Je parie que vous vous attendiez tous à ce que ce chapitre se passe avec Bridget…eh ben c'est raté! (bah oui, il faut bien de l'imprévu de temps en temps!)
Excusez-moi, ptite erreur de manoeuvre : le chapitre était bien fini !
IV - Sang et larmes
Carmen reposa le téléphone sur le combiné. Elle tituba lentement, la vue troublée par les larmes qui se formaient dans ses yeux, vers le canapé du salon, où elle s'assit. Les larmes dévalaient à présent le long de son nez, puis sur ses joues, sa bouche, où elles se mêlaient à la salive, et son menton, pour enfin tomber et éclater sur un coussin de toile bleu, formant ainsi une tache plus foncée. Elle entendit vaguement une porte se refermer, puis des bruits de pas, mais ces sons lui paraissaient très loin du cauchemar dans lequel elle était.
Lorsqu'Eleonor entra dans le salon, elle trouva sa mère figée sur le sofa, en train de pleurer. Elle s'approcha timidement pour essayer de la réconforter :
« Maman, qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi tu pleures ?
- On a téléphoné il y a deux minutes, répondit Carmen, la voix rauque et tremblante, après une longue hésitation. C'était l'hôpital…Papa…
- Papa quoi ! la pressa Eleonor, Maman qu'est-il arrivé ?
- Il…Il a eu un accident de voiture…
- Oh mon Dieu ! C'est grave ? demanda la jeune fille, tout en espérant que son père n'avait seulement qu'une jambe et quelques côtes cassées.
- Il…Il est dans le coma, acheva sa mère. J'ai attendu que u reviennes pour aller le voir…A moins que tu préfères être épargnée de ce spectacle… »
Sous le choc, Eleonor fondit en larmes. Elle secoua la tête et entraîna sa mère dehors.
Toutes deux sortirent de la maison. Le soleil illuminait leur grand jardin. En marchant le long de l'allée bordée de parterres de fleurs, Eleonor maudit intérieurement ce beau temps d'été qui aurait dû être, selon elle, triste, gris et maussade comme son humeur. Toujours sans un mot, Carmen démarra la voiture. Elles faisaient peine à voir toutes les deux, avec leurs paupières gonflées, leurs yeux rouges et leurs joues humides.
D'ailleurs, tout le monde se retourna sur leur passage quand elles furent arrivées à l'hôpital. Après un bon moment passé à se renseigner, elles trouvèrent enfin le médecin qui avait examiné Win :
« Bonjour mesdames. Vous voulez sans doute voir votre mari ? demanda-t-il en s'adressant à Carmen.
- Eh bien oui s'il vous plaît. Qu'à t-il exactement ?
- En fait, lorsque le choc s'est produit, sa tête s'est fracassée contre le pare-brise. Il en résulte une fracture du crâne avec possibilité d'endommagement du cerveau. Ceci est le principal dégât causé par l'accident mais il a subi aussi une fracture de plusieurs côtes et bien sur des contusions un peu partout sur le corps. Mais ce ne sont que des dommages minimes.
- Oh mon Dieu ! Et…vous pensez qu'il a une chance de… se réveiller ?
- Ma foi, je ne puis vous renseigner pour le moment. Il faudra attendre plusieurs jours, voire semaines avant de savoir s'il a des chances…Je suis désolée madame, ajouta t-il, d'un ton compatissant. »
Le médecin les conduisit ensuite jusqu'à la chambre d'Eric, où il les prévint avant d'ouvrir la porte :
« Attention, vous allez peut-être subir un choc…Mais si vous vous croyez assez fortes, entrez. »
Carmen s'élança, mais Eleonor resta plantée devant la porte. Et si elle ne supportait pas de voir son père dans un tel état ! Peut-être fallait t-il mieux attendre ici…Mais elle entra quand même. L'envie de prendre la main de son père prit le dessus.
Là, devant le lit, comme prévu par le médecin, son cœur fit un bond.
Le long des murs, près du lit s'alignaient une dizaine de machines qui clignotaient ou émettaient des « bips » à intervalles réguliers. Eleonor s'approche du lit. Elle ne pouvait pas encore voir son père car Carmen se tenait devant son lit, murmurant des paroles presque inaudibles et entrecoupées de sanglots à son mari. Sentant la présence de sa fille, celle-ci se décala un peu, permettant ainsi à Eleonor de voir le macabre spectacle : Win était allongé dans les draps blancs, sur lesquels on pouvait voir une grosse tache rouge au niveau de l'abdomen. Tout son corps était d'une pâleur extrême. Il y avait une ouverture béante en haut de son front, qu'on distinguait malgré le bandage qui la recouvrait. A cet endroit éclataient de temps à autre des bulles rouges, et quelques gouttes de sang coulaient de la plaie, zébrant au passage son beau visage de traînées carmin. Un énorme tube plongeait au fond de sa gorge afin de le faire respirer. Toutes les parties visibles de son corps étaient couvertes d'hématomes et cicatrices. Son bras droit avait été tellement râpé que la chair était à vif ; un tube de perfusion y était enfoncé. Sous les plis des draps, on devinait que de petits appareils de mesure, reliés à chacune des machines, étaient accrochés au niveau des organes vitaux du blessé.
Devant cette vision d'horreur, Eleonor ne put retenir ses larmes et, s'agenouillant à côté du lit, elle prit la main de son père :
« Papa, je t'en prie réveille-toi ! Ne nous laisse pas comme ça toutes les deux…On a besoin de toi, on t'aime ! »
Elle ferma les yeux, sentit des bras lui enlacer le cou et entendit d'autres sanglots derrière elle. Les larmes continuèrent ainsi à rouler sur ses joues, au même rythme que les gouttes de sang sur le visage de son père…
Elles restèrent ainsi, au moins dix minutes, sans rien dire. Les seuls bruits qu'on entendait étaient les « bips » monotones des machines, et les quelques reniflements, ou sanglots émis tantôt par la mère, tantôt par la fille, qui venaient rompre de temps à autre le silence oppressant.
« Il va falloir annoncer ça à Ben et Léo, commença Carmen, une fois installée dans la voiture. Les pauvres, ils ne vont pas comprendre…Ellie, ma chérie, ça va ? Tu es toute blanche !
- Tu…tu crois qu'il va se réveiller ? demanda t-elle, d'une voix tremblante.
- Je…Je ne sais pas…Je l'espère de tout mon cœur.
- Je ne supporterais pas de perdre mon père à seize ans. Et pour Ben et Léo ! Sans papa à six et huit ans, c'est trop tôt !
- Eleonor, essaie de ne pas penser trop à ça, même si c'est dur…Tu n'aurais peut-être pas dû aller le voir. Je ne voudrais pas que cela te gâche les vacances.
- Bien sûr que si ça va les gâcher ! Papa est entre la vie est la mort, et tu voudrais que je n'y pense pas ! s'indigna-t-elle.
- Je sais que tu ne pourras pas t'empêcher de penser à lui, mais je veux que tu t'amuses quand même, que tu te distraies. Et je suis sûre que Papa voudrait ça aussi…
- Au fait, déclara Eleonor, le conducteur de l'autre voiture a été blessé ? Et qui était en tort pour l'accident ?
- Eh bien, il a été blessé, bien sûr – personne ne pourrait se tirer d'un tel choc sans dommages – mais pas aussi gravement que Papa. Les deux jambes cassées, je crois, mais il s'en remettra. Et pour savoir qui été en tort, les circonstances de l'accident vont être établies par des expert qui donneront le compte rendu au tribunal dans unmois…
- Dans un mois ! Mais c'est hyper long !
- Tu sais, c'est toujours comme ça dans les procès...ça prend un temps fou
- Je le savais, mais pas à ce point ! Dis, je pourrai assister au procès ?
- Euh…Eh bien…si tu veux, après tout… »
Leur arrivée à la maison mit un terme à la conversation.
Carmen et Eleonor passèrent l'après-midi sans rien faire d'intéressant, mais elles ne voulaient pas rester inactives pour éviter de repenser à Win et fondre en larmes. Elles espéraient que le temps passerait lentement, mais les aiguilles ne voulaient pas s'arrêter, et tournaient trop vite à leur goût. Bientôt, Ben et Léo rentreraient de leur stage. Bientôt, elles devraient faire tourner leur belle journée en cauchemar…
Soudain, elles entendirent un bruit de moteur qui s'arrêta, pour laisser place à des pas le long de l'allée, et des rires d'enfants joyeux. La mère et la fille se regardèrent. Elles pouvaient lire dans les yeux de l'autre, le même désespoir commun. On sonna. Dans un élan de courage, Carmen ouvrit la porte.
«Merci, Anita, de me les avoir ramenés, s'exclama t-elle, d'un ton qu'elle voulait joyeux mais qui sonnait faux. A plus tard!»
Elle referma la porte, tremblante. Benjamin, l'aîné, commença: «Maman, c'était génial! On a fait plein de trucs. En premier on a fait des petits jeux avec un ballon pour s'échauffer…
- Et après on a fait des vrais matchs et on a gagné ça! s'exclama Léo, encore plus couvert de boue de boue que son frangin, en brandissant deux diplômes déjà salis.
- C'est bien mes chéris…C'est bien…murmura Carmen d'une voix éteinte. J'ai…quelque chose de…d'important à vous dire…
- Oui ?
- Quoi ?»
Voyant que sa mère ne parlait pas, Eleonor lui lança un regard encourageant. Carmen prit une bouffée d'air avant de dire d'une seule traite:
«Papa a eu un accident de voiture et il a été très gravement blessé.
- Mais c'est grave? s'enquit timidement Léo
- Ben oui puisque elle a dit gravement ! se moqua son frère. Il a une jambe cassée ou un bras?»
Carmen s'écroula sur un fauteuil. Elle n'arrivait pas à trouver les mots pour expliquer tout ça. Et ses pauvres fils, qui croyaient que leur papa n'avait seulement qu'une fracture! Eleonor se décida à prendre la parole, afin d'aider sa mère qui semblait désespérée: « C'est beaucoup plus grave que ça, Bénou…En fait… (sa voix se brisa) il…il est endormi…»
- Oh non! s'exclama Ben, les yeux emplis de larmes. Il est vivant, hein, Ellie? Pas vrai, maman?
- Ne pleurez pas mes chéris, dirent Eleonor et Carmen d'une même voix.
- Papa n'est pas mort, ne vous inquiétez pas…ajouta cette dernière.
- Mais…il est vivant, alors?»
Eleonor s'apprêtait à répondre par la négative, mais sa mère la devança, en répondant un «Oui, mais il dort…Il va dormir pendant un certain temps…». La mère et la fille prirent alors Ben, qui était en larmes, et Léo, qui ne comprenait pas ce qui se passait, dans leurs bras…
Les jours passèrent. La maison semblait vide. La bonne humeur et la joie qui y régnaient autrefois avaient maintenant disparu. Eleonor faisait des efforts pour ne as craquer ni en présence des ses frères, ni de sa mère pour ne pas qu'elle se mette à pleurer elle aussi. Mais le soir, dans sa chambre, elle pensait à son cher père, qui était tellement complice avec elle. Elle revoyait des moments de bonheur partagés avec lui, souriait, et pleurait dans son oreiller…Léo réclamait son papa, et Ben, qui avait à peu près compris la situation, insistait pour aller le voir.
Mais Carmen ne céda pas. Elle ne voulait pas que ses enfants subissent un tel choc. Quant à Eleonor, elle se sentait complètement vidée.
«Ellie, commença Carmen, voyant la mine désespérée de sa fille, je crois qu'il vaudrait mieux pour vous de partir quelques temps en vacances.
- On ne peut pas partir. Imagine que papa se réveille, il serait tout seul et nous en voudrait de l'avoir abandonné.
- Non, je voulais dire, les garçons et toi. Il ne faut pas que vous restiez là, sans rien faire, à vous morfondre. Vous avez besoin de prendre l'air, de vous amuser…à la mer, par exemple!
- Mais où est-ce tu veux qu'on aille tous seuls? En colo? demanda t-elle, avec une grimace. Tu sais bien que je déteste ça!
- Je pensais plutôt demander à votre oncle de vous héberger pendant quelque temps…»
Un petit sourire se dessina sur les lèvres d'Eleonor; le premier depuis déjà longtemps.
«Aller à Miami! s'exclama t-elle. Ce serait…génial.
- OK, je vais lui téléphoner…»
Sur ce, elle décrocha le téléphone et composa le numéro qu'elle connaissait par cœur.
«Allô? répondit une voix familière qu'elle fut heureuse d'entendre.
- Salut. C'est moi, Carmen.
- Oh! Ca faisait longtemps! Tu vas bien? Le déménagement s'est bien passé? demanda t-il.
- Oui…Euh, en fait je voulais te demander un petit service…
- Vas-y, je t'écoute.
- Eh bien…Win est…est…tombé dans le coma…
- Oh mon Dieu! Il va s'en sortir?
- J'espère…
- Et les enfants, ils tiennent le coup?
- Plus ou moins…Tu vois, le problème, c'est qu'on ne va pas pouvoir partir en vacances, et…
- Tu peux me les envoyer si tu veux.
- Oh! répondit Carmen, soulagée qu'il l'ait proposé avant elle. Eh bien…c'est une bonne idée…enfin, si ça ne te dérange pas!
- Oh non. Faut bien se serrer les coudes. En plus il y aura ma fille. Eleonor a le même âge, non?
- Elle est un peu plus jeune. Elle a quinze ans, bientôt seize.
- OK. Quand est-ce que tu peux me les envoyer?
- Hum…euh…dans une semaine? Le temps de tout préparer et d'acheter les billets d'avion.
- Ca marche. Gros bisous. Et si tu déprimes, n'hésite pas à m'appeler.
- OK.
- Tu es sûre que ça va aller, toute seule, dans un pays que tu connais à peine?
- Oui, oui. Ne t'inquiète pas. J'ai déjà rencontré dans mon quartier des femmes avec qui je m'entend bien.
- OK. Ciao bella!
- Bye!»
Et elle raccrocha, heureuse que ses enfants puissent s'amuser, loin de la tragédie qui avait détruit tous rires et sourires.
Voilà, c'est fini pour aujourd'hui. Croyez moi, ça ne me fait pas plaisir non plus de martyriser le pôvre Win que j'aime pourtant bien...
Réponses aux reviews :
moon light of dreams : franchement, il faut que tu lises les autres tomes. Personnellement, je les adore tous, mais mon préféré c'est quand même le 3...il est encore plus génial !
Kamala1 :en fait je ne sais pas trop encore si il va se réveiller ou pas... On verra...
Pami : merci beaucoup fidèle lectrice (looool !)
Cla : G pas trop pigé ta 1ère review mé bon C pa grave. Bisous !(Ma petite puce...tu m'grattes ! loooooool quel trip débile !)
