Oiseau de Justice

Chapitre 9: Départ.

Malgré l'heure matinale, la gare était déjà bondée. La foule des voyageurs fluctuait et ils se croisaient tel les courants d'un fleuve. Des salary-men dialoguaient via leurs téléphones mobiles, attachés-caisses sous le bras, des touristes traînaient leurs valises et leurs enfants à moitié endormis. Des voix à peine compréhensibles annonçaient l'heure d'arrivée ou de départ de tel ou tel train.
Kaito Kuroba se tenait sur les quais prés de ses malles, avec Aoko, Chii et Tomoe, frais et dispo'. Il adorait l'ambiance de la gare au même rang que celle d'un aéroport ou autre lieu de transit (à l'exception des ports maritimes). On pouvait le voir regarder de tout les cotés, souriant et sautant occasionnellement hors du chemin d'un voyageur avec de grandes valises, ou distrayant de ses tours un petit group attendant leur train.
Cela faisait partie de sa routine du voyage. Cependant il y avait ce matin un brin de nervosité dans sa manière de scanner la masse humaine de ses yeux.
« Kaito, arrête ça tu veux? » Aoko, dont la chevelure rebelle ne s'était pas assagie avec les ans, commençait à avoir le tournis.

« Arrêter quoi? » Répondit Kaito, faisant pour l'énième fois le tour du groupe. Sa femme essaya de le fixer du regard, puis abandonna avec un soupir.
« Tu ne peux pas immobile cinq minutes? »
« J'ai l'impression que le jeune maître attend quelqu'un. » Dit Chii, le sourire aux lèvres. Le vieil assistant sirotait son thé sans se soucier le moins du monde de la nervosité du magicien.
Tomoe pour sa part ne disait rien. Elle avait sur le visage un air fâché.
-Le train à destination direct de Kyoto partira dans cinq minutes. Les passagers sont priés de monter à bord, je répète…-
« Ah, c'est pour nous! » Fit Kaito. D'un mouvement agile, il souleva deux valises et rentra dans le train.
« Mais… Tu n'attendais pas quelqu'un? » Demanda Aoko, surprise…
« Pas du tout… » mentit-il avec aisance. « Allez, assieds-toi là pendant que je monte le reste des valises. »
Aoko fit mine de vouloir refuser, puis se ravisa, marmonnant quelque chose à propos d'un magicien trop têtu.
Chii monta s'asseoir à côté d'elle, son dos maintenant trop fragile pour aider Kaito et Tomoe à monter les dernières malles.

Heiji jura.
Il avait eu de la chance de pouvoir trouver l'heure de départ du train de Kuroba, mais cela ne lui servirait à rien s'il arrivait une fois ce train parti. Heiji maudit l'embouteillage qui l'avait ralenti.
Laissant sa dignité au vestiaire, il se fraya à grande vitesse un chemin à travers la foule vers le quai souhaité.
Il reconnut la figure du magicien.
« Hé! Vous là! » Héla-t-il.
Surpris, l'homme aux cheveux hirsutes et la femme qui l'aidait regardèrent dans sa direction.
Le signal sonore de fermeture des portes se fit entendre.
Le magicien sourit.
'Et merde!' Heiji accéléra la cadence.
Les portes se fermèrent.
Dans un vain effort, Heiji essaya de faire comprendre au personnel de la gare qu'il voulait retarder le départ du train.
Trop tard. Il était parti. Sans qu'il ne puisse échanger deux mots avec le prestidigitateur.
Luttant pour retrouver son souffle, Heiji ne put s'empêcher de penser, entre deux malédictions: 'Bizarre… Je croyais qu'il avait inventé Tomoe de toutes pièces!'

Dans le train, Kaito s'esclaffa de rire. La tête qu'avait fait ce détective… Il prit mentalement note de remercier les dieux de la chance pour ce timing inespéré. Tomoe le regardait bizarrement.
« Oui? » Demanda-t-il.
« Le type bronzé à la casquette, tu le connais? »
Le sourire de Kaito s'étira un peu plus. « Un peu. C'est Hattori Heiji, le grand 'Détective de l'Ouest.' »
Les yeux de Tomoe étincelèrent d'interêt, puis…
« Allons rejoindre les autres Tomoe! »
…Ses yeux se fixèrent à nouveau sur le magicien, remplis de colère.
« Hm? » Kaito se retourna, puis il lui dit à voix basse, « quelque chose ne va pas, Akira? »
Tomoe lui jeta un regard noir.
« T'es quand même pas encore fâché pour le déguisement! »
« Oh, le masque et la peruque, ça va… Ça… » elle pointa du doigt vers sa poitrine, « ça passe encore… » Ses yeux s'enflammèrent. « Mais une jupe et des collants! »
Kaito sourit avec humour. « Cela aurait été dommage de gaspiller tes jolies jambes. »
Kaito ne put s'empêcher de rire à nouveau devant l'air choqué de Tomoe.
Akira allait avoir beaucoup à apprendre.