Voilà la fin, en tous cas la fin de l'histoire à proprement parler, maintenant je me suis un peu laissée aller avec l'épilogue… enfin, vous verrez bien.
(Given up, Lara Fabian)
Bon, maintenant qu'elle y était, il n'y avait pas de retour en arrière possible. Elle devait le faire. Elle n'avait pas le choix. Elle n'avait plus le choix. Leur affaire était quasiment résolue. Catherine et Nick interrogeaient le suspect. Pour ne pas dire le coupable. Ils avaient déjà bien assez de preuves pour le mettre derrière les barreaux même si il continuait de nier. Il ne restait qu'une heure avant la fin de leur service. Et, si elle s'était arrangée pour éviter Grissom durant les huit précédentes, il était temps de l'affronter. Quelque part, les choses auraient sans doute été plus difficiles s'il s'était comporté autrement ce matin. Là, elle n'avait plus de regrets à avoir. Cette… liaison avait été une erreur. Une monumentale erreur. Tomber amoureuse de Grissom en avait été une autre. Pire encore.
Alors pourquoi hésitait-elle, le regard fixé sur la porte de son bureau ? Pourquoi ses mains devenaient moites ? Pourquoi son cœur s'accélérait brusquement ? Et surtout, pourquoi tremblait-elle ? Parce qu'elle l'aimait ? Parce que, quelque part au fond d'elle, elle savait qu'il y avait entre eux l'un de ses liens invisibles et immuables qui la poursuivrait toute sa vie. Peu importe ses choix. Peu importe la route qu'elle prendrait. « Il » serait toujours là, avec elle. Et en un sens, c'était rassurant… non ? Enfin, de toutes façons, elle n'avait plus le choix. Elle devait le faire. La jeune femme brune prit une grande inspiration et frappa à la porte. Une voix familière l'invita à entrer. Ce qu'elle fit avant de le regretter dans la demi seconde qui suivit. Grissom n'était pas seul dans cette pièce…
Comment elle réussit à conserver un visage neutre ? Comment réussit-elle à ne pas s'effondrer ou s'enfuir en courant ? Elle ne le saurait sans doute jamais. Le voir, là, dans son fauteuil, souriant, avec cette p de Sofia assise sur son bureau, les jambes croisées dans une pose aguicheuse… Elle eut envie de hurler. Mon Dieu. Peut-être que c'était plus facile ainsi mais c'était tellement douloureux… Passée la première seconde d'effarement, elle se composa un sourire. Elle ne leur ferait pas le plaisir de craquer. Jamais. Par contre, elle aurait volontiers fait disparaître l'air narquois et triomphant de la jeune femme blonde…
- « Grissom » commença Sara, impressionnée par son propre sang-froid. « Je voudrais vous parler de quelque chose… »
- « Sara, tu ne vois pas que je suis occupé pour l'instant ? » répliqua l'entomologiste avec une certaine cruauté qu'il ne se connaissait pas. Il se faisait certainement plus de mal qu'à elle songea t'il, le cœur brisé à l'idée de la faire souffrir, mais incapable de s'en empêcher.
- « Ça ne prendra pas longtemps » répliqua sèchement la brunette, blessée par son ton.
- « C'est à propos de votre affaire ? » s'enquit Grissom tout en sachant parfaitement que ce n'était pas le cas. Une part de lui voulait voir comment elle se débrouillerait pour gérer la présence de Sofia. L'autre part nota combien Sara pouvait être insolemment belle et désirable en cet instant.
- « Non » répondit la brunette en redressant fièrement la tête, les yeux plus sombres que jamais.
- « Alors ce n'est pas le moment » conclut Grissom, se calant davantage dans son fauteuil. Il jeta un regard en coin à la femme blonde près de lui qui semblait se délecter de la situation. Décidemment il y avait quelque chose qu'il n'aimait pas chez cette femme. Et si il tolérait encore sa présence dans son bureau en ce moment, c'était uniquement pour mettre Sara mal à l'aise. Bon sang, mais qu'est-ce qu'il faisait ? Il voulait la perdre définitivement ou quoi ? En même temps, son manque de réaction l'agaçait…
- « Je n'ai besoin que d'une minute » fit Sara, bouillant de rage. Elle n'allait sûrement pas le supplier. Ça non. Jamais.
- « Eh bien allez-y, on vous écoute » proposa Sofia avec nonchalance.
Sara manqua de s'étrangler mais réussit à ne laisser percer son étonnement que par un sourcil levé. « On vous écoute » ? « On » ? Mais qu'est-ce qu'elle croyait celle-la ? La jeune femme brune se tourna vers Grissom qui se contenta d'un signe de la main pour signifier qu'il était d'accord. Salop. Mais okay… S'il le prenait comme ça, elle aussi elle pouvait jouer. Au fond, elle savait qu'il n'y avait rien entre Sofia et lui. Qu'il n'aurait jamais fait ça. Qu'il ne lui aurait jamais fait ça. Et elle savait qu'il y avait une raison derrière ce comportement. Peut-être même qu'elle la connaissait cette raison. Mais elle ne constituait en aucun cas une excuse.
- « Parfait » approuva la brunette, consciente des deux regards posés sur elle. De celui de Grissom surtout. « C'est fini » lâcha t'elle, étrangement soulagée.
- « Mais tu n'as rien dit… » remarqua la jeune femme blonde en fronçant les sourcils alors que l'entomologiste se figeait dans son siège.
- « J'ai dit que c'était fini » répéta Sara avec une bonne volonté exemplaire. « C'est fini. Je laisse tomber. Game over » expliqua t'elle. « Et je suis sûr que le docteur Grissom a parfaitement compris, lui » ajouta t'elle, sarcastique, en insistant sur le 'lui'.
Le contentement qu'elle éprouva en constatant la soudaine pâleur – voire même lividité – de son superviseur ne fut pas aussi total que ce à quoi elle s'était attendue. Et pour tout dire, là, tout de suite, elle avait surtout envie de pleurer et d'être réconforté dans des bras chaleureux. Les siens par exemple. Ce qui était plutôt ironique étant donné la situation… Mais dès que cela concernait Grissom, elle avait tendance à perdre tout sens logique. Elle l'aimait tellement qu'elle le détestait. Et elle le détestait tellement qu'elle l'aimait. Une foule de sentiments contradictoires remontaient en elle. Cette peine dans ses yeux bleus, cette douloureuse incrédulité… ça lui faisait mal, ça la mettait en colère. Comment osait-il avoir l'air trahi alors que c'est lui qui la trahissait ?
- « Je ne… » commença Sofia, de plus en plus perdue.
- « Dehors » articula Grissom en se tournant vers elle. « Tout de suite ! » ordonna t'il à la jeune femme blonde sur un ton tellement dur qu'il s'en étonna lui-même.
Mais l'entomologiste ne s'autorisa pas à rester étonner très longtemps. Il était bien trop dévasté. C'était de sa faute. Il aurait du le savoir. Il n'aurait pas du jouer à ça avec elle. Elle était trop importante. Il tenait trop à elle pour tout gâcher par simple jalousie. Un instant il se surpris à prier qu'elle n'agisse que sous le coup de la colère. Elle ne pouvait pas vraiment le penser… Elle ne pouvait pas vraiment renoncer. Pas maintenant, alors qu'ils venaient juste de saisir leur chance. Parce que lui n'y survivrait pas.
- « Oh non, ce n'est pas la peine » fit Sara en se dirigeant calmement vers la porte avec un sourire mielleux et hypocrite qu'elle ne se connaissait pas. « Je n'ai rien d'autre à ajouter, vous pouvez continuer… quoique vous fassiez… » ajouta t'elle avec une pointe d'insolence avant de sortir. Elle l'avait fait. Elle l'avait vraiment fait. Sans élever la voix en plus. Sans flancher. Et sans se ridiculiser en bafouillant ou en éclatant en sanglots.
- « Non, Sara, attends ! » s'exclama l'entomologiste en se précipitant à sa suite.
Il n'avait hésité qu'une seconde mais quand il passa la porte, Sara était déjà à l'autre bout du couloir. Un instant, le bourreau de travail qui était en lui suggéra qu'il pourrait sans doute attendre la fin de la journée pour parler à la jeune femme. Mais son cœur aussi bien que sa raison repoussèrent vigoureusement cette option. Elle était bien trop importante. Grissom rejoignit donc la brunette à grandes enjambées, ignorant les regards perplexes des laborantins et autre personnel de jour. Sara le sentit arriver plus qu'elle ne l'entendit. La tête haute et d'apparence très calme, elle continua d'avancer. Il n'avait pas voulu l'écouter, tant pis pour lui. Elle avait fait ce qu'elle avait à faire. Evidemment, l'idéal aurait été qu'elle puisse l'éviter jusqu'à demain – voire même quelques jours si elle avait pu – mais…
Une main sur son avant bras la stoppa. Elle laissa échapper un soupir. Pourquoi fallait-il qu'il rende les choses encore plus difficiles ? Elle était déjà brisée. Avait-il vraiment besoin de faire ça ? Elle aurait juste aimé pouvoir rentrer chez elle, se lover dans son lit avec un pot de nutella en regardant son dernier DVD. Harry Potter en l'occurrence. Oui, oui, ça pouvait sembler puérile mais elle aimait beaucoup ça. Même si elle ne l'aurait jamais volontairement avoué… La pression sur son bras se fit plus forte et la main l'entraîna dans les vestiaires, vides à cette heure. Le claquement de la porte derrière elle la fit inconsciemment sursauter. Mais elle ne bougea pas. Incertaine quant à la conduite à tenir. Et puis c'est lui qui l'avait amener ici après tout, c'était à lui de commencer, non ?
- « Sara… » fit doucement la voix de l'entomologiste avant de se briser.
Mince, il voulait vraiment parler. La jolie brune ferma les yeux en instant et s'efforça de respirer calmement. Elle ravala les larmes qui menaçaient de franchir la barrière de ses paupières closes. Elle n'avait pas pleuré avant alors elle n'allait certainement pas s'y mettre maintenant. C'était hors de question. Mon Dieu… Elle aurait tout donné pour être ailleurs. Tout. Enfin presque. L'idée était là en tous cas. Seule avec Grissom. Dans les vestiaires. Alors qu'elle venait de mettre un terme à cette comédie dramatique qu'était leur 'pseudo relation'. Déjà, dans une situation normale – avec un autre homme – c'était une chose qu'elle détestait. Les confrontations post-rupture. C'était toujours horrible. Mais quelque part c'était l'occasion ou jamais de lui dire ce qu'elle avait sur le cœur. Une scène ? Pourquoi pas au fond…
- « Sara, regarde-moi » reprit Gil d'un ton presque suppliant.
Il n'était pas en colère. Il ne l'était plus. Il ne l'avait été que très brièvement. Le temps de l'attraper et de la faire entrer de force dans la pièce sombre et vierge de tout public. Il était juste… Pas effondré. Ça n'était pas vraiment son genre. Peut-être plus tard si il venait à la perdre pour de bon. Non, il était plutôt profondément triste. Et angoissé. Et vidé. Et confus. Il fit un pas vers la jeune femme qui lui tournait résolument le dos. Elle n'avait pas bougé. Sauf quand il avait refermé et verrouillé la porte afin de les isoler. Maintenant il voulait savoir pourquoi. Il voulait comprendre. Et la faire changer d'avis si elle lui en laissait la possibilité. Il leva une main hésitante vers ses boucles brunes mais suspendit son geste à mi-chemin. Ce n'était sûrement pas la plus pertinente des choses à faire.
- « Sara, je t'en prie… » murmura t'il, ne sachant que faire d'autre.
- « Quoi ? » lança finalement Sara en se retournant brusquement, le regard flamboyant. « Tu as gagné, ça te va ? C'était une erreur, ça ne pouvait pas marcher. J'aurais du le savoir. Tu le savais. Fin de l'histoire. Il n'y a rien à ajouter ! »
La fausse décontraction qu'elle affichait dans son ton ne le trompa pas. Elle était en colère. Elle souffrait sans doute autant que lui. Et cela lui fit mal. Il lui était beaucoup plus douloureux de la voir souffrir que de gérer sa propre souffrance. La prendre dans ses bras, la serrer contre lui. C'est ce dont il avait le plus envie en cet instant. C'est ce dont il avait le plus besoin. Mais d'abord ils devaient parler. Sara ne prenait jamais – ou alors très rarement – de décisions sur un coup de tête. Il le savait. Elle examinait les évidences, réfléchissait puis se faisait une opinion. C'est pour ça qu'elle était douée dans son travail. Elle avait du réfléchir avant de prendre 'cette' décision. Et c'est sans doute ça qui l'effrayait le plus. Ça et le fait qu'elle était aussi – sinon plus – bornée que lui.
Mais il n'abandonnerait pas. Pas maintenant. Il ne voulait pas. Il ne le pouvait pas. Il l'aimait. Ça paraissait tellement évident, tellement clair à présent… En y réfléchissant, une chose l'interpella dans le discours de la brunette. Pourquoi ce choix de mots ? Pourquoi cette référence à lui ? 'Tu as gagné'. 'Tu le savais'. Pensait-elle vraiment qu'il ne voulait pas de cette relation ? Pensait-elle vraiment qu'il avait condamné cette relation à l'échec avant même de l'avoir entamé ? L'avait-il blessé au point qu'elle ne puisse plus lui faire confiance ? Ou alors peut-être venait-elle seulement de réaliser qu'elle ne l'aimait pas. Qu'elle ne l'aimait plus. Qu'il était finalement trop tard.
- « Pourquoi ? » fut la seule chose qu'il parvint à articuler. Mais il y tenait.
Un sourire fugitif passa sur les lèvres de Sara. 'Pourquoi ?'. En dehors du fait qu'il ne l'aimait pas ? C'est ça ? C'était une blague, n'est-ce pas ? A quoi bon connaître le pourquoi de la chose puisqu'elle le débarrassait d'elle si gracieusement ? Etait-il toujours obligé de tout analyser, de tout décortiquer ? N'avait-il pas compris qu'en matière de sentiment la logique passait au second plan ? Mais si il voulait des raisons, elle allait lui en donner… Parce qu'elle en avait. Plein. Cependant si il pouvait éviter de poser sur elle un regard aussi désespérément tendre, cela lui faciliterait la tâche. Elle décida de fixer son propre regard ailleurs que sur lui – la meilleure manière d'éviter le sien – et se lança.
- « Je ne me suis jamais vraiment fait d'illusions » commença t'elle, les yeux dans le vague, détachée. Un peu comme si elle racontait une histoire. Mais pas la sienne. « J'ai toujours su, quelque part, que… que je ne pourrais jamais avoir le contrôle dans cette relation. J'ai toujours su que vous… que tu ne pourrais jamais tenir à moi comme je tenais à toi. Mais je pensais que ça n'aurait pas d'importance si je t'avais, toi. Je pensais que je pourrais m'y faire, que si c'était le prix à payer pour être avec toi » exposa t'elle avec un sourire triste. Grissom, voulu intervenir mais elle l'en dissuada d'un geste de la main. Il la laissa donc poursuivre, le cœur douloureusement serré. « Je pensais vraiment que je pourrais supporter… tout ça. Le fait de garder ça pour nous. Le fait qu'on ne soit pas un couple comme les autres, qu'on ne sorte pas, qu'on ne fête pas Noël à la maison autour d'un sapin à confectionner une maison de pain d'épice… Je sais que ça peut sembler stupide mais c'est important pour moi » fit Sara mi-souriante mi-au bord des larmes. « Je pensais que je pourrais supporter le fait que tu ne sois pas démonstratif, je ne le suis pas non plus. Je pensais que je pourrais supporter que tu ne me parles pas de toi, que tu ne cherches pas à ce que je parle de moi, que tu souffles toujours le chaud et le froid entre nous » Grissom chercha une nouvelle fois à l'interrompre en lui prenant la main mais elle se dégagea vivement, comme s'il l'avait brûlée. « Je pensais supporter le fait que quoique que je fasse, je n'aurais jamais dans ta vie la place que tu as dans la mienne. Le fait que je passerais toujours après ton travail, après Catherine ou même après Sofia. Mais la vérité c'est que… je ne le supporte pas. Je savais que tu ne voulais pas de cette relation. Je savais qu'elle finirait par me détruire à un moment ou à un autre, que j'étais trop dépendante. C'est juste que… je… je voulais tellement y croire… »
Elle ne put aller plus loin. Sa voix se brisa en même temps que ça capacité à retenir ses larmes. Elle avait vraiment, vraiment voulu y croire. De toutes ses forces. Mais elle n'avait plus le courage de se battre. Les épaules secouées de sanglots, elle ne protesta pas quand Grissom passa une main autour de sa taille. Pas plus qu'elle ne protesta quand il l'attira tout contre lui, son autre main caressant ses boucles brunes. Elle se laissa seulement aller, le nez niché dans son cou, les yeux clos. Ses bras s'étaient noués de leur propre initiative autour de la nuque de l'entomologiste. Ils restèrent ainsi de longues minutes. Enlacés. Lui la berçant tendrement. Elle se calmant progressivement. La peine et la culpabilité étaient peintes en technicolor sur le visage de Grissom et dansaient dans ses yeux. Il se détestait.
Comment avait-il pu faire ça ? Lui faire ça ? Comment avait-il pu laisser la situation dégénérer à ce point ? Et surtout comment avait-il pu douter un seul instant de son affection ? Il ne la méritait définitivement pas. Mais elle l'aimait. Autant qu'il l'aimait. Alors il allait faire un effort. Pour elle. Pour lui. Pour eux. Il allait faire en sorte que ça marche. Il allait la rendre heureuse. Il ferait tout pour ça. Tout. Et la première chose à faire était de l'amener à comprendre qu'il tenait à elle plus que tout. Que lui aussi était dépendant de cette relation. Que lui non plus ne contrôlait rien quand il était avec elle. Et que ça lui plaisait en fait, de ne rien contrôler dans ces moments-là. Il se détacha légèrement de Sara et passa deux doigts sous son menton, l'obligeant gentiment à le regarder.
- « Ssssshhhhh, sweetheart. Ça va aller… » lui promit-il dans un souffle en balayant du pouce ses dernières larmes.
Il caressa doucement sa joue encore humide puis repoussa tendrement une mèche brune derrière son oreille. Il savait que ça ne serait pas toujours facile. Il savait qu'il y aurait toujours un risque compte tenu de leurs personnalités respectives et de leurs relations de travail. Mais il savait aussi que ça valait la peine d'essayer. Il savait qu'elle valait toutes les peines, tous les risques. Et surtout il savait qu'elle ne le ferait jamais souffrir. Jamais intentionnellement, qu'elle n'était pas une autre Debbie Marlin et qu'elle était la seule avec qui il avait envie de partager sa vie. Alors, oui elle allait certainement mettre sa vie sans dessus dessous – comme si elle ne le faisait pas déjà… – mais, franchement, il n'en avait que faire du moment qu'il l'avait, elle. Ils y arriveraient, il était confiant.
- « Je suis désolée, je… » commença Sara, complètement perdue.
Ça n'aurait pas du se passer comme ça. Absolument pas. Il n'aurait pas du la prendre dans ses bras. Il n'aurait pas dû la consoler. Il n'aurait pas du être tendre. Elle fut coupée dans le cheminement de ses pensées par des lèvres chaudes qui se posèrent sur les siennes dans un baiser léger mais chargé d'émotion. Un baiser doux et aimant qui acheva de la déboussoler. On était bien d'accord sur le fait qu'elle venait de confirmer la nécessité d'une rupture, n'est-ce pas ? D'accord, donc ce qui se passait maintenant était… complètement inattendu. Elle décida de ne pas s'attarder sur ce genre de considération et de savourer le moment. Mais déjà les lèvres s'éloignaient et un front se posait contre le sien. Elle releva les yeux pour tomber dans un magnifique regard bleu empli de tendresse et voilé de larmes.
- « Non, c'est moi qui suis désolée, honey » la reprit affectueusement Grissom « Je n'ai pas compris, je n'ai pas su voir que… » Il s'interrompit un instant, ne parvenant pas à mettre des mots sur ses émotions. « Ne me laisse pas… Je t'aime » dit-il finalement, jugeant que c'est ce qui résumait le mieux tout ce qu'il aurait voulu expliquer.
En y réfléchissant bien, songea l'entomologiste, elle était la seule personne à qui il avait dit ces mots – mis à part sa mère. Mais ça lui semblait juste. Il lui avait fallu du temps pour se l'avouer, pour s'autoriser à l'admette et surtout à le lui montrer mais le fait est qu'il l'aimait. Cette jeune femme qu'il tenait dans ses bras, il l'aimait. Alors autant le lui dire. D'ailleurs il ne regrettait pas de lui avoir dit… rien que pour l'expression choquée – et terriblement adorable – qu'elle arborait à l'instant. Sauf que maintenant il était un peu nerveux… disons très nerveux. Il venait tout de même de se dévoiler. Et cela lui avait demandé un certain courage. Après tout, elle n'avait pas dit qu'elle l'aimait, lui. Elle l'avait sous-entendu mais elle ne l'avait pas dit.
Encore incertaine quant au fait qu'il ait vraiment dit ce qu'elle croyait qu'il avait dit, Sara se contenta de le fixer pendant un moment. Elle le sondait, cherchant à savoir s'il le pensait vraiment. S'il le ressentait vraiment. S'il l'aimait vraiment. Ou alors s'il avait juste dit ça… comme ça. Sur le moment. Non, Grissom n'était pas le genre d'homme à prendre ces sortes de déclarations à la légère. Et ses yeux… ses yeux reflétaient ses paroles. Ils étaient aimants, vraiment très tendres. Il la faisait se sentir en sécurité, entourée, désirée… aimée. C'était nouveau. C'était… bon. Alors elle sourit. Elle sourit comme elle ne l'avait plus fait depuis longtemps. Autant avec les lèvres qu'avec les yeux. Elle vit Grissom se détendre et sourire à son tour, visiblement soulagé.
- « Merci… » fit-elle d'un ton doux et rieur en appuyant son front contre l'épaule de l'entomologiste.
Bien sûr, quelque chose du type 'je t'aime aussi, marions-nous et faisons plein d'enfants' aurait sans doute été davantage de circonstances. Sara en avait conscience. Mais elle ne se sentait pas prête pour ça. Elle s'était bien assez mise à nue pour la journée – voire l'année. En revanche 'merci' reflétait exactement ce qu'elle pensait. Elle lui était vraiment reconnaissante d'avoir eu ce courage. De l'aimer et de le lui dire. C'était un quelque sorte sa manière à elle de lui accorder une autre chance. Elle ne lui pardonnait pas tout à fait. Elle n'oubliait pas. Elle… comprenait.
- « De rien » répondit simplement Grissom avec un léger sourire taquin. Généralement, ce genre de réponse était plutôt négative. Mais il savait que de la part de la jeune femme, ce n'était pas le cas. Et ça lui suffisait. « Il va falloir qu'on parle » reprit-il sans relâcher son étreinte. « Il va falloir qu'on mette certaines choses au point » continua t'il alors qu'elle acquiesçait contre son épaule. « Sara » ajouta t'il plus doucement, « je… je veux que tu me promettes quelque chose. La prochaine fois que tu douteras, parle-moi. D'accord ? Je ne suis pas très doué pour ce genre de choses, je ne sais pas vraiment comment m'y prendre… ça va demander un peu de temps pour que je m'y fasse, mais je vais faire des efforts. »
- « Je pense que nous avons tous les deux besoin des faire des efforts » remarqua Sara en relevant la tête, malicieuse puis soudain plus grave. « On devrait y aller doucement… je veux dire, prendre le temps de parler. On ne l'a pas vraiment fait la dernière fois et… » Elle ne finit pas sa phrase mais il comprit parfaitement où elle voulait en venir. Ils s'étaient jetés tête baissée dans cette relation au lieu de la construire. « Mon Dieu, je me sens tellement stupide… » murmura t'elle en secouant doucement ses boucles brunes, le rose aux joues.
- « Tu ne l'es pas » l'assura l'entomologiste en posant ses lèvres sur son front. « Tu es la plus brillante et la plus belle des femmes que la terre ait portée » fit-il en ponctuant chaque mot d'un baiser dans le cou de la jeune scientifique.
- « Vil flatteur… » se moqua Sara en souriant avant de s'emparer de ses lèvres pour de bon.
Grissom ne tarda pas à répondre à son invitation explicite et très vite leurs langues se rejoignirent dans une danse voluptueuse et hypnotique. Leurs mains ne restèrent pas inactives et commencèrent à explorer des terrains déjà bien connus. L'entomologiste souleva Sara et la plaqua contre la porte en étouffant son gémissement de sa langue et en passant une main sous son tee-shirt. Tous les deux frissonnèrent lorsque ses doigts rencontrèrent la peau nue de la jeune femme. Le baiser gagna en passion et en intensité. Leurs corps demandaient plus mais ils savaient tous les deux qu'il n'était pas question qu'ils aillent plus loin ici et maintenant. Ils rompirent donc l'étreinte d'un commun accord, à bout de souffle. Gil posa son front fiévreux contre celui de Sara. Ses mains glissèrent sur sa taille fine. Il sourit.
- « Bien… On devrait y aller maintenant… » annonça t'il en se redressant, sans pour autant libérer la jeune femme de son étreinte.
- « Oui, sinon les gens vont commencer à se faire des idées » approuva Sara, taquine.
- « Oh, tu crois ça ? » feignit de s'étonner Grissom en arquant un sourcil, entrant dans son jeu.
- « Tu sais ce que c'est les rumeurs de bureau… » rétorqua la brunette tout contre ses lèvres, une lueur espiègle dans les yeux.
- « Si tu veux on peut éclaircir la situation dès maintenant » proposa l'entomologiste, soudain plus sérieux. Honnêtement, ça ne lui posait aucun problème. Il avait juste pensé que Sara ne voulait pas s'exposer ainsi. Et manifestement il s'était trompé.
- « Je préférerais qu'on attende un peu » trancha t'elle après quelques instants de réflexion.
En fait peut lui importait que les autres soient au courant ou pas. C'est des sentiments de Grissom dont elle voulait être sûre. Et elle l'était à présent. Plus qu'elle n'avait jamais pensé pouvoir l'être.
- « On va voir si ils sont d'aussi bon experts que ça… » ajouta la jeune scientifique avec un sourire mutin.
- « Comme tu veux » fit Gil, amusé. « Je peux t'inviter pour le petit déjeuner ? » demanda t'il ensuite en frottant doucement sa joue râpeuse contre la sienne.
- « Evidemment » répondit Sara, luttant pour ne pas rire à la sensation de la courte barbe de son amant contre sa peau. « Ta maison ou mon appartement ? » ajouta t'elle d'une voix sensuelle au creux de son oreille.
- « Vous êtes diabolique Miss Sidle » grogna l'entomologiste, les yeux assombris par le désir et les lèvres étirées d'un sourire carnassier. « Je croyais que tu voulais 'y aller doucement' ? »
- « Eh bien, je crois que c'est un peu tard pour y penser… » répliqua la jeune femme, mutine.
FIN… Du moins, c'est « une » fin mais l'épilogue promet d'être long.
