Un Voile entre les mondes
Troisième partie : Violence
6 – Le Mariage et le Retour
Que vous dire de plus ?
Ma sœur était furieuse quand nous sommes rentrés, parce que je n'avais pas pu être à l'heure pour le choix de son bouquet. J'étais déjà arrivée juste à l'heure pour le repas qui réunissait les deux familles des mariés. Même la sœur de son fiancé, qui pourtant ne donnait signe de vie qu'une fois tous les cinq ans, était arrivée avant moi.
Mais ceci fut vite oublié quand elle aperçut les paquets que je portais et surtout l'écrin que j'avais pourtant caché au fond de mon sac. Elle avait l'œil implacable et me harcela de questions, provoquant sans cesse de petits accidents pour me forcer à jouer de la magie. Mais elle ne gagna pas. J'avais déjà assez fait de concessions pour la journée.
Le mariage eut lieu une semaine plus tard. Occasion pour toute la famille Lenoir de se retrouver et de rencontrer la famille qui serait maintenant celle de ma sœur.
Comme elle l'avait exigé, nous étions un bel ensemble assorti de couleurs pastelles. Alice, la petite dernière et filleule de ma sœur, passa toute la matinée de préparation à danser et tournoyer dans ce qu'elle appelait sa robe de princesse. Elle était adorable, avec ses anglaises du même miel que celui de sa marraine, s'accordant à la robe d'un joli vert anisé.
Un moment heureux, pour célébrer la famille et l'amour. Mais étonnamment, je ne me sentis pas à ma place. Bien sûr, je m'amusais bien et profitais de mes cousins que je ne reverrais pas avant quelques mois (parce que j'avais beau avoir une baguette neuve, hors de question que je m'amuse à transplaner d'un bout à l'autre du continent). J'organisais même la distribution de riz et de pétales de rose à la sortie de l'église.
Mais j'avais toujours l'impression que quelque chose, peut-être quelqu'un, manquait. Comme si j'étais incomplète, et ce, depuis si longtemps que je ne me souvenais plus de ce qui avait été avant. Je me sentais absente, ce qui provoqua quelques plaintes de ma sœur. J'avais en effet oublié d'empêcher la vente de la jarretière, mais aussi attrapé par réflexe le bouquet qu'elle avait lancé vers ses amies ingénieures, sans même m'apercevoir qu'il s'agissait des fleurs de la mariée.
Non, j'avais la tête ailleurs, et perdue entre les voiles séparant les mondes, je ne savais plus où je me trouvais. Et ce depuis si longtemps… si longtemps que j'avais perdu la notion de différence et de séparation.
Si je râlais contre mon travail, je fus soulagée de pouvoir quitter le noyau familial et regagner l'Allemagne. Fred m'avait envoyé dans la semaine un plan et des horaires pour me guider de l'aéroport au foyer, qui effectivement était impossible à trouver avec ces deux métros et trois bus, quand on n'avait pas encore la pratique des transports hambourgeois.
Épuisée par le voyage et la fête qui raisonnait encore dans mes oreilles, je me serais volontiers effondrée sur mon lit si le travail ne m'avait pas attendu. Cependant je retrouvais enfin la tranquillité et le calme que j'avais perdu en suivant Grand-père, à travers le dédale de la cité sorcière de Paris. Et pourtant, instinctivement, je sentais que l'achat de cette nouvelle baguette dont je ne connaissais toujours pas les composants, cachait un lourd secret…
Merci à Bastetamidala, Naseis, Alana Chantelune, Miya, Luffynette, Aliri et Alionorah pour la trace de leur lecture et leurs messages d'encouragement.
Angharrad, dernière modification le 30 octobre 2010
Première publication le 25 juillet 2004
