Chapitre 5 : Où les souvenirs remontent et le moral redescend.
« I get around
Get around round round I get around
From town to town
Get around round round I get around
I'm a real cool head
Get around round round I get around
I'm makin' real good bread
Get around round round I get around
I get around
Round
Get around round round oooo
Wah wa ooo
Wah wa ooo
Wah wa ooo»
Je devais offrir un bien étrange spectacle ce matin-là. J'étais vautrée dans mon divan, celui qui n'a plus de fond et qui risque de m'engloutir d'un jour à l'autre, en train de lire un livre d'horreur et d'essayer de me vernir les ongles. Les Beach Boys hurlaient à qui mieux mieux « I get around » et je les accompagnais dans leur « Wah wa ooo », les seules paroles de la chanson qu'on pouvait prononcer avec un pinceau à vernis entre les dents.
C'est dans cet état que me trouva Remus.
Il transplana juste à côté de moi ce qui me fit sursauté en plein milieu d'un de mes « Wa ooo » endiablé. Je lâchai mon pinceau et lançai mon livre dans un glapissement suraïgu, le vernis tâcha copieusement la page 217 de mon bouquin avant que ce dernier ne me retombe sur la figure. Je me relevai rapidement, consciente de la teinte rosée qu'avait pris mes joues. Cela empira d'ailleurs quand je me rendis compte que je venais de me lever et que donc :
a) j'avais une gueule affreuse comme d'habitude.
b) j'étais toujours en pyjama.
c) ledit pyjama n'était en fait qu'un t-shirt qui exhibait mes guiboles à l'air libre et qui comportait l'inscription « Ton village vient d'appeler, ils ont perdu leur idiot ».
Hypersex quoi.
J'aurais pu en rire si Remus n'avait pas eu l'air si grave. Pourquoi d'ailleurs venait-il chez moi sans prévenir, ni frapper…ni même passer par la porte d'ailleurs ?
C'est parce qu'il ne peut plus se passer de toi ! Me hurla une de mes petites voix intérieures. Malheureusement, il s'agissait de celle qui a toujours tort.
Comme il ne se décidait pas à parler, je fis le premier pas :
-Qu'est-ce qui se passe ?
-C'est Lucy…
-Lucy ?
-Elle…Elle est à l'hôpital…Accident de voiture…
Et merde ! Pourquoi est-ce que tous les gens que j'aime doivent mourir dans des accidents de voiture ? Ca manque d'originalité !
-Bouge pas, je reviens !
Je courus dans ma chambre, sautai dans un jeans et attrapai au hasard une paire de sandales.
-Comment…Comment va-t-elle ? Demandai-je en sautillant sur un pied pour essayer d'enfiler mes godasses.
-Pas très bien, elle n'a pas repris connaissance et doit être opérée de toute urgence.
Il me prit la main ce qui me fit délicieusement frissonné mais ce n'était pas le moment de faire rejaillir à la surface mes sentiments pour lui alors que sa petite amie se mourrait.
Nous transplanâmes et arrivâmes directement dans la salle d'attente de l'hôpital où une infirmière tenta de nous rassurer sans y arriver pour autant. Nous nous assîmes sur un banc rouge et je me rendis compte qu'il me tenait toujours la main…ou que plutôt nous nous tenions toujours la main…à moins qu'il n'y ait que moi qui tienne la sienne. C'était difficile à voir et j'en avais marre de me focaliser sur des trucs aussi débiles alors que ma meilleure amie se battait contre la mort. Remus sembla remarquer mon regard insistant sur nos doigts nouées et retira rapidement sa main. Peut-être qu'il avait cru que ça me gênait alors que j'étais juste en train de compter nos doigts ou alors, peut-être que ça l'embêtait lui.
Pourquoi est-ce que j'avais regardé nos mains ? Il ne s'en serait peut-être pas rendu compte et à l'heure qu'il est, je ne serais pas en train de frissonner bêtement parce que la douceur et la chaleur de sa peau me manque…Oh ta gueule Julie, pense à Lucy !
Un médecin en blouse blanche passa près de notre banc et Remus lui demanda comment les choses se passaient. Le médecin nous apprit que lui et son équipe faisaient tout leur possible et nous adressa un petit sourire rassurant pas convainquant pour deux sous.
-Tout notre possible…Ils disent tous ça, ils avaient dit ça aussi l'autre fois et ça n'a rien changé.
Remus me regarda d'un air curieux et je me rendis compte que j'avais parlé tout haut.
-J'avais douze ans, je partais en vacances avec mes parents et mon père conduisait. Ma mère fredonnait une chanson en français dont je ne saisissais pas tout à fait le sens et mon père pianotait nerveusement sur le volant, impatient de sortir des embouteillages.
J'avais commencé à parler sans même y faire attention, je n'avais jamais raconté ça à personne, je m'étais toujours contentée de raconter le strict nécessaire : « mes parents sont morts dans un accident de voiture point barre ». Je ne sais pas si c'était son regard confiant ou le simple fait que je l'aimais par-dessus tout, mais j'avais soudain eu envie de me confier à lui, de lui raconter tout ce que j'avais sur le cœur depuis trop longtemps. J'en avais marre de toujours tout garder pour moi, de ne jamais me plaindre, pour toujours avoir l'air forte.
-Nous étions sur l'autoroute, il faisait nuit mais le trafic était toujours important et nous n'avancions pas. Mon père décida de prendre la première sortie sur la droite, il ne devait pas très bien savoir où il allait mais tout ce qui comptait pour lui, c'était d'avancer et de ne pas rester bloqué bêtement. Il n'y avait personne sur cette route. Elle passait à travers les bois et n'était pas éclairée. Mon père roulait doucement de peur qu'un animal ne décide de traverser la route mais pas assez pour éviter la voiture qui arriva droit sur nous. Elle roulait avec ses phares éteints et nous n'avions pas pu la voir à temps, elle ne freina pas et mon père fut obligé de faire une embardée sur le côté. La voiture ne s'arrêta pas non plus quand elle vit que nous avions heurté un arbre de plein fouet. Aucun de nous n'avait de ceinture. A l'époque, ce n'était pas encore obligatoire. Mon père tendit son bras pour empêcher ma mère d'être projetée en avant. J'entendis des éclats de verre partout puis je me cognai violemment la tête contre le siège de mon père et perdis connaissance. Quand je me réveillai, tout était silencieux, je sortis de la voiture et ouvrit la portière avant. Mon père respirait difficilement, il avait une blessure à la tête et ça n'arrêtait pas de saigner. Ma mère, elle, ne bougeait plus. Le geste désespéré de mon père au moment de l'impact l'avait empêché de passer par-dessus bord mais sa tête avait quand même heurté le pare-brise. Je secouai nerveusement mon père et il finit par reprendre connaissance. Personne ne passait sur la route et il me demanda d'aller chercher de l'aide. Il me dit qu'il devait y avoir un village dans les environs et que si je voyais une voiture, je devais l'arrêter pour qu'elle vienne nous aider. Mon père avait les jambes cassées et parlait de plus en plus difficilement, il regarda ma mère puis me dit que je devais faire vite. « D'accord papa », c'était ce que j'avais dit avant de partir en courant. Si j'avais su que c'était la dernière fois que je lui parlais, je lui aurais sûrement dit autre chose mais je ne me rendais pas bien compte de la gravité de la situation. Je courus à en perdre haleine droit devant moi. Tout était noir, c'était une nuit sans lune, je ne voyais pas où était la route et j'avais peur de m'enfoncer dans les bois sans m'en rendre compte. Aucune voiture ne passait par là et il n'y avait aucune lumière laissant présumé l'existence d'un village dans les environs. Il n'y avait rien. Rien que moi et ma peur, rien que moi et la chose qui restait tapie dans les bois. Celle qui me suivait du regard, guettant le moment où je m'effondrerais. Celle répétait : « Cours petite fille, ça ne sert à rien, tu sais que c'est trop tard, mais cours petite fille, je t'attends ». Je continuais à courir, je ne savais plus où j'étais ni depuis combien de temps je courais. Des branches d'arbre me giflaient la figure, il faisait noir…très noir et personne ne venait m'aider, personne n'entendait mes hurlements.
Sans m'en rendre compte, je m'étais mise à pleurer. Remus m'avait prise dans ses bras et j'avais appuyé ma tête contre son épaule. Je hoquetais et frissonnais, tout ce que j'avais ressenti cette nuit-là et que j'avais enterré du mieux que je pouvais revenait en grosses vagues qui me submergeaient et dans lesquelles je me noyais sans pouvoir y échapper.Remus passait doucement sa main dans mes cheveux ce qui, peu à peu, réussit à m'apaiser et je pus reprendre mon récit, j'avais envie d'aller jusqu' au bout pour affronter une fois pour toutes mes cauchemars.
-Au moment où j'allais renoncer et m'écrouler sur le sol, j'entendis un bruit, un bruit de moteur. Puis, soudain, je vis les phares d'une voiture et tout s'éclaira. Je regagnai en courant la route dont je ne m'étais miraculeusement pas trop éloignée et adressai de grands signes au véhicule. Celui-ci s'arrêta. J'expliquai rapidement au conducteur la situation et il me fit monter à bord. C'était un homme d'une trentaine d'années très gentil qui ne cessait de répéter « calme-toi, c'est fini ». Mais rien n'était fini, quand nous arrivâmes à la voiture, mon père avait à nouveau perdu connaissance et j'aidai l'homme à les transporter dans sa voiture. A l'époque il n'y avait pas encore de téléphone portable, nous n'avions donc aucun moyen d'appeler une ambulance. Sans que je ne me souvienne vraiment comment, je m'étais retrouvée dans une salle d'attente un peu comme celle-ci. Les médecins courraient dans les couloirs et parlaient tout bas avec des airs graves. L'homme qui nous avait amené ici avait du repartir et je me retrouvai à nouveau toute seule. Personne ne s'occupait de moi à part quelques infirmières qui passaient devant moi et me lançaient des regards compatissants. Après ce qui me sembla être une éternité, un docteur s'approcha de moi. Rien qu'à son regard, je savais que les nouvelles n'étaient pas bonnes et en effet, elles ne l'étaient pas. Ma mère était déjà morte en arrivant ici et mon père avait perdu trop de sang, on n'avait rien pu faire pour le sauver mais les médecins avaient fait tout leur possible. Tout avait été une question de temps. Quand j'étais partie chercher de l'aide, ils étaient tous les deux encore en vie. Si la voiture, qui avait été à la cause de tout ça, s'était arrêtée ou si j'avais été plus rapide, mes parents seraient toujours là et je ne me serais pas sentie si seule pendant toutes ces années. J'ai du aller vivre chez une voisine avec qui je ne m'entendais pas très bien. Heureusement, je ne faisais qu'y loger. Le reste de la journée, je le passais chez Tid', le meilleur ami de mon père et mon prof de boxe. Mais les seuls moments où je me sentais vraiment bien, c'était quand Lucy était chez elle. Malheureusement, la plupart du temps, elle était à Poudlard et maintenant…maintenant, elle risque de partir encore plus loin.
Petit à petit, mes larmes se tarirent et je me trouvai soudain trèsridicule. J'essuyai les dernières larmes qui roulaient encore sur mes joues puis murmurai :
-Désolée.
-Pourquoi ?
-Je…Lucy est peut-être en train de mourir et moi je t'emmerde avec mes histoires à la con et je fous de la morve sur ta chemise.
-Ce ne sont pas des histoires à la con. Tu n'as pas besoin d'être toujours si forte et tu ne dois pas avoir honte de montrer tes sentiments.
Nous prîmes soudain conscience que nous étions toujours dans les bras l'un de l'autre et je me relevai doucement, de peur de trop montrer mes sentiments justement.
Je rougis légèrement et contemplai d'un air intéressé mes pieds à moitié vernis.
Soudain, je pensai tristement qu'au moment où j'avais vernis le gauche, Lucy était encore en vie et que quand je m'attaquerais au droit, elle ne serait peut-être plus de ce monde.
A SUIVRE
RAR :
Lily: Je crois que c'est toi qui a reviewé les deux fois mais je vais répondre aux deux séparément. En tout cas, merci pour les reviews, ça fait vraiment plaisir et je suis contente que ça te plaise. J'espère que ton histoire semblable à celle que j'écrisva s'arranger!
Soblack: Celui-ci est moins drôle...Merci pour la review!
Halexia Black: Merci de reviewer tous mes chapitres, ça me fait vraiment plaisir! Et ne t'inquiète pas, je continue!
Lily: Merci! Je sais, si tu es la même personne je te l'ai déjà dit mais bon, une review et positive en plus, çafait toujours plaisir!
Touffue: Et oui, je pense que t'es déjà partie mais c'est pas grave, je sais pas quand tu rentres mais je vais essayé d emettre le plus de chapitres possible avant ton retour!
