Un Voile entre les mondes
Troisième partie : Violence
3 – A la baguette magique
Ils y étaient finalement arrivés. D'une, ils m'avaient forcée à faire des courses à la Galerie Parallaxe, ce qui était déjà un exploit en soi, vu que je n'y avais plus mis les pieds depuis facilement dix ans. De deux, le ministère lui-même exigeait que je me rachète une baguette et me remette à la magie.
Sous-entendu, il fallait nous rendre à l'Hôtel de la Monnaie dans le quartier moldu et accéder à l'aile sorcière du bâtiment où Gringotts était abrité. Puis, si j'arrivais à ne pas trop me faire arnaquer par ces rapaces de Gobelins, il allait falloir retraverser la Seine, l'île de la cité sorcière et remonter la Galerie Parallaxe jusqu'à la boutique « À la Baguette Magique ».
Si j'étais une fille gentille, et surtout de bonne humeur, j'en aurai profité pour acheter une de leurs délicieuses baguettes aux céréales et algues diverses. Mais vu mon humeur massacrante, je me garderais bien de leur faire ce plaisir.
« Ce sera pour du pain ou pour une baguette ? » demanda Miss Olivia, la gérante de la boutique.
Ah oui, j'ai oublié de vous dire. Fatiguée que des petits plaisantins entrent dans la boutique et commandent de la baguette pour leurs sandwichs, la mère de l'actuelle gérante avait transformé le magasin en un double commerce, de manière à pouvoir répondre aux plaisantins.
« Ce sera une baguette magique, » répondit Grand-père, avec tout le sérieux du monde.
Je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire. Elle nous fit signe de la suivre et nous guida à la seconde pièce, où se trouvait son père.
Si on ne m'avait pas déjà fait le coup il y a plus de quinze ans, j'aurais juré que cet homme était un elfe de maison. Petit et fin, des mains aux longs doigts effilés, les yeux énormes et des oreilles d'éléphant, monsieur Dubâton était le fabriquant français de baguettes magiques le plus renommé. Un mythe urbain voulait qu'il descende de la même famille d'artisans baguettiers que Ollivander de Londres. Rumeurs jamais démenties, ni par l'un ni par l'autre, chacun profitant de la renommée de l'autre.
« Tiens tiens, Monsieur Lenoir. Ne me dîtes pas que votre bâton de Mage vous joue encore des tours ! gémit-il.
- Allons mon ami. Avez-vous si peu de foi en votre propre travail ? Quoi que, une petite révision…
- Aha ! Je le savais ! s'exclama triomphalement le petit bout d'homme. Mais qui vois-je avec vous ? Attendez, laissez-moi me rappeler… continua-t-il en glissant ses demi-lunes sur le bout de son nez long et fin. Hum… Pas le cheveu de Vélane… Plutôt le ventricule de dragon dans une tige de sorbier ? »
Je ne pus m'empêcher d'éclater de rire à la mine soucieuse de l'homme.
« C'est tout à fait ça, le rassurai-je avec un hochement de tête. Enfin c'était…
- Ah oui, j'ai entendu pour votre Grand-mère. Triste affaire. Une grande dame qu'elle était. Mais comment se fait-il que vous veniez seulement maintenant la remplacer ? s'étonna-t-il alors qu'il sortait son mètre à mesurer.
- S'il n'en tenait qu'à moi, je ne l'aurais jamais remplacée… murmurai-je entre mes dents serrées.
- D'autres préoccupations ont retardé cet achat ! » dit Grand-père pour couvrir mes paroles, tout en me menaçant du regard.
Je haussais les épaules.
« Ah oui, c'est vrai. J'ai aussi entendu pour votre mariage… » commença-t-il à marmonner tout en finissant de prendre mes mesures et appelant à lui un certain nombre d'écrins où reposaient les précieuses baguettes magiques.
J'avais envie de hurler parce qu'il m'avait confondu avec ma sœur cadette, et allais lui dire le fond de ma pensée, quand il me tendit à essayer la première baguette d'une série qui s'avéra finalement rassembler toutes les baguettes du magasin.
Perdu sous une pile d'écrins, Monsieur Dubâton cherchait frénétiquement lequel il n'avait pas encore ouvert, et qui pourrait contenir LA perle rare qui me conviendrait. Je haussais une nouvelle fois les épaules, face à l'explosion provoquée par un mouvement de poignet désinvolte avec une baguette qui ne me correspondrait pas plus que les autres. Grand-père me lança un regard désapprobateur. Comme si c'était de ma faute ! Monsieur Dubâton me présenta une dernière baguette que je ne pus même pas saisir, celle-ci me fuyant avec une telle ardeur, qu'elle se retrouva figée dans le mur.
« Mathilde, arrête de faire l'idiote et concentre-toi un peu sur ces baguettes, me fustigea Grand-père, exaspéré.
- Mais je n'y suis pour rien, m'énervai-je. Dites-lui, Monsieur Dubâton !
- Effectivement, la baguette semble la rejeter. Vous m'en voyez désolé, mais je n'ai malheureusement rien qui puisse convenir à la petite demoiselle dans ce magasin…
- Tu vois ! l'interrompis-je. Ca ne sert à rien de me forcer à…
- N'y a-t-il aucune possibilité de trouver cette baguette ? me coupa sèchement Grand-père en s'avançant vers Dubâton qu'il aida à sortir de sa pile d'écrins.
- Je pourrais vous la fabriquer, mais je devrai faire des tests avec la petite demoiselle. Il y en a au moins pour trois semaines, voir un mois, le temps de rassembler les éléments magiques.
- Impossible, je dois être rentrée en Allemagne d'ici une dizaine de jours. »
Il soupira.
« Je ne peux alors que vous conseiller de vous rendre à Londres. J'avoue que ce cher Ollivander possède la plus belle collection de baguettes extraordinaires et invendues que je connaisse. Si votre achat est si pressé, je peux vous laisser utiliser mon portoloin. Il relie la Galerie Parallaxe au chemin de Traverse, en cas de problème comme le vôtre.
- Ce serait effectivement une solution, acquiesça Grand-père. Si vous vouliez bien nous fournir le portoloin…
- C'est toujours un plaisir que de traiter avec vous Monsieur Lenoir. Nous vous devons tant. Les gens n'ont pas conscience de votre travail, mais je sais à quel point votre présence est rassurante pour nous tous. En tout cas, vous devriez trouver votre bonheur là bas. Une jolie baguette pour la petite demoiselle !
- Et si nous ne la trouvons pas ? demandai-je avec espoir alors qu'il nous tendait le portoloin.
- Alors, c'est que vous êtes perdue pour le monde de la Magie et des vivants. »
Ces paroles résonnèrent dans mes oreilles alors que j'étais transportée par le portoloin.
Merci à Bianca n'ha gabriela, Aliri, Shiri, Alpo, Luffynette, Alana Chantelune, Miya Morana, Naseis pour la trace de leur passage et leurs encouragements.
Angharrad, dernière modification le 30 octobre 2010
Première publication le 3 juin 2004
