Disclaimer Tous ces petits bishos ne sont (malheureusement !) pas à moi

Genre: Sans doute un peu angsty et mélancolique, mais avec une touche d'espoir, quand même (quoique...).

Bonne lecture, en espérant que cela ne vous lasse pas. Avant-dernier chapitre!


Chapitre 10 : La vie que je ne vivrai pas

Extrait du journal de Quatre (Raberba Winner) Kardec – Avril AC 205.

Il y avait une autre lettre ; une seule. La dernière.

Je me rappelle du tremblement incessant de mes mains au moment de cliquer sur l'icône luminescente…

Une lettre dans un fichier consacré aux deux 'terroristes' classés ' parmi les plus dangereux'. J'ai grincé des dents à la lecture de ces mots. 'Dangereux', oui. Mais ils ne sont pas nés dangereux ; ils ne sont pas nés pour tuer, ni même pour la guerre. Personne ne naît pour ce genre de chose. L'Etat, l'armée, Oz et les Mads nous ont rendus dangereux, tous, pour après nous punir comme de vulgaires criminels. C'est ce que nous sommes aux yeux du monde. Heureusement qu'aucun d'entre nous ne se battait pour la gloire éternelle ou la notoriété. Non, nous n'étions que les enfants rois d'une bande de professeurs qui nous ont placé en première ligne, pilotant leurs nouveaux jouets. Certains jouets sont plus vrais que nature.

Dangereux, donc. Oui, ils le sont. C'est indéniable. Ils le méritent, à présent, leur statut de criminel, même si l'admettre m'écorche les tripes, même si écrire la vérité me fais mal aux doigts, mal à l'intérieur. C'est mon sang que je verse dans ces quelques lignes, après tout. C'est ma vie qui s'écoule, car après cette dernière retranscription, que me restera-t-il ? Peut-être est-ce pour cela que mon récit se fait de moins en moins maîtrisé, peut-être est-ce pour cette raison que je m'égare sans cesse, me perdant dans les méandres du peu d'esprit qu'il me reste. Peut-être mon âme refuse-t-elle de laisser s'épancher le dernier chapitre de leur histoire, refusant de me laisser clôturer la mienne. J'ai vécu ces quelques mois à travers eux. J'ai retrouvé leur trace et pourtant la sensation de les avoir perdus à jamais me tiraille. Quel espoir reste-t-il après cette lettre ?

J'aurais aimé pouvoir effleurer le papier du bout des doigts, contempler l'écriture fine et penchée de celui qui était autrefois mon meilleur ami, sourire tristement de ce dernier contact avec Duo … Oui, c'est Duo qui a écrit la lettre. Et c'est à son meilleur ami qu'il s'adresse, à moi… A qui d'autre ?

Je n'ai pas pu lire la vraie lettre, devant me contenter d'imprimer les mots de Duo sur un papier blanc impersonnel et de mauvaise qualité. Mais les derniers mots que Duo m'a adressés doivent être joliment présentés, comme on place une belle photo dans un cadre trop cher. Alors, comme on habille avec précaution un mort pour la veillée funèbre, je couche les mots de Duo dans mon journal, évitant soigneusement de raturer, penchant plus que d'ordinaire les pleins et déliés(1), pour rendre hommage à mes amis, à Duo, pour laisser derrière moi un héritage autre que la poussière à nouveau accumulée sur les meubles. C'est mon au revoir ou mon adieu, mon baroud d'honneur.

« Quatre,

Même si d'autres la liront bien avant, c'est à toi que j'adresse cette lettre, parce que je sais qu'un jour tu chercheras à retrouver notre trace, à comprendre ou à expliquer ce que tu découvriras. J'aimerais te l'expliquer moi-même tu sais, j'aimerais trouver toutes les raisons du monde pour excuser ce que nous avons fait, j'aimerais nous donner des circonstances atténuantes, mais il n'y en a pas. Pas pour ce genre d'acte.

Je sais que ton regard sur nous changera probablement, que tu seras peut-être même écoeuré d'avoir un jour été notre ami. J'en ai conscience, même si j'espère au fond de moi que tu sauras trouver les excuses que je n'ai pas.

J'ignore si j'étais fou ou simplement désespéré, si j'ai eu raison ou tort. L'amour et la haine sont deux sentiments si proches… et leur combinaison ne donne lieu qu'à des actes passionnels, tu sais. Des actes parfois cruels et égoïstes, des actes qui détruisent pour mieux construire et détruire à nouveau ensuite. Des actes qu'on ne maîtrise que rarement. Alors oui, je suis certainement fou, Quatre, car j'ai choisi cette vie d'amour et de mort plutôt qu'une autre. J'ai choisi de suivre Heero dans cette course folle vers un monde rien qu'à nous, dans cette utopie que seuls deux être aliénés peuvent concevoir. Nous sommes aliénés, tu sais, nous sommes devenus étrangers au monde pour ne vivre que pour nous, que par nous.

Je l'aime; je ne l'aime pas comme il le faudrait, mais je l'aime. Sa peau me manquait avant même de l'avoir goûté, son odeur est ancrée en moi comme le parfum du bonheur, ses yeux sur moi sont mon seul miroir, sa présence est mon oxygène. C'est lui qui définit ma réalité, mes principes, ma vie. S'il le faut, je tuerai encore, inexorablement, sans regrets, sans lâcheté, avec pour seul mobile mon amour et pour seul excuse ma folie.

Pardonne-moi ces mots, Quatre, mais je te dois la vérité. C'est pourquoi je refuse que tu nous cherches ; je refuse de te revoir ou de prendre encore contact avec toi. Cette lettre est et restera la dernière. Je refuse de t'imposer un tel choix, alors je le fais pour toi. Je refuse de te corrompre en te demandant d'accepter un tel choix de vie, de t'obliger à faire fi de tes principes par amitié. Je ne te forcerai pas à suivre la même voie que moi, que nous.

Je suis avec lui, même si j'ignore pour combien de temps. Peut-être finiront-ils un jour par nous attraper. Mais en attendant, je vis Quatre. Alors vis aussi.

A l'heure où je t'écris cette lettre, tu es encore enfermé entre ces murs de pierres froides, mais je sais qu'un jour tu en sortiras. Je sais que Relena ne cessera jamais son combat pour vous. Et le jour où tu sortiras, Quatre, je te demande de vivre.

Vis la vie que je n'aurai pas. Installe-toi, marie-toi et adopte des enfants… Je sais que tu aimes Trowa, dis-lui ! Dis-lui avant même de prononcer une autre parole, avant même de penser à quitter le quartier de la prison. Chasse vite au loin ta solitude et tes mauvais souvenirs, construis une vie remplie d'amour et d'amis. Ne garde pas de place dans ton cœur, donne-le tout entier. Parce que c'est ça la vie, Quatre, c'est aimer. Aime de toute ton âme et abreuve-toi de l'amour de celui qui t'a choisi. Tu verras, la grisaille du matin disparaît, même les jours de pluie sont heureux… Sois heureux.

Tu as été le meilleur ami que je n'aurai jamais plus ; je ne t'oublierai pas Quatre. Et je veux penser à toi en me disant que tu sauras trouver le chemin tout seul… C'était peut-être toi, le plus fort d'entre nous. Alors continues d'être toi, continues de ressentir si bien les choses, et ne laisse plus personne s'éloigner. Tu me manqueras toujours, Quatre, mais mon cœur est déjà trop rempli tu sais. Emplis le tien aussi… Vis maintenant Quatre, car quand notre vie sera écoulée, il ne restera que les mouches...

Adieu, Quat-chan, et sourit pour moi, en souvenir de nous cinq. »

Je n'ai pas pleuré, juste esquissé un sourire triste, empli de toutes les larmes du monde. Duo a raison, j'ai été écoeuré ; j'ai été déçu et furieux, et pourtant je lui ai trouvé des excuses. Et pourtant mon amitié est restée intacte. Comme je le comprends à présent…

Les mots dansent devant mes yeux ; ils résonnent comme si les paroles avaient été prononcées tout haut.

Je dois vivre, aimer de toute mon âme selon toi, Duo. Je t'admire d'avoir réussi, tu sais. Je vous admire tous les deux. Mais chez moi, la grisaille du matin est bel et bien présente. J'ai donné mon cœur tout entier, il y a quelques temps déjà. J'ai voulu construire une nouvelle vie. J'ai vraiment voulu, tu sais.

Mais ici, Duo, il n'y a plus personne à aimer.


A suivre pour l'épilogue !
(1) délié : En calligraphie, la partie fine d'une lettre

plein : La partie d'une lettre qui est formée par un plus gros trait.


Réponses aux reviews ('anonymes') :

Aele : Lol, c'est très gentil de m'écrire une review à chaque chapitre et ça me fait vraiment plaisir, mais non ce n'est pas obligatoire et tu le sais bien. Je suis ravie que tu suives toujours cette histoire et j'espère qu'elle te plaira jusqu'à la fin. Ne t'en fais pas, tu auras les réponses à tes questions dans les prochains chapitres. Merci pour ta review !

ElangelCaido : Ca me fait vraiment plaisir que tu accroches autant et que tu trouves cette fic un peu 'différente'. Et oui, tu as bien raison les reviews font vraiment plaisir. C'est super de savoir ce que les gens pensent de ton histoire, mais tu le sais aussi : elles ne sont pas obligatoires. Attention ! Je ne crache pas dans la soupe. Je le dis et le répète : les reviews me font super plaisir. D'ailleurs, merci pour ta gentille review !

Yohina : Kikoo ! Je suis contente que tu aimes cette histoire. Ne t'en fais pas, tu sauras bientôt ce qu'il s'est passé. Merci pour ta review et à bientôt peut-être !