Un Voile entre les mondes
Seconde partie : Feel

7 – WE difficile


Le week-end arriva sans même que je ne m'en rende compte. Si j'avais cru pouvoir en profiter un peu pour empaqueter mes affaires en vue de mon déménagement au Wohnheim, je m'étais bien trompée. Mes patrons extérieurs au GKSS avaient téléphoné vendredi en milieu d'après-midi au moment même où je leur envoyais ma fiche d'avancement.

Résultat ? Un rapport de cent pages en anglais à rédiger pour la première heure lundi, fuseau horaire du japon. Mais à qui en vouloir si ce n'est à moi-même, qui voulait tellement m'essayer à l'international ? Je dus donc faire une croix sur mes après-midis, mais à aucun prix je ne leur sacrifiais mes grasses matinées. Du moins c'est ce que je pensais intérieurement, jusqu'à ce que mon chef m'appelle, disant qu'il venait me chercher à neuf heures.

Vous pouvez donc imaginer l'état d'esprit dans lequel je me trouvais quand mon portable sonna en milieu de la journée.

« Ici Mathilde, j'écoute ! déclamai-je avec un gros soupir.

- Et ben, ça a pas l'air d'être la grande forme. Je te dérange ?

- Euh…

- Fred, moi c'est Fred, à moins que ce ne soit George ? ou alors Gred…

- Ou encore Forge. C'est bon je connais déjà ! le coupai-je un peu à court de patience.

- Tu veux que je raccroche ? Tu as l'air vraiment énervée.

- Enervée ? Carrément ! Et je le serais encore plus si tu ne me dis pas pourquoi tu m'as dérangée en pleine rédaction d'un rapport !

- Parce que tu n'es pas à Hambourg ? Tu es au boulot là ? Un samedi ? »

Je soupirais, retenant une remarque acerbe qui pourtant me brûlait la langue.

« Non je ne suis pas à Hambourg. Pourquoi ? Ca t'arrange ? demandai-je ma curiosité tout à coup éveillée.

- Carrément ! J'appelais pour te dire que je ne pourrais pas te retrouver avant facile deux heures !

- Pardon ?

- Bah oui, tu te souviens pas lundi… »

Je fronçai les sourcils.

« … notre excuse pour ne pas aller à Reeperbahn ? »

J'essayais de me rappeler le flux des conversations intarissables des italiens.

« Ah mince ! Je me rappelle, tu devais me faire visiter … kam.. durch.. strässe. Ah, moi et les noms allemands ! »

Il y eut un silence, je sentis qu'il hésitait, mais reprit rapidement la parole.

« Ouais, un truc du genre. Mais j'ai carrément oublié de me lever ce matin. J'suis limite de me faire le p'tit déj' ! »

Je cherchai du regard ma montre, jurant intérieurement contre mes pouvoirs magiques qui en se développant, avaient également développé les champs magnétiques émanant de ma personne, rendant en moins de trois mois toute montre inutilisable.

« T'as vu l'heure ? m'exclamai-je.

- Ouais et alors ? Dans mon pays on appelle ça un Brunch !

- Ah bon ? je croyais que c'était 'tea time' ? » déclarai-je avec sarcasme.

J'entendis un bruit de papier et livres qui volaient.

« Ah ouais. Jouons pas sur les mots !

- Raconte-moi pourquoi tu te lèves si tard grand frère ? demandai-je en me calant dans mon fauteuil pour l'écouter.

- Ca ne te regarde pas petite soeur ! répondit-il d'un ton moqueur.

- Allez, raconte ! Elle est belle ? grande ? rousse ? brune ? yeux bleus ? verts ? insistai-je.

- Mathilde !

- Hé je m'ennuie à mourir avec ce foutu rapport ! Et vu que tu m'as interrompue en plein effort, tu dois nourrir ma curiosité ! »

Je l'entendis grogner, ce qui eut pour effet de me motiver encore plus pour lui tirer les vers du nez.

« Allez Fred ! Et puis, si tu te confies pas à ta petite sœur, à qui tu vas le faire ?

- George est là pour ça !

- Sauf qu'il n'est pas là ce week-end ! »

Nouveau grognement de sa part.

« Ecoute, tu avances ton rapport un max. Je passe te chercher et on va se faire un dîner en ville.

- Tu me raconteras tout ?

- Tout ce qu'il y a à savoir sur le grand Fred ! »

J'éclatai de rire. Il ne pouvait pas rester sérieux jusqu'au bout. Et ça changeait agréablement des autres.

La sortie avec Fred dans les rues de Geesthacht me fit le plus grand bien, même si quand il me laissa à l'arrêt de mon premier bus, j'aurais tout donné pour pouvoir transplaner directement au fond de mon lit et non me taper trois changements de bus.

Merlin ! Venais-je de souhaiter une nouvelle fois ne pas avoir cessé d'utiliser la magie ? Je secouai vivement la tête, essayant de chasser cette pensée furtive. Mais rien n'y fit, l'idée était bien là.

Je ne le réaliserai pas sur l'instant, mais seulement quelques mois plus tard, quand tout se serait stabilisé, que je commençais à guérir.


Merci à Alpo, Miya Morana, Luffynette, Mirabelle P, Shiri, Celo, Iliana pour leurs messages encourageants.

Angharrad - Dernière mise à jour le 13 Octobre 2010
Première publication le 30 avril 2004