The smile on your face
Lets me know that you need me
There's a truth in your eyes
Saying you'll never leave me
The touch of your hand
Says you'll catch me whenever I fall
You say best
When you say nothing at all
(When You Say Nothing At All, Ronan Keating)
Chapitre 3: Où, le whisky aidant…
Harry ouvrit brusquement la porte, prenant Sirius par surprise. Son filleul se tenait sur la défensive, et sa baguette était dirigée contre lui.
" … Harry ? ", bredouilla-t-il.
" Si - Sirius ! "
Sirius sourit. " Lui-même. Pourrais-je savoir… " Puis soudain il comprit. " Tu - tu as cru que…? "
Harry baissa sa baguette en poussant un soupir de soulagement. " Ben… oui ", admit-il piteusement.
Sirius avança le bras comme s'il voulait poser sa main sur l'épaule de Harry, mais se reprit au dernier moment et s'appuya au montant de la porte. " Tu as bien réagi. Après tout, on n'est jamais assez prudent. Je suis désolé de t'avoir fait peur ", ajouta-t-il.
" Pas - pas grave. " Après un silence, Harry se risqua : " Euh… Tu - tu voulais me dire quelque chose ? "
Sirius, très étonné par l'accueil qu'il avait reçu, en avait pour un instant totalement oublié la raison pour laquelle il était là. Du coup, toutes les phrases d'introduction qu'il avait préparées dans sa tête s'étaient envolées, et il se retrouvait comme un imbécile, sans savoir quoi dire.
" Euh… C'est-à-dire que… je passais par là, et… j'ai entendu du bruit, donc je me suis dit que tu ne dormais pas,… et je voulais savoir ce qu'il se passait ", balbutia-t-il. " Tout - tout va bien ? "
" Oui oui, ne t'inquiète pas ", répondit immédiatement Harry. " C'est juste que j'arrivais pas à dormir. J'essayais de trouver de quoi m'occuper, et j'ai fait tomber quelque chose par terre. Je t'ai pas réveillé, au moins ? ", demanda-t-il d'une voix inquiète.
" Oh non, ne t'en fais pas ! J'arrivais pas à dormir non plus, à vrai dire… ", expliqua Sirius avec un petit sourire. Puis, comme frappé d'une idée: " Dis, vu qu'on est tous les deux réveillés…Je boirais bien quelque chose, tu me tiendrais compagnie ? "
" Euh… Oui, pourquoi pas ? ", répondit Harry, pris au dépourvu.
" Ok. Alors, tu m'attends là ? Je vais chercher ce qu'il nous faut. "
" Mais je peux descendre aussi… "
" Non non, reste ici. Ou non, plutôt mieux. Vas dans ma chambre. Elle est plus accueillante que la cuisine, plus grande que la tienne, et il y a une cheminée. J'arrive ! ", s'exclama Sirius en s'élançant dans les escaliers.
Il espérait que ces quelques minutes de solitude lui permettraient de reprendre ses esprits. Comme d'habitude, la vue de son filleul lui avait fait perdre toute contenance, et il ne savait plus où il en était.
Harry, quant à lui, avait été un peu étonné par la réaction de son parrain. Néanmoins, il obéit et se rendit dans sa chambre, où il s'assit sur le canapé, laissant la porte ouverte pour Sirius. Là, il essaya de réfléchir à la façon dont il pourrait lui dire ce qu'il voulait. Il ne pensait pas avoir à se poser cette question avant le lendemain matin, mais il était décidé à saisir cette chance. Seulement, il savait très bien que, dès que Sirius réapparaîtrait, avec son grand sourire et son regard affectueux, toutes ses bonnes résolutions s'évanouiraient. Il fallait donc qu'il soit prêt.
Sirius était remonté. Arrivé devant sa porte, il s'arrêta et jeta un coup d'œil à l'intérieur. Harry était assis, les coudes sur les genoux et la tête entre les mains, une expression à la fois pensive et résolue sur le visage. Sirius fronça les sourcils. Que se passait-il donc dans la tête de son filleul ? Il secoua la tête. S'il parlait à Harry, il avait une chance de le découvrir. Et il entra d'un pas décidé.
Harry leva la tête. Son parrain arborait toujours son sourire irrésistible, et ses yeux pétillaient malicieusement. D'une main, il tenait deux verres, et de l'autre, une bouteille. Une bouteille… qui n'avait pas l'air de contenir de la Bièraubeurre… ni aucune boisson que Harry avait jamais goûtée. Ce dernier jeta un coup d'œil interrogateur à Sirius.
Le sourire de celui-ci s'élargit. Il posa les deux verres sur la table qui faisait face au canapé, avant de tendre la bouteille à son filleul. " Réserve de la famille Black. Meilleure marque, provenance directe des Etats-Unis. Si ça se trouve, elle date encore de l'époque de la prohibition. "
Les yeux de Harry s'arrondirent. " Du… du whisky ! "
Sirius hocha la tête et ne put s'empêcher de rire face à la tête que faisait l'adolescent. " Mais oui mon cher. Apparemment, tu n'en as jamais bu. Tu es plus raisonnable que ton père et moi. A ton âge, on avait déjà profité de sa cape pour se faufiler dans la cave des Trois Balais et en piquer une bouteille ", expliqua-t-il.
Harry secoua la tête. " Non, jamais. "
" Il est donc grand temps que je fasse ton éducation ", déclara Sirius d'un air très sérieux, en remplissant leurs verres. Il en tendit un à Harry. " Mais… pas un mot à Molly, d'accord ? Elle me tuerait si elle savait que je te débauche à un si jeune âge… ", ajouta-t-il avec un sourire espiègle.
Harry attrapa son verre. " Juré ! Je suis pas fou… ", répondit-il en souriant lui aussi.
Sirius leva le sien. " A ta santé, donc ! "
Harry approcha le verre de ses lèvres, et les y trempa. L'alcool lui brûla la gorge, mais il ne trouvait pas ça désagréable. Il avala, bien conscient que Sirius l'observait.
" Alors, premières impressions ? ", lui demanda ce dernier.
" Pas mal. C'est pas pire que la pimentine… ", plaisanta Harry. Puis il ajouta soudain: " Est-ce que ça marche ? "
" Marche ! ", s'étonna Sirius. " Qu'est-ce que tu veux dire ? "
" Je veux dire… est-ce que ça peut faire oublier certaines choses ? ", expliqua Harry en évitant de regarder son parrain.
Sirius ne répondit d'abord rien. Il avait les yeux fixés sur son filleul, la tête penchée de côté, essayant de déterminer s'il était sérieux, ou s'il lui demandait ça pour rire. Mais c'est qu'il est sérieux, ma parole !
" Oui, ça marche. Malheureusement, l'effet n'est que temporaire… Quelle que soit la quantité absorbée, et je parle d'expérience ", répondit-il enfin.
Harry regardait toujours son verre. " Dommage ! Mais bon, c'est toujours ça de pris… " Et il reprit une gorgée.
Un silence gêné s'installa. Ni Harry ni Sirius n'osaient prendre la parole, et ils ne pouvaient pas continuer à fixer le fond de leur verre éternellement. Harry frissonna. Même en plein été, le manoir de la famille Black était impossible à réchauffer. A croire que la température reflétait l'atmosphère qui régnait dans ces lieux. Vêtu de son pyjama, qui consistait pourtant en un pantalon de training et un pull à capuche, il grelottait presque. Espérant se réchauffer, il se recroquevilla au fond du canapé. Sirius remarqua le mouvement de son filleul.
" Oh, désolé ! ", s'excusa-t-il en se levant immédiatement. Il semblait être monté sur ressorts. " Je t'ai fait venir ici pour la cheminée, et j'ai complètement oublié d'allumer un feu. Bon, il faut aussi dire que j'ai eu l'occasion de m'habituer au froid, et qu'il en faut beaucoup pour que j'en souffre… ", ajouta-t-il. Son ton était enjoué, et il avait lancé ça comme une plaisanterie, mais Harry reçut cette phrase comme une décharge électrique.
Il savait pertinemment que son parrain faisait allusion au temps qu'il avait passé dans sa cellule d'Azkaban. Comment pouvait-il en parler avec un tel détachement ? A nouveau, Harry eut l'envie désespérée de pouvoir aider Sirius, de lui faire oublier tout ça, de le consoler… Mais franchement, il se voyait mal prendre son parrain dans ses bras ! En désespoir de cause, il se décida alors à mettre son plan à exécution, et immédiatement.
" Sirius, je - ", commença-t-il courageusement.
" Harry, je - ", se lança Sirius au même moment, se détournant du feu qu'il avait fait apparaître.
Tous deux s'arrêtèrent, se regardant les yeux ronds, et l'air un peu bête. Puis ils se sourirent d'un air gêné avant de baisser la tête, l'un agissant presque comme l'exacte reflet de l'autre.
Soudain, Sirius releva les yeux. " A toi l'honneur, Harry ", déclara-t-il. Non, je ne suis pas lâche ! Seulement, s'il me parle, je saurai peut-être enfin ce qu'il a dans le crâne.
A ces mots, Harry sentit son estomac se serrer, un peu comme avant un match de Quidditch. Cette fois, plus moyen de reculer… Il leva la tête pour rencontrer le sourire encourageant de son parrain. Si seulement il pouvait arrêter de faire ça ! Comment je peux lui dire de s'en aller quand je n'ai qu'une envie, c'est de pouvoir rester avec lui ?
Etonné par le silence de l'adolescent, Sirius était sur le point de dire quelque chose lorsqu'il fut coupé net dans son élan. En effet, Harry s'était enfin décidé, et il sortit d'une traite : " Sirius, je – j'ai réfléchi, et je crois que ce serait mieux que tu partes d'ici. "
Après quoi Harry baissa à nouveau la tête, et se mit à observer le tapis. Voilà, il l'avait dit. Sans les formes, bien sûr, mais il l'avait dit.
Sirius restait figé sur place, continuant de regarder droit devant lui, complètement sonné. Son esprit tournait dans le vide. Hein ! Je sais bien que je ne fais pas un parrain exemplaire, mais de là à – Soudain, il se rendit compte que le dos de Harry tremblait. Sa capuche lui était tombée sur la tête, lui dissimulant son expression. Qu'est-ce que - ? Ne sachant pas trop quoi faire, il resta bêtement où il était, à fixer son filleul. Puis il se secoua enfin, et vint s'asseoir à côté de lui.
En sentant son parrain prendre lentement place sur le canapé, Harry se recroquevilla encore plus dans son coin. Il doit me détester après ce que je lui ai dit ! Enfin, c'est peut-être mieux comme ça… Il aura envie de partir, au moins.
Sirius n'y comprenait plus rien. Mais il sentait qu'il y avait quelque chose derrière le comportement de Harry. Il ne pouvait pas expliquer quoi, mais il le sentait. C'était un des avantages de son côté canin… Et il voulait en avoir le cœur net. Lorsque son filleul eut un mouvement de recul, il le saisit par le bras. Il entendit alors une exclamation étouffée, et le lâcha immédiatement. J'ai peut-être été un peu brusque, mais quand même…
" Harry ? Je t'ai fait mal ? "
Toujours dissimulé sous sa capuche, Harry marmonna : " Non… enfin, si. Mais c'est pas ta faute, c'est là où… où Wormtail m'a… "
" Oh. Je suis désolé… je pensais pas que ça te faisait encore mal. " Puis, après un silence : " Harry ? Regarde-moi dans les yeux. "
Harry remua, mal à l'aise, mais n'obéit pas. Sirius se chargea alors de lui relever le menton.
" Harry, je veux que tu me répètes ce que tu viens de me dire en me regardant dans les yeux. " Il inspira puis expira profondément. " Je peux tout à fait comprendre que tu veuilles que je parte. Après tout, tu ne me connais pratiquement pas, et on ne peut pas dire que j'aie rempli avec succès mon rôle de parrain jusque-là ", dit-il en essayant de garder un ton léger. " Je te jure que j'accepterai. Mais je veux que tu me le dises en me regardant dans les yeux."
Harry se crispa. Et c'est encore lui qui a l'air de s'excuser… Il va avoir tellement de peine… Mais il faut que j'y arrive ! Harry prit sa respiration, essayant de rassembler son courage, et leva les yeux pour les fixer dans ceux de Sirius. " Oui – " Mais ce qu'il y vit l'arrête net. Son parrain faisait tous ses efforts pour garder une expression détachée, mais Harry sentait qu'il attendait sa réponse comme un verdict. Il le voyait dans ses yeux. Des yeux perdus derrière le voile qu'Azkaban y avait laissé, et qui ne les quittait qu'en de rares occasions. Ce voile venait de retomber. Harry ferma les yeux, serra les lèvres, et baissa la tête.
" Non ", déclara-t-il, vaincu. " C'est pas ça… Bien sûr que je voudrais que tu restes. Seulement… " Il avait beaucoup de peine à s'exprimer : c'était comme si les mots refusaient de sortir de sa gorge. " Je ne veux pas non plus que tu gâches ta vie ici ! Tu as déjà suffisamment souffert… "
Harry entendit distinctement son parrain pousser un soupir – un soupir de soulagement. " Mais Harry, je ne trouve pas qu'en remplissant mon rôle de parrain et en essayant de mettre un terme aux agissements de Voldemort je sois en train de gâcher ma vie. "
Harry l'interrompit par un grognement ironique et se décida enfin à le regarder. " Ah oui ? Moi, je trouve plutôt que tu t'es échappé d'une prison pour atterrir dans une autre. " Au moment où il eut dit ces mots, il les regretta. Il ne voulait pas avoir l'air sarcastique, mais il n'avait pas pu s'en empêcher. Cela le révoltait que Sirius pense d'abord aux autres avant de penser à lui. On ne pouvait pas dire que cela lui avait réussi jusqu'ici.
Sirius ne dit rien pendant un instant, puis soupira. " C'est vrai, Harry ", avoua-t-il sans avoir l'air fâché le moins du monde, " je me sens enfermé ici. Mais au moins ça me permet d'être au courant de ce qu'il se passe, et surtout de rester en contact avec toi. "
" Mais tu mérites mieux, Sirius ! ", s'exclama Harry avec véhémence. " Il ne faut pas te sentir obligé – "
" Obligé ? Tu crois que je me sens obligé de m'occuper de toi ? " Sirius n'en revenait pas. J'ai donc été si mauvais que ça, pour qu'il ne comprenne même pas - " D'accord, au départ, je me suis senti obligé d'honorer la promesse que j'avais faite à ton père. Mais après… Harry, il n'y a pas que ça ! Je - " Non, je ne peux pas le dire. Je – ne – peux - pas. De toute façon, James me le disait déjà à l'époque, que j'étais un handicapé du cœur ! " De toute façon, c'est bien la moindre des choses que je puisse faire ", termina-t-il lamentablement en détournant les yeux.
Harry le regardait fixement. C'est le moment où jamais de lui dire quelque chose. Il faut qu'il comprenne une bonne fois. Allez, maintenant !
" Sirius ? Ce n'est pas ta faute. "
Sirius releva la tête, un peu étonné, et fit un vague signe de la main.
" Sirius, ce n'est pas ta faute. "
" Je sais… ", répondit ce dernier en hochant distraitement la tête. Ben oui que je le sais, on n'arrête pas de me le répéter… Comme si ça changeait quelque chose !
" Ce n'est pas ta faute ", insista Harry. Je ne sais pas si ça va servir à quelque chose, mais au moins j'aurai essayé !
" J'ai compris, Harry. " Mais à quoi il joue, là ?
" Sirius… "
" Qu'est-ce que tu essaies de faire, là, Harry ? ", demanda Sirius en se tournant carrément vers son filleul.
" Ce – n'est – pas – ta – faute ", répéta ce dernier.
Cette fois, Sirius se leva brusquement et alla se placer devant la cheminée. Mais qu'est-ce qu'il m'arrive ? Ses yeux le piquaient d'une façon tout à fait désagréable et inhabituelle. Oh, reprends-toi, Padfoot ! C'est pas le moment de craquer… Il se mit à remuer les bûches pour se donner une contenance.
" Sirius. "
" Arrête ça, Harry, d'accord ? ", le coupa Sirius, le dos toujours tourné contre son filleul, et la voix plus étranglée qu'il n'aurait voulu.
" Ce n'est pas ta faute. "
Sirius se retourna d'un coup, l'air presque fâché. Mais il fut incapable de dire quoi que ce soit. Soudain, il porta la main devant ses yeux et baissa la tête. Les épaules affaissées, il resta prostré, sans bouger. A chaque fois qu'il tentait de se reprendre et de se calmer en respirant, un sanglot manquait de lui échapper. Oh, Merlin… Merde ! Mais qu'est-ce que j'ai…
Harry, après une courte hésitation, se leva et s'avança vers son parrain. Timidement, il lui posa la main sur le bras. Sirius le repoussa violemment, et s'éloigna, lui tournant à nouveau le dos. Harry voyait bien que son parrain essayait désespérément de ne pas perdre la face devant lui, et qu'il n'était pas loin de sortir de la pièce. Il le laissa un moment tranquille, puis se rapprocha et, sans rien dire, vint se serrer contre lui. Cette fois-ci, Sirius ne réagit pas. Harry le serra plus fort, et finalement, Sirius se détendit légèrement et lui rendit son étreinte, le visage enfoui dans ses cheveux.
" Ça va, Sirius… ", murmura Harry, ne sachant pas trop quoi dire pour faire comprendre à son parrain qu'il pouvait se laisser aller.
Ce dernier ne répondit rien, mais Harry l'entendit avaler sa salive et renifler. Enfin, il marmonna d'un ton étranglé:
" Espèce de petit salopard… Tu as réussi ton coup, hein ? Remus aussi a essayé, mais apparemment tu es plus malin que lui… "
" Qu'est-ce qu'il a essayé ? ", demanda innocemment Harry.
" De me faire pleurer, tiens ! "
" Mais il me semble pas que tu pleures… "
Sirius eut une exclamation étouffée. " Je peux te jurer que si tu me répètes ça encore une fois… "
Harry eut une demi seconde d'hésitation avant d'ouvrir la bouche. " Ce n'est pas ta faute, Sirius. "
Au lieu d'éclater en sanglots, Sirius lui donna un coup de poing en pleine poitrine. Lui apprendra ! " Sadique, va ! ", protesta-t-il d'une voix encore incertaine.
Harry lui fit un petit sourire timide, mais où pointait une trace d'espièglerie. Merlin, on dirait James quand il venait de faire une connerie et qu'il essayait de se faire pardonner…
Tous deux évitaient de se regarder droit dans les yeux. Sirius était très mal à l'aise d'avoir craqué à ce point devant son filleul, lui qui avait toujours été fier de ne jamais trahir ses émotions. Harry, quant à lui, avait un peu honte d'avoir mis son parrain dans un état pareil, même s'il était persuadé que ce n'était pas une mauvaise chose. Finalement, il se tourna obligeamment, laissant à Sirius le temps de se remettre. Ses yeux tombèrent sur la table et leurs verres abandonnés.
" Sirius ? " Il entendit son parrain faire un mouvement brusque : il s'attendait sûrement au pire.
" Je peux encore avoir du whisky ? "
Encore crispé, Sirius rit nerveusement. " Tu profites que je sois dans un état de faiblesse, hein ? Note que tu as raison, et je dois dire que j'en ai bien besoin moi-même… " Il se dirigea vers la table et remplit leurs deux verres. " Mais juste un fond, d'accord ? Je fais un piètre parrain, mais si je pouvais au moins éviter de soûler mon filleul à la première occasion… " Il tendit son verre à Harry, qui put constater qu'il avait retrouvé son sourire.
" Moi je trouve pas que tu sois un si mauvais parrain que ça… "
" Ah oui ? Honnêtement, il faut avouer que Molly a raison quelque part : je suis irresponsable, c'est un fait. "
" Mais c'est ce qui fait ton charme, justement ", déclara Harry en se baissant juste à temps pour échapper à la main de l'ancien Maraudeur, qui cherchait visiblement à lui apprendre le respect.
Quand ils se furent calmés, tous deux se rassirent sur le canapé pour déguster leur whisky. Soudain, Harry se souvint de quelque chose.
" Sirius ? "
" Hmm ? ", demanda distraitement ce dernier, plongé dans ses pensées.
" Tu voulais me dire quoi avant, en fait ? "
" Avant ? Ahhhh… Eh bien, je - ", il s'arrêta, réfléchissant comment exprimer au mieux ce qu'il voulait dire. " Tu sais, Harry, il faut que tu saches que ton parrain est un vieil homme irresponsable, comme je l'ai déjà dit, et que son séjour à Azkaban n'a pas arrangé. J'ai donc pris la mauvaise habitude de ruminer mes pensées, et – Je réfléchissais à l'avenir, et à comment - " Il s'interrompit une nouvelle fois. Il n'allait nulle part… Se tournant d'un air décidé vers son filleul, il lâcha : " La vérité, Harry, c'est que je suis absolument mort de peur à l'idée de devoir m'occuper de toi. En fait, je suis terrifié parce que je suis sûr que je vais me planter à un moment ou à un autre. Voilà. "
Harry était sans voix. Il avait imaginé plein de choses, mais jamais il n'avait songé à ça. " Mais – " , bredouilla-t-il.
Sirius le coupa: " Tu n'as qu'à voir juste maintenant. Franchement, c'est le monde à l'envers. "
" Je vois pas en quoi. "
" Harry… C'est moi qui suis censé t'aider, te réconforter, pas l'inverse. "
" Ah oui ? Je vois pas pourquoi. Qui est-ce qui était là pour toi pendant douze ans, à Azkaban, hein ? "
Sirius le regarda les yeux ronds. Là, il a touché juste… Mais ce n'est pas à lui d'essayer de me récupérer maintenant… " D'accord, il n'y avait personne. Mais ce n'est pas à toi de – "
" Pourquoi, ce n'est pas à ça que ça sert, la famille ? "
Sirius sourit. " Tu es têtu, toi, hein ? N'empêche que c'est moi qui suis censé remplir le rôle de parent, ici. Pas que j'aie une grande expérience, mais bon… "
" Il me semble que tu es têtu aussi… ", remarqua Harry. " De toute façon, étant donné que j'ai pas une grande expérience dans le rôle de – enfin, dans mon rôle non plus… "
" Ok, j'abandonne ! ", se rendit Sirius en levant les mains. " On forme une belle équipe tous les deux, hein ? ", plaisanta-t-il encore. Voyant son filleul lui répondre en souriant, il fut submergé par une émotion qu'il ne se souvenait pas avoir jamais ressentie. Peut-être que je comprends enfin James… Cette pensée le décida à ajouter quelque chose qu'il voulait dire à Harry depuis bien longtemps.
" Harry ? Il y a autre chose que je voulais te dire, et il faut que je profite de ce que l'alcool m'encourage pour le faire, sinon tu ne l'entendras jamais. Je voulais te dire que je – Tes parents doivent être très fiers de toi, Harry. " Il sourit, et ajouta : " Je peux d'ailleurs presque entendre James me chanter tes louanges… "
" Pourquoi tu dis ça ? ", demanda Harry, espérant désespérément qu'il n'était pas en train de rougir.
" Parce que c'est comme ça qu'il était avec ta mère, quand il a commencé à sortir avec elle. Tu peux demander à Remus. Tu l'aurais entendu à l'époque ! Il pouvait en parler des heures, à passer en revue toutes ses qualités… " Sirius pouffa en se rappelant la fois où lui, Remus et Peter étaient sortis l'un après l'autre de leur dortoir, laissant James continuer à parler tout seul. Il lui avait fallu un moment avant de se rendre compte que son public avait disparu.
" Bref ", dit-il en revenant au présent, " ce qui est sûr, c'est que je peux te jurer qu'ils doivent être très fiers de toi, où qu'ils soient. " Après une seconde d'hésitation, il ajouta : " En tout cas, moi, je le suis. " Ben tu vois, quand tu veux!
Ne sachant pas quoi dire, Harry ne réussit qu'à sourire bêtement d'un air gêné. Sirius lui ébouriffa affectueusement les cheveux.
Lorsqu'il fut sûr de pouvoir parler sans bafouiller, Harry déclara : "J'imagine que moi aussi il faut que je profite de l'occasion - et du whisky peut-être aussi", ajouta-t-il avec un sourire espiègle, " pour te dire quelque chose, Sirius. " Ce dernier le regardait avec curiosité. " Je – je t'admire beaucoup, tu sais", bredouilla-t-il. Ce fut au tour de son parrain de prendre une légère teinte rosée. Bien fait !
Sirius avala sa salive. Il ne s'était pas attendu à ça. Je supporte beaucoup moins les compliments qu'avant, moi… ça va pas du tout, ça !
" Ben… je ne sais pas si je mérite cette admiration, mais… " Il se racla la gorge. " Par contre, j'espère que tu ne vas pas finir par me dire que tu me respectes, aussi, parce que ça me filerait un sacré coup de vieux ! "
Harry le regarda d'un œil critique, faisant semblant de réfléchir profondément, puis déclara: " Te respecter, toi ? " Il secoua la tête. " Non… je crois pas, non. " Puis il sourit malicieusement.
Sirius éclata de rire. " Me voilà rassuré, alors ! " Harry se mit à rire.
Brusquement, Sirius retrouva son sérieux. Etonné, Harry s'arrêta lui aussi de rire, et jeta un coup d'œil perplexe à son parrain.
" Harry ? Je peux te demander quelque chose ? ", lui demanda ce dernier. C'est peut-être pas le moment, mais je crois que j'ai besoin de savoir…
" Bien sûr ! ", répondit Harry en hochant la tête.
" Pourquoi – pourquoi tu m'as cru ? Pourquoi est-ce que tu me fais confiance ? "
Harry ne répondit pas tout de suite. Il s'était déjà posé ces questions plusieurs fois, et, franchement, il ne se l'expliquait toujours pas à lui-même. Ça a l'air très important pour Sirius, pourtant…
" Je – je sais pas, Sirius ", admit-il enfin. " En fait, je crois que je n'ai jamais cru à cette histoire. Je veux dire : que tu avais trahi mon père. Enfin si, je l'ai cru. " Oh là là, c'est difficile à expliquer ! " Mais quand je regardais ta photo, tu sais : celle au mariage de mes parents… ben je devais faire des efforts pour me persuader que c'était toi qu'on accusait de tout ça. " Soudain, il déclara : " Peut-être que dans la cabane, tout d'un coup, c'est toi sur cette photo que j'ai revu. Et j'ai su que j'avais raison. " Pas très clair ce que je viens de dire… Mais je peux pas faire mieux !
Sirius resta d'abord silencieux, comme s'il avait besoin de laisser ces informations faire leur chemin dans son esprit. Harry le regardait anxieusement, espérant que son parrain avait compris ce qu'il venait de dire. Enfin, Sirius reprit la parole. " Merci, Harry. " Il sourit. " Merci. Tu ne sauras jamais ce que ta confiance représente pour moi - "
" Si ", l'interrompit Harry. Soudain timide, il poursuivit néanmoins : " J'imagine que ça doit être comme de savoir que tu t'inquiètes pour moi. "
Cette fois sans hésitation, Sirius passa alors son bras autour des épaules de son filleul. Harry posa sa tête contre sa poitrine, et tous deux restèrent ainsi, sans parler, pendant quelques instants.
Soudain, Harry pouffa. Surpris, Sirius baissa la tête vers lui. " Qu'est-ce qu'il te prend ? "
" Je me disais… C'est peut-être ton côté chien, aussi. "
" Mon côté chien ? " J'aurais peut-être pas dû lui faire boire du whisky, moi… " Mais de quoi tu parles ? "
" Ben, tu m'as demandé pourquoi je te faisais confiance. Tu sais ce qu'on dit sur les chiens, non ? Qu'ils sont loyaux, fidèles… " Harry s'interrompit au moment où sa capuche lui tombait sur les yeux, enfoncé sur sa tête par la main de son parrain. Apparemment, il a compris cette fois…
S'il avait pu le voir, Harry aurait remarqué qu'un sourire se dessinait au coin des lèvres de son parrain, et qu'une lueur brillait dans son regard. Peut-être aurait-il alors deviné que cela annonçait le retour de son côté Maraudeur.
Il veut le voir, mon côté chien ? Ben il va le voir… Sirius donna un petit coup de tête à son filleul, un peu comme un chien qui veut jouer. Harry se remit à rire, tout en cherchant à se débarrasser de son capuchon. Sirius recommença, en insistant un peu. Par jeu, Harry le repoussa. Son parrain essaya alors de l'attraper, mais Harry, enfin libéré, se saisit du coussin qui se trouvait à ses côtés, et le lui envoya en pleine figure. Étourdi par le choc, Sirius secoua la tête – offrant une ressemblance certaine avec un chien qui s'ébroue - puis lança le coussin contre son filleul.
Il n'en fallut pas moins pour déclencher une véritable bataille. C'était à qui attraperait le plus vite le coussin pour l'envoyer dans la figure de l'autre. Bien sûr, se sachant seuls dans la maison, Sirius et Harry ne faisaient aucun effort pour rester discrets. Leurs éclats de rire et leurs exclamations s'entendaient de la cave au grenier. Au moment où Harry, couché sur le dos, essayait d'échapper à Sirius, qui lui maintenait les poignets afin de lui faire lâcher le coussin qu'il agrippait d'une main, un cri perçant retentit. Tous deux se figèrent. Ils purent alors entendre la voix désagréable de Madame Black, et les insultes qu'elle proférait.
Dégrisé, Sirius lâcha Harry et se rassit, les coudes sur les genoux et la tête entre les mains. Harry se releva, et regarda son parrain du coin de l'œil, navré.
" Tu – tu veux que je descende m'en occuper ? ", lui demanda-t-il d'une petite voix.
" Non, laisse. Elle va se calmer toute seule ", répondit Sirius d'une voix fatiguée. Tu vas la FERMER, vieille folle ! Ou tu vas continuer à me pourrir la vie jusqu'au bout ? Au point où j'en suis, il ne te reste plus grand chose à faire.
" Je – je suis désolé ", murmura encore Harry.
Sirius se passa les mains dans les cheveux et se secoua. " T'inquiète pas. C'est pas grave. " Reprends-toi, Padfoot ! Ne la laisse pas tout gâcher. " Enfin… j'imagine que ça devait pas être mieux chez ta tante, hein ? D'après ce que j'en ai entendu… ", dit-il dans un effort pour détendre l'atmosphère.
Harry se crispa. Il n'avait jamais vraiment raconté à son parrain comment sa famille l'avait traité jusque-là. Il préférait éviter, car il ne savait pas comment Sirius réagirait.
" Harry ? ", l'appela Sirius pour regagner son attention. " A quoi tu penses ? "
" A rien, à rien ", mentit Harry. Pitié, faites qu'il change de sujet…
" En fait, comment c'était chez eux, alors ? Un parrain qui se respecte devrait en savoir un peu plus sur la vie de son filleul… ", plaisanta Sirius.
Loupé ! " Je – j'ai pas envie d'en parler ", répondit Harry d'une voix presque suppliante.
Son ton n'échappa pas à Sirius, qui pencha la tête de côté – d'une façon décidément très canine. " Harry… ? Pourquoi tu ne veux pas m'en parler ? Tu m'inquiètes, tu sais…" Zen, Padfoot, zen. Il ne faut pas le brusquer, autrement il va se fermer comme une huître.
Harry soupira. " C'est exactement pour ça que je ne veux pas t'en parler. "
" S'il te plaît, Harry. J'aimerais vraiment savoir ", insista gentiment Sirius. Voilà, c'est ça… Tout en douceur… Comme Moony…
Sachant pertinemment qu'il n'y échapperait pas, Harry fit néanmoins une dernière tentative. " D'accord. Mais si je te parle de mon passé, tu me parleras aussi du tien ? Moi aussi je voudrais en savoir plus sur toi. Même… même à propos d'Azkaban. "
Sirius se tendit. Me voilà bien! Il est pas idiot, Pronglet… " Harry, je – Non, Harry, je ne te parlerai pas d'Azkaban. " Il ne laissa pas le temps à son filleul de protester. " En tout cas, pas encore. Mais je ne peux effectivement pas te demander de me raconter ta vie si je te refuse ça. Quoique je veux bien te parler de ma famille… Il y a déjà suffisamment à dire à ce sujet, je te promets ", expliqua-t-il en souriant tristement.
Harry hésita à insister. Je suis sûr qu'il a besoin d'en parler… Mais il faut pas que j'exagère non plus. Et peut-être que si moi je fais un effort de mon côté et que je commence à raconter… Il hocha la tête. " D'accord. Je comprends. Alors moi je te raconte comment c'était chez les Dursley, et toi tu me racontes comment c'était ici, ça marche ? "
" Ça marche. " Ouf ! Je l'ai échappé belle ! Mais franchement, je ne crois pas que j'arriverai jamais à en parler, même si Remus prétend le contraire. " J'avais rencontré ta tante à l'époque… Je me rappelle m'être dit qu'elle ressemblait furieusement à un cheval. C'est toujours le cas ? "
Harry gloussa. " Oh oui… Et mon oncle ressemble à un morse, et mon cousin à un cochon… " Harry se tut. Il ne savait pas trop comment commencer.
" Alors ? Comment c'est de vivre dans une ménagerie pareille ? ", essaya de l'encourager Sirius.
Harry prit sa respiration. " Pas terrible. En fait, la plupart du temps, j'ai l'impression d'être invisible… " Et Harry lui raconta tout : son enfance passée à accomplir des tâches ménagères et à dormir dans le placard sous les escaliers, comment son oncle et sa tante lui avaient menti à propos de ses parents, la façon dont Dudley le prenait pour un punching-ball, la réaction d'oncle Vernon quand il avait reçu sa lettre de Poudlard, leur crainte de tout ce qui avait trait au monde de la magie, puis leur terreur de voir débarquer Sirius à Privet Drive, sans oublier la tante Marge… Il raconta aussi ses deux premières années à Poudlard, et ses deux rencontres avec Voldemort.
Sirius l'écoutait passionnément. Son filleul n'avait que quinze ans, et il lui était déjà arrivé tellement de choses! Ses douze ans à Azkaban lui avaient bien sûr semblé une éternité, mais il avait néanmoins de la peine à se faire à l'idée que tant d'événements avaient pu se passer durant son emprisonnement. Dans sa cellule, il avait vieilli, mais il n'avait pas vu le monde évoluer. Et il avait encore un peu de peine à accepter que, dehors, la vie avait continué sans lui…
Plusieurs fois, il eut envie d'exprimer à voix haute ce qu'il pensait des Dursley. Les enfoirés ! Si jamais je mets la main sur ce Vernon, je m'en vais lui arracher sa moustache poil par poil. Quant à son fils, il mériterait une autre leçon qu'une simple queue de cochon… Et sa sœur… Grrrrr ! Je voudrais bien que Padfoot croise ses chiens, tiens ! Toutefois, il réussit à se contrôler. Si Moony me voyait, il serait fier de moi. Seuls la crispation de son poing ou un éclair dans ses yeux trahissaient ses pensées. Il ne pouvait pas s'empêcher de comparer l'armoire de son filleul à sa propre cellule, et était atterré de savoir que Harry n'avait jamais fêté son anniversaire. Dire qu'il a réussi à devenir ce… ce jeune homme courageux et attentionné sans l'aide de personne… Merlin, mais à quoi je peux bien servir moi maintenant ?
Harry en était arrivé à sa troisième année à Poudlard, que Sirius connaissait déjà en grande partie. S'il avait d'abord parlé avec hésitation, craignant à chaque instant la réaction de son parrain, il avait petit à petit pris confiance, et avait fini par tout lui raconter sans se poser de questions. A présent, il se sentait même soulagé d'avoir ainsi pu se confier à quelqu'un.
" Voilà, je t'ai tout dit. La suite, tu la connais. "
" Oui ", répondit Sirius. " C'est à ce moment-là que tu as essayé de me tuer ", le taquina-t-il.
" Je te ferai remarquer que de ton côté tu as essayé de m'étrangler… ", répliqua Harry.
" C'est vrai ", dit Sirius en riant. Après un silence, il ajouta : " Bon. Ben c'est mon tour, hein ? " Il n'avait franchement pas l'air enthousiaste. Du courage, Padfoot ! C'est le moment de respecter ta promesse.
Harry hocha la tête sans rien dire. Après avoir poussé un soupir, Sirius se lança lui aussi dans le récit de son enfance à Grimmauld Place. Il raconta les professeurs privés qui venaient lui donner des leçons, les soirées réunissant tous les sorciers de sang pur, c'est-à-dire à peu près les seules fois où il voyait ses parents, qui le présentaient avec fierté comme le futur héritier de la lignée. Il raconta comment son frère était continuellement ignoré, comment il s'en était toujours senti responsable…Et il expliqua le soulagement qu'il avait ressenti en partant pour Poudlard. Arrivé là, il s'arrêta. Cela lui faisait bizarre de se remémorer tout ça. Bien sûr, à son retour dans cette maison, il avait forcément repensé à son enfance, mais jamais de façon si ordonnée, si… chronologique. Il avait l'impression qu'il réussissait enfin à y voir un peu plus clair. Il devait même admettre que cela lui avait fait du bien. Mais il ne se sentait pas la force de continuer. Il était vidé. Hé ben… le moins qu'on puisse dire, c'est que je viens de passer une soirée riche en émotions !
Harry, qui ne l'avait pas interrompu une seule fois, dut le sentir, car il ne fit aucun commentaire. Sirius déclara alors : " Je ne sais pas pour toi, mais moi ça m'a épuisé de parler. Je crois même que j'arriverai peut-être à dormir maintenant. Et toi ? "
Harry hocha la tête. Sirius remarqua que son filleul somnolait presque. Il sourit. Faut dire que le whisky doit pas aider… " Tu veux retourner dans ta chambre ? " Harry marmonna quelque chose qui ressemblait à une négation. Sirius n'insista pas et resserra son bras autour des épaules de son filleul. Les yeux fixés sur le feu, il laissa ses pensées vagabonder un moment.
Lorsqu'il sentit ses paupières s'alourdir, il jeta un dernier coup d'œil sur Harry pour voir s'il dormait. Son filleul ne bougeait pas et respirait calmement. Sirius lui retira ses lunettes de sa main libre et les posa sur la table basse. Puis, mu par une brusque impulsion, il se pencha sur lui et murmura " Merci, Harry" en l'embrassant sur le front. A sa grande surprise, Harry se redressa alors légèrement et l'embrassa à son tour sur la joue, avant de reprendre rapidement sa position. Un peu gêné mais pas peu fier, Sirius le serra plus fort contre lui, et tous deux ne tardèrent pas à s'endormir.
Cette nuit-là, pour l'une des rares fois de leur vie, ni l'un ni l'autre ne fit de cauchemar. Le lendemain, les membres de l'Ordre reviendraient, et avec eux leur cortège de problèmes. L'ancien prisonnier et le garçon qui avait survécu devraient reprendre leur rôle respectif et faire ce que l'on attendait d'eux. Mais pour l'instant, ils s'en fichaient complètement. Pour l'instant, ils étaient juste Sirius et Harry, et le seul rôle qui les intéressait de jouer, c'était celui de parrain et de filleul. Au moins pour cette nuit-là…
