Je sais, c'est un peu plus court que la dernière fois mais j'essaye désespéramment d'être un minimum cohérente de façon à ce que chaque chapitre est un début et une fin (sachant que tout est déjà écrit de toutes manières) et comme je n'ai pas d'aspirations démoniaques je ne préfère pas vous torturer en « découpant » à un moment « crucial ». Enfin, bref, j'espère que ça vous plaira quand même.
Pour Megara : encore merci (beaucoup, beaucoup, beaucoup). Moi j'aimais bien Lady Heather (ce n'est passa faute si Grissom est un abruti)Pour l'action, tu verras... mais je te promets de m'inscrire sur le forum pour soutenir la (ou le, je n'ai jamais trop su) GSR ;-)
(Paid my dues, Anastasia)
- « Alors Sara, tu ne t'es pas réveillée ce matin ? » la taquina Warrick dès son entrée en salle de repos. Pour toute réponse la jeune femme lui lança un regard noir et traversa la pièce pour aller se servir une tasse de café.
Il était tout juste neuf heures cinq. Elle avait vingt minutes de retard et un horrible mal de crâne. Mauvaise journée. Elle se surprit quand même à sourire en observant d'un œil approbateur le travail de décoration qu'ils avaient effectués la veille.
- « Nuit agitée ? » suggéra Greg avec un sourire coquin.
- « Le troisième rendez-vous… » renchérit Catherine, suggestive.
- « Je ne répondrais pas à ça » fit la jolie brune en prenant place sur une chaise autour de la table, à côté de sa collègue. Sa tentative de prendre une voix sèche et implacable était tombée à l'eau. Trop fatiguée. Pas assez fâchée. « Où est Grissom ? » s'enquit-elle au bout de quelques secondes, constatant l'absence de leur supérieur hiérarchique. Etrange qu'elle ne l'ait pas remarqué avant du reste…
- « Il était là mais Ecklie l'a appelé. Il devrait bientôt revenir » répondit Catherine, plongée dans un magazine de la presse féminine.
Génial… Donc il savait qu'elle était en retard. Sara prit une longue gorgée de café brûlant. La sensation du liquide dans sa gorge la réchauffa et la réveilla complètement. Les deux garçons bavardaient de l'autre côté de la table. Une histoire de jeux vidéo. Et Catherine ricanait, le nez dans les potins et conseil de maquillage en tous genre. Non se reprit Sara, elle ne devait pas être si sarcastique. Elle aussi elle les lisait ces magazines. Parfois… La jeune femme releva les yeux quand sa voisine fit glisser le Cosmo devant elle. La brunette lui lança un regard interrogateur mais la blonde se contenta de sourire et de lui désigner un article sur la page de papier glacé. Sara reporta donc son attention sur l'endroit indiqué et n'eut besoin que d'un coup d'œil pour déterminer de quoi il s'agissait.
D'abord le titre : « Pourquoi suis-je amoureuse de mon boss ? ». Sara arqua un sourcil. Ça promettait… Suivaient plusieurs explications en fonction du 'Boss' en question. Le doigt de Catherine pointait sur la mention « Le caractériel ». Evidemment. Puis venait la question récurrente : « Pourquoi est-il irrésistible ? » Excellente question, du reste. Très pertinente. Et enfin l'article : « Lorsqu'on est confronté à un supérieur très critique, le moindre compliment de sa part aura un effet décuplé. Très juste. L'employée va commencer à chercher la faille pour approcher cet homme insupportable et insensible, en espérant une quelconque reconnaissance » décrypte Guy Cartwright. Oui, ça c'était tout à fait elle. Toujours ce besoin de reconnaissance, d'approbation de sa part.
Parce qu'il était le meilleur et que si il la trouvait douée, c'est qu'elle l'était. La jeune femme s'est mise à vivre pour ce petit regard où elle trouvait grâce aux yeux de son bourreau et qui prouvait qu'elle existait pour lui. Exactement. Elle désirait plus que tout avoir la preuve qu'il tenait à elle. « S'attacher à un boss qui ne nous regarde pas, qui ne nous accorde aucune attention, est aussi une façon de retarder l'échéance avec un homme réel. Aussi, oui. C'était sans doute vrai. S'accrocher à lui, lui permettait d'éviter, d'écarter la possibilité de toute autre 'vraie' relation Ce qui traduit, en général, une peur de l'engagement ou de la sexualité » poursuit Guy Cartwright. Enfin, il ne fallait pas exagérer quand même. Peur de la sexualité ? Non. Peur de l'engagement ? Sans doute…
La jeune scientifique se retint difficilement d'éclater de rire devant le contenu du texte et l'air entendu de sa voisine. Ok. C'était facile. Mais c'était inattendu par contre. Elle n'avait jamais été proche de Catherine. Elles étaient bien trop différentes. De caractère. Et de parcours. Non, en fait c'était pire que ça. Elle ne s'était jamais entendue avec Catherine. Depuis le début. Ce n'était pas faute d'avoir essayé pourtant. Mais son aînée n'avait pas été très réceptive. Ou peut-être qu'elle-même avait manqué de diplomatie, d'envie. Elle avait les gars, ça lui suffisait. Pourtant, parfois, la jeune femme blonde se montrait anormalement gentille, amicale voire maternelle. Comme pour cette affaire avec Hank. Ou comme maintenant. Pas de sarcasme ou d'ironie dans son regard. Juste de la complicité, de l'amusement. Du reste cet article n'était pas fondamentalement stupide…
- « Bien, je vois que vous êtes tous arrivés finalement, on va pouvoir se mettre au travail… »
Le son de la voix familière et teintée de sarcasme sortit Sara de ses réflexions. Grissom se tenait dans l'encadrement de la porte. Sans doute depuis un moment. La mâchoire crispée, les traits durs et les yeux sombres. La jeune femme songea immédiatement qu'elle aurait mieux fait de se faire porter malade et de rester chez elle. Cette pique s'adressait directement à elle et il n'avait même pas pris la peine de la regarder. Pourquoi ? Bon, il y avait eu quelques petites tensions la veille mais ça c'était arrangé. Qu'est-ce qui pouvait bien le pousser à se comporter ainsi ? Un sentiment de colère monta en elle. Voilà, c'était typique Grissom ça. Lunatique. Tout allait trop bien depuis une semaine, ce n'était pas normal. Il l'avait laissée s'approcher trop près et trop vite. Et maintenant il reculait, la repoussait. Encore. Mais était-il vraiment obligé de s'y prendre de cette façon, de la blesser ainsi ?
- « Catherine, Warrick, un corps retrouvé dans le canal du Venitian » fit l'entomologiste en tendant une feuille à sa collègue. « Brass vous attend. »
- « Okay… ça va être intéressant » répondit Cath en s'emparant du papier, visiblement ravie de l'assignation.
- « A plus tard les gars ! » lança Warrick avec un clin d'œil pour Sara, en quittant la pièce derrière elle.
- « Sara » reprit Grissom d'un ton glacial. « Un cambriolage dans une bijouterie à Summerlin. En solo » précisa t'il en faisant glisser l'assignement sur la table jusqu'à elle.
La jeune femme retint difficilement un sourire sarcastique. Elle aurait pu le deviner. A chaque fois qu'il lui en voulait pour quelque chose – sans qu'elle ne sache jamais de quoi il s'agissait vraiment – il l'envoyait en solo. Quelque part c'était amusant qu'elle considère comme une punition ce que Nick considérait, lui, comme une récompense ou une preuve de confiance. Tout tenait dans la manière de l'annoncer… De toutes façons, aujourd'hui, elle avait besoin d'être seule. De réfléchir un peu. Un cambriolage c'était parfait. Elle aurait même pu être contente si il ne lui avait pas confié ça pour se débarrasser d'elle. Parfois elle était effrayée de la haine qu'elle pouvait ressentir à son égard. C'était toujours fugitif. Très bref mais très intense aussi. La haine était si proche de l'amour. Si douloureusement semblable…
- « Parfait » déclara seulement la brunette avant de se lever pour sortir, la feuille à la main.
- « Courage, sunshine ! » l'interpella Greg avant qu'elle ne disparaisse dans le couloir après lui avoir adressé un léger signe de la main.
- « Greg, vous êtes avec moi » précisa Gil toujours aussi sèchement en choisissant d'ignorer cet échange. « Un cadavre dans le désert. Allons-y… »
'Comment des femmes pouvaient-elles porter ce genre de choses ?' songea Sara, deux heures plus tard, en récupérant un pendant d'oreille qui avait glissé sous un des comptoirs de la bijouterie. Le diamant qui l'ornait avec la taille d'une grosse cerise. Horriblement lourd et vraiment hideux. Enfin, chacun ses goûts… Les femmes à qui étaient destinées ces bijoux ne passaient certainement pas leurs journées à quatre pattes sur la scène d'un crime à relever des indices. Contrairement à elle. La brunette se redressa et plaça la boucle dans un petit sachet. Elle embrassa la pièce du regard une nouvelle fois. Les personnes qui avaient fait ça étaient loin d'être des professionnels. Ils avaient laissé pas mal de traces derrières eux. Des empreintes de chaussures. Des fibres de vêtements…
Sans compter qu'ils s'étaient concentrés sur les objets clinquants. Les plus chers évidemment mais les plus difficiles à revendre aussi car facilement identifiables. Les lèvres de la jeune femme s'étirèrent d'un sourire. N'empêche, si elle voulait cambrioler une bijouterie, personne n'en saurait jamais rien. La police scientifique avait aussi ses avantages. Dommage qu'elle ait une conscience… Sara se releva. Elle avait pris assez de photo et les indices étaient bouclés. Il ne restait que les empreintes. Bon, elle était seule. Pourquoi ne pas s'amuser un peu ? Elle se dirigea vers son kit et en sortit trois sortes de poudre fluorescentes. Rose, bleue et verte. Très kitch. Très amusant aussi – point de vue personnel. Au bout d'une demi-heure, elle avait presque fait le tour de la boutique quand des bruits derrière elle la surprirent.
- « Hey, Evans, j'ai quasiment fini. Je vais retourner au labo et… » commença t'elle en se retournant avant de s'arrêter.
Ce n'était pas Evans. Elle était en face d'un jeune homme d'une vingtaine d'années et d'une vingtaine de centimètre de plus qu'elle – que se soit en hauteur où en largeur. Il avait l'air tout aussi étonné qu'elle mais se reprit cependant plus vite. Avant qu'elle ne sache vraiment comment – et qu'elle n'ait pu ouvrir la bouche – elle se retrouva sur le sol, une douleur aigue lui vrillant la tempe. Ok, là elle était en colère. Il n'était pas question que quelqu'un la mette à terre. Tout ça c'était de la faute de Grissom de toutes façons ! Comme son agresseur se détournait – la croyant sûrement hors course – elle se redressa et le fit tomber à son tour. Les cours de self défense à Harvard n'étaient pas si inutiles en fin de compte… Moins d'une minute plus tard elle l'avait immobilisé et le tenait en respect avec son arme.
- « Evans ? » fit-elle dans sa radio, encore un peu essoufflée. « Vous pouvez venir ? J'ai un petit problème ici… »
- « Un problème ? » répondit le policier, inquiet.
- « Vous devriez venir… » se contenta t'elle de préciser.
En cinq minutes la boutique grouillait de policiers. Ils embarquèrent rapidement le suspect. Evans se rapprocha de Sara, assise sur le trottoir devant la bijouterie. Les coudes sur les genoux et le menton dans les mains. Elle attendait juste pour emmener les preuves qu'elle avait récoltées au labo. Et un sacré mal de crâne se profilait à l'horizon. Encore. Quand elle disait que ça allait être une mauvaise journée, elle ne pensait pas vraiment à ça…
- « Hey, vous allez bien ? » lui demanda l'inspecteur, concerné, en s'accroupissant à ses côtés.
- « Humm… Oui. Ça va. Merci » répondit la jeune femme en relevant la tête, souriante.
- « Vous êtes blessé » remarqua le policier en désignant son arcade sourcilière.
Sara porta la main à sa tempe et sentit sous ses doigts un liquide chaud et poisseux. Elle soupira. De mieux en mieux. Vivement ce soir qu'elle rentre chez elle… Waou, c'était bien la première fois qu'elle pensait quelque chose comme ça. Qu'était devenue son obsession presque maladive pour son boulot ? Envolée avec le reste de ses espoirs déçus sans doute…
- « Vous voulez que je vous emmène à l'hôpital ? » proposa Evans en l'aidant à se relever.
- « Non, c'est juste une égratignure. Le docteur Robins va m'arranger ça… » fit la jeune experte en secouant doucement ses boucles brunes. « Mais merci » ajouta t'elle avec un sourire sincère.
- « Allez, je vous ramène au LVMPD » reprit le policier en se chargeant de son kit.
- « Et ma voiture ? » interrogea Sara en le suivant.
- « On vous la ramènera plus tard » la rassura t'il en lui ouvrant galamment la portière de son propre véhicule.
- « Vous avez de la chance de ne pas avoir été plus grièvement blessée » commenta le docteur Robins en désinfectant la plaie de la jeune femme avec précaution.
- « Humm… Oui » admit Sara, perchée sur une des tables d'autopsie, les jambes dans le vide.
- « Ils auraient pu revenir tous les deux » poursuivit Al en continuant de tamponner la blessure avec une compresse imbibée d'alcool.
- « Evidemment » approuva la brunette. « Je déteste les hommes lunatiques… » murmura t'elle pour elle-même avec une colère sourde, oubliant la présence du légiste.
- « Votre agresseur était lunatique ? » la taquina Robins, tout en sachant pertinemment qu'elle ne parlait pas de lui.
- « Pardon ? » fit la jeune femme, reprenant conscience de la présence du médecin. « Le fait est que… Ouch ! » s'interrompit-elle en grimaçant, brûlée par le désinfectant.
- « Désolé » s'excusa Al en abandonnant le coton dans une corbeille avant de déposer de petites bandes adhésives sur la plaie. « Vous disiez ? »
- « Le fait est que je n'en sais rien. En tout cas il est plutôt stupide. Un gosse de riche qui ne sait pas quoi faire pour s'occuper… Je crois savoir ce qu'il était revenu chercher. J'ai trouvé une gourmette sur les lieux. Différente des autres bijoux. Il a du la perdre pendant qu'il cambriolait la bijouterie » exposa Sara.
- « C'est vous l'experte… » rétorqua le légiste avec un grand sourire en reculant. « Voilà, j'ai fini. Je vous offre un café ? »
- « Non, merci. Je dois aller voir si Mia a trouvé quelque chose pour moi » répondit la jeune femme. « Encore merci pour tout » fit-elle en descendant de son perchoir avant de quitter la pièce d'un pas rapide. Laissant seul le médecin qui secoua doucement la tête avant de se remettre au travail, un léger sourire aux lèvres.
Sara passa l'heure suivante à examiner les indices. Evans l'appela ensuite pour l'interrogatoire de son agresseur. Au bout de vingt minutes, le jeune homme avait tout avoué. Confondu par les preuves et ses propres gestes. Et il ne lui fallut pas plus de temps pour dénoncer son complice. C'est donc très satisfaite que la jeune experte quitta la salle. Elle avait bouclée son enquête en moins de quatre heures. C'est Grissom qui allait être content songea t'elle, sarcastique. La brunette se rendit dans la salle de repos afin d'achever son rapport. C'est ainsi que la trouva son supérieur une heure plus tard. Une tasse de café devant elle. Une pomme entamée dans la main droite. Jouant négligemment avec un crayon à papier au rythme de la musique. 'In the middle'. Sugababes. Ça la calmait toujours.
- « Sara ? » fit Grissom, encore un peu sec, en refermant la porte derrière lui.
Perdue dans ses pensées et absolument pas préparée à cette irruption soudaine, la brunette sursauta. Elle releva ensuite les yeux vers l'entomologiste, s'apprêtant à lui asséner une répartie bien sentie. Malheureusement les mots moururent dans sa bouche avant d'avoir pu franchir ses lèvres. Le regard de Gil s'était immédiatement posé sur sa blessure. Et ses pupilles, jusqu'à lors glacées, avaient pris la lueur d'une tendre inquiétude. Son visage s'était grandement adouci quand il vint s'asseoir près d'elle. Sans un mot il leva une main vers la tempe de la jeune femme, souleva quelques mèches brunes qui tombaient sur son front et fixa la plaie en fronçant les sourcils.
- « Qu'est-ce que… ? » interrogea t'il à mi-voix en passant son pouce à quelques millimètres de la blessure alors que son autre main glissait sur la nuque de la jeune femme.
- « Les risques du métier » répondit-elle simplement sans songer à se dégager. Sans en avoir vraiment envie, en fait. C'était presque effrayant cette façon qu'elle avait de ne plus rien contrôler à chaque fois qu'il était proche d'elle.
- « Mais qui… ? » s'enquit à nouveau l'entomologiste envahi par une vague de culpabilité, ses doigts jouant inconsciemment dans ses boucles brunes.
Il l'avait envoyé seule sur cette scène et maintenant elle était blessée. A cause de lui. De sa jalousie. Voilà le genre de chose qu'il avait craint en se laissant entraîner dans une relation avec elle. Laisser ses sentiments influer sur son travail. Mais s'ils étaient réellement ensemble, s'ils avaient pu en parler… peut-être que ça ne serait pas arrivé. Rien n'était pire et plus propice aux suspicions que le doute. Pourtant savoir qu'elle aurait pu être blessée plus gravement avait fait disparaître toute forme de ressentiment. Peu importait ce docteur Carter. Il n'aurait pas voulu la perdre alors qu'ils étaient en froid. Il ne voulait pas la perdre du tout. Jamais. Sara secoua doucement la tête et esquissa un sourire. Son attitude était si différente de ce matin. Quand elle disait qu'il était lunatique…
- « Peu importe, il a été arrêté. Et puis ce n'est rien » le rassura t'elle en s'écartant de lui.
Grissom la laissa faire, retirant ses mains de son cou et de son visage à regret. Il hocha la tête, décidant que la contrarier maintenant ne serait pas des plus subtiles ni des plus appropriés… Il opta donc pour un sujet plus 'neutre'.
- « Tu as bouclé ton enquête alors… » commença l'entomologiste sur le ton le plus amical qu'il put se donner. « C'est du bon travail. Tu peux rentrer si tu veux » ajouta t'il en souriant.
- « Non, Nick ne va pas tarder. Il a dit qu'il passerait ici ce soir » expliqua la brunette en se levant pour aller se resservir du café. « Et vous en êtes où avec votre cadavre ? » continua t'elle, davantage pour se montrer polie que par réel intérêt. Les tensions de la veille et de la matinée ne s'étaient pas encore totalement dissipées. Elle le sentait et lui aussi sans doute…
- « Manifestement un randonneur qui a présumé de ses forces. Crise cardiaque au milieu de son footing hebdomadaire » répondit Gil en se redressant sur sa chaise. « Greg tenait à écrire les conclusions lui-même » conclut-il avec amusement, non sans une certaine fierté à l'égard de son jeune élève. « Alors, tu vois Nick ce soir ? » reprit-il, mine de rien, en la suivant du regard alors qu'elle prenait place dans un des fauteuils.
- « Non, il va être fatigué après son vol. Il va avoir besoin de se reposer. En plus Warrick et Cath ne sont pas près d'avoir fini leur affaire. Mais on a une partie de strip-poker prévue pour demain. Vous voulez venir ? » proposa la jeune femme, mutine et un brin provocante. D'où est-ce que cela venait ? Proposer à Grissom une partie de strip-poker… Avait-elle perdue l'esprit ? Ou cédait-elle simplement au désir de passer du temps avec lui ?
- « Strip-poker, hein ? » répéta t'il en la fixant, mi-choqué mi-malicieux. « Ça pourrait être intéressant… » admit-il, véritablement tenté par la perspective d'avoir l'occasion de déshabiller sa jeune collègue. Même indirectement.
- « Parfait, je préviendrais les autres » approuva t'elle, légèrement surprise. « Normalement ça se fera chez Nick. Poker et tapas. Mais ne soyez pas trop confiant, on n'est pas mauvais à ce jeu-là » ajouta la jolie brune, espiègle.
- « Je ne savais pas que tu jouais au poker » reprit Grissom avec un sourire en coin.
- « Il y a pas mal de trucs que tu ne sais pas… » répliqua Sara avant de se rendre compte de sa bévue et de se mordre la lèvre inférieure. « Que vous ne savez pas. Désolée. »
- « Non, 'que tu ne sais pas', ça me va » rectifia l'entomologiste, toujours souriant. Quelque part, il était content de son erreur – qu'il ne considérait d'ailleurs pas comme une erreur en soi. Si elle le tutoyait, ici et naturellement, c'était plutôt bon signe. Et c'est ce qu'il voulait.
- « Je sais » répondit la brunette avec un demi sourire. « C'est juste que… c'est étrange » fit-elle en secouant ses boucles brunes. « Je ne suis pas habituée. J'ai l'impression de… de commette une sorte de sacrilège » conclut-elle en fuyant son regard, les joues roses. Elle se sentait déjà tellement stupide de penser ça, alors le lui avouer…
- « A ce point là ? » la taquina Grissom. « Tu peux dormir dans mes bras mais pas me tutoyer au labo ? » continua t'il avec un sourire carnassier, décidé à la faire rire et ravi de la faire rougir en passant. Il n'avait pas l'habitude d'agir ou de parler de la sorte. Sans réellement réfléchir aux conséquences. Juste sur l'impulsion de moment. Mais il sentait qu'il pourrait s'y habituer rapidement.
- « Elle a dormi dans tes bras ? » La voix de Catherine, mêlant amusement et effarement, les fit sursauter et se retourner brusquement. La femme blonde se tenait sur le seuil, les bras croisés sur sa poitrine, un sourire ironique plaqué sur les lèvres.
- « Sara, tu ne m'avais pas dit que ce n'était pas du tout ce que je croyais ? Non, parce que là ça s'en rapproche » sous-entendit l'experte en haussant un sourcil, malicieuse.
- « Catherine… » fit Sara dans un soupir. « Honnêtement, je me demandais quand tu allais en parler » lâcha t'elle, blasée. Elle savait – en tous cas, elle pressentait – que cela aurait forcément des répercutions. Mais le côté positif c'est que là, ils étaient deux contre elle. Cath était plus proche de Grissom. Elle 's'acharnerait' sur lui.
- « Tu as dormi dans ses bras ? » reprit la femme blonde en se tournant vers sa coéquipière.
- « Quoi ? » fit la brunette en haussant un sourcil. « J'ai dormi dans les bras de Nick et de Warrick des centaines de fois. Ça n'a rien d'exceptionnel » se justifia t'elle alors que le sourire de son interlocutrice s'élargissait de seconde en seconde.
Se justifier n'était pas une bonne idée songea t'elle immédiatement après avoir prononcé ces mots. Cela accentuait le sentiment de culpabilité qui émanait d'elle. Catherine n'était pas dupe. Et Grissom ne l'aidait pas vraiment. Il semblait trouver la situation plutôt amusante. Mais où était passé le véritable Gil Grissom qui ne supportait pas d'aborder le moindre sujet en rapport avec sa vie privée ? Certainement perdu quelque part entre l'enlèvement de Nick et aujourd'hui… Elle devait trouver autre chose. Et vite.
- « Et quand bien même j'aurais couché avec Grissom dans chacune des pièces de ce labo, ça ne te regarderait pas » suggéra Sara sur le ton d'une conversation on ne peut plus banale et avec une facilité qui l'étonna elle-même. « Au fait, où est Warrick ? » demanda t'elle, changeant brusquement de sujet et tentant de dissimuler un sourire derrière sa tasse de café.
Elle aurait vraiment adoré avoir un appareil photo. Ou mieux, une caméra. La franche incrédulité qui se reflétait sur les visages de ses deux coéquipiers était vraiment impayable et indescriptible. La jolie brune chercha du regard une éventuelle trace de vidéo surveillance mais n'en trouva aucune. Zut.
- « Hey, salut les gars ! » lança précisément Warrick en arrivant dans la pièce.
Le jeune afro-américain s'arrêta net en remarquant les expressions encore choquées de Grissom et Catherine. Il se tourna vers Sara, en quête d'une réponse mais cette dernière se contenta d'hausser les épaules avec un regard résolument innocent et un sourire candide.
- « Il y a un problème ? » demanda t'il finalement au bout de quelques secondes.
- « Non » répondit simplement la jeune scientifique. « Justes quelques images subliminales qu'ils doivent avoir du mal à gérer… » exposa t'elle en prenant sur elle pour ne pas éclater de rire à l'instant.
- « Images de quoi ? » s'enquit Warrick en se servant une tasse de café.
- « Crois-moi, tu ne veux pas savoir » chuchota Sara à son oreille.
- « Bien, merci Sara, maintenant je me poserais toujours la question et je vais faire des cauchemars pendant au moins une semaine » fit Catherine en sortant de sa léthargie
- « Des cauchemars à propos de quoi ? » interrogea le jeune expert, de plus en plus perdu.
Mais avant que la femme blonde ait pu ne serait-ce qu'esquisser une réponse, Greg déboulait dans la pièce, le souffle court. Sara se surprit à bénir mentalement son jeune collègue pour son timing. Quoique quelques minutes plus tôt, une telle interruption aurait été la bienvenue.
- « Nick est arrivé ! » s'exclama t'il avec enthousiasme.
Grissom fut le dernier sorti. Et quand il arriva dans le hall, Sara était d'ores et déjà littéralement nichée dans les bras du jeune texan. Ses mains passées autour de sa nuque et ses jambes nouées autour de sa taille. Le visage de Nick était fendu d'un grand sourire et quelques sacs gisaient à ses pieds. Signe qu'il les avait sans doute laissés tomber un peu plus tôt afin d'étreindre la jeune femme. Cette vision ramena définitivement l'entomologiste à la réalité, chassant les dernières idées quelques peu… déplacées qu'avait fait naître le commentaire de Sara. Idées qui les impliquaient lui, la jeune femme, les vestiaires du labo et absolument aucun vêtement. Tout sauf professionnel. Il secoua discrètement sa tête et se rapprocha du petit attroupement qui s'était formé autour du nouveau venu.
La brunette se laissa glisser à terre mais ne se sépara pas pour autant de son ami. Ce qui eut le don d'agacer Grissom plus qu'il ne l'aurait souhaité. Quand enfin ils se décidèrent à s'écarter l'un de l'autre, l'entomologiste constata avec soulagement que Nick avait bien meilleure mine. Mais ses yeux n'avaient pas encore totalement retrouvé cette lueur qui les habitait habituellement. Sauf quand son regard se posait sur ses amis. Là, il s'illuminait. Ils lui avaient manqué. C'était évident. Dans des circonstances pareilles, lui, Grissom, ne se serait jamais éloigné. Pas d'elle. Et pour aller où de toutes manières ? Mais Nick n'avait pas le même caractère. Cet intermède lui avait fait du bien… Gil vit le jeune homme échanger embrassades et poignées de main avec une bonne volonté exemplaire.
Une fois la foule dissipée, il s'approcha à son tour et échangea avec le texan un regard qui en disait bien plus long que n'importe quelles paroles. Il appréciait beaucoup Nick. Il savait que c'était réciproque. Il savait aussi que le jeune expert recherchait énormément son approbation, sa confiance. Il en était flatté. Et ses yeux disaient combien il était content de le voir de retour, en bonne santé. Cela suffisait. Greg et Warrick s'emparèrent des sacs du texan et ouvrirent la marche vers la salle de repos. Catherine leur emboîta le pas suivi par Grissom qui risqua un œil en arrière. Nick avait affectueusement passé un bras autour de la taille de Sara et lui murmurait des choses à l'oreille, penché vers elle.
La jeune femme riait, appuyée contre son épaule. Là, elle était vraiment rassurée. Pour la première fois depuis 10 jours. Elle l'avait été quand ils l'avaient retrouvé, quand ils avaient su qu'il était sauvé, qu'il n'y aurait pas de séquelle. Mais, le voir maintenant, après une semaine, aussi reposé, aussi souriant, aussi… lui. Il lui avait moins manqué qu'elle l'aurait cru. Ou disons qu'elle s'était moins angoissée qu'elle l'aurait cru. Parce qu'il y avait eu Grissom. Matt aussi, dans une moindre mesure. Surtout Grissom. Il avait été l'ami que Nick aurait pu être dans les mêmes circonstances. Il avait été là, pour elle. Matt… Ce n'était pas pareil. Il n'était pas un ami. D'ailleurs elle ne savait pas trop comment le qualifier. 'Petit ami' lui semblait un peu trop 'adolescent' comme terme. Et puis l'était-il vraiment ?
La jeune femme sortit de ses pensées dans la salle de repos. Au son des exclamations ravies de Greg à qui Nick avait ramené un souvenir. Elle sourit de bon cœur devant ce qui se révéla être un cactus en pot – un faux, en peluche – qui, lorsqu'on appuyait sur un bouton, se mettait à remuer au rythme d'une musique typiquement country. Le texan avait des cadeaux pour chacun d'entre eux. Il finit son tour de table en se retournant vers Sara, un large sourire aux lèvres. La brunette arqua un sourcil interrogateur devant son air malicieux et se retrouva rapidement coiffée d'un superbe chapeau digne de Lucky Luke.
- « Et voilà pour ma princesse… » fit Nick en se reculant légèrement pour juger de l'aspect général, visiblement fier de lui.
- « Merci cow-boy » murmura Sara, ravie, avant de déposer un léger baiser sur sa joue. Elle avait toujours rêvé de posséder un de ces chapeaux. Il le savait. Il s'en était rappelé.
- « Mais de rien » rétorqua le jeune homme avec une galanterie sciemment exagérée. « Alors, comment vous vous êtes débrouillés sans moi ? » reprit-il. « Je parie que vous ne vous en sortez pas… » ajouta t'il, faussement docte.
- « Moi je m'en sors » répondit Sara avec espièglerie. « Les autres ont plus de mal… »
- « Humm… d'ailleurs on va devoir y retourner nous » fit Catherine en se tournant vers Warrick. « On a pas tous les faveurs du patron… » ironisa t'elle gentiment en coulant un regard entendu vers Sara.
- « De toutes façons, je tombe de fatigue » annonça Nick sans avoir remarqué l'échange précédent. Le taxi m'attend en bas et je ne rêve que de mon lit » expliqua t'il en réprimant un bâillement. « On se voit demain soir ? Vingt heures chez moi ? » s'enquit-il.
Les autres acquiescèrent en souriant, ce qui le fit sourire à son tour. Il échangea une nouvelle étreinte avec Catherine, embrassa Sara sur le front, leur souhaita à tous une bonne soirée et quitta la pièce, Greg sur ses talons. Catherine et Warrick ne tardèrent pas. Finalement Sara et Grissom se retrouvèrent seuls. La jeune femme, légèrement nerveuse, retira son couvre-chef et passa une main dans ses cheveux en s'asseyant. L'entomologiste, lui, posait sur elle un regard mi-narquois mi-taquin, tout en jouant machinalement avec la tarentule en peluche que Nick lui avait offert. Le silence qui régnait à présent dans la salle n'était pas vraiment inconfortable. Juste un peu… tendu.
- « Je suis désolée pour tout à l'heure » se lança Sara après quelques instants d'hésitation.
- « A quel propos ? » l'encouragea son superviseur, tentant tant bien que mal de garder un visage sérieux.
- « Je n'aurais pas du dire ça à Catherine » admit la jeune femme avec une petite moue de gamine prise en faute. « Mais parfois elle peut être tellement… »
- « Harassante ? » proposa Gil, secourable, sans pouvoir dissimuler l'amusement qui pointait dans sa voix.
- « Oui, par exemple » approuva la brunette en relevant les yeux vers lui. Pourquoi n'était-il pas fâché ? Ne serait-ce qu'un peu. Ou même juste mal à l'aise… Cela la dépassait.
- « C'était plutôt bien trouvé » finit-il par répondre, ses lèvres s'étirant d'un sourire. « On va dîner ? Indien ? C'est moi qui paie » proposa t'il soudainement en se levant.
D'accord. Là, elle était définitivement tombée dans la quatrième dimension. Etait-ce vraiment ça être ami avec Grissom ? Etait-ce vraiment si facile ? Cela le changeait-il vraiment autant ? A quoi pouvait-il bien penser en lançant ce genre de proposition comme si il n'y avait rien de plus naturel ? Elle se leva cependant à sa suite. Elle aimait passer du temps avec lui, pourquoi s'en priverait-elle ? Peut-être parce qu'elle aimait trop ça, justement. Ou peut-être parce qu'à choisir, elle préférait regarder un épisode de Stargate avec lui plutôt que d'aller à l'Opéra avec Matt. Et ça, ce n'était pas 'bien'. Pour autant que les notions de bien et de mal signifiaient encore quelque chose à Vegas. Il ne fallait pas qu'elle s'habitue à être près de lui. Il ne fallait pas qu'elle redevienne dépendante de lui. C'était trop dangereux.
- « Vous savez, » fit-elle en passant devant lui alors qu'il lui tenait la porte, « j'ai du mal à vous comprendre des fois… »
Sa mine déconfite le fit fondre et il plaça une main dans le creux de ses reins avant de se pencher vers elle. Comment pouvait-il lui faire savoir qu'il ne jouait pas avec elle, qu'il avait juste envie d'être avec elle parce que c'est ce qui lui semblait juste et parce qu'il en avait une irrésistible envie ?
- « Moi non plus je ne me comprends pas toujours… » chuchota t'il à son oreille, souriant.
