité de rencontrer le Père Noël sur une plage à Hawaï est plus forte que la probabilité d'avoir des informations de la part de Heero Yuy.

Je n'ai jamais su d'où me venait cette expression. Probablement du chef de la rébellion pour qui je travaillais quand j'étais un mercenaire contre l'Alliance. Il avait, il me semble, un humour assez particulier.

J'arrive enfin au cirque. Le directeur nous accueille devant l'entrée. A côté, Catherine doit sans doute compter le nombre de spectateurs. Au moment où je passe devant eux, elle me fait un signe auquel je réponds par un hochement de tête.

Je m'assois dans les gradins en lisant le programme. Le spectacle va apparemment commencer par un sketch de clowns. Un numéro de dressage. Un tour de magie. Le lancer de couteaux de la fameuse Catherine, suivit d'une dizaine d'autres tours : funambules, acrobates et autres…

Le spectacle commence. Je le suis d'un air distant. Pas vraiment concerné. Mes camarades applaudissent à tout rompre d'un numéro à l'autre.

Enfin, c'est le tour de Catherine. Un spot l'illumine, seule, au centre de la piste.

« Bonsoir ! Je suis la Grande Catherine, lanceuse de couteaux. Pour ce numéro, j'aurai besoin de quelqu'un de l'assistance. Qui se porte volontaire ? »

Un nombre impressionnant d'hommes lèvent leur bras pour se porter volontaire. Mes voisins en font d'ailleurs partie.

« Toi, là-bas ! Le beau gosse mystérieux avec la mèche ! Pourras-tu rester de marbre face à la mort ? »

Je comprends que c'est à moi que Catherine s'adresse. Elle me désigne carrément de la pointe de ses lames… Après tout, pourquoi pas ? Je descends donc les marches pour rentrer sur la piste. Je rejoins donc Catherine.

« Ne t'inquiète pas ! Tout ce que tu auras à faire est de ne pas bouger d'un pouce. »

J'acquiesce. Ce n'est pas trop difficile. Faire le soldat de plomb, ce n'est pas la première fois que je joue ce rôle.

Catherine me conduit à côté d'une immense roue et deux aides au spectacle m'y attachent, les jambes écartées et les bras en croix. Je la regarde se préparer, puis lancer quelques couteaux qui se plantent à quelques centimètres de moi. Nouveau lancer, même résultat. Je dois reconnaître qu'elle sait y faire.

« Fais semblant d'avoir peur, sinon le numéro devient ennuyeux ! » me lance-t-elle.

Faire semblant ? Je ne sais pas faire semblant. Et je n'éprouve aucune peur. C'est une professionnelle, et je lui fais confiance. Et puis, si j'avais eu peur de la mort, je me serais gravement trompé de vocation. Je me contente donc de la fixer, impassiblement, attendant patiemment son prochain lancer.

Je vois que Catherine hésite. Elle me regarde sans comprendre. Puis elle se décide. Je sens les projectiles siffler dans l'air, puis se ficher si près de moi qu'une lame m'entaille légèrement la joue. Un filet de sang dégouline, mais rien de bien méchant.

Catherine me jette un regard horrifié. Les deux aides aux spectacles viennent me libérer pendant que la lanceuse de couteaux salue le public. Puis elle m'entraîne dans les coulisses.

« Je suis absolument désolée ! Pourquoi tu ne l'as pas évité ? »

« Tu m'as dit de ne pas bouger. «

Catherine écarquille les yeux puis éclate de rire. Avec un morceau de coton imprégné d'alcool, elle me désinfecte la plaie. Je sens sa chaleur m'envelopper. Etrangement, ça me fait un bien fou.

« Tu sais », commence-t-elle. « On se ressemble beaucoup, je trouve. »

Je fixe ses prunelles avec une lueur interrogatrice. Je me demande ce qu'elle veut dire par là.

« Tu as apparemment perdu toute ta famille puisque tu ne te souviens plus de ton nom. Moi aussi ma famille est morte. J'ai perdu mes parents et mon petit frère à cause de cette guerre. Ou du moins la guerre de l'Alliance à l'époque. Et toi aussi, tu détestes la guerre. »

« Je suis un soldat. Les champs de bataille sont ma raison d'être. »

« Il n'empêche que je sais, je sens que tu détestes la guerre. Mais tu as raison, je peux me tromper. »

Elle me laisse là, avec mes interrogations. Je ne pourrais même pas dire si elle s'est trompée car moi-même je ne sais pas ce que je ressens à ce niveau. Mais ça me fait une piste à creuser. Serait-il possible que je haïsse la guerre ? Comment cette fille peut le savoir ?

Je rejoins le dortoir, pensif. Je n'ai pas le cœur de regarder la suite des numéros. Je profiterai ainsi d'une ou deux heures tout seul dans mon dortoir avant le retour des lieutenants.


Cela fait bientôt une semaine que Heero s'est réveillé et pendant tout ce temps j'ai tenu la promesse que j'avais faite à Catherine. Tous les jours, immanquablement, j'allais donner à manger à Pacha et aux autres animaux sauvages. Souvent, Catherine était avec moi et me faisait la conversation. La plupart du temps, c'était elle qui me racontait sa vie. Mais, j'avoue avoir passer des moments agréables avec elle.

Réveillé à l'aube par la sirène, je me dépêche de m'habiller pour l'inspection. Une fois finie, je vais dans le bureau de Lady Une qui me donne mes instructions.

Comme je l'avais deviné, je dois interroger une nouvelle fois Heero, devant même utiliser la force si nécessaire, le délai de sa soi-disant récupération expiré.

Quand je rentre dans sa chambre capitonnée, Heero reste toujours les yeux fermés, comme endormi. Mais dès que la porte se referme derrière moi, il les ouvre et les pose sur moi.

« Heero Yuy, je suis revenu pour te poser des questions. »

« Ça reste toujours un problème : je ne suis pas disposé à révéler des informations à Oz. »

« Si tu t'obstines, je vais devoir recourir à la force. »

Il ne répond pas mais la signification de son silence est parfaitement claire.

« Très bien. »

Je me relève. Cette fois, je ne pourrai pas le couvrir.

« Tu ne me tortures pas ? »

« Tu as tellement envie d'y passer ? »

« Pas vraiment, mais je ne suis pas en position de choisir… »

« Si tu veux vraiment savoir, je dois faire mon rapport à Lady Une qui programmera sans doute une petite séance de torture à ton intention. »

Heero me jette un regard compréhensif. Il ouvre la bouche, comme s'il hésitait à dire quelque chose, mais il la referme aussitôt. Je me retourne pour sortir.

« J'y ai réfléchi… A la question que tu m'as posé la dernière fois. La raison pour laquelle je me bats. »

Cette fois, il capte mon attention.

« Je me battais vraiment pour les Colonies au début. Mais depuis, je me bats parce que je lui ai promis. Je lui ai promis qu'on se battrait ensemble. »

« … Merci. »

« Mais il a fallu que je trouve quelqu'un à aimer et à protéger. Ne cherche pas la raison de ton combat dans le passé. Trouve-la de toi-même ! Et s'il le faut, construis-la ! »

Je l'observe impassible. C'est quand même la deuxième personne en une semaine qui semblent en savoir plus sur moi que moi-même. C'est assez ennuyeux. Mais encore une fois, il n'a peut-être pas tort. Je me rassoie à côté de lui, chacun gardant le silence.

« N'espère rien ! » me dit Heero. « Je ne dirai rien. J'ai subitement perdu la mémoire… »

« C'est embêtant », je commente.

« N'est-ce pas ? Vous feriez tout aussi bien de me tuer. »

« Je pense que dans ce cas-là, Lady Une prévoira une petite séance d'électrochoc. »

Heero sourit faiblement. J'ai dans l'idée qu'il va bientôt nous fausser compagnie. Je ne sais pas comment je le sais, mais c'est un fait. Il va bientôt s'échapper. Parfois, il m'arrive d'avoir des intuitions. Ça s'impose à moi avec une telle force que toute tentative de rationalisation est vaine.

Je devrais peut-être avertir le Colonel Lady Une de cet état de fait. Mais je n'en éprouve aucune envie. J'abandonne donc Heero et me dirige directement vers le cirque. J'éprouve un besoin urgent de me retrouver près du félin, le dénommé Pacha. C'est ainsi que je me retrouve quelques minutes après, près du lion. En lui grattant la tête, je réfléchis intensément.

Je sens la présence de Catherine dans mon dos.

« Cela doit faire au moins une heure que tu gratouilles Pacha. Alors je t'ai apporté du café. C'est du jus de chaussette mais c'est buvable. »

Elle me tend une tasse remplie du liquide noir. Je la prends en la remerciant. Elle s'assoit à côté de moi en buvant une gorgée. Je l'imite.

« Moi aussi, j'aime bien m'occuper de ces animaux quand je suis soucieuse », me confie-t-elle.

Je garde le silence. De toute façon, qu'est-ce que j'aurais bien pu dire ? D'autant plus que j'ai la désagréable impression qu'elle me connaît mieux que moi-même. J'abandonne Pacha et fixe le ciel d'un bleu limpide.

« Dis-moi Lieutenant, ça te plait tant que ça d'être un soldat de Oz ? »

« Qu'est-ce que je pourrais faire d'autre ? » je demande laconiquement.

Catherine se relève brusquement et me gifle. Elle me jette un regard empli de fureur.

« Tu n'as donc aucune volonté ? » crie-t-elle. « Tu marches, tu parles ! Si tu te blesses, tu saignes ! Ca prouve que t'es humain, non ? Alors comment peux-tu parler comme si tu étais qu'une vulgaire machine à tuer ? Tu es plus que ça ! Il va falloir que tu t'en convainques ! »

Elle commence à s'éloigner, en reprenant en passant ma tasse de café.

« Alors réfléchis à ce que toi tu veux faire ! Et pas à ce qu'on te dit de faire ! » gronde-t-elle avant de disparaître.


Je suis allongé dans mon lit. Toute la journée, les reproches de Catherine m'ont poursuivis. Et pour être franc envers moi-même, j'ai vraiment envie d'essayer de faire ce que je veux faire.

Mais autre chose m'a perturbé. Le fait que cette fille prenne tellement à cœur mon manque d'humanisme. Pourquoi s'inquiète-t-elle autant ? Je crois que je lui rappelle son petit frère qu'elle a perdu. Peut-être s'imagine-t-elle qu'en me « sauvant », dans son esprit, elle le sauverait aussi. En fait, je ne vois pas d'autre explication.

Je rumine donc sur ma couchette quand l'alarme incendie retentit dans tous les bâtiments. Mes camarades se relèvent d'un bond, s'habillent en quatrième vitesse. J'en fais de même. Je m'apprête à les suivre quand une image s'impose à moi. Un visage, des yeux bleus, des traits typiquement asiatique. Heero Yuy, prisonnier dans sa cellule. Et il y a fort à parier, qu'incendie ou pas, ils le laisseront enfermés.

Je m'arrête au milieu de la chambre et ferme les yeux. Qu'est-ce que je veux ? Le sauver. Pourquoi ? Parce que je déteste la guerre. Parce que je ne sais faire que ça. Parce que j'ai l'impression que je ne suis qu'un soldat pour les autres. Et ? Il est absolument clair que Oz continuera la guerre tant qu'il n'aura pas la Terre et les Colonies sous sa coupe.

Cette réalité me foudroie. Je prends mon arme. Direction : l'infirmerie. Je cours dans les couloirs. Je rencontre très peu de soldats. Quand c'est le cas, je leur donne simplement des ordres en prétextant vérifier qu'il n'y a plus personne dans la base.

J'arrive à l'infirmerie. C'est le branle-bas de combat. Des infirmières, des médecins courent dans tous les sens pour évacuer les blessés. Avec toute cette agitation, ils ne font même pas attention à moi. J'approche à grands pas des deux gardes.

« Allez rejoindre les autres ! » je leur ordonne.

« Mais, et le prisonnier ? »

« Il ne peut aller nulle part. Toutefois, si vous tenez à mourir brûlé ici, je peux vous fournir une autorisation spéciale. »

Ni une ni deux, ils me font leur salut militaire et disparaissent de ma vue. Je déverrouille la porte. Heero est toujours attaché sur son lit, toujours aussi impassible. Je m'approche et commence à défaire ses sangles. Heero me jette un regard étonné.

« Je me suis trompé de camp », je lui réponds.

« Ah bon ? »

« Le fruit d'une longue réflexion. »

« J'y suis pour quelque chose ? »

« Non. »

Une fois libre de ses mains, Heero s'arrache la perfusion pendant que je m'attaque aux sangles retenant ses pieds. Totalement libéré, je lui lance une arme.

« Et maintenant ? » me demande-t-il.

« Je… »

« Je vois qu'on a été devancé », constate une voix derrière moi.

Je me retourne pour faire face à un garçon, sans doute de mon âge, blond, qui pointe une arme devant lui. La seule chose à laquelle je pense est que ce genre de chose n'a rien à faire entre ses mains.

« Hein ? » demande une autre voix.

La tête d'un autre garçon natté jaillit d'un coin de la porte. Il me lance un regard mauvais.

« On a intérêt de s'enfuir très vite. Sinon ils vont s'apercevoir de notre petite supercherie », nous dit calmement le blond.

« Quatre, Duo ? Qu'est-ce que vous fichez ici ? » demande Heero, pendant que nous courons dans les couloirs.

« Venu te récupérer, pardi ! » lance le natté comme si c'était une évidence.

« Où va-t-on ? » me demande l'autre garçon.

Je n'en sais absolument rien. Il nous faudrait un allié à l'intérieur de cette base. Catherine ! Le cirque.

« Suivez-moi ! J'ai une petite idée. »

Le pilote blond hoche la tête. Je les fais passer par les endroits les moins susceptibles de rencontrer un soldat. Mais quand la malchance s'en mêle, je joue mon rôle de Lieutenant en grondant mes subordonnés d'être encore à l'intérieur du bâtiment.

Je fais passer les pilotes par le réfectoire, les cuisines, puis nous nous mettons à courir vers les caravanes des gens du cirque. J'avais oublié qu'ils devaient partir ce soir-là. Tant mieux, notre fuite n'en sera plus que rapide.

Je repère Catherine et le directeur du cirque près de Pacha, qui rugit de mécontentement. Enfin, elle s'aperçoit de notre présence à tous les quatre.

« Lieutenant ? »

« Catherine ! J'ai besoin de ton aide pour sortir sans se faire repérer… »

Elle hoche précipitamment la tête et se tourne vers le directeur.

« Le problème Cathy est qu'ils risquent de les découvrir s'ils fouillent les caravanes », rétorque le directeur.

« Mais ils ne vont pas fouiller les cages aux animaux… »

Elle me lance un regard en coin. J'hoche la tête. J'ai compris. Je déverrouille la porte et entre dans la cage de Pacha. Celui-ci se mit à rugir de plus belle.

« Viens-là ! » je lui ordonne.

Le lion me défie, je le sais. Mais finalement, il va se coucher tranquillement dans un coin de la cage. Il accepte qu'on envahisse son territoire. Sans perdre plus de temps, je fais signe aux autres pilotes de grimper à leur tour. Le blond y entre suivit de près par Heero. Le pilote natté hésite avant de s'engouffrer dans la cage. Il jette un regard méfiant à Pacha avant de s'asseoir complètement à l'opposé du félin.

Catherine et le directeur referment la cage puis rabattent la protection devant les barreaux. Une faible lueur pénètre difficilement dans la cage. De petits trous d'aération s'éparpillent ça et là.

J'entends le natté grogner. Puis le camion se mit en route.

« Elle est bien nourrit cette bestiole, au moins ? Parce que c'est pas pour finir bouffer par un gros matou que j'ai voulu libérer Heero », bougonne le natté.

« Duo ! » grogne Heero.

« Si ça peut te rassurer, pendant toute la semaine, c'est moi qui l'ai nourrit… »

Le dénommé Duo marmonne quelque chose mais se tait. Le camion stoppe. J'entends vaguement des voix à l'extérieur. La voix de Catherine, celle du directeur puis une autre inconnue. Sûrement celle d'un soldat.

« Et là ? Qu'y a-t-il ? » demande-t-il.

« C'est la cage d'un lion mâle », répond le directeur.

« Ouvrez-la ! »

« Je ne vous le conseille pas », dit Catherine. « Pacha est vraiment grognon quand on part en voyage. Si vous voulez éviter de vous faire arracher la tête… »

« Vous êtes des dresseurs oui ou non ? »

« Non », répond-t-elle. « Moi, je ne suis qu'une simple lanceuse de couteau. »

« Allez me chercher le dresseur alors ! » ordonne le soldat exaspéré.

« Il est en quarantaine dans sa chambre. Une maladie infectieuse. Apparemment contagieuse. »

« Alors qu'est-ce qui me prouve qu'il y a bien un lion à l'intérieur ? »

« Facile. Pacha ? » l'appelle-t-elle.

Pacha relève la tête. Du coin de l'œil, je vois Duo se recroqueviller un peu plus contre le mur, le regard méfiant. Heero et Quatre se tiennent immobile. Moi je m'approche de Pacha. Catherine n'arrête pas de l'appeler mais le félin ne se décide pas à rugir. Je gratte les oreilles de l'animal.

« Il va falloir m'aider mon vieux. Fais-nous attendre ta belle voix ! » je lui chuchote.

« Ouvrez-moi cette cage ! » hurle le soldat.

Je ne sais pas ce qui a fait le plus réagir Pacha, mais celui-ci se mit à pousser des rugissements colériques.

« Alors, vous nous croyez maintenant ? » demande Catherine, un peu énervée, entre deux rugissements.

« Allez, dépêchez-vous de déguerpir ! »

J'entends le soldat s'éloigner en aboyant des ordres. Pacha se calme soudain, s'allonge pour dormir.

« Tout va bien ? » demande Catherine à travers l'un des trous d'aération.

« Aucun problème. »

Je m'éloigne et vais m'asseoir avec les autres.

« Merci », me dit donc Quatre, assis à côté de moi. « Je ne sais pas pourquoi tu nous as aidé mais, merci. »

« Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? » me demande Heero.

« Je te l'ai dit : une intense réflexion. »

« Tu as trouvé ta raison ? »

« Non. »

« … »

« Au fait, moi, je suis Quatre Raberba Winner. »

« Et moi Duo Maxwell. »

« Je n'ai pas de nom. »

Quatre se contente d'acquiescer et Duo me regarde avec beaucoup moins d'hostilité tout d'un coup.

Le voyage se passe en silence. Au bout de quelques heures, le camion s'arrête. Puis la protection s'abaisse, la brusque lumière du jour nous éblouissant violemment. A travers les doigts de ma main, je distingue les silhouettes de Catherine et du directeur. Ils déverrouillent la porte de la cage. Duo en profite pour en sortir. Heero, Quatre et moi-même le suivons.

Le camion s'est arrêté près de la route qui borde une falaise.

« Je suis désolé de vous abandonner ici, mais nous sommes près de la frontière. Les soldats fouilleront nos camions de fond en comble. Pacha en colère ou pas Pacha en colère. »

« Ce n'est pas grave », le rassure Quatre. « Vous en avez déjà fait beaucoup. »

« J'aurai aimé faire plus… »

Catherine s'approche de moi avec quatre sacs à dos qu'elle me tend.

« J'y ai mis de quoi manger pour quelques jours. Des bouteilles d'eau. Et quatre couvertures. »

« Ça ira. Merci Catherine. »

« Après ce que j'ai fait pour toi, tu pourrais au moins m'appeler Cathy, comme tout le monde, non ? »

« Merci Cathy », je répète.

« Prends soin de toi, petit frère ! » me dit gentiment Cathy en me serrant dans ses bras.

« Petit frère ? »

« J'en ai perdu un, et j'en ai trouvé un autre. Et celui-là, je ne compte pas le perdre. »

Elle me relâche enfin. Elle remonte avec le directeur dans le camion, qui, quelques minutes plus tard, s'éloigne. Pendant quelques instants, nous entendons que le rugissement de Pacha. Je me saisis d'un sac à dos et en passe un aux trois autres.

« Tu n'étais pas obligé de venir avec nous », me dit Heero.

« Je dois être moi aussi recherché pas Oz pour désertion et, s'ils découvrent mon implication dans ton évasion, pour trahison. »

« Raison de plus pour rester loin de nous », s'inquiète Quatre. « Tu risques bien plus en restant. »

« Ce n'est pas un problème. Je ne me ferai pas prendre. Ni vous. Et je ne crains pas la mort. Alors, il n'y a pas de problème. »

« La nuit ne va pas tarder à tomber. Nous ferions mieux de nous trouver un coin où dormir… », nous informe Duo.

Tout le monde acquiesce à l'unisson.

« J'ai passé beaucoup de temps près de ce genre de montagne, il y a forcément une petite grotte, ou au moins, un petit abri rocheux. »

« Le tout est de savoir où… »

Heero s'approche de la paroi rocheuse qu'il commence à gravir. Duo soupire et le suit. Je me mets aussi à grimper le long de la paroi. Quatre doit sûrement être derrière moi. On grimpe jusqu'à une corniche assez large pour tous nous y accueillir. Au dessus, un rocher surplombe la saillie créant ainsi un petit abri. Je pose mes deux pieds sur la corniche et me retourne pour aider Quatre à grimper. Je lui tends la main. Celui-ci la prend avec un chaleureux sourire.

« Merci », me dit-il.

Depuis quelques temps, il n'arrête pas de me remercier. Ça va finir par en devenir gênant. Nous déposons nos sacs. Duo s'étire nonchalamment en regardant en bas de la falaise.

« Pff ! On a fait une sacrée trotte. Dis Quatre, si je crie, tu crois qu'on m'entendra ? »

« Il y a de forte chance… Pourquoi ? »

« Tant pis. Je vais quand même crier. Ça fait trop longtemps que je me retiens… »

« Heu… Duo... »

J'observe la scène. Les joues de Duo commencent à s'empourprer tandis que Quatre est visiblement paniqué. Il lance de fréquent coup d'œil à Heero. Celui-ci est d'ailleurs entrain de fouiller dans son sac à la recherche de ne je sais quoi. Quant à moi, je m'adosse à la paroi.

« Heero », ronronne Duo.

Heero se retourne assez ennuyé. Il doit d'ailleurs s'apprêter à riposter mais il est stoppé net dans son élan. Duo s'approche de lui calmement. Quatre soupire bruyamment à côté de moi. Duo pose ses deux mains sur les épaules de Heero en baissant la tête.

« Duo ? » demande Heero, incertain.

Ah ! Heero, Heero, Heero…

Il le pousse brusquement contre la paroi.

« COMBIEN DE FOIS FAUDRA-T-IL QUE JE TE LE REPETE ? JE T'INTERDIS D'ESSAYER DE TE TUER ! »

« Ça va Duo ! » rouspète Heero. « Je ne suis pas mort. »

« Non, c'est vrai. Mais tu as failli… Et tu avais promis… »

Duo pousse une nouvelle fois Heero violemment contre la paroi puis s'éloigne en donnant des coups de pieds dans chaque cailloux. Lorsqu'il disparaît de mon champ de vision, Quatre secoue la tête, d'un air résigné.

« Heero, tu devrais aller lui parler », lui suggère-t-il.

« J'ai autre à faire que courir après ce baka. »

« C'est possible. Il vaut mieux le laisser seul… »

Puis il se tourne vers moi et me fait un clin d'œil avec un sourire manipulateur.

« Ne t'inquiète pas ! Il va juste hurler un bon coup. J'espère seulement que des soldats ne passeront pas dans le coin… »

Je ne comprends pas. Pourquoi me raconte-t-il ça ? Je ne m'inquiète pas le moins du monde pour ce garçon. Et c'est pas ma physionomie qui m'a trahi puisque depuis mon plus jeune âge, je fais toujours en sorte de cacher le moindre sentiment.

« Ok, j'y vais », décide abruptement Heero.

Il s'éloigne en prenant la direction où était parti Duo. Le sourire de Quatre s'agrandit.

« Ça marche à tout les coups », me révèle-t-il.

Quatre et moi restons dons seuls. Je n'ai jamais été très doué pour faire la conversation. Généralement, ce sont les autres qui entamaient les conversations, comme l'a fait Catherine.

J'observe le paysage. Quatre s'affaire derrière moi.

« Nous allons devoir établir des tours de garde. On ne sait jamais. Faudra aussi éviter d'allumer un feu de camp. »

« Et qu'allez-vous faire, maintenant ? »

« Je n'en sais trop rien. Nous n'avons plus eu d'ordre de mission depuis. Tant que Lady Une menacera les Colonies, nous ne pourrons rien faire. »

« Je vois. Mais j'ai entendu dire qu'elle avait été sévèrement réprimandée par Treize Kushrénada. Je ne pense pas que cette menace soit encore d'actualité. »

« Ça, c'est bon à savoir. Et toi, que comptes-tu faire ? »

« Sans doute partir dans l'espace. Les rebelles ont peut-être besoin d'aide. »

Quatre reste silencieux. Il m'observe attentivement. Je ne le connais pas beaucoup mais j'ai la vague impression qu'il complote quelque chose.

« Comment es-tu devenu un soldat de Oz ? » demande-t-il en changeant de sujet.

Bon, je ne saurais pas ce qu'il a imaginé. Je suppose que c'est mieux comme ça.

« Avant j'étais un mercenaire qui combattait l'Alliance Terrestre. Une suite logique en quelque sorte… »

Quatre hoche la tête en signe de compréhension.

« Je crois qu'on va quand même tenter un petit feu. S'il n'est pas trop grand, si on le cache suffisamment… »

« Inutile »

Je fouille dans mon sac à dos et sors le réchaud à camping qui m'avait labouré le dos pendant toute l'ascension. Je m'empare aussi du briquet et les brandit. Quatre hoche la tête avec vigueur et éclate d'un petit rire.

« J'adore ta sœur ! » s'exclame Quatre.

« Ce n'est pas ma sœur… », je reprends.

« C'est tout comme. Et je sais de quoi je parle. J'ai 29 sœurs éparpillées sur Terre et dans les Colonies. »

J'hausse un sourcil vaguement étonné. 29 sœurs ? Il se souvient du nom de chacune d'entre elle ? (1)

Quatre s'empare du réchaud et l'allume, puis il y pose dessus une casserole remplit d'eau. J'observe Quatre à la dérobée. Lui, un pilote ? Un redoutable pilote de Gundam ? Quelqu'un capable de tuer de sang-froid ? Je ne sais pas pourquoi mais, je n'y crois pas une seule seconde. Et pourtant…

Ce garçon semble plein de surprise. Il a aussi cette façon de me regarder… Cela me gêne beaucoup. Comme s'il pouvait lire en moi. Comme s'il pouvait sonder mon âme. Si c'est le cas, il ne va pas y trouver grand-chose. Mais ça reste assez perturbant. Et je me fais aussi peut-être des idées. Après tout, Heero et Catherine ont réussi à lire en moi assez facilement. Peut-être ne suis-je pas aussi impassible que j'essaye de le faire paraître. Il faut aussi rajouter que jusqu'à aujourd'hui, très peu de personnes ont essayé de me connaître réellement. Ma barrière, mon indifférence en rebutent plus d'un. Eux deux seuls ont réussi à percer un peu la brume qui entoure mon âme. Et il se pourrait que Quatre s'y essaye aussi. Pourquoi me porte-t-on ce soudain intérêt ?

Le petit blond cesse de s'affairer autour du réchaud, le temps que l'eau puisse bouillir. Il me rend mon regard scrutateur et m'adresse un sourire bienveillant.

Je détourne brusquement mes yeux vers le ciel qui commencent à s'étoiler. Sans m'en rendre compte, j'avais fixé intensément ce drôle de garçon. Et de toute ma vie, je n'avais jamais scruté quelqu'un comme ça. J'espère qu'il ne le prendra pas à mal. Décidément, ces derniers temps, rien ne tourne rond, à commencer par moi, qui plaque absolument tout pour essayer de vivre pour moi-même.

« Ils ne reviennent pas tes copains ? » je demande pour faire baisser cette tension qu'il y a dans l'air.

Je ne sais pas ce que cette atmosphère signifie. Je ne sais pas de quoi il s'agit mais c'est… nouveau. Et perturbant, je dirais. Une atmosphère que je n'ai jamais vécue…

Quatre éclate de rire.

« Et bien… Je suppose qu'ils se réconcilient… » me répond Quatre avec un air mystérieux sur le visage.

« Ils en mettent du temps. On devrait peut-être aller à leur recherche. Si Oz les a capturé… »

« Oh non ! Ce n'est absolument pas nécessaire. »

Quatre rigole franchement. Je ne vois vraiment pas ce qu'il y a de drôle dans cette histoire. C'est sérieux. Si Oz les a repéré, ils ne vont pas tarder à nous retrouver. Dans le cas contraire, il serait préférable que l'on reste groupé. C'est plus efficace pour se battre. Enfin, je crois… Quoique… Quand j'étais encore chez Oz, j'avais parfois des boulets à la place de soldats de valeur. Et sur un champ de bataille, ce n'est pas souvent une partie de plaisir avec la première catégorie de pilote. Remarque, quelque soit le niveau des pilotes sous mes ordres, ce n'est jamais une partie de plaisir… Mais, il me semble que pour notre survie en ce moment, le regroupement est une meilleure stratégie que de se séparer.

Mais je ne comprends toujours pas pourquoi le petit blond trouve ça amusant. Je ne dois pas avoir toutes les données. Quatre s'arrête brusquement de rire quand nos yeux se croisent. Il prit un air contrit.

« Désolé. C'est juste que… Je te rassure, ils sont ensemble et ils vont bien. D'ailleurs, ils ne devraient pas tarder… »

Quatre me sourit à nouveau. Je me rends compte, pour en avoir été souvent bénéficiaire, qu'il sourit souvent. Toutefois, j'y détecte toujours une pointe de tristesse. Je ne sais pas. Ses yeux peut-être… mais j'y perçois aussi beaucoup de force, de volonté, de charisme. C'est étrange. Si je ne savais pas qu'il était un pilote de Gundam, j'aurai plutôt pensé qu'il devait être PDG d'une grande entreprise, ou peut-être un leader politique prônant le pacifisme. Car, la douceur de ses traits, son teint clair, ses yeux incroyablement bleus, cette impression de pureté… Il se dégage clairement de lui une aura protectrice, du plus profond calme. En aucun cas, je n'aurai pensé de lui comme une personne capable de tuer, même pour se défendre. Comme quoi, la guerre bouleverse énormément les vies.

Si ma vie n'avait pas rencontré la guerre, je serais où ? Je serais comment ? Je serais avec qui ? Un frère ? Une sœur ? 29 sœurs ? Une sœur comme Catherine ? Tout est possible, je présume. Si ça se trouve, ma vie aurait été encore plus misérable. Mais le fait est là. La guerre a eu lieu. Et me voici sous un rocher avec Quatre, pilote de Gundam. Entrain de le contempler encore une fois, accroché à ses prunelles.

Cette fois, c'est Quatre qui se détourne. Il s'approche des couvertures et commence à les déplier. Je regarde quant à moi, le paysage. Le soleil a maintenant complètement disparu sous la ligne d'horizon. Mais il y avait encore suffisamment de lumière pour apercevoir deux silhouettes s'avancer vers nous.

« Vous voilà enfin ! » s'exclame Quatre sans se retourner. « Un peu plus et on partait vous chercher… »

« Disons que Heero a pris son temps pour se faire pardonner », répond du tac au tac une voix qui ressemble à Duo.

La silhouette qui doit donc être Heero, le frappe à la tête.

« Aïe ! »

« Baka. »

Un regard et un sourire complice semblant les lier. J'ai la vague impression qu'ils sont très proche tous les deux. Je ne saurais pas définir exactement la nature de leur relation. Tout ce que je peux dire, c'est qu'ils sont bien plus que de simple camarade.

Je ressens aussi un puissant lien entre Quatre et chacun de ces 2 pilotes. Je dirai qu'il doit être la voix de la sagesse. Heero a beau être un pilote exceptionnel, peut-être même le meilleur, mais Quatre, à sa manière, doit certainement les avoir rendu plus fort qu'ils ne le sont déjà. Comment puis-je savoir tout ça ? Seulement en le regardant. C'est comme ce matin. C'est une certitude qui s'impose à moi, absolument indéniable.

Quatre doit énormément s'occuper des autres. C'est une autre certitude, mais celle-ci parait beaucoup plus naturelle. Mais et lui ? Qui s'occupe de lui ?

Je secoue la tête. Pourquoi je m'en fais autant ? Pourquoi ? Pourquoi lui et pas Heero ? Ou bien Catherine ? Pourquoi est-ce que je ne m'inquiète pas pour Catherine qui risque bien plus que nous ?

Ah non ! Ça y est ! Pour le coup je me fais du souci pour elle aussi. Pour les gens du cirque. J'espère qu'ils ont pu franchir la frontière sans problème.

C'est étrange. Je ne me suis jamais fait de souci pour qui que ce soit depuis mon plus jeune âge. Et maintenant, on dirait que je rattrape mes 15 années sans aucun tracas majeur d'un coup. Je fronce les sourcils. Tous ces changements vont un peu trop vite à mon goût…

Une main se pose sur mon bras. Je pivote vers le propriétaire de cette main.

« Ne t'inquiète pas ! Je suis sûr qu'ils vont bien », me rassure Quatre.

C'est bien ce que je pensais. Ce garçon doit sans doute carrément lire dans les pensées. Ce qui serait plutôt gênant dans la mesure où je n'ai quasiment pensé qu'à lui… Mais, il est légitime que je m'interroge, non ?

Pour arrêter de penser à quoique ce soit, je jette les pâtes à la carbonara lyophilisés dans l'eau frémissante. Heero et Duo s'asseyent autour du feu. Quatre nous rejoint.

« Il va falloir établir des tours de garde », nous informe Heero.

« Que fait-on à l'aube ? » demande Duo avec sérieux.

« Nous ne sommes pas loin de la frontière. Si nous arrivons à la traverser, l'unité Maganac pourrait nous récupérer. »

Heero fronce les sourcils, indécis.

« T'inquiète ! Ils sont cool », lui garantit Duo. « Ils nous ont bien aidés Quat-chan et moi. »

Quat-chan ?

« Une question. Où est Trowa ? »

Quatre et Duo se regardent. Duo fait une grimace et Quatre soupire.

« Disparu », répond Duo. « Après la bataille en Sibérie, il a complètement disparu. Aucune nouvelle. »

« Il s'est peut-être caché. »

« Non, il a laissé son Heavyarms. Une équipe de Oz avait repéré son armure. Avant qu'ils avertissent les autres, nous avons récupéré le Gundam… »

« Vous voulez dire qu'il a disparu et qu'il a laissé son Gundam derrière lui et intact ? » veut s'assurer Heero, incrédule.

Duo et Quatre hochent la tête.

« Mais, je le trouverais », affirme Quatre.

« Comment ? » demande Duo.

« Je ne peux rien dire pour le moment. Il faut juste que je confirme quelque chose avant. »

Il me lance un regard assez mystérieux. Je ne vois pas ce que je pourrais faire. Je ne peux absolument pas l'aider. Tout ce que je peux dire sur ce prétendu Trowa, si c'est bien celui que je crois, est qu'il se bat très bien. Pour l'avoir affronté, c'est tout ce que je peux dire.

« Peu importe », déclare Heero, le visage sombre. « Nous n'avons pas besoin d'un pilote qui est capable d'abandonner son Gundam au premier venu. On ne peut plus compter sur lui. »

« Heero a raison », confirme Duo. « Rien que son attitude à la base de New-Edwards prouve que ce type n'était pas assez fort pour supporter le fardeau qui est le notre. »

« Je ne sais pas exactement ce qui s'est passé. Mais on ne peut pas lui en vouloir… Mais je vous promets de ramener Trowa. »

« Laisse tomber Quatre ! Il serait un poids pour nous… »

Quatre hoche la tête en signe d'affirmation. Je ne le connais pas bien mais j'ai dans l'idée qu'il ne va pas du tout laisser tomber. Malgré son visage d'ange, il m'a l'air d'être quelqu'un de très obstiné. Alors que je le fixe encore une fois, sans m'en rendre compte, il me sourit.

Pourquoi cela m'apaise ? Pourquoi mon cœur s'emballe à chaque fois que le coin de ses lèvres remonte ? Pourquoi ai-je cette subite envie de savoir sourire moi aussi ?

Le reste du repas, je me concentre très fort sur mes pâtes en écoutant la conversation des trois pilotes. Quatre et Duo sont entrain de raconter à Heero ce qu'il s'est passé pendant les trois mois de son coma. Puis nous décidons de qui effectuerait les tours de garde. J'ai insisté pour prendre le premier quart. Et d'après ce que j'ai compris, Heero me remplacerait, suivit de Duo puis de Quatre.


Je regarde la lune, le premier quartier si je ne m'abuse. La nuit est fraîche, agréable. J'entends derrière moi Duo marmonner dans son sommeil. Heero, qui dort près de lui, lui intime en chuchotant de se taire. Après une bonne dizaine de minute sans aucun résultat, je suppose qu'il a du trouver un moyen puisque je n'entends maintenant plus rien. Quatre ne bouge pas d'un pouce. Quelle erreur ! De croire qu'il puisse être faible. Tout son être, sa physionomie, sa façon de dormir enroulé dans son sac, indique une certaine fragilité. Et pourtant…

Je me concentre à nouveau sur la lune. Ce genre de situation est vraiment propice à l'introspection. Il ne me faut pas longtemps pour me rendre compte que je ressens quelque chose pour Quatre. Il y a quelque chose que je ne retrouve pas chez Heero et Duo. Mes sensations envers eux ne sont pas du tout les même. Je suis sûr que si Catherine était là, elle m'aurait dit ce que c'est. C'est étrange. Je me suis habitué à elle beaucoup plus vite et beaucoup plus que je ne pensais. C'est étrange mais pas désagréable. Je me rends compte qu'elle a prit naturellement une grande place dans ma vie. Et ce que je ressens pour elle est tout aussi différent.

Après une heure d'intense réflexion, j'en suis arrivé à cette conclusion. Je ne sais toujours pas pourquoi, ni comment, mais c'est devenu clair. Je veux que Quatre arrête cette guerre. Je veux voir disparaître cette tristesse tapie au fond de ses prunelles. Je veux le voir sourire franchement. Je veux… Je veux, je veux. C'est incroyable à quelle vitesse j'ai pu m'affirmer. Il y a quelques heures, je n'avais aucune volonté propre. Je ne savais même pas ce que moi, je voulais. Il a suffit que Catherine passe par là pour vouloir.

Mais je me rends compte que c'est ridicule. La conclusion de tout ça, est que je veux le protéger de tout ce qui le fait souffrir. Car il souffre, j'en suis certain. Et cette guerre y est pour quelque chose. Je veux le protéger. Mais c'est ridicule de vouloir protéger quelqu'un qui n'en a pas besoin. Je suppose qu'à cause de ce grand chambardement, j'ai reporté ma volonté de protection sur la première personne qui me paraissait faible. Mais pourquoi cela ne s'est pas reporté sur Catherine ? Finalement, éprouver des sentiments, c'est assez ennuyeux. Je comprends de moins en moins mes propres réactions. Avant tout était bien plus simple…

Une main se pose sur mon épaule.

« Va te coucher ! C'est mon tour », m'annonce Heero.

J'hoche la tête.

« Tu ferais mieux de dormir près de Quatre, m'informe Heero. Ce baka natté est intenable quand il dort. Même quand il ne dort pas d'ailleurs… Il a la bougeotte et s'agrippe à toi comme on s'agrippe à une bouée… »

« Et ça ne te dérange pas ? »

« Non. »

Il s'éloigne un peu, sans doute pour vérifier les alentours. Puis il vient s'asseoir là où j'étais. Je passe devant Duo qui grogne et agrippe son sac. Heero a peut-être raison. Ça ne vaut sûrement pas le coup de mourir étouffé de cette manière. J'avance donc vers Quatre. Celui-ci m'entend sans doute arriver car il se lève et me tend une couverture.

Je me glisse sous ma couverture près du petit blond. Et voilà mon cœur qui se met à battre à un rythme effréné. Je ne savais pas qu'il pouvait battre aussi vite. Comme quoi le fruit de mes réflexions n'est pas totalement faux.

Je contemple la voûte céleste en attendant que je me calme. J'aperçois soudain une ombre s'avancer vers Heero. Une natte se balance au gré des pas de la silhouette. Duo. Il enserre la taille de Heero qui n'a pas bougé, et s'appuie contre son dos. Je les entends chuchoter.

« Tu devrais dormir Duo. Après c'est ton tour… »

« Je n'y arrive pas. »

« Menteur. »

« … Tu sais, je pense à Trowa. Je me demandais ce que j'aurais fait si j'avais été à sa place. Tu sais, si tu n'avais pas été là… »

« Tu te serais battu, Duo. »

« Tu crois ? J'en suis pas si sûr. Je ne me suis jamais battu pour rien ou pour un idéal. Avec mon gang, je me suis battu pour survivre et protéger mes gars. Je me suis battu pour sœur Helen et le Père Maxwell. Et maintenant, je me bats pour toi et avec toi… Alors, si… »

« Duo, je suis là. Ça ne sert à rien de se poser la question. »

« Oui. Tu as probablement raison. »

« Retourne te coucher ! »

« Non. Je vais faire le guet avec toi. »

« Je peux le faire seul. »

« C'est plus marrant à deux. Et puis c'est rare de se retrouver seul. »

« Presque. »

« Bof ! Quat-chan est plus qu'au courant pour notre relation puisqu'il a été le premier à le savoir. Et le Lieutenant, ça ne le perturbera pas. Et puis, si ça le perturbe, m'en fiche ! »

« Comme tu veux. »

« Non, toi, qu'est-ce que tu veux ? »

« … Reste. »

Je n'entends plus rien. Et Duo a tout à fait tort. Cette histoire me perturbe. Leur histoire me perturbe. Ainsi, la personne que Heero a choisi d'aimer et de protéger est cet exubérant natté, un pilote de Gundam. Une personne capable de se battre et de se défendre toute seule. L'idée que, quelques minutes plus tôt, je trouvais irrationnelle, elle ne serait donc pas si absurde ?


On est partit à l'aube. Nous faisons tout pour rester le plus longtemps possible à couvert. Ce n'était pas facile au début puisqu'il n'y avait rien pour nous couvrir hormis quelques blocs de rochers. Enfin, les couvertures couleur sable nous ont camouflés un minimum. Heureusement, vers le milieu de la matinée, nous sommes arrivés à l'orée d'une petite forêt de conifères. Les pins sont assez espacés entre eux mais c'est toujours ça de prit. Nous déambulons à la file indienne, Quatre ouvrant la marche et Heero la fermant.

Ce matin je les ai entendu parler. Ils devaient penser que je dormais. Duo s'était inquiété de me savoir avec eux. En quelque sorte, il ne me faisait pas encore totalement confiance. Je pouvais être encore un soldat au service de Oz pour les suivre jusqu'à leur Gundam. J'avoue que ces soupçons ne sont pas infondés. Moi, dans une situation identique, je ne sais pas si je leur aurais fait confiance. Heero n'avait rien dit. J'ai imaginé sans peine son visage crispé par la concentration, les sourcils froncés, ses lèvres ne formant qu'une seule ligne. Mais ce qui m'a le plus surprit c'est la réaction de Quatre. « Je crois en lui. » avait-il simplement dit. Et le débat avait été clos. Seul Duo avait rajouté un « puisque c'est toi qui le dit… » enthousiaste et vaguement soulagé. Je me pose encore des questions à son sujet. D'habitude je n'accorde pas autant d'intérêt à une personne mais Quatre bat tous les records. Je ne comprends absolument plus rien et il faudrait aussi ajouter que je ne fais aucun effort pour que la situation s'éclaircisse. Je suppose que le moment venu, je comprendrais…

Nous nous arrêtons pour manger quelque chose et boire un peu. Puis sans attendre un peu plus, nous reprenons notre marche. Si j'en crois la position du soleil, je dirai que nous nous dirigeons vers l'ouest. Vers le milieu de l'après-midi, nous sortons du couvert des bois pour retrouver face à de petits arbustes rabougris. Le sol commence à se recouvrir de sable. Et nous remettons les couvertures sur nos têtes.

« A partir de là, c'est désert à perte de vue », nous informe Quatre.

« Tu sais où nous sommes ? » demande Duo.

« Pas au kilomètre près, mais oui. Nous devrions peut-être rester sous les arbres pour nous reposer. Il vaut mieux voyager de nuit. »

« On est à combien de la frontière ? » s'enquit Heero.

« Si on ne l'a pas déjà dépassé, on y est. Mais il faut nous en éloigner pour Rachid puisse venir nous chercher. »

« Dans ce cas, un peu de repos sera pas de refus. Il fait une chaleur à en crever ici ! »

Nous revenons donc sous les pins puis nous nous reposons. Je crois bien que je me suis endormis parce que quand j'ouvre les yeux, le soleil se couche déjà. Soudain une gourde envahit mon champ de vision.

« Bois un peu ! » me conseille Quatre. « Nous n'allons pas tarder à partir. »

J'hoche la tête en guise de remerciement et boit une gorgée. Puis Heero sonne l'heure du départ. Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé mais au bout d'un moment, une armure mobile nous barre la route.

« Quatre-sama ! » j'entends par les haut-parleurs.

« Rachid ! Merci d'être venu… »

Une jeep s'approche de nous. Une homme portant moustache et toque rouge se gare près de nous.

« Quatre-sama ! Je suis content de vous savoir en vie ! Duo-kun ! Vous êtes toujours le bienvenue ! »

« Quatre-sama ! Montez vite ! Le coin n'est pas sûr. »

« A toute à l'heure Rachid ! »

Nous grimpons dans la jeep. Ils l'ont appelé Quatre-sama ? Quatre est-il quelqu'un de si important pour eux ? Et puis, je croyais que les pilotes de Gundam se battaient seuls. Apparemment ce n'est pas le cas pour Quatre. Quand je disais qu'il avait du charisme, je ne m'étais pas trompé. Il est capable de rallier les gens à sa cause. Je ne sais pas si tous les pilotes sont comme lui mais je comprends pourquoi ils sont tant redoutés. Il est clair que Heero, force le respect pour sa détermination ; Duo, pour son sens de l'amitié et sa loyauté ; Quatre pour son charisme. Je me demande comment sont les deux autres.

Nous arrivons à la base souterraine de l'unité Maganac. La soirée se déroule tellement vite que je me retrouve allongé sur un lit, dans une chambre de la base. Je me souviens à peine de ce que j'ai mangé pendant le banquet organisé en l'honneur de Quatre-sama, Duo-kun et Heero-kun. Moi aussi j'ai eu droit aux honneurs il me semble. Mais ça m'est égal ce genre de considération. Je regarde donc le plafond de ma nouvelle chambre. Pour combien de temps ? Je n'en sais rien.

Ma porte s'ouvre sur un Quatre se mordant la lèvre. Lorsqu'il la referme, il éclate d'un petit rire.

« Que se passe-t-il ? » je demande au bout d'un moment.

« Ce n'est rien… il se trouve que Duo et moi on a eu à peu près la même idée. Peu importe. Viens avec moi, j'ai quelque chose à te montrer ! »

Il me tend la main pour m'aider à me relever. Je la saisi et mon cœur recommence son exercice de batterie. Une fois debout, il me la tient toujours avec un petit sourire timide. Finalement, il la lâche. Grosse douleur à la poitrine, comme de la… déception ? Etant donné que je ne suis pas près de saisir, de mettre des mots sur ce que je ressens, je me contente donc d'établir une liste mentale de leurs effets somatiques. Un rythme cardiaque qui s'accélère est facile à détecter. Ce que ça peut bien vouloir dire reste un mystère.

Je suis donc Quatre à travers la base. On arrive devant une immense porte. Celle-ci s'ouvre et je me retrouve aux pieds de trois Gundams. Il m'amène vers un Gundam rouge, le 03, celui que j'ai affronté en Sibérie.

« Voici Heavyarms ! A côté c'est Sandrock, mon Gundam. Et là-bas, c'est Deathscythe, le Gundam de Duo. »

« C'est drôle. Celui-là nous l'appelons 03, le tien 04 et celui de Duo, 02. Heero, 01 et le dernier 05. »

Quatre éclate de rire.

« Ça c'est bien Oz ! Il ont aucun idée de notre identité pourtant ils connaissent déjà nos noms sans le savoir. C'est assez ironique. »

« Je trouve aussi. »

Quatre redevient subitement sérieux. Il me regarde droit dans les yeux.

« Que comptes-tu faire exactement après ? Je veux dire, une fois que tu seras dans l'espace. »

« Je suppose que je vais combattre Oz. Je vais sans soute aider les rebelles. »

« C'est une bonne idée. En plus je connais un groupe de rebelle qui ont bien besoin d'aide en ce moment. Si tu es prêt à les aider… »

« Je ne me suis pas fixé d'autre but en ce moment. »

Quatre me scrute attentivement, comme pour se convaincre qu'il avait fait le bon choix. Mais qu'est-ce que je raconte ? Comment pourrais-je le savoir ?

« Je leur parlerai de toi si tu veux. Ils sont encore sur Terre mais ils vont bientôt partir dans l'espace. »

Je ne dis rien. J'hoche simplement la tête.

« Ils s'appellent Heero Yuy, Duo Maxwell, Quatre Raberba Winner et Wufei Chang. Tu veux toujours les aider ? »

Je le regarde droit dans les yeux. Il plaisante ? Non. Il est très sérieux.

« Ce que tu me proposes, c'est de me joindre à vous… »

« Exactement. »

« Je n'ai pas de Gundam… »

« Non seulement je te propose un Gundam, mais aussi un nom. »

« Pardon ? »

« Le pilote de Heavyarms s'appelait Trowa Barton. Et il se trouve qu'il avait lui aussi emprunté ce nom. Tout comme Heero et Duo. Heero Yuy est, comme tu dois le savoir, le nom du leader pacifiste. Duo, c'est un peu plus compliqué… Alors acceptes-tu de devenir Trowa Barton pilote du Heavyarms ? »

J'hésite. La proposition est tentante. Mais…

« Pourquoi moi ? »

« Tu n'as jamais eu de ces intuitions, ces vérités qui s'imposent à toi, avec tellement de puissance que tu ne peux absolument pas l'ignorer. »

Je vois exactement ce qu'il veut dire. C'est la même chose qui s'est produit avec Heero et Quatre.

« A chaque fois que je te regarde, c'est ce que je vois. A chaque fois que nos regards se croisent, je sais. Tu es un pilote de Gundam. Et tu aurais dû l'être depuis le début. Je ne peux pas me l'expliquer, mais c'est ce que je ressens. Ta place est auprès de nous, en tant que pilote. »

Je reste silencieux. Quatre se rapproche de moi et me prendre une main dans les siennes. Battements de cœur à un rythme effréné.

« Je sais bien que tu dois y réfléchir. Je comprends. Mais laisse-moi te dire une dernière chose : si tu vas dans l'espace, tu ne trouveras aucun groupe rebelle contre Oz. Les colonies vont bientôt nous tourner le dos. C'est pour ça que nous devons repartir, pour éviter que la situation n'empire. »

Il me lâche enfin. Pointe de déception.

« Je vais maintenant te laisser réfléchir. Mais pour ça je vais te conduire au meilleur endroit qui soit. »

Il se détourne et je lui emboîte le pas. Il me conduit à un ascenseur. Nous montons sur une passerelle. Quatre m'amène devant le Heavyarms. Il me fait entrer dans le cockpit.

« Installe-toi et réfléchit. Connecte-toi avec le Gundam. Je suis sûr que même lui te reconnaîtra comme son pilote… »

Quatre referme le cockpit. Sous les consignes de Quatre, je me connecte au Heavyarms. Immédiatement, je me retrouve dans une atmosphère vaguement familière. Ou du moins, aurait dû l'être ? Je n'arrive pas à exprimer ce sentiment de plénitude qui m'envahit. Sentiment familier mais totalement inconnu. Etrange, non ? Les MS de Oz n'ont rien à voir avec le Gundam. A chaque fois que j'en pilotais un, j'éprouvais ce sentiment que je qualifierais aujourd'hui de dégoût. Enfin je crois. M'interroger sur les sentiments, ce que je croyais ne jamais avoir eu, est tout nouveau et pas facile à interpréter. Malheureusement, je ne peux pas faire machine arrière.

Je sors du cockpit. Ma décision est prise. Je ne sais pas trop ce qui m'a motivé, mais j'y réfléchirais plus tard. Quatre m'attend devant, un sourire aux lèvres.

« J'en étais sûr. Cette armure est faite pour toi, et tu es fais pour elle. »

« J'ai décidé que je vous aiderai. »

« Merci infiniment, Trowa Barton. »

Ça me fait une drôle d'impression de s'entendre appeler par un nom qui n'est pas le sien. Surtout pour moi, qui n'aie pas de nom. Je suppose que je m'y ferai. On s'habitue à tout à ce qu'on dit. Alors, je m'habituerai à ce nom. Ce nom qui me donne une existence réelle. Même si c'est un leurre.

Je pose mes yeux sur le Gundam, enfin mon Gundam maintenant, sur celui de Quatre et puis sur son pilote. Celui-ci s'adosse à la rambarde de la passerelle. J'obverse son profil, puis je l'imite.

« Si tu as des questions ? »

« De qui devrais-je prendre mes ordres ? »

« Du professeur S. Mais je doute que tu aies beaucoup d'ordre de mission de sa part dans la mesure où ils sont poursuivis par Oz. Nous sommes seuls désormais. »

« Vous n'êtes pas seuls. Nous sommes cinq maintenant. »

« Oui. »

Sourire de Quatre. Envie de sourire de mon côté. Je sens d'ailleurs le coin droit de ma lèvre se relever légèrement. Mais cela reste assez discret.

« Tu disais que tu avais eu la même idée que Duo, tout à l'heure… »

« Oh ! Disons que j'ai croisé Duo dans les couloirs et plus spécialement devant la chambre de Heero. Mais leur réunion n'a rien avoir avec les Gundams… »

« Je vois. »

« J'espère que ça ne te dérange pas ? D'habitude, ils sont plus discrets, mais je suppose que le stress et la peur a dû les rendre beaucoup moins… euh… discret. »

« En fait, je ne comprends pas pourquoi… Ils sont forts… Alors pourquoi ils se protègent ? Pourquoi… »

… je veux protéger quelqu'un qui n'en a pas besoin, je finis mentalement. Quatre observe mon profil, je le sens vaguement intrigué. Il semble réfléchir quelque instant.

« Je suppose qu'ils ne m'en voudront pas si je te réponds », marmonne-t-il pour lui-même. « C'est vrai qu'ils sont tous les deux très forts individuellement. Ils sont tout à fait aptes à se protéger eux-mêmes. Mais, à mon sens, protéger quelqu'un ce n'est pas que ça. »

Il relève la tête et dirige son regard au loin.

« Pour être plus concret, tu vois, Heero, ce n'est pas Duo qu'il protège. Ce qu'il veut à tout prix préserver, c'est son sourire, son optimisme. Parce que si Duo peut distribuer des sourires, et plaisanter à tout va, ça ne veut pas forcément dire que tout va bien pour lui. Parce que le passé de Duo est bien plus sombre qu'on peut l'imaginer. Et Heero, même si lui-même ne le sait pas encore, a besoin plus que tout au monde de Duo, de ses sourires, de son optimisme… »

Quatre me dévisage en souriant. Il pose un coude sur la rambarde et appuie son menton sur sa paume.

« Duo, c'est un peu différent. Lui, il le protège de… disons… de Heero, du Perfect Soldier. Avant qu'ils ne se rencontrent, Heero était un garçon taciturne et pensait un peu comme une machine programmée pour accomplir le plus efficacement ses missions. Grâce à Duo, Heero a pu s'épanouir, à sourire et même à développer un certain sens de l'humour… Duo l'a rendu beaucoup humain. C'est pour ça qu'ils ont besoin de l'un de l'autre. »

Je garde un silence méditatif.

« Je n'avais pas vu les choses sous cet angle-là », je déclare finalement.

« … Bien, il est temps de dire aux deux autres que j'ai trouvé un autre Trowa Barton. »

« Tu avais calculé ça depuis le début, n'est-ce pas ? »

« J'avoue », réponds Quatre en riant. « Duo, dans ses mauvais jours, me traite de « sale petit manipulateur ».

Bond cardiaque, plus envie irrépressible des deux coins de mes lèvres s'obliquer vers les joues. Plus envie de poser ma main sur sa tête. Je sens que si je m'en tiens à la description physique des signes, je ne vais pas beaucoup avancer. Mais maintenant, je sais pourquoi ce n'est pas ridicule de vouloir le protéger. Je ressens la même volonté que Duo et Heero. Et je crois avoir compris que Heero et Duo sont ensemble comme… un couple. Donc, si on va par là, je suis…

« Amoureux ? »

« Pardon ? » me demande Quatre.

« Heero et Duo… »

« Ils s'aiment, oui. »

« Ah… Je vois. Je crois que je comprends un peu mieux. »

Quatre haussent les sourcils, un peu désorienté. Et moi, j'ai enfin compris le sens de tous ces signes.

« Qu'est-ce que tu as compris, Trowa ? »

« Que je t'aime comme Heero et Duo s'aiment, enfin je crois… », je réponds pensivement.

Quatre rougit violemment. Il se recule, les yeux écarquillés. Il se met à bégayer quelque chose d'incompréhensible. Je crois qu'il veut me demander ce qui me fait dire ça.

« Je ne comprenais pas pourquoi mon cœur s'emballe toujours quand je suis à tes côtés, pourquoi j'ai envie de sourire et pourquoi je veux te protéger toi et pas Catherine, ou quelqu'un de plus faible. D'après ce que tu m'as raconté sur Heero et Duo, j'ai l'impression que pour moi c'est pareil. Mais je n'en suis pas tout à fait sûr. Après tout, je ne crois pas que l'amour ne soit juste que des manifestations somatiques, non ? »

Quatre n'a pas changé de position. Il ouvre la bouche, puis la ferme. Je fronce les sourcils. Pourquoi a-t-il une réaction pareille ? Il ouvre une dernière fois. Il soupire. Et enfin, il éclate de rire. Il se plie en deux et doit même se retenir à la rambarde.

« Et il me dit ça comme ça ? » j'entends entre deux crises de fou rire.

Des larmes commencent le long de ses joues. Moi, le faire pleurer de rire ? Mais qu'est-ce que j'ai dit de si drôle ? Enfin maintenant, moi, j'ai compris ce que je ressens. Et c'est quoi la suite de l'histoire ? J'observe Quatre qui n'a pas pu se retenir longtemps à la rambarde puisqu'il est maintenant assis par terre.

Des borborygmes sortent de ma gorge. De drôle de sons. Mon… rire ? Fait avéré : le rire de Quatre est contagieux. Voilà que je me mets moi aussi à rire. Et pour rien en plus. Quatre s'arrête subitement, étonné. Mes épaules sont violemment secouées, ainsi que mes côtés. L'hilarité de Quatre reprend de plus belle.

Je ne sais pas combien de temps on rit tous les deux. Quatre se relève, il s'approche de moi avec un simple sourire. Il prend mes joues entre ses mains et pose ses lèvres sur les miennes.

J'étudie avec stupeur le visage de Quatre. Celui-ci a les yeux fermés, les traits détendus. Oui, je crois qu'une comparaison avec un ange n'est pas mauvaise. Et, moi ? Qu'est-ce que je dois faire maintenant ? C'est quoi la suite logique ?

Quatre se recule et nos lèvres se séparent. Il me fait un petit sourire amusé.

« Tu penses trop, Trowa ! Bon, je crois qu'il est temps de rejoindre chacun notre chambre… »

Il s'éloigne. Je suis un peu déçu. Enfin un sentiment que je commence à bien connaître. Tout comme ces pulsions irrésistibles qui font que j'attrape Quatre par le coude, le retourne vers moi et l'embrasse. Cette fois, je savoure pleinement ses lèvres sur les miennes. Je pose lentement mes mains sur sa taille, celles de Quatre s'enroulent autour de mon cou. Une délicieuse chaleur m'envahit. Je sens ses lèvres bouger sous les miennes puis s'entrouvrir légèrement. Quelque chose d'humide me caresse timidement ma lèvre supérieure. Répondant à la demande silencieuse de Quatre, j'entrouvre les miennes et nos langues se rejoignent pour entamer un timide ballet. Je sens Quatre se presser contre moi, puis relâcher la pression en s'éloignant.

« Je crois… Je crois qu'on devrait vraiment aller dormir parce que sinon… sinon… »

« Tu as raison, Quatre. »

J'ai maintenant besoin de calme pour méditer sur ce qui vient de se produire, sur ce que cela implique. Et je crois qu'une bonne nuit de sommeil nous mettra les idées bien en place. Et je sais que Quatre ressent la même chose, la même nécessité pour y voir un peu plus clair.

Nous retournons donc chacun dans nos chambres. Au moment où on allait se séparer, Quatre m'embrasse tendrement en me souhaitant une bonne nuit. Je fais de même. Je m'allonge quelques instants après sur mon lit. Pour la première fois de ma vie, je me sens… complet. J'ai un but, une famille d'accueil, une identité même si elle est fausse, pour le moment je m'en contenterai. Et j'ai Quatre…


C'est le matin, il me semble. Quelqu'un frappe à ma porte. Heero rentre après l'avoir inviter à le faire.

« Je viens te chercher, on prend notre petit déjeuner. »

« Je te suis. »

Heero m'amène donc dans la grande salle à manger de la demeure d'un pilote des unités Maganac. Duo et Quatre sont déjà attablés. Ils sont en pleine conversation : Quatre remue ses céréales avec sa cuillère et Duo l'écoute la bouche ouverte prête à avaler sa tartine qu'il ne croque pas. Subitement, sa tartine tombe sur la table. Duo se relève à moitié frappant la table du plat de ses mains.

« Il t'a dit ça comme ça ? » s'exclame-t-il, sidéré.

Quatre hoche la tête. Puis Duo éclate de rire. Tous les deux remarquent enfin notre présence. Quatre me sourit franchement et Duo lève le pouce.

« Ça, c'est de la déclaration ! »

Heero me jette un regard en coin. Je me contente d'hausser les épaules. Heero va s'asseoir près de Duo et Quatre me fait signe de le rejoindre. Alors je m'installe sur la chaise à côté de lui, Quatre se relève brusquement et pose une main sur mon épaule.

« Heero, Duo, j'ai trouvé Trowa Barton, le pilote de Heavyarms. »

Duo s'interrompt encore une fois, la tartine en l'air. Je me demande s'il va la finir un jour sa tartine… Heero fronce les sourcils.

« Comment ça ? »

« C'est simple : je vous présente Trowa Barton », me désigne-t-il en se plaçant derrière moi.

Je sens maintenant ses deux mains sur chacune de mes épaules. Voyant que les deux autre ne disent rien, il se penche un peu en avant. Son torse repose presque sur ma tête. J'ai d'ailleurs envie de m'y appuyer, mais je ne fais rien. Ce n'est pas le moment.

« Hier soir, j'ai amené Trowa dans le hangar. Heavyarms l'a totalement accepté. Je suis même persuadé que c'est lui qui aurait dû être à nos côtés depuis le début. »

« Tu es sûr de toi ? » demande Heero.

« Absolument certain. »

« Et de toute façon, les intuitions de Quat-chan se sont toujours révélées exactes », renchérit Duo. « Bienvenue dans l'équipe Tro ! Après ce que tu as dit hier soir à Quat-chan, tu ne dois pas manquer de courage, ou bien tu es simplement inconscient. De toute façon, être un pilote de Gundam demande au moins une de ces deux qualités, si ce n'est pas les deux… »

Quatre accentue sa pression sur mes épaules puis me lâche et s'assoie à mes côtés.

« Qu'est-ce qu'il t'a dit hier ? » demande Heero assez intrigué.

« Ce que toi, tu as mis près d'une semaine à me dire. »

« Ah ! Je vois… Dans ce cas, bienvenue dans l'équipe pilote Trowa Barton ! »

Le reste du petit-déjeuner, nous discutons de la situation politique entre les Colonies, la Terre, OZ et nous. En tant qu'ancien officier de Oz, je leur apporte des éléments capitaux dans ce qui est maintenant ma lutte, mon combat.

« Tu dis que Zechs Merquise a récupéré les pièces de mon Gundam ? »

« Oui. Et il a aussi fait importé une grande quantité de gundamium dans sa base au lac Victoria. »

« Il doit certainement vouloir réparer mon Gundam. »

« Mais pourquoi faire ? » demande Duo. « Il a déjà le Tallgeese, non ? »

« Pour t'affronter à nouveau », répond Quatre.

« Je pars au lac Victoria. »

« Que vas-tu y faire ? » l'interroge Quatre.

« Ça dépend. Si le Gundam est fini, je le vole, dans le cas contraire je le détruis. »

Heero se lève de table pour aller préparer ses affaires. Duo soupire bruyamment.

« Et c'est repartit ! J'imagine que ça pouvait pas durer… »

« Ne t'inquiète pas Duo ! J'irai avec lui… », décide Quatre.

« Non », je m'oppose calmement. « Je suis un ancien soldat de Oz. Il n'y a pas mieux comme couverture pour aller aux renseignements. »

« Sauf que tu n'es plus un soldat pour eux puisque tu as fuis avec nous… », objecte Duo

« Pas fuis, mais surveillé. Tu t'es infiltré dans notre groupe, tu t'es arrangé pour qu'on te fasse confiance et nous t'avons même donné le nom de Trowa et le Heavyarms. Tu vois où je veux en venir Trowa… ? »

J'hoche la tête.

« Très bien. Tro ! Je te confie mon Heero à une seule condition : interdiction formelle, quitte à l'assommer ou autre, qu'il s'approche du petit bouton rouge sous peine de mettre le Shinigami en colère. Et crois-moi, tu n'as aucune envie de voir le Shinigami en colère ! »

« Bien reçu ! » j'approuve avec un salut militaire avec le coin droit de ma lèvre qui remonte sensiblement.

« Dans ce cas, Trowa, tu devrais aller poser Heavyarms sur un camion transporteur. »

J'acquiesce et me lève. Je pars ensuite dans la direction des entrepôts.

Une demi-heure plus tard, mon Gundam est solidement attaché et camouflé sur le transporteur. Je descends du camion et rejoins Quatre en compagnie de Rachid et de quelques hommes. Heero me rejoint suivit de Duo. Ce dernier me regarde durement. Apparemment, j'ai tout intérêt à éloigner Heero d'un bouton d'autodestruction, rouge ou pas.

Les hommes de l'unité Maganac nous encouragent et nous souhaitent bonne chance. La cérémonie d'adieu se déroule assez rapidement et sans discours solennel. Heero monte du côté passager du camion. Je m'apprête à faire de même quand une main retient la portière. Quatre me regarde droit dans les yeux, sérieux.

« Sois prudent ! Lorsque la guerre sera finie, nous reparlerons de ce qui s'est passé hier. »

« … Toi aussi, reste en vie ! »

Quatre me sourit et s'éloigne. Je monte dans la cabine et démarre le semi-remorque. Je ne fais pas dix mètres que Duo courre après nous. Une fois arrivé de mon côté, il grimpe sur le marchepied et s'accroche à la fenêtre.

« N'oublie pas ta promesse Tro ! » me dit-il avant de descendre.

« C'était quoi cette promesse ? »

« Je dois faire en sorte que Heero ne touche pas aux boutons rouges sous peine d'éveiller la colère du Shinigami. Et d'après lui, je ne veux pas éveiller la colère du Shinigami… »

« Ano baka ! » marmonne Heero.

J'éclate d'un petit rire. Puis Heero et moi, on s'enfonce dans le désert laissant derrière nous la base et les deux personnes qui nous sont chers…


A la fin de la guerre

J'aide Quatre à sortir de son Gundam. Encore une fois, il a risqué sa vie. Mais encore une fois, grâce à son charisme et sans doute son charme, il a réussi à rallier cette Dorothy Catalonia à nous.

Nous rejoignons les autres pilotes de Gundam. Finalement, nous avons tous survécu, ce qui n'est pas plus mal. Heero a sauvé la Terre, Wufei a enfin tué Treize Kushrénada et Duo s'est occupé de nos bourreaux de professeurs. Je les ai rencontré alors qu'ils travaillaient sur le Vayaete et le Mercurius. La seule chose qui est sortie de notre rencontre c'est qu'ils sont incroyablement intelligents mais incroyablement siphonnés comme dirait Duo.

J'amène Quatre à l'infirmerie. Sally nous y attend accompagné d'une fille que je ne connais pas.

« Dans quel état tu es Quatre ! »

Quatre relève la tête et plongea ses yeux dans ceux de la jeune femme.

« Iria… Je suis content que tu sois là ! Trowa, je te présente Iria, une de mes sœurs aînées. »

« Voilà donc le fameux Trowa… »

Un petit sourire orne le visage de la femme. J'ai la vague impression que Quatre lui a raconté la façon dont je me suis déclaré, si on peut appeler ça une déclaration… Est-ce que ça va me poursuivre jusqu'à la fin ?

Sally aide Quatre à s'allonger sur le lit. Iria me fiche littéralement à la porte. J'attends patiemment derrière la porte. Duo et Heero viennent me rejoindre après quelques minutes.

« Sally s'occupe de Quat-chan ? »

« Oui », je réponds.

« Tu vois Duo ! Elle est déjà occupée… »

Il fit mine de faire demi-tour. Duo le retient fermement par le bas de son débardeur.

« Pas si vite ! Toi, tu y passes après. »

« Duo… »

« Heero Yuy… C'est un ordre ! Et puis, compte sur moi pour pas te lâcher… »

Aussitôt dit, Duo emprisonne les épaules de Heero avec ses bras et le plaque contre lui. C'est vraiment dommage que Quatre ne soit pas aussi récalcitrant de temps en temps. Mais à quoi je pense moi ? Heero soupire, fataliste. Il me lance un regard à demi exaspéré. Je le connais suffisamment bien aujourd'hui pour savoir que le cinéma de Duo de l'ennuie pas. Au contraire. Je me demande parfois s'il ne le fait pas un peu exprès. Qui sait ?

Sally s'apprête à sortir quand elle se fige.

« Tiens tu es encore là Trowa ? Ah Heero, tu tombes bien. Iria t'attend pour ton bilan… »

« Et Quatre ? » je demande.

« Il vaut mieux qu'il reste un peu allongé et qu'il se repose. Sans compter la perte du sang, cette bataille l'a beaucoup fatiguée. Mais tu peux aller le voir à condition que tu ne le fasses pas rire… », rajoute-elle avec une œillade.

J'hausse un sourcil à peine moqueur. J'ai peut-être beaucoup appris ces derniers temps sur les sentiments, sur tout ce qui fait que je suis un être humain et cela, pour une grande part, grâce à Quatre, mais je ne suis toujours pas le genre de personne à faire rire les gens… Bon, c'est vrai, ça arrive que je fasse rire Quatre, mais la plupart de temps c'est complètement involontaire. D'accord, je vois. Sally doit aussi être au courant pour l'incident entrepôt. D'où l'œillade. Sans accorder d'autre regard à Sally, je pénètre dans l'infirmerie. Iria pointe du doigt une porte bleue. Je suppose que c'est la chambre où se repose Quatre. Je l'ouvre.

Quatre est allongé, droit comme un i, les yeux clos avec un air passablement énervé. Il ouvre les yeux quand il m'entend refermer la porte.

« Trowa ? »

« Je suis venu voir comment tu allais. »

« Ça va mieux maintenant… Sauf que je n'ai aucune envie de rester au lit. Mais comme je ne peux même plus tenir debout, je me sens encore plus frustré. »

J'esquisse un petit sourire en m'asseyant sur une chaise à son chevet. J'écarte doucement quelques mèches blondes dégageant ainsi son front. Qutre ferme les yeux en inspirant profondément.

« Merci », me dit-il.

« De quoi ? »

« D'être là. »

« … Au fait, rassure-moi ! Dis-moi qu'il y a au moins une personne dans cette galaxie qui ne connaisse pas cette histoire ! »

Les épaules de Quatre commencent à se soulever. Mauvais signe. Quatre éclate de petit rire très vite étouffé par un gémissement de douleur. Il porte une main à sa blessure.

« S'il te plait Trowa ! Ne me fais pas rire… »

« Désolé. »

« Le pire c'est que tu ne la fais même pas exprès… Mais je te rassure. Il y a au moins 1 personne qui ne le sait pas. Quoique je ne parierai pas là-dessus. Je suis désolé que ça te dérange. »

« Ça ne me dérange pas spécialement. Maintenant, je sais pourquoi il arrive que je déclenche quelques rires quand je traverse cette base… »

« Je suis sincèrement désolé. Je ne savais pas que ça allait si loin. »

« Ne t'excuse pas ! C'est de ma faute. Je suppose que j'aurais dû être plus… pragmatique à ce moment-là. »

Quatre pose une main sur mes genoux avec un doux sourire collé aux lèvres.

« Trowa, tu es quelqu'un de franc ! Ce que tu m'as dit ce jour-là, tu n'aurais pas pu le dire autrement et je n'aurai pas voulu que tu le dises autrement. C'est très bien comme ça, crois-moi ! »

« Si tu le dis. »

Quatre referme les yeux. Sa main, posée sur une de mes cuisses, se relève. Je sais immédiatement ce qu'il veut. Aussi, nos doigts s'entremêlent, pendant que, de mon autre main, je lui caresse doucement les cheveux. Après quelques secondes, Quatre réussit finalement à s'endormir. La porte de la chambre s'ouvre lentement. Iria passe la tête par l'entrebâillement.

« Il s'est endormi ? » me demande-t-elle.

J'acquiesce. Elle nous observe puis sourit. Enfin, elle me fait signe de la rejoindre. Je me relève après avoir démêler nos doigts. Je caresse une dernière fois son visage avant d'y déposer un léger baiser. Puis je sors de la chambre.

« Merci de veiller son mon petit frère. Prends bien soin de lui surtout ! »

Je ne sais pas trop ce qu'elle veut dire par-là, mais ma volonté de protéger Quatre est toujours aussi forte. Donc, tant que je serai là, à ses côtés, je ferai en sorte que tout aille pour le mieux pour lui. Je ne me fais pas d'illusion. Je sais que je ne pourrai pas le protéger de tout, en ma présence ou non.

« Je ferai de mon mieux. »

« Parfait alors ! Allez, c'est ton tour pour la visite médicale ! »


Quelques jours après

« Je suis désolé, mais il n'en est pas question ! » gronde Catherine. « Nous n'avons plus de place ! »

« Cathy, en fait, il serait… »

« Non, Directeur ! Je refuse catégoriquement qu'il travaille avec nous. »

« Cathy… Je suis quand même le directeur et… »

« Et c'est mon petit frère ! »

Je regarde assez impassiblement Cathy se disputer avec le directeur du cirque. Je sens la main de Quatre dans mon dos. Il a l'air visiblement gêné.

« Ecoute Trowa ! Je t'aime beaucoup et tu le sais. Et si tu le ne savais pas, ben, maintenant tu le sais. Et il hors de question que tu passes ta vie dans un cirque. On voyage tout le temps, les horaires sont impossibles et ce Directeur est un vrai pingre ! »

« Hey ! Cathy, tu vas un peu loin là ! » proteste ledit Directeur.

Quatre étouffe le fou rire qui menace de jaillir.

« Vis ta vie Trowa ! Et malgré toute l'affection que tu me portes, ta vie n'est pas auprès de moi. Non mais regarde-le ! Ce garçon qui est à tes côtés, il est tout malingre ! Tout pâle ! Tout mimi ! Ca se voit tout de suite qu'il a besoin de toi. Tu n'auras pas l'audace d'abandonner ce pauvre petit ange ? Hein Trowa ? »

Mon regard se fixe sur Quatre. Celui-ci a la tête baissée, les épaules secouées d'un fou rire silencieux.

« Donc, ce que tu me demandes c'est de rester avec Quatre… »

« T'as tout compris petit frère ! Et tu n'as pas intérêt à refuser sinon, je te renie et je libère Pacha pour qu'il te mange tout cru. Ou cuit, mais cela dépendra à quel point tu m'auras énervé… »

« Pacha ne t'obéira pas », je riposte calmement.

« Personne n'oserait défier le terrible regard de la Grande Catherine quand elle est en colère, pas même un lion », rétorque-t-elle.

Cathy met ses poings sur ses hanches, le visage sévère. Puis son visage se détendit en regardant Quatre qui fait tout ce qu'il peut pour garder son calme.

« Franchement, avoue qu'il n'y a même pas à choisir entre rester avec moi ou avec lui ! Avoue qu'il est bien plus mignon que moi ! »

« Toi aussi, tu es mignonne », je déclare sereinement.

« Raah ! T'es vraiment bouché ! Je parie que tu te moques de moi… Trowa Barton, tu me le paieras ! »

Je souris alors que Cathy s'éloigne en faisant semblant d'être furieuse. Le directeur secoue la tête, un rien fataliste partit vaquer à ses occupations.

« Bon, je crois que tu n'as pas trop le choix, Trowa. »

« Oui. Mais comme elle l'a fait remarqué, c'est un choix facile… »

Je lui souris. D'après Duo, c'est un sourire « spécial pour Quat-chan ». Apparemment, c'est quelque chose que je n'offre à personne d'autre.

« Bon. Qu'est-ce qu'on fait maintenant que nos sœurs nous ont toutes les deux fichues à la porte ? » me demande Quatre.

« Facile. Il suffit de se trouver un chez nous… »

Le sourire de Quatre s'agrandit. Il me prend la main, puis m'entraîne vers la voiture garée devant le cirque.

« Très bien ! Maintenant, il va falloir éplucher les petites annonces… »

Owari


A y est fini ! Pff ! Il a pas été facile celui-là ! Mais j'espère qu'il vous plaira…

Le prochain à être cuisiner : Heero… (petit clin d'œil à Yat !) Mais avant de le cuisiner, va falloir attendre… je ne sais pas combien de temps.

Zib à tous le monde !


(1) Franchement, c'est la question que je me pose sans arrêt.