Titre : Mondes alternatifs

Résumé : 5 chapitres plus ou moins longs. Dans chaque chapitre, un des pilotes de Gundam n'est pas un pilote de Gundam.

Sous-titre : Heero

Genre : POV Heero et comme il devrait pas avoir de problèmes particuliers ce ne sera qu'un POV Heero (faut pas oublier que c'est un super boy !). AU et shonen ai

Couple : un 1x2 ou le contraire ou 1+2. Moi, je suis comme le lecteur, je ne sais pas à l'avance comme ça se finira. Du moins, on a tous une petite idée mais quant à savoir comment elle va se dérouler, l'idée…

Résumé : comme pour Duo et Trowa mais avec Heero. Peux toujours pas mieux faire comme résumé.

Disclaimer : bon, TOUT est à moi, à savoir : l'ordinateur portable, l'inspiration, les kilos supplémentaires pour abus de chocolat, l'histoire, le laguiole de Duo que je lui ai prêté, les grenades, l'alarme à incendie, la tente et divers accessoires qui s'avèreront peut-être inutile par la suite, les feuilles de brouillons quand je suis en cours, l'encre avec laquelle j'écris, et mon invariable tchatche pour ne rien dire. Bref. Et dans la mesure où c'est moi qui les fais parler, bouger, butiner, penser… on peut donc dire qu'ils sont quand même un peu à moi, non ?

Je me souviens plus si j'ai répondu à toutes les reviews. Ca fait tellement longtemps que j'ai mis MA en attente... Enfin, bref, un gros merci à Kelidril, Shima-chan, Thealie et Sekiei.

Bonne lecture et Joyeuses Fêtes!

POV Heero

Mes doigts filent à vive allure sur le clavier de l'ordinateur. Mes yeux restent fixés sur l'écran. Des dizaines de lignes sans queue ni tête défilent devant moi. Pour quelqu'un d'inexpérimenté, ce ne serait qu'un capharnaüm mais pour quelqu'un comme moi, tout cela a un sens bien précis. Je branche une clé usb pour copier les données. Je dois faire vite, l'alarme a dû être donnée. D'ailleurs, une radio commence à grésiller derrière moi. Je me lève et me dirige à grand pas vers le corps allongé. Je le retourne et m'empare de sa radio.

« -Equipe Delta au rapport. »

« -Ici équipe Delta, ras ! »

« -Roger ! Continuez les recherches ! »

« -Roger ! »

Je brise la radio. L'homme que je viens de retourner commence à cligner des paupières. Je l'assomme une nouvelle fois. Je regarde l'avancée du téléchargement. 47. J'observe rapidement le soldat allongé à mes pieds. 1, 68 mètres. 65 kilos. 40 de pointure. Je pense que ça fera l'affaire. Je retire le pantalon, la veste et les rangers du soldat et les enfile. Ils sont à peine plus larges mais ce n'est pas gênant. Je récupère aussi son arme à feu, avec les trois chargeurs. Je les inspecte rapidement. Suffisamment graissée. Chargeurs pleins. Parfait.

Un léger signal m'indique que le téléchargement est terminé. Je récupère ma clé et la cache dans un de mes rangers. Je sors de la petite salle en enjambant d'autres corps. Personne en vue pour le moment. Début plan 1 : activation de la diversion. Je sors d'une de mes poches une petite télécommande. J'appuis sur un bouton qui déclenche tout de suite une demi-douzaine d'explosion. Parfait. Le hangar de Mobil Dolls doit être partiellement détruit. Je file dans la direction opposée, vers les quartiers des soldats de Oz. Je ne croise relativement que peu d'hommes. Cela facilite ma fuite. Je passe par les cuisines puis je vole un de leurs camions de ravitaillement. A la sortie de la base un garde stoppe mon véhicule.

« -Autorisation de sortie et votre matricule, soldat ! »

Sans un mot, je lui présente des papiers d'autorisation ainsi qu'un matricule falsifiés. Le soldat n'y voit que du feu et me laisse sortir de la base.

C'est décidément trop facile…


Après avoir abandonné le camion dans une décharge avec les vêtements militaires, je me dirige à pied vers ma demeure. Elle se situe dans une banlieue huppée de la Colonie L1. Je dois en avoir pour une petite demi-heure à pied. Mais ça ne me dérange pas plus que ça. J'aime beaucoup ces moments de solitude, ces rares moments où je peux réfléchir sur moi-même, où je doute. Je doute du bien fondé de mes actions. Pour moi, elle me semble juste. Mais je sais que je suis qu'un rouage bien huilé au sein d'une organisation rebelle secrète. Je ne connais pas le but, la finalité de mes actions. Alors je doute. Je me demande si je fais bien de leur faire confiance…

J'arrive devant une immense demeure. Style Renaissance, avec des pilastres le long des façades blanches, un perron en faux marbre entouré de deux statuts, deux nues féminins portant chacune une amphore sur leurs épaules. Je pousse la lourde porte en bois sculpté et pénètre dans un grand hall pratiquement vide. Un homme d'une quarantaine d'année, vêtu d'un costume noir sort d'une pièce adjacente et s'incline devant moi.

« -Bienvenue Yuy-sama ! »

J'hoche rapidement la tête.

« -Tanaka-sama vous attend dans le petit salon. »

« -Merci. »

Je me dirige donc vers le petit salon où un vieil homme, sexagénaire, fumant un cigare, travaille tranquillement derrière un bureau en bois d'acajou. Il me fait signe de m'asseoir sur un petit fauteuil face à lui.

« -Personne ne t'a vu, n'est-ce pas ? »

« -Personne ne se souviendra de moi », je réponds.

« -N'oublie pas Yuy ! Ce n'est pas par charité et bonté d'âme que je te laisse vivre sous mon toit. »

« -Je ne suis pas prêt d'oublier. »

« -J'en suis persuadé. Parlons travail ! Trouve-moi tout ce que tu peux sur cette personne ! »

« -Très bien. »

Je me lève et m'incline. Je repasse dans le hall en sortant du bureau et gravit les marches de l'escalier menant au premier. Je traverse quelques couloirs pour entrer dans ce qui me sert de chambre. Celle-ci n'a vraiment rien de sophistiquée. A première vue, on pourrait dire que c'est une chambre d'hôtel. Un simple lit, une table de chevet avec une lampe, une armoire et une commode. La seule touche personnelle est le complexe informatique installé sur un bureau. Il s'agit simplement de mon ordinateur portable et quelques accessoires supplémentaires.

Je m'assoie en face de l'écran et le déverrouille. En bas à droite de l'écran, une petite lettre se décachette et se referme régulièrement. Signal que j'ai un message. Je clique rapidement sur l'icône. Une fenêtre s'ouvre.

To : Loyh

From : Jhogs

Object : cours par correspondance : retard.

Nous n'avons pas reçu votre dernier devoir. Veuillez nous l'envoyez au plus vite avec le motif de votre retard. Dans le cas contraire, nous serions obligés de vous pénaliser de deux points par jour de retard dans la notation.

Merci de votre compréhension.

La direction Jhogs.

Je regarde ma montre. Il a dit vrai. J'ai 45 minutes de retard. Je referme la fenêtre et branche ma clé. Quelques instants après, la liste de données s'affiche sur mon écran. En aussi peu de temps, je brise le code de cryptage et une liste de nom et d'objectifs de mission deviennent lisible. A mon tour, je protège la liste avec mon système de protection, bien meilleur que ceux d'Oz. Un programme virus est bien plus efficace qu'une simple barrière. J'ouvre ma boite à e-mail.

To : Jhogs

From : Loyh

Object : cours par correspondance : devoir sur le système immunitaire humain.

Je n'ai aucune excuse valable pour mon retard. Je suis désolé. Cela ne se reproduira plus.

Votre élève, Loyh

J'y joins mon fichier infecté et l'envoi à Jhogs. Je n'ai jamais rencontré cette personne. Tout ce que je sais c'est que Jhogs combat Oz et qu'il fait partie de mes contacts. Je suis souvent sollicité pour hacker n'importe quel système d'exploitation. Généralement, je fais moi-même une petite enquête sur mes contacts. Ils ne le savent pas mais je connais leurs identités. Mesure de sécurité. Le seul sur qui je n'ai rien trouvé, c'est ce Jhogs. C'est donc le seul que je respecte réellement parmi tous mes contacts.

C'est comme ça que je me suis installé chez Tanaka-sama. Remercié de la Fondation Romefeller pour ses idées extrémistes il y a maintenant une vingtaine d'année, il n'a jamais été réintégré. Tout ce qu'il veut aujourd'hui, c'est retrouver son honneur (fichus aristocrates !). Quand je l'ai su, je me suis immédiatement présenté à lui. En me faisant passer pour son fils adoptif, je dois en échange lui apporter toutes les informations qu'il me demande. Mais cela me permet de le surveiller de près. C'est le genre de personne qui peut retourner sa veste et trahir sa propre famille tant que cela sert ses intérêts. Je fais donc juste en sorte qu'il ait besoin de mes talents. En étant à ses côtés, c'est plus facile de le manipuler, sans parler du fait qu'il contribue à me fournir une bonne couverture.

Je parcours rapidement le dossier que m'a donné Tanaka-sama. La personne sur laquelle je dois enquêter : Quatre Raberba Winner. Fils de Selim et Katherine Winner. Actuellement à la tête de l'empire Winner qui ne vaut plus grand-chose aujourd'hui, cf. la révolte qu'il y a eu quelques semaines plus tôt. Révolte qui a tué Selim Winner. Son implication avec les Gundams ? Probablement très forte. Et c'est ce qu'il faut que je détermine pour Tanaka-sama.

Il va donc falloir que je manipule les informations que je vais trouver. Si ce Quatre Winner a un lien quelconque avec les Gundams, voire en être un des pilotes comme je le pressens, Tanaka-sama ne doit rien savoir. Il ne doit absolument pas connaître l'identité de ses pilotes. Il voudra sans doute s'en servir pour réintégrer la Fondation et aussi se débarrasser de moi par la même occasion. Donc, je dois l'amener à croire que Winner est bien lié aux pilotes mais sans apporter de preuves tangibles. Laissons planer le doute, il sera encore plus facile de l'utiliser.

Je fais mes recherches sur Internet, triant les informations en fonction de leur pertinence. Jusqu'à ce que le majordome me prévienne que le dîner est servit. Le repas avec Tanaka-sama se passe comme d'habitude, c'est-à-dire en silence. Entre deux plats, il me demande bien entendu comment avance l'affaire. Je lui réponds avec une impatiente dissimulée que je viens juste de commencer mes recherches. Il me reproche ensuite ma lenteur, en me signalant que dès fois, je trouvais ce qu'il voulait plus rapidement. Et comme je sens que cela va dégénérer en dispute, je me tais en hochant la tête.

Je remonte dans ma chambre. La petite icône m'indique que j'ai un e-mail.

To : Loyh

From : Jhogs

Object : cours par correspondance : résultat

Nous avons reçu votre devoir sur le système immunitaire humain. Comme vous n'aviez aucune excuse nous vous avons pénalisés de deux points seulement. Votre note s'élève donc à 17 / 20.

Ceci est un très bon devoir, concis, synthétique et en parfait accord avec le sujet donné.

Votre sujet de dissertation pour la semaine prochaine est joint à ce message. N'oubliez pas de le consulter.

La Direction Jhogs vous remercie.

J'ouvre leur fichier joint. L'écran de mon ordinateur devient subitement tout bleu et une barre d'écoulement se remplit à toute vitesse. Je vois qu'il m'a renvoyé mon programme virus. J'insère aussi vite que possible la clé contenant l'antivirus. Celui-ci éradique mon programme assez rapidement. Et je peux afin lire mon nouveau « devoir ». D'ailleurs, c'est assez rare que Jhogs m'envoie si vite une nouvelle mission à accomplir. Généralement, il attend une petite semaine. Il a donc du découvrir quelque chose de très important dans ce que je lui aie envoyé.

Un petit paragraphe au centre d'une page word. Voilà le seul message qu'il m'a envoyé. Etrange. D'habitude, c'est plus détaillé, avec les plans des bases à infiltrer, les matricules des gardes de ronde, les éléments sur leur situation familiale. Je lis le paragraphe

La Fondation Romefeller a ordonné l'attaque du Royaume de Sank. Or, il est essentiel de garder en vie la princesse de ce royaume, Réléna Peacecraft, fille adoptive de feu le ministre des affaires étrangères Darlian. Rendez-vous sur le site de conversation privée. Même pseudonyme.

Je fronce les sourcils. Pourquoi me demander de protéger cette fille ? Même s'il ne me l'a pas dit expressément, c'est exactement ce qu'il attend de moi. Je le sais.

Je me connecte donc sur le site de conversation privée. Je repère immédiatement son pseudonyme.

Loyh : Directeur Jhogs.

Jhogs : Acceptez-vous le sujet sur la protection de l'environnement à notre époque ?

Loyh : Pourquoi un tel sujet ?

Jhogs : Parce que vous êtes le meilleur de mes élèves. Et nous pensons que votre niveau de compétence exige des sujets plus intéressants et peut-être plus compliqués. Nous avons pensé que cela vous plairait. Mais nous reviendrons sur notre décision si cela ne vous convient pas.

Loyh : J'aurais préféré un sujet concernant le domaine politique.

Jhogs : Vous avez une idée de sujet ?

Loyh : Le pacifisme parviendra-t-il à instaurer la paix ? Sujet étayé sur le cas Winner.

Jhogs : Ce sujet me parait tout à fait intéressant. Mais cela reste très restrictif. Si vous élargissiez votre horizon en prenant aussi en compte le cas du Royaume de Sank ?

Loyh : Je prendrais en compte vos conseils si vous acceptez ma requête.

Jhogs : Ce qui signifie que vous acceptez la nôtre ?

Loyh : Oui.

Jhogs : Nous sommes ravis de votre décision. Vos sujets d'examen seront donc plus intéressant au vu de votre niveau. Bonsoir élève Loyh.

Loyh : Bonsoir directeur Jhogs.

Je me déconnecte. Parfait. Je ferai d'une pierre deux coups. Je réserve un billet pour le prochaine vol pour la Terre, et plus précisément le Royaume de Sank. Je descends précipitamment dans le bureau de Tanaka-sama. Je frappe calmement à sa porte.

« -Entrez ! » tonne une voix grincheuse.

« -Tanaka-sama ! » je salue en entrant.

« -Qu'est-ce que tu veux ? » me demande-t-il avec une voix agacée.

« Je pars demain pour le Royaume de Sank. J'ai besoin que vous m'inscriviez à l'école que dirige Réléna Peacecraft, en tant qu'ambassadeur de la paix de la Colonie L1. »

« -Pour quoi faire ? » me questionne-t-il brusquement.

« -Quatre Raberba Winner se cache au Royaume de Sank. Je ne trouve pas grand-chose sur Internet, à croire que toutes les informations le concernant ont été effacé. Je pourrais les dénicher mais si je le côtoyais, je pourrais le surveiller et découvrir quelle est son implication avec les Gundams, bien plus rapidement. »

Tanaka-sama semble réfléchir. Il me regarde en fronçant les sourcils. Il n'a jamais su quand est-ce que je mentais, cela n'allait certainement pas commencer aujourd'hui !

« -Très bien. »

Il s'empare du téléphone et me congédie d'une main.


La voiture s'arrête devant l'école. Je descends et gravis les marches en direction d'une jeune fille blonde portant l'uniforme de l'école. Elle me tend la main avec un sourire.

« -Je suis Réléna Peacecraft. Bienvenue dans notre école ! »

Je m'incline quelque peu pour la saluer à mon tour, sans un mot. Voici donc la fille que je dois protéger, notre seul espoir de paix. Et elle se balade seule, en dehors de chez elle, sans protection rapprochée, avec toute la Fondation et Oz à ses trousses, dans un pays dit pacifiste ayant aucune arme défensive ? Comment Jhogs veut-il que je protège quelqu'un qui n'a pas l'air de se rendre compte de tous les risques qu'elle prend ? Comment veut-il que je protège une personne aussi naïve qu'inconsciente ?

Un homme assez âgé apparaît à ses côtés. Les yeux à peine ouverts, le sourire aux lèvres, les cheveux grisonnants. Un serviteur sans aucun doute à en juger par sa tenue, sa posture, la déférence avec laquelle il s'incline devant Réléna Peacecraft. Peut-être un homme fidèle aux Peacecraft depuis deux ou trois générations…

« -Réléna-sama ! Je vais faire monter les bagages de Yuy-sama dans sa chambre. »

« -Merci Pagan. Veuillez me suivre dans mon bureau Heero-kun ! Je peux vous appeler Heero-kun ? »

J'hoche la tête. Si ça peut lui faire plaisir, qu'elle m'appelle comme elle veut. Cela n'a vraiment pas d'importance. De toute façon, Heero Yuy, ce n'est pas mon nom. Réléna me parle. Je n'écoute pas. Je suppose qu'elle doit me décrire l'école, les us et coutumes, l'emplacement des locaux… Mais tout ça, je le sais déjà. Dans l'avion, j'ai déjà épluché les plans de cette école, pour trouver ses points faibles et la meilleure façon d'y remédier. J'ai aussi établi un plan d'évacuation en cas d'attaque et les endroits stratégiques où je devrais poser des pièges.

Une fois dans son bureau, je signe tous les papiers qu'elle me présente. Je me contente de répondre à ses questions par des onomatopées à grand renfort d'hochement de tête. Pagan fait irruption dans le bureau, déclarant que mes affaires ont été transportées dans ma future chambre. Et que mes colocataires m'y attendent.

« -Colocataires ? »

« -Oui, c'est un principe ici. Nous préférons loger nos pensionnaires quatre par chambre. C'est plus convivial ainsi », me répond Réléna avec un sourire.

« -Je préfère être seul », je riposte froidement.

Le sourire de la princesse s'évanouit. Elle fronce les sourcils et secoue la tête.

« -Non. Personne ne préfère rester seul. Ça, au moins, je le sais. »

Il est possible que cette fille déteste la solitude mais une chose est sûre : je suis ici en mission. Et je ne pourrais pas accomplir parfaitement ma mission avec des camarades de chambre. Je serais obligé de sortir tous les soirs pour poser mes pièges, faire mes rondes, faire des recherches sur chaque personne entourant la princesse. Et je serais donc obligé d'inventer des excuses pour justifier mes sorties nocturnes. Or, je ne suis pas le genre de personne à me justifier. La plupart du temps, je me contente de neutraliser, voire de tuer tous mes obstacles.

« -Vous êtes le troisième garçon à intégrer cette école. Nous sommes une majorité de fille. Un peu de compagnie masculine vous soulagera en fin de journée, si vous voyez ce que je veux dire… »

Je ne vois pas du tout. Mais j'acquiesce. Je suppose que je devrai faire un effort. Je n'ai jamais été très sociable. Mais je ferai un effort pour le bien de ma mission.

La princesse m'accompagne en compagnie de Pagan vers ma chambre. En chemin, nous croisons plusieurs jeunes filles qui s'inclinent toutes devant Réléna avant de me jeter un regard intéressé. Intéressé ? Hum… Je vais peut-être commencer par enquêter sur ses pensionnaires. S'il y a une espionne, je le saurai. Réléna frappe contre une porte et une voix nous invite à entrer.

Au centre de la pièce, un petit blond nous accueille chaleureusement. Quatre Raberba Winner. Ça tombe très bien, je n'aurai pas à le chercher dans tout le royaume. Je le salue à mon tour. Derrière lui, deux lits superposés. Mes affaires sont posées au pied du lit à gauche de Winner. Le lit du rez-de-chaussée de droite est impeccablement bien fait. Celui du haut, la couverture fait une bosse, ne laissant apparaître qu'une natte.

« -Je suis Quatre Raberba Winner », se présente le petit blond que j'avais déjà identifié.

« -Heero Yuy », je réponds laconiquement.

« -Où est Duo-kun ? » demande Réléna.

« -Et bien… En fait… »

Quatre s'arrête assez gêné et jette un coup d'œil à la bosse qui doit donc être Duo-kun. La bosse gémit, et une tête émerge de sous la couverture. Visiblement encore endormi.

« -Moui ? » demande-t-il d'une voix pâteuse. « C'est à quel sujet ? »

Pagan éclate d'un petit rire discret tandis que Quatre secoue la tête, carrément blasé. Et moi, je crois que je suis légèrement surpris. Un coup d'œil discret à ma montre me confirme ce que je crains : il est 17 heures passés ! J'en conclus que niveau sociabilité, je devrais faire plus d'effort. S'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est la paresse. Intransigeant, intolérant me direz-vous ? Et moi, je vous répondrais que non. Je ne suis pas officiellement un soldat, ni un espion, mais j'ai été élevé par un ancien tueur à gage, qui m'a appris les ficelles du métier. Et on m'a toujours appris à être carré. A aimer la rigueur et une certaine discipline, maîtrise de soi. J'ai donc toujours banni le laisser-aller de mon existence. Le laisser-aller, c'était beaucoup trop dangereux. Parce que rien n'était jamais prévisible, tout était aléatoire. Et l'imprévisible m'angoissait.

« -Duo-kun, votre nouveau colocataire vient d'arriver », dit Réléna.

Je vois tout de suite qu'elle essaye de le motiver pour qu'il sorte de ses draps.

« -Ce n'est pas grave Peacecraft-sama », je rassure parce que de toute façon, qu'il reste sous les draps m'arrange. Ça m'évitera de devoir nouer le contact. Tout ce dont j'ai besoin est d'en savoir plus sur Winner et de protéger Réléna Peacecraft. Le reste m'est égal. J'ai juste besoin de savoir dans quelle catégorie placer les autres : alliés/ennemis.

La tête sortit de nouveau des couvertures, complètement réveillé cette fois-ci. Nos yeux s'accrochent. Je n'ai jamais vu des yeux pareils. Il faut aussi avouer que je ne m'intéresse pas vraiment aux gens, donc je ne m'attarde pas vraiment sur leurs traits physiques. Je ne saurai même pas dire, en ce moment précis, de quelles couleurs sont les yeux de Réléna ou bien de Quatre. Et même de Tanaka-sama. Mais je suppose que la couleur des yeux de Duo est tellement inhabituelle qu'elle capte tout de suite le regard de l'autre.

Duo esquisse un sourire amusé puis bondit littéralement de son lit. Puis il s'avance vers moi en me tendant la main.

« -Salut ! Moi, c'est Duo. Duo Maxwell. »

J'observe calmement cette main qu'il me tend. J'ai bien envie de ne pas la serrer et d'aller ranger mes affaires. Mais le mot « mission » associé aux mots « ne pas attirer l'attention, sois réservé mais renfermé ! » résonnent dans ma tête et en cachant ma répulsion, je la saisis.

« -Heero Yuy », je répète.

« -Bien. Nous allons vous laisser vous installer Heero-kun. »

Réléna nous fait rapidement à tous, un signe de la tête et sort en compagnie de Pagan. Je m'avance vers mes valises.

« Nous t'avons laissé les lits de gauche. Mais si ça ne te convient pas, nous pouvons échanger… », propose Quatre.

« -Ça n'a aucune importance », je réponds.

« -Heero Yuy, hein ? »

Je me retourne vivement vers Duo. Celui-ci arbore une expression que je n'arrive pas à qualifier. A la limite de l'amusement et un je-ne-sais-quoi. Je n'aime pas beaucoup cette impression. Il se contente de sourire en s'adossant contre la porte, les bras croisés dans une attitude clairement prédatrice. Qu'importe ! Qu'il aille trouver une proie pour faire joujou avec, ailleurs ! Duo jette un coup d'œil à Quatre. Celui-ci le lui rend puis hausse les épaules. Quatre, toujours aussi souriant, s'approche de moi.

« -Tu veux de l'aide ? »

« -Non, ça ira. »

Je me retourne à mon sac. Ils doivent être au courant. Ils savent que Heero Yuy n'est pas mon vrai nom. De la part de Quatre Raberba Winner, ça ne m'étonne pas beaucoup. Mais ce Duo Maxwell… Son nom me dit vaguement quelque chose mais je n'arrive pas à savoir où je l'ai déjà entendu. Je vais d'abord enquêter sur lui. Et s'il est ami avec Winner, il y a de forte probabilité pour que Maxwell soit un pilote de Gundam.

Un flemmard comme lui ? Non. Il y a peu de chance. Mais je ressens autre chose chez ce garçon. Une lueur inquiétante au fond de ses prunelles. De toute façon, je trouverai bien de quoi il s'agit. Et si jamais il me gêne, je le tue, pilote ou pas.

J'extirpe de mon sac, mon ordinateur portable, quelques affaires que je range dans une commode. Winner s'approche de moi et s'assoie sur son lit. Par réflexe, tous mes muscles se tendent près à l'attaque.

« -Ne t'inquiète pas ! On sait que Heero Yuy n'est pas ton vrai nom. Tu dois avoir tes raisons. Et ça nous regarde pas », conclut Winner.

Parfait ! De toute façon, ça ne m'angoissait pas plus que ça. Winner, je sais que je peux relativement lui faire confiance. Et puis, c'est rare quand les gens se souviennent de Heero Yuy, le leader pacifiste. Généralement, ce nom leur dit vaguement quelque chose et ne cherchent pas plus loin.

Je branche mon ordinateur sans prêter plus attention aux deux autres. Il faut que j'envoie un e-mail à Jhogs pour lui confirmer mon arrivée. Je commence à taper mon message. J'entends vaguement Quatre me demander quelque chose et essayer de capter mon attention. Une main passe devant mes yeux et je la frappe pour l'éloigner. Je n'ai pas de temps à perdre avec eux pour le moment. Je les ignore donc.

Tout d'un coup, l'écran de mon portable s'abaisse violemment, et je retire vivement mes doigts, à temps pour ne pas me les faire coincer. Une main appuie fermement sur mon ordinateur. Je lance un regard glacé au propriétaire de cette main. Et je tombe sur deux améthystes brillants eux aussi de fureur.

« -Ecoute Yuy ! On est apparemment amené à vivre ensemble pour quelques jours, semaines, mois, années, j'en sais foutrement rien. Alors, le minimum, ce serait de nous répondre quand on te demande quelque chose ! Vivre en collectivité, ça te dit quelque chose ? »

Il se recule et me jauge du regard. Je sens que ce gars va rapidement dépasser les limites. D'autant plus que mon Beretta n'est jamais très loin. Finalement Maxwell retrouve le sourire. Il se tourne vers Winner.

« -On va mettre sa mauvaise volonté sur le compte du décalage horaire. »

J'ouvre à nouveau mon ordinateur portable et termine mon message. Maxwell et Winner s'activent autour de moi. Une fois mon e-mail envoyé, j'éteins mon portable et le range. Soudain, une feuille envahit mon champ de vision.

« -Je ne veux pas te déranger mais voici notre emploi du temps pour la semaine… », m'informe Winner.

Je tends la main pour prendre la feuille quand Maxwell l'arrache des mains du blond. Il fit une grimace de dégoût.

« -Quatre ! Je crois qu'il est temps pour moi de commencer à sécher les cours. »

Winner arrache à son tour la feuille et la pose à côté de moi.

« -Tu as promis Duo ! »

« -Promis ? J'ai tenu ma promesse. Ça fait deux mois que je suis TOUS les cours.

« -Duo, ça ne fait que trois semaines qu'on est là ! »

Maxwell pousse un gémissement plaintif et Winner éclate soudain d'un petit rire qu'il essaye apparemment vainement d'étouffer. Maxwell hausse les épaules. Quant à moi, j'observe attentivement l'emploi du temps, surtout les trous entre deux heures de cours. Ce temps-là, je pense le mettre à profit pour enquêter sur les personnes qui entourent la princesse.

Liste mentale : Duo Maxwell, Quatre Raberba Winner, « Pagan »

Je m'allonge sur mon lit et ferme les yeux. Ce Maxwell n'avait pas tout à fait tort. Le décalage horaire m'a complètement épuisé. Un peu de repos et de calme me fera le plus grand bien. Mais c'est sans compter la présence du natté. En plus d'être paresseux, il est plus bavard et plus bruyant qu'une adolescente hystérique. A se demander si ce garçon n'est pas sourd lui-même et ne s'entend pas parler. Dans le cas contraire, il y a fort à parier que c'est moi qui vais développer cette cécité. Par nécessité. C'est quand même pas croyable le nombre de bêtises qu'il peut débiter par minute.

Quatre semble plus posé. Plus discret aussi. Son rire sonne agréablement à mes oreilles. J'ai l'impression qu'il exerce une certaine influence sur Maxwell. S'il pouvait seulement faire en sorte qu'il la boucle un peu ! Mais c'est pas possible d'avoir un aussi long débit de parole !

Quelqu'un frappe à notre porte et interrompt enfin le natté. Winner va ouvrir et Pagan nous informe que Réléna Peacecraft nous invite à dîner à sa table avec toutes les autres pensionnaires dans une heure.

« -Super ! Encore un dîner de trois heures pour bouffer trois carottes, et crues en plus ! » grogne Maxwell.

Ça tombe plutôt bien. Finalement, je n'aurai pas à attendre si longtemps. Je vais profiter du fait qu'ils vont dîner pour faire un tour dans les environs. En commençant par préparer l'itinéraire d'évacuation. Ou bien alors, je ferais des recherches sur Duo Maxwell. Je commencerais déjà par fouiller leurs affaires. Les effets personnels apprennent bien plus sur les gens que des informations. Oui, je crois que c'est ce que je vais faire. L'itinéraire d'évacuation attendra que je connaisse un peu mieux l'école. Connaître les plans d'un lieu ne suffit pas. Cela contribue à 35 des chances de réussite. Mais il reste 65 qui reposent sur d'autres données comme la connaissance « physique », visuelle des lieux, la chance, et les capacités.

Ma décision est prise, je suis serein. Je sais ce qu'il me reste à faire. Je sens soudain mon lit s'affaisser légèrement. J'ouvre brusquement les yeux et tombe sur deux autres, améthystes. Maxwell est penché au-dessus de moi. Il se retire lentement avec un sourire aux lèvres. Je m'assoie immédiatement. Qu'est-ce que ce baka croit qu'il allait faire ?

« -J'en étais sûr que tu dormais pas. »

« -Qu'est-ce que tu veux ? » je demande froidement.

« A table. »

Il se retourne en se dirigeant vers la sortie. C'est le moment où jamais.

« -Dis aux autres que je m'excuse mais je suis fatigué et j'ai envie de rester un peu au calme. »

« -A qui tu veux faire croire ça ? »

« -Fais ce que je te dis ! Et garde tes commentaires ! »

Il commence sérieusement à me taper sur les nerfs. Généralement les gens se heurtent à mon masque d'indifférence. Leurs reproches, leurs conseils, tout me glisse dessus. Mais lui ! Je ne sais pas comment, ni pourquoi il arrive à me faire perdre tous mes moyens, tout mon self-control… Ce moment, seul dans cette chambre, va me faire du bien. A son retour, j'aurai récupéré mon masque, et cette fois il ne le brisera pas aussi facilement. Et en plus, on va mettre ça sur le compte de la fatigue. Je n'aurai jamais cru qu'un voyage et quelques heures dans cette chambre avec lui puissent autant m'épuiser.

« -Très bien, Heero Yuy-sama ! »

Il ouvre la porte. Et sans un regard en arrière, il s'apprête à la refermer.

« -Au fait ! Prends bien soin de nos affaires ! »

La porte claque doucement. Je reste assis sur mon lit, interdit. Qu'est-ce que ça veut dire ? Mon projet aurait été découvert ? Mais comment ? Je fronce les sourcils. Pourtant, rien dans mon attitude laissait deviner que j'allais fouiller leurs affaires. Rien puisque je dormais, du moins à première vue. Je n'ai pourtant pas pensé à voix haute ?

Qu'à cela ne tienne ! Je dois être légèrement paranoïaque. C'était juste une remarque ironique de plus. Pas la peine de se prendre la tête pour un abruti à la natte. Je me lève et commence à fouiller la commode appartenant à Maxwell. Pantalons noirs, chemises noires avec un col blanc, sous-vêtements noirs. Cette couleur détonne complètement avec sa personnalité. Quoique je ne le connais pas beaucoup… Et puis, il peut bien s'habiller comme il veut, cela me passe par-dessus la tête.

J'allais plonger, avec une certaine gêne, je dois l'avouer, mes mains dans le tiroir contenant ses sous-vêtements quand j'entends quelqu'un frapper discrètement à la porte. Je referme tout silencieusement et vais ouvrir la porte. Peacecraft entre dans la chambre avec un plateau-repas dans ses bras. Elle semble quelque peu surprise de me voir debout devant elle.

« -Bonsoir Heero-kun. Duo-kun nous a averti que vous étiez très fatigué et que vous n'aviez pas la force de vous lever. Mais, vous avez l'air d'aller mieux. »

Je pense mentalement à me pencher très sérieusement sur le cas de Maxwell et à la meilleure façon de le tuer. Il pourrait pas se mêler de ses affaires celui-là ! Qu'est-ce qu'il est allé raconter comme connerie ?

« -J'allais juste me rafraîchir un peu puis me coucher quand vous avez frappé. »

« -Ah. »

J'ai toujours été doué pour trouver rapidement des explications. Tanaka-sama dit souvent que je manque d'originalité dans mes excuses, mais je persiste à croire que les justifications les plus simples sont les meilleures.

« Je vous ai apporté de quoi vous nourrir un peu. Vous n'allez tout de même pas dormir le ventre vide ? »

Elle m'a apporté elle-même un plateau ? Elle ferait pas un peu de zèle la princesse ? Elle doit avoir une bonne centaine de domestiques à son service, pourquoi est-ce qu'elle quitte ses invités pour venir m'apporter un plateau-repas à moi ? Bizarre comme fille. Bah, elle est pas méchante… Juste un peu… rose (si une couleur pouvait qualifier quelqu'un)

« -Merci », je dis en prenant son plateau.

Je n'ai pas mangé depuis mon départ de L1. J'accepte donc son plateau. Mais c'est aussi un moyen de lui faire comprendre que je veux rester seul, que je veux qu'elle s'en aille. Malheureusement, elle n'a pas l'air de vouloir comprendre. Elle reste là, dans l'embrassure de la porte. Elle semble hésiter à me dire quelque chose. Mais je n'ai pas le temps.

« -Merci », je répète. « Vous devriez aller rejoindre vos invités Princesse ! »

« -Oh ! Vous avez raison. Et bien, bon appétit ! »

Je referme la porte avant même qu'elle fasse un pas. C'est totalement impoli de ma part mais j'ai autres choses à faire que faire des ronds de jambes et des courbettes devant une Princesse.

Je pose mon plateau sur mon lit et reprends ma fouille. Maxwell, en plus d'être bruyant et paresseux, semble être aussi désordonné. Il a rangé ses affaires en vrac. Quelque part, ça me facilite la tâche. Je peux retourner ses affaires, les chiffonner qu'il ne le remarquerait même pas… Je reprends donc là où j'en étais arrêté. C'est-à-dire, tiroir à chaussettes, boxers, slips et caleçons. Je me concentre très fort sur ma mission. C'est étrange. Ce n'est pas la première fois que je fouille dans les affaires des autres, et généralement, je ne ressens rien du tout. Mais là, le dégoût m'envahit. Je grimace avant de reprendre mon masque impénétrable.

J'y trouve plusieurs objets, plus ou moins étranges. Un revolver bien entretenu et chargé à bloc, quelques chargeurs de rechange, des balles, un couteau à cran d'arrêt, une sorte de mini-ordinateur ou d'agenda électronique, un bouquin qui en a vue des vertes et des pas mûres : écorné, feuilles volantes et traces ensanglantées… Sans importance. Mais tout cela confirme que Duo Maxwell n'est pas un simple étudiant ici. Et ce n'est pas non plus un pacifiste, donc aucun rapport avec Réléna. L'espèce d'agenda électronique pourrait servir à commander son Gundam à distance. L'autodestruction ou bien l'ouverture du cockpit. Les deux peut-être…

Je suppose que si je fouille les affaires de Quatre, je trouverais certainement la même chose. Ou peut-être pas. Quatre m'a l'air bien plus soigneux, et du genre à bien cacher ses armes, ailleurs que dans son tiroir à sous-vêtements. Mais ça ne coûte rien d'essayer. Je me dirige donc du côté de la commode appartenant à Winner. Comme je le pensais, il est minutieux. Ses vêtements sont bien rangés. D'où, difficulté de fouiller sans éveiller les soupçons plus tard. Cependant, je suis un expert en la matière. Au bout de deux petites minutes de fouille, je ne trouve rien. Du moins, rien de parlant. C'est-à-dire, pas d'arme, pas de mini-agenda électronique.

Bon, il ne reste plus qu'à vérifier les lits. Je regarde donc sous l'oreiller de Winner. Rien. Sous son matelas. Rien. Dans la table de chevet, toujours rien. Cela commence à devenir frustrant. Passons à Maxwell. Sous son oreiller, deux armes blanches. Sous son matelas, une arme à feu. Dans sa table de chevet, fixée au mur à sa hauteur, un livre quelconque.

Résumons : paresseux, bruyant, bordélique, et j'hésite, prudent ou paranoïaque ? Mais s'ils sont ce que je crois qu'ils sont, je pencherais pour prudent. Comme quoi, il ne doit pas avoir que des défauts…

Et puis, je ne suis pas sûr que le revolver caché sous le matelas du natté lui appartienne vraiment. En cas d'attaque, Quatre y a accès plus facilement que Duo. Donc, je dirai que cette arme est la première preuve que Quatre est un pilote de Gundam. Etrange d'ailleurs que le fils d'un homme prônant le pacifisme et le désarmement total, se soit engagé dans cette guerre.

Ça suffira pour ce soir. Je suis ici pour un moment de toute façon. Et puis, ce n'est pas ma mission première. Si je découvre que Winner et Maxwell sont bel et bien des pilotes, je ferais quoi ? A l'origine, je voulais me prouver que Quatre en était un pour pouvoir protéger son identité, mais j'avais oublié qu'ils étaient 5. Non, 4 maintenant. Il y en a un qui s'est fait sauté avec son Gundam lors de l'opération en Sibérie. Toutefois, rien ne prouve qu'il est réellement mort… Donc, si je détermine que ces deux garçons sont des rebelles, je me devrais de protéger leur identité. C'est-à-dire que je devrais aussi cacher l'identité de Maxwell.

Protéger quelqu'un qui… quelqu'un qui… qui me dégoûte, qui m'ennuie, qui arrive à détruire ce masque qui m'a prit tellement de temps à mettre en place. S'il n'était pas un de ces rebelles… Je crois que je m'en débarrasserais. Jamais je n'ai eu autant envie de tuer quelqu'un. Je n'arrive pas à m'expliquer ces sentiments si extrêmes. La meilleure solution serait de l'ignorer et de l'éviter aussi souvent que possible. Pour ma santé mentale. Je n'arrive pas à croire que je doive en arriver là !

Je sors moi aussi mes armes et les cachent dans divers endroits stratégiques. Sous mon oreiller. Sous mon lit. Dans mon sac de cours. Dans ma trousse de toilette. Derrière ma commode. Le reste, je les laisse dans mon sac de voyage en attendant de les placer le long de l'itinéraire d'évacuation. Puis je m'assoie en tailleur sur mon lit et entame mon plateau. Bien rempli par ailleurs. Je mange assez rapidement et laisse mon plateau sur la commode près de l'entrée. J'imagine qu'un domestique le rapportera demain matin.

Je me dirige vers la salle de bain pour prendre une douche. Je ressors une vingtaine de minutes plus tard, avec juste mon short de nuit. D'une main, je tiens mes vêtements et mes chaussures. De l'autre, j'essuie mes cheveux encore humides avec une serviette. Puis je me fige au milieu de la chambre, interdit.

Winner et Maxwell sont visiblement revenus de leur dîner. Mais ce n'est pas ça qui m'a bloqué. Non. C'est le regard de Maxwell. Dans un parfait accord, tous deux sont passés par le stade de la surprise. C'est vrai que c'est incorrect de se promener à moitié nu dans une chambre que l'on partage avec de parfaits étrangers, même si je sais beaucoup de choses sur eux. Du moins, sur l'un d'eux. Mais, si l'expression de Quatre passe ensuite par la gêne en détournant aussi vite que possible les yeux, Maxwell lui, fait tout le contraire. Je me sens épié, déshabillé du regard, détaillé, décortiqué… Je ne trouve pas de mots exacts. Une lueur se met à briller au fond de ses prunelles. Je fronce les sourcils, et serre la mâchoire. Je n'aime pas du tout cette expression. Une lueur prédatrice… Maxwell esquisse un sourire, hoche la tête. Il se lève et avance vers moi. Il se passe la langue sur ses lèvres.

Je crois que j'ai peur. C'est la première fois, mais… Ce regard, cette démarche, ce garçon… Il me fait peur. Pourtant, dans cette situation, il n'y a vraiment rien de « mortel ». Et pourtant, tous mes sens crient le danger. Il s'approche de moi et je retiens mon souffle. J'ai peur ce qu'il pourrait me faire. Mais j'ai aussi peur de ce qu'il pourrait ne pas me faire… Mais je ne laisse rien transparaître. J'ai affronté la mort plusieurs fois. Le danger fait partie intégrante de ma vie. Alors non ! Je ne me laisserai pas avoir par cette peur irrationnelle. Je lui offre donc mon regard le plus meurtrier possible. Son sourire s'accentue. Il passe à côté de moi.

« -Beau petit cul Hee-chan ! »

Puis il s'enferme dans la salle de bain après m'avoir mis une main aux fesses.

Quoi ? Qu'est-ce qu'il a osé dire ? Qu'est-ce qu'il a osé faire ?

« -Ne te vexe pas Heero-kun ! Duo adore provoquer les gens… C'est une manière de les tester… »

Winner me fait un sourire d'excuse.

« -Ça ne me concerne pas », je rétorque froidement.

« -Je tenais juste à te prévenir… »

Je détourne mon regard. Je jette la serviette dans la corbeille à linge et m'infiltre sous les draps. Je me tourne sur un côté pour empêcher à Quatre toute initiative de conversation. Surtout si ça doit tourner autour de ce baka natté. J'entends Winner soupirer et se coucher.

Ce que j'avais oublié, c'est qu'en me tournant sur la gauche pour éviter le blond, j'ai maintenant la porte de la salle de bain en face de moi. Quand la porte s'ouvre, je ferme les yeux et feins de dormir profondément. Malgré tout, et surtout malgré moi, j'écarte un peu les paupières. Maxwell sort face à moi, en caleçon, les cheveux lâches, portant une brosse à cheveux. Je ne peux m'empêcher d'admirer sa silhouette. Je dois avouer que malgré les apparences, il est bien bâti pour être un pilote de Gundam. Une musculature nerveuse, mais puissante. Une démarche féline, sans bruit. Comme quelqu'un ayant eu pour habitude de faire le moins de bruit possible. Quelqu'un de silencieux. Quelle ironie ! Lui, silencieux ? Une vraie pipelette en temps normal…

« -Quat-chan ! J'ai vraiment besoin de toi sur ce coup ! Je crois que j'ai battu le record mondial de nœud avec ses foutus cheveux… »

« -Ok, j'ai compris. Assieds-toi là ! »

Pendant un moment, personne ne dit rien. Et moi, je fais toujours le mort.

« -Dis Hee-chan ! T'en as pas marre de faire semblant de dormir ? »

J'aimerai vraiment savoir comment il fait pour savoir que je ne dors pas. Ma technique est pourtant parfaite. Tout le monde n'y voit que du feu…

« -Je ne crois pas t'avoir donner l'autorisation de m'appeler Hee-chan ! » je rétorque, glacial.

« -C'est normal puisque je ne t'ai rien demandé… », me répond-il.

« -Duo… », gronde Quatre. « Ce n'est pas le moment. »

Maxwell grogne. Soudain, il pousse un petit cri de douleur.

« -Aïe ! Quat-chan, j'ai pas dis que tu devais aussi embarquer ma tête avec les nœuds ! »

« -Désolé Duo. »

« -Tu n'as qu'à te les faire couper », je dis.

Silence.

« -Détrompe-moi Hee-chan ! » commence Maxwell. « Si tu t'es mis dos à nous c'est pour éviter de nous parler, non ? Commence par aller au bout des choses avant de donner des conseils stupides ! »

« -Duo ! »

Silence. Ma main s'approche lentement mais sûrement vers mon Beretta. Je vais le tuer. C'est décidé. Je vais littéralement le liquider ce type ! Pourquoi je me laisse manipuler par ce baka ? J'inspire profondément. Non, je ne me ferai pas avoir une deuxième fois. S'il a besoin de « tester les gens » qu'il se trouve quelqu'un d'autre ! Après quelques minutes, pendant lesquelles je me suis calmé, Winner finit de démêler les cheveux de Maxwell. Celui-ci pousse un bruyant soupir de soulagement. Il grimpe sur son lit et lance un joyeux « bonne nuit Quat-chan » et « bonne nuit Hee-chan » avant l'extinction des feux.

Je m'allonge sur le dos, tentant de distinguer dans le noir la planche soutenant le lit au-dessus de moi. J'entends la respiration lente de Winner. Il a dû s'endormir. Par contre je n'entends rien du côté du natté. Silencieux. Encore une chose qui ne lui ressemble pas. Ou peut-être est-ce son attitude bavarde qui ne lui ressemble pas. Qu'est-ce que j'en sais ? Et pourquoi je m'obstine à vouloir le comprendre ? Parce que, toutes ces questions que je me pose sur lui, c'est pour essayer de le comprendre. Or ce garçon, je crois bien que je ne l'aime pas du tout. Je n'ai jamais pu dire si j'aimais ou pas quelqu'un, mais lui, ça s'est imposé comme ça. Je ne l'aime pas. Un point c'est tout. C'est peut-être parce que c'est la première personne pour qui je ressens une émotion autre que l'indifférence, que je m'attarde sur sa personnalité. Franchement je ne vois pas d'autres explications.

« -Hee-chan ! Tu serais pas insomniaque dès fois ? » me demande subitement Maxwell.

Je comprends mieux pourquoi je ne l'entendais pas. Il ne dort pas lui non plus.

« -Et toi ? » je demande avec exaspération, dans l'espoir de le faire taire.

« -Pas du tout. J'arrive simplement pas à dormir… »

Et le voilà qui s'emballe et commence à me parler de tout et de rien. Raté. Je me retourne de nouveau sur le côté gauche. L'éviter et l'ignorer risque d'être plus difficile que prévu. Surtout s'il n'est pas coopératif ! Il n'est pas croyable. A se demander s'il n'a pas un dédoublement de la personnalité. J'ai l'impression d'avoir affaire à plusieurs Maxwell. Un Maxwell joyeux, flemmard… Un Maxwell sarcastique et provocateur. De quoi y perdre son latin… Sauf que ça n'a pas l'air de perturber Winner. En fait, j'ai pas l'impression que grand-chose le perturbe.

Je ferai mieux de dormir…


Le réveil de Winner sonne bruyamment. J'ouvre les yeux et m'assoie sur mon lit. Winner fait de même en se frottant les yeux, mal réveillé. Il s'extirpe de son lit et va s'enfermer dans la salle de bain, laissant son réveil continuer sa fanfare.

« -Quatre ! » beugle Maxwell. « Eteins-moi ce putain de truc ! »

Je le vois balancer son livre de chevet sur le réveil, qui tombe à terre, mais n'arrête pas de sonner. A quel point il peut être idiot celui-là ? Je sors à mon tour du lit alors que Maxwell s'emmitoufle un peu plus sous sa couverture en grognant et marmonnant toutes sortes de malédictions à propos d'un certain Shinigami. J'hausse les épaules. Je compte sérieusement demander à Réléna Peacecraft de prendre une chambre à moi tout seul.

Je me dirige vers ma commode prendre mon nouvel uniforme scolaire. Je l'enfile puis je vais préparer mes affaires de classe. Je n'ai pas eu souvent l'occasion d'aller à l'école. Cela ne doit faire qu'un peu moins de deux ans que j'y vais, et encore, pas régulièrement. En fait, depuis que j'habite chez Tanaka-sama. Je jette un coup d'œil sur l'emploi du temps. Nous allons commencer par un cours d'histoire des Colonies. La matière que j'aime le moins. L'histoire a souvent été façonnée par l'homme. Ce qu'on nous apprend, c'est une histoire partielle et partiale. Car les gouvernements ont toujours fait en sorte de cacher certaines choses, d'en modifier d'autres pour manipuler le public.

Une fois mes affaires rangées, Winner sort à son tour de la salle d'eau, lui aussi en uniforme. Il s'approche du lit superposé, grimpe sur un petit tabouret, et secoue impitoyablement Maxwell.

« -Debout Duo ! Nous devons aller prendre notre petit déjeuner. »

Maxwell grogne, se tourne et se retourne. Winner soupire et tire d'un coup sec la couverture. Maxwell proteste en insultant copieusement le petit blond qui ne perd rien de sa détermination. Puis il finit par abandonner et va s'enfermer dans la salle de bain. Moi, pendant ce temps-là, je fais mon lit. Winner fait de même. Le natté ressort au bout d'un moment, portant lui aussi un uniforme. Il grimace en passant une main entre le col et son cou.

« -Quat-chan ! » se plaint-il. « Redis-moi pourquoi je dois absolument porter ce truc immonde ! Franchement cette princesse n'a aucun goût vestimentaire. »

« -D'un, parce que c'est l'uniforme de l'école, et c'est donc obligatoire. Quant au goût vestimentaire, on peut aussi se poser des questions sur les tiens », je réponds avant Winner, avec un ton énervé.

Silence. Consterné de la part du blond. Amusé de la part de Maxwell.

« -Je vois que Hee-chan est de bonne humeur ce matin… Fais attention ! A force, tu ne pourras plus utiliser le décalage horaire comme excuse ! »

« -Je n'ai pas besoin d'excuses », je riposte froidement.

Maxwell ne répond pas. Ils se regardent avec Winner. Celui-ci secoue la tête avec un air blasé. Le natté sourit de plus belle.

« -Tu sais que j'adore les défis », lui dit Maxwell.

« -T'es irrécupérable. Heero-kun ! Suis-nous, je vais te montrer où se trouve le restaurant. »

Winner ouvre la porte de notre chambre. Par réflexe, et surtout par expérience, je m'efface pour laisser passer Maxwell avant moi. Le blond se met à mon niveau et me commente chaque partie de l'école que nous traversons. L'autre reste derrière nous ce qui ne me rassure pas du tout. Nous rentrons finalement dans l'immense restaurant pour notre petit déjeuner. Je n'ai pas le temps de le décrire qu'une horde de jeunes filles bondissent littéralement sur nous en criant de joyeux « bonjour » Et je me rends compte avec un certain effarement, que je cache, que ce Maxwell est véritablement populaire auprès de la gente féminine. Se rendent-elles compte à quel point il peut être perturbant et perturbé ? Je n'en ai pas l'impression. Maxwell discute gaiement avec chacune d'entre elle, les appelant avec des diminutifs. Je vois qu'il n'est pas familier seulement avec moi et Winner. D'ailleurs, celui-ci a l'air d'avoir aussi son fan club. Mais c'est déjà plus compréhensible. Il est de bonne famille, aimable, gentil, souriant, d'après les critères féminins beau, et certainement normal. Hormis le fait qu'il soit un pilote de Gundam, chose que je dois encore prouver, il a plutôt tout pour lui. L'effervescence se calme rapidement et tous les regards convergent en un seul point : moi.

« -Regardez ! Un nouveau ! »

« -Il est mignon ! »

« -Tu t'appelles comment ? »

« -Tu viens d'où ? »

« -Viens t'asseoir avec nous ! »

« -Tu es arrivé quand ? »

« -C'est le garçon d'hier ! »

Je suis vite dépassé par les évènements. Quand je disais que je ferai un effort de sociabilité, je ne pensais pas à quel point cela allait être difficile et compliqué ! Comment voulez-vous gérer autant de conversations à la fois ? C'est humainement impossible. Winner s'avance vers le groupe de jeunes filles agglutinées et stoppe leurs questions en levant simplement une main.

« -Il s'appelle Heero Yuy, il est arrivé hier. Vous aurez toute la journée pour faire sa connaissance. En attendant, déjeunons ! »

Les filles hochent la tête et retournent chacune à leur table. Seule une fille avec des sourcils bizarre qui lui donne un air de… en fait je ne trouve pas d'autre mot que psychopathe, s'avance vers nous en me tendant la main. Je suppose qu'elle veut que je la serre. Ce que je fais.

« -Bonjour ! Je suis Dorothy Catalonia, la petite fille du président de la Fondation Romefeller. »

Pas besoin de faire des recherches sur elle. Je la classe définitivement dans la catégorie « ennemi ».

« -Heero Yuy. »

« -C'est ce que j'avais cru comprendre. Je te propose de venir déjeuner à ma table. »

Je n'ai pas le temps de répondre que mes épaules sont recouvertes par un bras appartenant à Maxwell. Je vois qu'il a fait de même avec les épaules de Winner.

« -Désolé Dorothy ! Mais il mange avec nous aujourd'hui. »

Il m'entraîne avec lui et le blond dans un coin de la salle. Arrivé devant une table, il nous lâche et m'invite à m'asseoir.

« -C'est bon ! On va pas te manger », riposte Maxwell devant mon hésitation. « Et puis, je suis sûr que tu préfères manger n'importe où qu'avec elle… »

Il a raison. C'est la seconde personne la plus antipathique que je connaisse. La première étant Maxwell. Bizarrement, manger avec lui me dérange moins que manger avec elle. Je m'assoie donc à côté de Winner.

« -Content de voir que nous sommes d'accord au moins sur un point », constate Maxwell.

« -Hn. »

« -Au fait Quat-chan, on commence pas quoi ce matin. »

« -Histoire des Colonies. »

« -Génial », raille Maxwell. « Juste ce qu'il me fallait. Et qu'elle est l'heureuse élue ? »

« -Tu faisais quoi au dernier cours ? » demande Winner avec une certaine impatience.

« -Je dormais, je crois. »

« -Pourquoi je pose la question ? Aujourd'hui, on continue l'étude de L2. »

« -Re-génial ! Quat-chan, je me sens pas bien. Je crois que je vais faire un tour du côté de l'infirmerie. »

« -Duo, ne commence pas… »

Maxwell bougonne je ne sais pas trop quoi, mais il me semble entendre le mot « Shinigami ». Moi, je continue à avaler mon petit-déjeuner sans rien dire. Je les laisse faire la conversation. Winner me sollicite de temps en temps, mais je me contente de répondre laconiquement si ce n'est par onomatopées… A ces moments-là, Maxwell s'acharne vigoureusement sur ses céréales. J'ai l'impression qu'il se contient. Qu'il cache une certaine colère. Je suis soulagée de constater que ce tapage sur les nerfs marche dans les deux sens.

Lorsque la cloche sonne, nous nous dirigeons vers notre salle pour le cours d'histoire. En entrant dans la salle, Réléna se lève et se dirige précipitamment vers moi. Elle me serre la main avec chaleur. Tout le monde s'installe. Je remarque mes deux colocataires, assis au dernier rang, séparé par une seule chaise de Dorothy qui me fixe intensément.

« -Mesdemoiselles et Messieurs, je vous prie de faire un bon accueil à notre nouveau camarade, Heero Yuy-kun », commence Réléna. « Heero-kun, va t'asseoir entre Duo-kun et Dorothy-san. »

Je me demande si cette fille me déteste… Si oui, pourquoi ? Mais sans un mot, je prends la chaise et m'installe avec le sourire satisfait de Maxwell. Dorothy m'adresse un petit signe de la main. Et un mal de crâne menace de m'envahir.

« -Donc, où en étions-nous arrêté la dernière fois ? » demande Réléna.

Une fille lui répond et Réléna continue son exposé. Winner prend vaguement des notes, Maxwell s'adosse au dossier de sa chaise et reste en équilibre sur les pieds arrière. Il se balance, les mains croisées derrière la tête, regardant pensivement le plafond et mâchouillant son crayon. Dorothy fixe pensivement Réléna avec un air supérieur. Celle-ci continue son monologue. L'épidémie meurtrière, la corruption politique et militaire, la misère, les tragédies, comme celle de l'Eglise Maxwell, la hausse de la criminalité… Bref, pas beaucoup de réjouissance pour cette Colonie.

La journée se termine assez vite après ça. Entre, comme prévu, les questions personnelles auxquelles je réponds à moitié, les cours ennuyeux, l'énervant Maxwell. Point positif de cette journée : j'ai pu examiné un peu plus les lieux, dressé une liste des principaux suspects et je commence à apprécier Quatre. La pureté qui émane de ce garçon est telle qu'il est impossible de croire qu'il y ait la moindre malice, fourberie dans ce garçon. Rien avoir avec ce Maxwell. Avec ses réflexions cyniques et ironiques, à la limite du harcèlement moral. Mais maintenant j'ai compris qu'il ne faisait ça que pour provoquer une quelconque réaction de ma part. Et même s'il m'en coûte de me retenir d'exploser, je fais tout pour ne pas lui donner satisfaction. Tant bien que mal, je garde mon masque impénétrable.

La nuit est tombée depuis maintenant près de 4 heures. Mais je ne dors pas. J'entends les régulières respirations de Winner et Maxwell. Signe évident qu'ils dorment. Enfin ! Je me demandais quand est-ce qu'ils allaient s'endormir, surtout Maxwell. L'essentiel est que maintenant, je peux faire un tour. Un itinéraire d'évacuation attend d'être préparé. Je me glisse silencieusement hors du lit. Je m'empare de mon sac à dos, mon arsenal personnel. J'enfile mon débardeur vert et mes chaussures. Je sors tranquillement de la chambre et traverse les couloirs de l'école.

D'après les plans que j'ai inspecté dans l'avion, cette école a une partie souterraine dont certains tunnels ressortent loin de la ville, dans la forêt qui la borde. Etrange pour une simple école… Je trouve le conduit d'aération qui m'y mènera. Je rampe dans l'étroit conduit, et au bout d'une demi-heure, j'arrive à en sortir. J'atterris enfin sur un sol ferme. Je regarde autour de moi et c'est la stupéfaction.

« -Je vois que tu as trouvé Deathscythe, Sandrock et Wing », me dit une voix avant d'entendre le bruit spécifique d'un revolver qu'on arme.

Je me retourne doucement, les mains en l'air et tombe sur deux yeux améthystes qui me fixent impitoyablement. Puis le canon d'un revolver, le chien ramené en arrière.

« -Que fais-tu ici Heero ? »

« -Je croyais que tu dormais. »

« -J'ai un sommeil très léger. Alors ? »

« -Je n'ai rien à dire. »

Une balle siffle près de mon oreille tandis que le bruit se répand en écho dans tout le hangar. Je vois qu'il ne plaisante pas. Mais moi non plus. D'un coup de pied retourné, j'envoie valdinguer le revolver de Maxwell qui glisse sous un établi. Dans le moment de surprise, je le cogne d'un crochet du droit. J'enchaîne par un uppercut mais Maxwell l'arrête dans l'élan. Il me retourne le bras, me fait un croc-en-jambe et me plaque au sol, sous lui. Soudain, une lame vient se ficher près de ma gorge.

« -Ne m'oblige pas à te tuer Heero ! » me menace-t-il.

Il relâche la tension au niveau de mon bras. Je sens une vague de frustration m'envahir. J'ai perdu. J'ai perdu contre lui, en plus ! Maxwell doit sentir que je capitule, puisqu'il me relâche complètement. Il éloigne sa lame de ma gorge. Je me mets sur le dos. Maxwell est assis à côté de moi, jouant avec son couteau à cran d'arrêt. Je passe ma main sur mon visage.

« -C'est bien ce que je pensais. Winner et toi êtes des pilotes de Gundam. »

« -En effet. Je suis le pilote du Deathscythe. Quant-chan pilote Sandrock. Lucrézia Noin ainsi que d'autres combattants de la liberté conduisent les Taurus Blancs que tu peux voir au fond. »

« -Si tu me dis tout ça, c'est que tu as l'intention de me tuer. Ne te donne pas tant de mal ! Je me fiche de tout ça et fais ce que tu as à faire ! »

Maxwell me regarde droit dans les yeux. Je soutiens son regard avec une lueur de défi. Je ne crains pas la mort. Un éclat de rire me fait sortir de mes pensées.

« -Je ne te tuerais pas Hee-chan ! Sauf si tu es un espion de Oz, ce que tu n'es pas… »

« -Pourquoi ? » je demande malgré moi.

« -Parce que tu es Heero Yuy. »

Il se relève et me tend une main pour m'aider à faire de même. Je la saisis. Une fois debout, Maxwell m'attire à lui.

« -Et parce que tu m'amuses », me chuchote-t-il à l'oreille avant de me la mordiller doucement.

Puis il s'éloigne dans un petit rire. Avant que je puisse réagir. Avant que je puisse… le tuer. Bon sang ! C'est la deuxième fois qu'il réussit à m'avoir. C'est du harcèlement là ! Et comment ça, je l'amuse ? Je le foudroie du regard alors qu'il récupère son arme. Il a dû sentir toute la lourdeur de mon regard, car il éclate de rire.

« -Tu sais qu'avec un peu d'entraînement, tu pourrais tuer rien qu'avec tes yeux ? Sauf que moi, tu ne pourras pas me tuer. »

« -Je te trouve bien sûr de toi. »

Il me sourit simplement, mais je me rends bien compte que son sourire est faux. Il fait bonne figure. Je me demande s'il est plus doué que moi pour cacher ses émotions. Du moins, ce qui le touche vraiment.

« -Cela va poser un problème », je commence. « Moi aussi, je suis increvable. »

Maxwell éclate de rire. Il me fait signe de le suivre. Il s'approche d'un mur et appuie sur un bouton dans une petite cavité. Rien ne se passe. Maxwell fronce les sourcils et tout son corps se tend. Il sort son revolver et l'arme. Il se plaque ensuite contre le mur. Je fais de même. Son attitude m'indique clairement qu'il se passe quelque chose d'inhabituelle. Le mur s'ouvre et je réalise qu'il s'agit en fait d'une cage d'ascenseur. Une personne en sort doucement. Un homme. La trentaine. Les cheveux bruns. Je n'ai pas le temps de le détailler un peu plus qu'une déflagration retentie. Une giclée de sang et de matière cervicale m'asperge. L'homme s'écroule au sol laissant apparaître un Maxwell, le visage dur, les yeux aux reflets métalliques, le revolver en l'air.

« -Désolé Hee-chan ! T'es bon pour la douche… »

Il s'empare d'un portable. Il compose vaguement un numéro et attend que quelqu'un réponde.

« -Allo ? » demande une voix endormie.

« Lucrézia ? C'est Duo ! »

« -Duo ? Non mais t'as vu l'heure ! »

« -J'ai pas de montre. Bref, c'est pas le sujet. J'ai buté un type. Je crois que c'est notre espion de Oz. »

« -Tu crois ? »

« -Je le connais pas. C'est suffisant. »

« -Et si c'était un technicien ? »

« -Tant pis pour lui. Il n'avait qu'à pas se promener près de l'entrepôt tout seul. »

« -Et toi, qu'est-ce que tu y fais ? »

Il me regarde.

« Somnambulisme », il répond. « Et puis, je suis sûr qu'il est pas de chez nous ce gars. »

« -Si tu le dis. Mais, pourquoi tu m'appelles ? »

« -Pour que tu fasses disparaître le corps. Il est pile devant l'ascenseur. »

« -Attends une minute ! C'est toi qui le tues, et c'est moi qui dois m'occuper du cadavre ? »

« -Tout à fait. »

« -T'es gonflé ! »

« -Comme si tu ne le savais pas depuis le temps. »

« -Attends Duo ! »

« -Bonne nuit Lucrézia ! »

Il raccroche. Il grimpe dans l'ascenseur sans un regard pour le cadavre. Je monte moi aussi dans la cage. Le trajet se fait en silence. Maxwell n'est pas un gars si léger finalement. C'est vrai, il est paresseux, bordélique, bruyant mais il sait rester silencieux, froid. Un assassin. La Mort.

On rentre enfin dans notre chambre. Je me dirige vers la salle de bain pour me débarbouiller. Je ne ressens aucun dégoût. Je suis habitué à ce genre de tâches. Ce n'est pas la première fois que j'en suis recouvert. Je me douche vite fait puis j'enfile juste mon short de nuit. Quand je reviens dans la chambre, Maxwell est debout devant sa commode, pensif. Il referme le tiroir et pivote vers moi, le sempiternel sourire aux lèvres. Lui aussi est en tenue de nuit. On se dirige chacun vers notre lit. Mais avant de grimper, il me prend un poignet, il enroule son autre bras autour de ma taille et m'attire contre lui. Il pose ses lèvres sur les miennes avant de mordiller ma lèvre inférieure. Il me repousse et bondit sur son lit en se cachant sous sa couverture. Je reste interdit. Trois fois ! Il m'a eu trois fois ! Où sont donc passés mes réflexes ? Pourquoi mes sens ne me préviennent pas du danger quand il arrive ? Je porte une main à mes lèvres.

« -Toi… »

Ma voix résonne comme une menace. Pilote ou pas, je vais le liquider ce type ! Je ne comprends pas ce dégoût qui m'envahit à chaque fois qu'il m'approche mais je ne vais pas le supporter encore longtemps.

« -Bonne nuit Hee-chan ! » chantonne Maxwell.

« -Omae o korosu », je marmonne en allant m'emmitoufler sous mes draps.


J'ai passé une nuit agitée à me tourner et me retourner dans tous les sens. Franchement, je ne comprends plus rien. Maxwell, ce type, je lui en veux. C'est évident maintenant, je lui tiens rancune. Et le pire dans toute cette histoire, le plus pathétique, c'est que je sais même plus pourquoi je lui en veux. Tout est confus. Et je ne supporte pas quand tout est confus. C'est bien plus simple quand je n'ai aucun doute. Ou quand mes sentiments sont clairs. L'indifférence, il n'y a rien de plus facile. Le problème est que je ne suis pas indifférent face à Maxwell. Bon, c'est vrai, que je ne le suis pas non plus face à Winner. Mais lui, je l'aime bien. Il n'y aucun problème avec lui. Mais Maxwell… C'est totalement différent. Je ne l'aime pas. Tout en lui m'exaspère. Pourtant en me disant cela, j'ai une vague impression de mensonge. Quand je me dis « je ne l'aime pas » je sens que ce n'est pas tout à fait vrai. Il y a autre chose qui me dérange. Quelque chose qui manque. Sauf que je ne sais pas quoi. J'ai beau cherché, je ne sais pas d'où ça peut venir.

Le réveil de Quatre se met en route. Le blond se relève, se frotte les yeux et se dirige vers la salle de bain. C'est automatique chez lui, j'ai l'impression. Son réveil est réglé comme du papier à musique. Je reste allongé. Je regarde pensivement la planche au-dessus de moi. Quand des paires d'yeux croisent les miens.

« -Bonjour Hee-chan ! » claironne Maxwell avec un grand sourire.

Je le vois s'approcher doucement de moi. Mais cette fois, je suis paré. Je lui colle le canon de mon Beretta sur le nez. Mais cela ne fait pas réagir Maxwell comme je m'y attendais. Au lieu d'une réaction apeurée comme je l'avais espéré, il éclate une nouvelle fois de rire. J'ai le vague sentiment qu'il ne me prend pas au sérieux. Si je lui colle une balle dans la tête, peut-être qu'il me prendra enfin au sérieux…

« -Ok, ok, j'ai compris Hee-chan ! T'es pas du matin… Et d'où tu sors ce flingue ? »

« -Oreiller », je réponds.

Il s'éloigne. Il s'étire bruyamment. Je fixe la natte de Maxwell qui se balance au rythme de ses pas. Comment peut-il avoir des cheveux aussi longs ? Ca ne le dérange pas lors de ses missions ?

« -Si tu continues de fixer ma natte comme ça, je vais finir par t'hypnotiser. Remarque ça pourrait être drôle… », commente Maxwell.

« -… »

« -T'aimerais bien savoir comment j'ai deviné que tu fixais ma natte, hein ? Je vais te le dire : j'ai des yeux derrière la tête. Je vois tout. »

« -Tu as surtout un miroir face à toi », je rétorque, énervé.

Je me lève à mon tour et vais récupérer l'uniforme. Une fois habillé, je me rends compte que Maxwell n'a pas du tout mit son uniforme. Mais ses vêtements noirs qui, maintenant assemblés, ont l'air de faire partie de la panoplie du petit prêtre. Encore plus étrange. La personnalité de Maxwell n'a absolument rien avoir avec la religion, il me semble.

Quatre sors de la salle de bain, un peu comme un somnambule. Il s'approche du lit de Maxwell et grimpe sur le tabouret.

« -Duo ! Debout, c'est l'heure ! Et discute pas ! »

Il tire la couette d'un coup sec, descend du tabouret et se prépare à recevoir comme tous les matins, je présume, les insultes très créatives d'un certain natté.

« -Je suis là Quat-chan ! »

« -Duo ? » s'étonne Winner, les yeux écarquillés, bouche bée.

« -Ferme la bouche Quat-chan ! Tu vas gober les mouches. Et rassure-toi, ça ne se produira pas deux fois ! »

Winner hoche la tête et regarde Maxwell d'un air suspicieux. Apparemment sa confiance envers le natté est assez limitée puisqu'une certaine crainte envahit son regard.

« -Et puis, ce n'est pas la peine de préparer tes affaires, on va pas en cours ! »

« -Ah… Ah bon ? Heu… Pourquoi ? »

« -Parce que Hee-chan a quelque chose à nous raconter. »

« -Je n'ai rien à vous dire », j'objecte.

« -Figure-toi, continue Maxwell se moquant éperdument de ce que je peux bien dire, qu'hier soir, Hee-chan a fait la rencontre de Deathscythe, Sandrock et Wing. Ainsi que d'un espion de Oz mais ça reste à vérifier. »

Quatre dirige immédiatement ses yeux vers moi.

« -Dans ce cas… »

Il s'avance vers la porte de la chambre et la ferme à clé. Pendant ce temps, Maxwell vérifie le verrouillage des fenêtres. Je me sens vaguement pris au piège et je n'aime pas du tout cette sensation.

« -Vas-y Heero ! On t'écoute », dit Quatre en s'asseyant sur son lit.

Je crois que je n'ai pas vraiment le choix. Et puis, ce n'est pas comme si on était ennemi. Du moins, nous avons tous trois un ennemi commun.

« -Très bien. Je suis ici en mission afin de protéger Réléna Peacecraft d'une future tentative d'assassinat camouflée par une attaque du Royaume de Sank. »

« -Ils veulent assassiner Réléna ? Ils vont attaquer le Royaume de Sank ? »

« -Ce n'est pas étonnant Quatre. Maintenant que Zechs a quitté Oz, et que Treize est dans une mauvaise posture pour une divergence d'opinion, Réléna n'a plus aucune protection. »

« Oui. Et comme le Royaume de Sank accueille de plus en plus de partisans de la paix… Heero, qui t'as donné une telle mission ? »

Je fais mine de réfléchir. Ils n'ont pas à connaître mes contacts. Et puis franchement, je ne vois pas en quoi cela pourrait les avancer… En plus, moi-même je ne le connais pas.

« Je ne connais que son pseudonyme », je réponds.

« -Dis toujours », encourage Winner.

« -A quoi ça va te servir Quat-chan ? »

« -Juste à vérifier mon intuition. »

« -Il s'appelle Jhogs. »

« -J.H.O.G.S ? » demande Winner.

« -Oui »

Silence. Ils se regardent pensivement. Soudain, Maxwell écarquille les yeux.

« -Non ! Tu déconnes ? »

« -Pourquoi pas ? »

« Hee-chan ? On pourrait lui parler à ton Jhogs ? »

« Pourquoi faire ? » je demande agressivement.

« -Fais-nous confiance Heero ! Nous pensons juste savoir qui c'est et si on ne se trompe pas, cela pourrait expliquer bien des choses… »

J'hausse les épaules. Je prends mon ordinateur portable et l'allume. Je constate que j'ai un nouveau message. Dont l'expéditeur est Tanaka-sama. Je l'avais complètement oublié celui-là.

« -Tiens Hee-chan ! T'as un e-mail ! »

« -Merci, je n'avais pas vu… », je riposte un rien agacé.

« -Ben tu l'ouvres pas ? »

« -Duo ! Ca ne nous concerne pas ! »

« -En fait si, un peu », je réponds. « Tanaka-sama est l'homme chez qui j'habite en échange d'informations. La dernière personne sur qui je devais enquêter, c'est toi Winner. »

« -Moi ? Pourquoi ? »

« -Trop long à expliquer. »

J'ouvre ma boîte à e-mail.

To : Loyh

From : Tanaka-F

Object : rapport

Je n'ai pas reçu ton rapport hier. J'espère que tu as trouvé les informations que je t'ai demandées. Dans le cas contraire, je te donne jusqu'à demain pour le prouver.

Tanaka-sama.

Je lui réponds assez froidement que non, je n'ai encore rien trouvé de définitif et que non, demain je n'aurais toujours pas les informations qu'il cherche dans la mesure où la confiance ne se gagne pas si vite et que s'il voulait réellement ses informations, il devra attendre le temps nécessaire. Mais s'il n'est pas capable d'attendre plus longtemps, je pourrais toujours rentrer et faire mes recherches sur Internet mais cela prendra beaucoup plus de temps. Puis j'écris enfin un e-mail pour Jhogs.

To : Jhogs

From : Loyh

Object : cours par correspondance : problème.

Mon sujet sur la protection de l'environnement m'a apporté beaucoup plus de difficultés que prévu initialement. J'aurais besoin de vous en parler sur le service de conversation privée.

Merci, votre élève Loyh

J'envoie le message.

« -Cours par correspondance ? » demande Quatre.

« -C'est notre couverture. »

« -Loyh ? » m'interroge Maxwell.

« -Lowe Odin Yuy Heero. Loyh. »

« -Pourquoi un tel surnom ? »

« -Odin Lowe est celui qui a assassiné Heero Yuy. Mais ça été aussi mon mentor pendant quelques années. J'ai pris le nom de Heero Yuy après sa mort pour garder en mémoire sa bourde monumentale… »

Silence. Maxwell me regarde bizarrement. J'ignore ce que signifie ce regard. Et je doute de le savoir un jour. Un bruit sonore m'averti la réception d'un message.

To : Loyh

From : Jhogs

Object: cours par correspondance : réponse au problème.

Nous avons bien reçu votre message et nous sommes disposés à vous aider dans vos travaux de recherches. Nous vous donnons donc rendez-vous sur le site de conversation privée dès réception de ce message.

Merci de votre compréhension.

La direction Jhogs.

Parfait. Penchés au-dessus de moi, Maxwell et Winner suivent attentivement les opérations que j'effectue. Je me connecte sur le site de conversation privée. J'aperçois le pseudonyme de Jhogs.

Loyh : Bonjour Directeur Jhogs. Merci d'avoir répondu si vite.

Jhogs : C'est toujours un plaisir de pouvoir aider l'un de nos meilleurs élèves.

« -Hee-chan ! Je pourrais lui parler… Si c'est bien celui qu'on pense, il comprendra. Dans le cas contraire, trouve une excuse ! »

Je lui accorde avec mauvaise volonté l'autorisation. Mais bon, le regard insistant de Winner m'a convaincu. Maxwell s'assoie dans mon dos, passe ses bras autour de ma taille et pose son menton sur mon épaule. Je suis sûr qu'il le fait exprès ! Maxwell pianote quelques mots.

Loyh : Ici Shinigami ! Voudrais parler à Tête de Bolet, alias la Peste !

Mais qu'est-ce qu'il raconte cet abruti ? Winner, à côté se retient de rire. Il met sa main devant sa bouche essayant d'étouffer son fou rire. Pendant ce temps, le natté m'enserre la taille et me garde tout contre lui. Je fais preuve d'une patiente à toute épreuve. Parce que je sais que ce n'est pas le moment de le tuer. Et puis je me rends compte, avec un soupçon de défaitisme, que je pourrais dire n'importe quoi pour qu'il me lâche, il fera exactement le contraire, se collant un peu plus contre moi. Et puis, je vais enfin avoir certaines réponses à propos de ce Jhogs dont je ne connais toujours pas l'identité.

« -Si avec ça, il comprend pas… », marmonne Maxwell dans le creux de mon cou.

« -Tu crois pas que t'y es allé un peu fort Duo ? »

« -Non. Si j'avais été plus correct, il aurait eu des doutes. »

Jhogs : Rendez-vous à la maison Shinigami, alias la Mort !

« -T'avais raison Quat-chan ! »

« -On dirait oui. »

« -Alors vous le connaissez ? » je demande.

« -Ouais. Viens ! On va te le présenter. »

Maxwell se relève suivit par Winner. Je les suis ensuite dans les couloirs jusqu'à un ascenseur. Celui qui mène aux Gundams. Le hangar est vide. Maxwell me conduit vers la passerelle qui conduit aux cockpits. Il entre dans un Gundam noir avec d'étranges ailes dans le dos. Il s'assoie dans le fauteuil et allume le système central. Les écrans autour de lui se teintent de bleu. Puis un homme avec une espèce de boléro sur la tête, un nez crochu et une cicatrice sur la joue apparaît.

« -Sale voyou ! Qu'est-ce que tu manigances encore ? »

« -Attends papy ! C'est à moi de te demander ça ! »

« -Sale petit emmerdeur ! »

« -Vioc à la manque ! »

Et ils continuent de s'insulter copieusement. Winner pose une main sur mon avant-bras.

« -Au cas où tu ne les croirais pas encore fous, ils se disent juste bonjour. »

« -Trop tard », je réponds.

« -Bref papy, Hee-chan avec moi. »

« -Hee-chan ? »

« -Le gars que vous avez embauché pour des clopinettes, si ce n'est pas gratuitement, pour sauver la peau à notre seul espoir de paix. »

« -… J veut lui parler. Seul. »

Maxwell descend de son siège et m'invite à m'y asseoir.

« -Ok, Hee-chan. Je vais refermer le cockpit. T'appuies sur ce bouton pour en sortir. Sinon, touche à rien ou tu auras de mes nouvelles ! »

J'hoche la tête. Maxwell referme tout et je me retrouve seul dans le noir avec ce drôle de bonhomme. D'ailleurs celui-ci fait place à un autre homme tout aussi bizarre. Avec des lunettes spéciales et une main robotisée.

« -Bonjour Heero Yuy… »


Je ressors une demi-heure plus tard. Maxwell et Winner m'attendent sagement devant le Gundam.

« -Winner ! Maxwell ! J'aurais besoin d'apprendre à piloter le Gundam Wing aussi vite que possible. »


Pendant le reste de la journée, Winner et Maxwell m'apprennent à manipuler Wing. Heureusement, j'apprends très vite. J'aurais besoin de quelques jours supplémentaires pour le connaître parfaitement. Seulement, rien ne remplace l'expérience au combat. Je saute même le repas du soir avec Maxwell pour perfectionner mon maniement. D'autant plus que les autres Gundams ne peuvent pas voler, donc, il faudra que je me débrouille seul à ce niveau-là avec pour seule aide, les plans du Docteur J, créateur de Wing.

Nous rentrons enfin dans notre chambre. Winner n'est pas revenu du repas avec Réléna. Maxwell s'allonge sur le lit appartenant au petit blond pendant que moi, je vais dans la salle de bain. Après une bonne douche revigorante, je repense à cette journée. Maintenant je dois faire équipe avec Winner et Maxwell. D'après ce que j'ai pu comprendre, Winner est le leader de notre groupe, celui qui assure la cohésion. Maxwell est le plus efficace dans ses missions. Les deux autres, je n'en ai pas entendu parler.

Soudain, un reflet dans le miroir capte mon attention. Une silhouette trop connue. Une silhouette trop énervante et collante. La silhouette de ce baka natté de Maxwell. Je me retourne brusquement et place mon fidèle Beretta entre nous. Maxwell stoppe net.

« -Dehors ! » je menace.

« -Et rater un aussi beau spectacle ? Sûrement pas ! »

« -Omae o korosu ! »

« -Ça m'étonnerait Hee-chan. »

« -Omae o korosu ! » je répète encore plus froidement que possible.

« -Ah Hee-chan et ses tendres mots d'amour ! Je te dis que tu ne pourras pas le faire. »

« -Je le ferai. »

« -Très bien. Fais-le ! »

J'hésite.

« -Tu vois ? »

Je tire. Immédiatement, je regrette mon geste. Mais Maxwell est toujours debout devant moi. Seul le mur derrière arbore un joli petit trou. Je n'arrive pas à croire que j'ai manqué ma cible ! D'habitude, je ne manque jamais ce que je vise. Alors pourquoi ?

Soudain, la porte s'ouvre avec fracas laissant apparaître Winner, essoufflé. Maxwell ne se départ pas de son sourire ironique et ses yeux me toise avec une expression de triomphe. Bon sang ! Je le jure. Je le tuerai ! Je ne sais pas pourquoi j'ai hésité mais mes moindres scrupules s'évanouissent sous ce regard. Winner nous observe ne cachant pas son inquiétude.

« -Qu'est-ce qui s'est passé ? » demande-t-il.

« -Rien du tout Quat-chan ! Juste un petit différend. »

Maxwell sort de la salle de bain en sifflotant. Je range mon revolver sous l'œil inquisiteur de Winner.

« -Tu veux qu'on en parle ? » me demande-t-il.

« -Parler de quoi ? » je réponds avec humeur.

« -De ce dégoût qui te torture l'esprit depuis quelques jours. Ou devrais-je dire depuis quelques heures… »

« -Je ne ressens aucun dégoût. »

« -Heero ! Je suis un newtype. Mon domaine est l'empathie. Ce que je ressens chez toi est un profond dégoût. N'essaye pas de me le cacher, ça ne sert à rien. »

« -Et alors ? Maxwell me dégoûte. Il n'y a pas de quoi en faire toute une histoire. Et puis, empathie ou non, cela ne te regarde pas. »

Winner reste silencieux en m'observant. Mais il ne bouge toujours pas d'un pouce. Je pense sérieusement à le menacer de mon arme, lui aussi.

« -Je peux te poser une question Heero ? »

« -Dis toujours ! » je marmonne.

« -Es-tu sûr que ce soit Duo qui te dégoûte ? Es-tu sûr que ce soit son contact qui t'écoeure ? »

« -Je ne vois pas autre chose. »

« -Non, tu ne veux pas voir autre chose. C'est totalement différent. »

« -Et qu'est-ce que tu veux que j'y vois ? » je demande, agacé, ma voix montant d'un cran.

« -Pour moi, Heero, cet écoeurement, c'est juste un transfert. Ce n'est pas Duo qui te dégoûte mais ce que tu ressens pour lui. Alors que tu t'étais promis de plus jamais rien ressentir pour qui que ce soit, pour ne pas te mettre en danger. Enfin de compte, tu te dégoûtes toi-même parce que tu n'arrives pas à tenir cette promesse.

« -… »

« -Heero, je suis très perspicace et je dois avouer que mon empathie m'aide beaucoup. Et tu n'es pas le seul à faire des recherches. J en connaît un morceau sur toi… Tu devrais y réfléchir. »

Winner sort de la salle de bain sans un mot de plus. Bon sang ! Mais comment il fait pour deviner tout ça ! Il ne me connaît même pas et pourtant j'ai l'impression qu'il me connaît plus que moi-même.

Réfléchissons posément ! Bon, première nouvelle, Maxwell ne me répugne pas. Partons de là. S'il ne me révulse pas, il me fait quoi ? Je ne vois pas du tout. Pourquoi est-ce que Winner est venu mettre son grain de sable ? Il n'aurait pas pu rester en dehors de tout ça ? Bon. Il n'y a pas trente-six solutions, il faut que j'aille parler à ce natté. Il faut que je le voie. Alors peut-être que je saurais ce que j'éprouve pour lui. Je m'habille et donc me rends compte pour la première fois que j'étais nu durant toute cette histoire. D'où la remarque de Maxwell à propos d'un certain spectacle. Je sors précipitamment de la salle de bain. Winner est allongé sur son lit entrain de lire.

« -Il est sûrement dans son Deathscythe », me dit-il simplement sans lever les yeux.

« -Cette attitude te coûtera un jour la vie, Winner », je grogne.

« -Mais oui, Heero… Bonne chance ! »

Je claque la porte de la chambre furieusement. Je franchis quelques couloirs à grand pas. Je prends donc l'ascenseur, monte sur la passerelle et me poste devant le cockpit du Deathscythe. Maxwell y est assis, les yeux fermés. Je ne le crois pas. Il dort ! Alors qu'il lui faut au moins deux bonnes heures pour s'endormir, si ce n'est plus, il ne lui faut que quelques minutes dans son cockpit. Je m'approche pour le réveiller. Mais je retiens mon geste. Je pense que c'est une bonne situation pour évaluer mes sentiments à son égard. Pour pouvoir faire le point, il me faut Maxwell en face. Réveillé ou pas n'a aucune importance. C'est même plus facile s'il est endormi. Je le contemple donc. Bon. Premier point… Il est beau. Est-ce que ça peut m'aider ? Non. Je ne pense pas que la beauté attire ma répulsion ou mon amitié. Donc, il y a quelque chose d'autre. Son caractère ?

Petite liste récapitulative : paresseux, bruyant, goinfre, insouciant, prudent, silencieux, dur, mélancolique, joyeux… C'est définitif : ce garçon est atteint d'un dédoublement de la personnalité. Le côté enfantin avec paresseux, bruyant, goinfre, joyeux. Le côté plus sombre de sa personnalité : prudent, silencieux, dur, impitoyable et mélancolique. Bien, maintenant que ça c'est fait, qu'est-ce que j'aime en lui ? Ou bien qu'est-ce que je déteste ?

Tout.

C'est le déclic. J'aime tout en lui et je déteste tout en lui. Je l'envie aussi. C'est peut-être pour ça que je lui en veux autant. Son côté joyeux, j'aimerais pouvoir être comme lui. Sourire, rire. Deux choses que j'aime. Je comprends donc pourquoi je me laissais si facilement avoir ! J'entrais dans son jeu. Je n'attendais qu'une chose, c'est qu'il me provoque pour que mes réactions incontrôlées le fassent sourire. Mais je déteste sa part sombre. Et ça, je ne me l'explique pas. C'est déjà un bon début. Je peux retourner me coucher maintenant. Je pivote pour descendre quand deux bras m'enserrent la taille et m'attirent sur les genoux de Maxwell.

« -Où est-ce que tu vas comme ça ? Tu crois que tu peux me mater comme ça et t'enfuir comme un voleur ? »

« -Maxwell ! Lâche-moi ! »

« -Non. Moi, c'est Duo. Et Winner, c'est Quat-chan. Les deux autres, c'est Tro-tro et Fei-Fei. On est coéquipier maintenant, tu peux nous appeler par nos prénoms. »

« -Maxwell… »

« -Duo, Hee-chan. Duo. »

Je soupire.

« -D'accord. Duo, lâche-moi ! »

« -Le mot magique ? »

« -Omae o korosu. »

« -Ah non. Y a erreur ! Un gage. »

Je sens ses lèvres se poser à la base de mon cou alors qu'il resserre un peu plus son étreinte.

« -Très bien, très bien », je capitule. « Lâche-moi Duo, s'il te plait. »

« -… Non. »

Je me débats de toutes mes forces mais Maxwell ne lâche pas prise. Il en rigole même. Je vais le tuer. Je vais le tuer. Je vais le tuer… Mes pieds prennent appui sur le fauteuil et je me pousse en avant. Mais Maxwell est attaché à moi comme une moule à son rocher et nous tombons tous les deux sur la passerelle. Le natté m'écrase de tout son poids. J'en ai le souffle coupé.

« -Excuse-moi Hee-chan ! » fait-il en se dégageant.

Mais il me garde toujours contre lui.

« -Pourquoi ? » je demande.

« -Pourquoi quoi ? »

« -Pourquoi tu cherches tellement à me mettre en colère ? »

« -Parce que j'aime pas les masques. »

« -Pourtant toi aussi, tu en portes un. »

« -Bravo Hee-chan ! T'es une des rares personnes à l'avoir remarquer. Mais ça ne change rien. Je n'aime pas non plus mon masque. Je ne supporte pas cette guerre. Elle m'a déjà prit tous ceux que j'aimais. Alors je fais ce que je peux pour garder la face parce qu'il est hors de question qu'elle me rende fou ainsi que tous les amis que je pourrais me faire. »

Il cache son visage contre mon cou. Je sens son souffle chaud contre ma gorge tellement serrée que j'ai du mal à déglutir.

« -Alors je garde le sourire et ma bonne humeur. Pour moi. Pour ne pas que je chavire. Et pour mes amis. Parce que je sens qu'ils en ont aussi besoin. De décompresser de temps en temps. »

Il relève la tête et me regarde droit dans les yeux, sérieux.

« -Et tu fais partie de mes amis Heero. »

« -Je n'ai pas besoin d'être protégé. »

« -Je n'ai pas dit ça. Mais tu es toujours mortellement sérieux Heero. Avoue que tu as aimé jouer le jeu ! »

Jamais ! Jamais je n'avouerai que je suis rentré dans son jeu. Et surtout que j'ai apprécié. Alors je me contente de lui lancer mon regard noir.

« -Comme tu veux Heero. Si tu veux nier, nie ! »

Il se releva et me saisit le poignet puis me remit sur mes pieds.

« -Allez ! On va faire une petite razzia du côté des cuisines, j'ai la dalle ! »

Sans lâcher mon poignet, il marcha vers l'ascenseur de la passerelle. Pendant la descente, sa main toujours sur mon poignet, il ne me regarda pas une seule fois, alors que moi, je me suis surpris à l'observer à la dérobée. Il a joué avec moi. Juste pour me faire réagir. Que j'arrête d'être cette personne rigide. Et du coup, moi aussi j'ai envie de jouer. De jouer avec lui. D'éprouver ses limites. Et pour une fois, penser à autre chose qu'aux missions. Alors qu'on arrive devant le deuxième ascenseur, celui-ci qui nous ramène à la surface, je sors mon arme et vise Maxwell.

« -Plus un geste Maxwell ! » je crie.

Il se retourne vers moi, stupéfait.

« -Les mains en l'air, bien en évidence ! »

Maxwell m'obéit.

« -Contre le mur », j'ordonne.

Je veux jouer. Juste jouer. Avec lui. A ses dépends. Malgré lui. Je fouille Maxwell et le dépouille de toutes ses armes. Il se laisse faire tranquillement.

« -Alors, tu voulais juste jouer ? » je demande.

Il me dévisage cherchant à savoir sans aucun doute ce qu'il me prend. Finalement, jouer malgré lui est assez… jouissif. Je raccourci la distance entre nous.

« -Les remarques douteuses, la main aux fesses, quand tu me mordillais l'oreille, quand tu m'embrassais, c'était juste un jeu ? »

« -Ecoute Hee… »

Je lui plaque mon revolver sous son nez ce qui l'arrête net.

« -Non toi, écoute-moi ! Je ne suis pas le genre de gars à qui on impose quoi que ce soit ! Alors ne t'étonne pas si je te fais payer ! »

Duo eut un mouvement de recul stopper très rapidement par le mur. Et moi, je continue d'avancer. Il me regarde, pas très à l'aise. J'avoue, je prends un malin plaisir à jouer avec lui, avec ses nerfs. Passons au cran au-dessus ! Je jette au loin mon revolver et de la surprise traverse ses prunelles. Il abaissa ses bras et fit un pas vers moi.

« -Heero, je… »

Je le repousse violemment contre le mur, emprisonne ses poignets de chaque côté de sa tête et presse mon corps contre le sien. Franchement, je ne me savais pas comme ça. Et c'est assez satisfaisant. Duo a déterré cette facette de moi, il en subira les conséquences. Je souffle lentement le long de son cou. Je le sens frissonner. Je l'entends murmurer mon nom d'un ton… suppliant. Et je me sens, moi aussi, trembler. Mes lèvres remontent doucement le long de sa mâchoire avant de lui mordiller le lobe de l'oreille. Sa respiration s'accélére, irrégulière. Il chuchote mon nom et je le bâillonne impulsivement avec mes lèvres. Je lui mordille les lèvres avec douceur pendant que je remonte doucement ses mains au-dessus de sa tête. Je lui immobilise les poignets d'une seule main. Celle qui est libre attire Duo vers moi en lui caressant les fesses. Je reprends possession de ses lèvres. Mais cette fois, Duo répond ardemment. Nos langues se joignent et commencent à se caresser l'une l'autre.

Je le veux. Je le désire comme jamais je n'avais désiré personne. Et pour une fois, j'ai vraiment envie de laisser mon corps prendre ce qu'il désire et oublier ses fichues missions juste pour un soir. Juste pour une nuit. J'en ai tellement envie. Pourquoi me priver ?

Je libère ses poignets. Et comme s'il n'attendait que ça, Duo abaisse rapidement ses mains pour les poser sur moi.


Quelques années plus tard, après l'épisode Mariemaia

Je suis allongé dans une chambre d'hôpital, bandé d'un peu partout. S'il me voyait, il rigolerait bien en me qualifiant de momie. Sauf qu'il n'est pas là. C'est d'ailleurs étrange. En temps normal, il aurait été le premier à venir me voir pour m'engueuler copieusement pour avoir encore une fois risquée ma vie. Mais le premier de la longue liste était Winner, enfin Quatre. En compagnie de Trowa. Je l'aime bien Trowa. On se ressemble beaucoup tous les deux. Sa nature calme, posée et réaliste est rafraîchissante. Ensuite, j'ai reçu la visite de Sally Po, un ancien médecin de l'Alliance qui a tourné sa veste, je ne sais pourquoi. Bref, j'ai eu droit à un check-up complet. Et toutes tentatives de résistance étaient étouffées dans l'œuf par la lame très aiguisée du sabre d'un certain chinois, appelé Wufei. J'ai reçu ensuite la visite de Réléna.

Cette fille doit avoir des sentiments pour moi. Je ne vois d'ailleurs pas pourquoi. Avec elle, je reste froid, professionnel. Mais ça ne semble pas la décourager. Elle s'était assise à côté de moi, elle m'a gentiment caressé les cheveux en réprimandant mon attitude audacieusement dangereuse pour la sauver. J'ai bien eu envie de lui répondre que c'était ma mission de départ, la protéger, mais Lady Une en compagnie de Mariemaia nous ont interrompus. La petite fille m'a remercié vaguement avant de se répandre en éloge sur la noblesse de Réléna-sama. Tout ça jusqu'à ce que le médecin chef les mette à la porte en leur ordonnant de me laisser me reposer. Le brave homme.

Mais il manque quelqu'un sur cette liste. Il me manque en fait. Je ne pensais pas m'habituer aussi bien à sa présence. Après la nuit que nous avons passé, il a été obligé de retourner dans l'espace. Quatre s'est donc occupé de mon apprentissage. Et son absence m'a été bénéfique puisque j'ai pu me concentrer sur mon travail. Après la guerre, il est partit vivre avec sa meilleure amie, une dénommée Hilde, celle qui a risqué sa vie pour nous. Mais nous nous voyions régulièrement pour diverses affaires. En fait, nous avons tous gardé le contact entre nous, parce que nous sommes les seuls à nous comprendre, à comprendre ces cauchemars qui nous rongent de temps en temps. Sauf que dernièrement, Wufei a trouvé un autre soutien du nom de Sally. Et Quatre, ce n'est pas encore sûr mais ça ne saurait tarder, du nom de Trowa. Il ne reste donc plus que lui et moi. Et j'ai la mauvaise impression qu'il s'éloigne de moi. Pourquoi ?

« -On dirait que ça t'amuse de toujours finir à l'hôpital ! » gronde une voix, près de la fenêtre de la chambre.

Mon cœur fait un bond. Sa voix. Je l'aurais reconnu entre toutes. Une voix agaçante. Une voix amusée.

« -Duo ? »

« -C'est moi Hee-chan. Je suis désolé de ne pas être venu plus tôt mais j'avais des choses à régler avec Hil'. »

« -Ah… »

Il s'approche à pas feutré.

« -Rassure-moi Duo, tu n'es pas passé par la fenêtre ! »

« -Obligé ! Je suis d'abord passé par la réception mais ils m'ont foutus dehors à coup de balai. »

Duo m'observe avec un sourire moqueur. Il caresse doucement les sangles qui me retiennent tant que je serai considéré comme un patient récalcitrant et devant encore se reposer. Enfin, le bon côté des choses, c'est que j'ai évité les calmants… Duo pose sur moi un regard que je reconnaîtrais entre tous : une lueur prédatrice. Il fit parcourir une main sur la chemise du pyjama que m'avait apporté Quatre. Il écarta quelques boutons laissant apparaître mes bandages. Soudain, d'un mouvement souple, carrément félin, Duo s'assit à califourchon sur moi. Ce type est impossible !

« -Tu sais que tu me donnes faim là ! Comme ça ! Dis-moi, on l'a jamais fait sur un lit d'hôpital, si ? »

« -Duo ! Libère-moi ! »

« -Pourquoi ? Moi, je te trouve très bien comme tu es. Sanglé et à ma merci ! Humm… Un régal. »

Il se penche et capture mes lèvres avec avidité. Ses mains me parcourent le corps créant des frissons de délice. Un gémissement de douleur s'échappe de mes lèvres lorsqu'il appuie sur mes côtés cassés. Duo se redresse subitement.

« -Je suppose qu'aussi tentante que soit l'idée de te faire l'amour ici et maintenant, il va falloir attendre que tu te rétablisses. Heureusement pour moi, je ne devrais pas attendre très longtemps. »

« -Tu peux me libérer maintenant ? » je demande avec une certaine impatience.

Duo semble réfléchir quelques instants. Mais qu'est-ce qu'il attendait ? Duo sort finalement une lame de sa manche. Je reste toujours très étonné de voir le nombre de lames qu'il peut cacher sur lui. Il commence par entailler les sangles. Pendant que je m'occupe de m'arracher la perfusion et de détacher les liens qui retiennent mes pieds, Duo s'approche de l'armoire. Il en sort mes vêtements que Quatre avait préparés pour ma future sortie. Duo me laisse m'habiller et gribouille quelque chose sur un bloc note. Je me penche au-dessus de lui.

Partis en vacances !

« -Comment ça « partis en vacances ! » ? » je demande.

« -Heero, crois-moi ! Entre Hil' et toi, y a pas photo, c'est toi que je choisi. Si je suis allé voir Hil' en premier c'est simplement pour lui dire que je pars en vacances pour une durée indéterminée. Et tu viens avec moi ! Tu n'as absolument pas le choix. »

« -Il faut d'abord passer chez moi pour prendre mes affaires. »

« -Aucun problème ! J'ai déjà tout ce qu'il te faut ! Et puis sincèrement, tu n'en auras pas besoin, de vêtements ! »

« -Pervers ! Comment tu… ? Y a-t-il un système de sécurité qui puisse te résister ? »

« -Heu… Je ne crois pas non. On y va ? »

« -Où ? »

« -En vacances ! »

« -Mais où ? »

« -Ça a vraiment une importance ? »

« -… Non. »

Nous grimpons sur le rebord de la fenêtre puis nous nous évadons de cet hôpital. Duo attrape ma main et m'entraîne derrière lui. J'esquisse un petit sourire. Cette fugue ne sera pas des vacances reposantes. Il va vraiment falloir que je réfrène ses ardeurs. Mais je crois que c'est ça… Vivre ! Avec lui.

Owari


Yeah ! Fini !

Le prochain, Quatre ! Mais celui-là, je crois qu'il va mettre encore plus de temps pour arriver. Désolé !