Oiseau de Justice
Chapitre 10: Kyoto.
Une
fois à Kyoto, nous descendîmes les valises et les malles
du train, avant d'attendre dans le Hall de la gare. J'attendais
avec impatience le moment où je pourrai me changer… J'avais
été inconfortable durant tout le voyage, et chaque fois
que je regardais le maudit magicien, je ne pouvais m'empêcher
de me demander quel esprit tordu se cachait derrière son air
insouciant.
Chii, le vieil homme, était parti organiser le
transport des valises. Pendant ce temps, Kuroba et Aoko discutaient
de choses ou autres, m'invitant de temps en temps à
participer à la conversation.
Je repensai à la
première impression que j'avais eue en rencontrant madame
Kuroba…
Après ma conversation avec Dove, le vieil
assistant de Kuroba, qui avait assisté et le père, et
le fils, vint me chercher. Il m'expliqua succinctement que, suite à
un imprévu, le magicien n'allait pas pouvoir s'occuper
personnellement de ma personne avant le lendemain. Chii m'amena
donc dans un hôtel des environs, partager sa chambre pour la
nuit… « Dans un souci de discrétion.»
M'avait-il dit. Après un dîner où Chii m'avait
rapidement fait comprendre qu'il ne pouvait répondre à
aucune de mes questions concernant Dove, je passai une nuit assez
inconfortable sur le sofa. Le lendemain, Chii me donna un livre à
lire et m'a formellement interdit de sortir de la journée.
N'ayant aucune envie de retourner en prison, je lis une grande
portion du livre, en faisant appel au service de l'hôtel pour
le déjeuner. Le soir, Chii revint avec le magicien, qui
s'empressa de s'excuser pour son absence et son petit tour sur la
scène. Il écouta sans broncher ma tirade, attendant que
ma colère s'épuise, avant de m'expliquer qu'il
était venu préparer un déguisement pour que je
puisse voyager incognito. Après un long moment et maintes
préparations, le magicien fut satisfait de mon apparence en
Tomoe, (ce sadique n'avait rajouté la jupe que ce matin!) et
Kuroba m'invita à le rejoindre lui, Chii et Madame pour
dîner.
Elle était assise, l'air absente, la peau
blême. J'avais eu l'impression d'une céramique
fragile, prête à se briser. Lorsque Kuroba est arrivé,
me présentant comme un témoin qu'un de leurs amis lui
avait demandé de 'dissimuler', elle me fit comprendre
qu'il fallait que je l'appelle Aoko dans ce cas. Son air fragile
s'était envolé, mais j'avais eu l'impression
qu'elle s'efforçait…
Quelle contraste avec maintenant. Elle discutait avec
ferveur, aussi vive qu'une flamme. Dans le train, elle avait
insisté pour que l'on joue tous aux cartes… Et avait été
la première à se plaindre lorsque nous avons réalisé
qu'elle n'avait que des mains gagnantes. Cet incident fut réglé
en changeant de distribuant. Chii ne put s'empêcher de rire
en voyant la mine renfrognée de Kuroba derrière sa main
perdante.
« Ça t'apprendras! » Avait dit
Aoko, tirant la langue comme une gamine. Kuroba ne s'était
pas laissé faire et, malgré ma colère, je ne pus
m'empêcher de rire avec Chii des gamineries des deux
adultes.
Entendant que la conversation était retournée
sur ce sujet, je souris.
Lorsque Chii revint, il n'était
pas seul. Tomoe/Akira ne put s'empêcher de rougir. La femme
qui l'accompagnait était vraiment très belle. Ses
longs cheveux noirs semblaient avoir des reflets rouges. Son visage
était orné d'un sourire un brin moqueur et
mystérieux. Elle salua avec emphase Kaito et Aoko. On présenta
Akira entant que Tomoe. Elle s'appelait Akako.
« C'est
donc toi que mon mari a confié à Kaito… »
Lui dit-elle.
Tomoe ne put répondre qu'en hochant la
tête, se demandant qui pouvait bien être son mari.
« Oh,
mais qui est donc ce petit bonhomme? » Aoko venait de
remarquer l'espèce de panier que portait l'autre femme.
Dedans se trouvait un jeune enfant. Délaissant ses airs de
mystère, Akako s'accroupit à côté de son
amie.
« Aoko, je te présente Shuri. Shuri, dis
bonjour à Tata Aoko! »
L'enfant regarda sa
mère et l'autre femme, en gesticulant un peu. Il ne devait
pas avoir plus de quatre mois.
« Voici donc ton fils. »
Fit Kuroba, un brin d'ironie dans sa voix. Il ne se faisait
toujours pas à l'idée qu'Akako, qu'il savait
était une sorcière, ait eu un fils. Surement elle
aurait pu s'arranger pour que ce soit une fille si elle l'avait
voulu, non?
« Il est adorable! » Fit sa
femme.
« N'est-ce pas? » Akako était
pleine de fierté.
« Tu ne lui dis pas bonjour
Kaito? »
Kaito s'accroupit avec un soupir prés
du porte-bébé. Il regarda l'enfant. Ses cheveux
clairs lui rappelaient le père, et il tenait définitivement
ses yeux brun-rouges de sa mère. Kuroba ne put s'empêcher
de penser que le jeune Shuri allait probablement lui causer autant de
soucis que ses deux parents réunis.
« Bonjour
bonhomme! » Il tapota le jeune garçon sur son petit
torse avec son petit doigt. L'enfant émit un petit
gargouillement. Kaito sourit.
« Bien, mesdames, je
pense qu'on va vous laisser prendre soin de Tomoe pendant que l'on
s'occupe des malles. » Dit Chii.
« Vous
pensez être finis à quelle heure? » Demanda
Akako.
« Oh, vers quatre, cinq heures. »
Répondit Kaito, en balançant sa main. Akira écarquilla
des yeux. Il était à peine neuf heures du
matin.
« Hé… » Tomoe tira sur la
manche du magicien. Kuroba se retourna pour l'écouter.
« Est-ce
que cela veut dire que je dois rester en jupe toute la sainte
journée! »
Kuroba sourit.
« Oui,
je crois bien. »
Voyant son air consterné, il
rajouta…
« On m'a fait comprendre que c'était
une bonne idée de te faire apprendre ce qu'est la
patience. »
Tomoe n'eut pas l'air convaincue.
« Oh,
allez… Vois plutôt cela comme un jeu! C'est l'occasion de
t'entraîner à jouer un rôle. »
« Comment
ça? »
« Tu sais, te faire passer pour
quelqu'un que tu n'es pas… »
Akira eut
l'affreuse impression que Kuroba était au courant de
l'affaire avec Yoshida.
« Tu n'as jamais joué
la comédie? » Lui demanda le magicien. Akira se
sentit soulagé. Non, il n'était pas au courant.
« Si,
si… » lui répondit-il. Il soupira.
« Tomoe
tu viens? » Firent les femmes.
« J'arrive… »
Chii ne put s'empêcher de sourire en voyant de loin l'air
abattu de Tomoe.
