Un Voile entre les mondes
Quatrième partie : D'amour et d'Amitié

5 - Grand frère

Vous dire que je me suis ennuyée les semaines qui suivirent serait à moitié vous mentir. Je passais beaucoup de temps à chatter avec Unsleepy Faery pendant mes journées, attendant qu'on me donne des instructions sensées ou enfin l'accès aux informations et machines dont j'avais besoin et mes soirées passaient entre lutter pour faire mes courses avec le réseau local de bus, maudissant mes préjugés et mon incapacité à transplaner correctement, et faire connaissance avec mes colocataires.

Il fallait bien avouer qu'avec vingt-et-un colocataires, et dix-sept nationalités, il y eut pas mal de fous rires à essayer de communiquer, et des moments de tension à chercher la solitude dont cette promiscuité nous privait.

Je parvins cependant à me ménager quelques moments de calme, assise devant la machine à laver le linge, seulement troublée par la présence rassurante et divertissante de Fred ou George. Mais si George se faisait parfois intrusif, ce ne fut jamais le cas de Fred, qui était presque fâché de la présence de son frère.

D'ailleurs, un mystère entourait ces deux jeunes hommes. Je croyais que Fred serait l'élément moteur du foyer, mais il n'en était rien. Il était absent encore plus souvent que moi, ou enfermé dans sa chambre à éviter le contact de nos colocataires, il faut bien l'avouer, intrusifs.

Si j'eus la chance à plusieurs reprises de partager une soirée rire, livres et bonbons avec les jumeaux, les autres semblaient presque les craindre. Je m'en rendis vraiment compte lors de la nuit des musées.

Il fallait bien avouer qu'emménager à Wohnheim m'avait considérablement rapprochée du travail, et de mes collègues, mais en aucun cas n'avait augmenté mon taux de visite de la région. Et je voyais les semaines qui commençaient à s'égrainer, sans que j'aie entamée la moindre visite culturelle.

Je fus donc aux anges quand Amanda et Jenny vinrent me proposer de prendre des billets pour die lange Nacht Museum de Hambourg. Le principe en était simple, tous les musées sont ouverts pour une nuit complète, et avec les billets pour les musées, sont offerts les transports. A nous la découverte des talents cachés hambourgeois.

Toute excitée, j'en parlais à Fred, lui montrant les prospectus de certains musées notamment sur le romantisme allemand du XIXième siècle, mais celui-ci semblait gêné, puis devint grognon.

« Si ça t'ennuie, tu peux me le dire et j'irai me coucher au lieu d'optimiser les visites avec toi ! finis-je par claquer exaspérée par son manque de répondant.

- Ce qui m'ennuie, c'est qu'on prenne la soirée pour planifier un truc qu'on aurait pu faire tranquillement en y allant un après-midi par week-end, ce que moi j'ai fait. Résultat, tu t'énerves toute seule alors que je ne vais même pas faire le marathon avec vous. »

J'en tombai de l'accoudoir sur lequel je m'étais installée, les dépliants étalés sur le canapé en contre bas.

« Mathilde ! s'écria-t-il en se levant de son bureau précipitamment.

- Ça va, je n'ai rien ! » criai-je, bien que la douleur dans le bas du dos me fasse grincer des dents.

Je priais intérieurement qu'il ne vienne pas me relever, ou lentement, que je puisse cacher ma baguette qui était responsable de mes bobos. Manque de chance, sa tête apparut au-dessus de moi juste au moment où j'apercevais l'objet en question dépassant à moitié en-dessous du canapé lit. Je donnai un coup de pied vif, l'envoyant rouler plus loin sous le meuble et lui fis la grimace.

« Tu t'es fait mal ? » demanda-t-il en me dévisageant manifestement inquiet.

Mais j'étais à présent sur la défensive et me grondais intérieurement pour mon manque de prudence. Note pour plus tard, les baggys et pantalons à poche se ferment avec fermeture éclair, comme ça on perd pas ce qu'on a dans les poches en tombant…

« Oui je me suis fait mal, et d'abord pourquoi tu ne viens pas avec nous demain ? claquai-je en le repoussant alors qu'il me tendait la main.

- Parce qu'on ne m'a pas proposé, répondit-il du même ton excédé.

- Je ne vois pas où est le problème, nous n'avons qu'à passer à l'office du tourisme demain, et…

- Et demain est une nuit noire, ça fait longtemps que je n'ai pas regardé les étoiles sans la pollution lumineuse de la ville, » me coupa-t-il en se dirigeant vers la fenêtre et regardant les étoiles qui s'éveillaient.

Je n'écoutai que d'une oreille distraite la suite de sa litanie sur les étoiles, me frottant le bas du dos d'une main et essayant de l'autre de lancer un Accio bien senti qui aurait pu me ramener la baguette capricieuse. Mais force est de constater que je ne parvenais à aucun résultat, paniquée comme j'étais et distraite à essayer de ne pas paraître trop inattentive.

« Allez, range tes papiers et allonge-toi là, » déclara-t-il finalement à sa troisième tentative avortée de me faire participer à sa rêverie.

Je dus avoir l'air surprise ou paniquée, alors qu'il me saisissait la main.

« Je vais m'occuper de ton dos avant que tu n'ailles te coucher, tu en auras besoin vu la course contre la montre que tu vas faire demain, » ajouta-t-il avec un clin d'œil.

Mais je n'étais pas plus rassurée quand il eut fini de ranger ma paperasse et me fit signe de m'allonger. Et que dire, quand je compris ce qu'il voulait faire. De ses mains qui me parurent expertes, il souleva le long pull sous lequel je me cachais, et baissa légèrement la taille de mon pantalon pour accéder à la zone douloureuse.

Je dus me cacher le visage dans les coussins pour qu'il ne voie pas à quel point j'étais rouge. Je priais pour que le rouge n'ait pas gagné tout mon corps, comme on le disait des peaux claires, ni qu'il devina ma gène.

Quoi qu'il en soit, il se montra patient, commençant par caresser la peau endolorie pour qu'elle s'habitue à son contact. Puis lorsqu'il sentit que je me détendais légèrement, ou du moins ne luttais plus contre son intrusion dans mon espace personnel quasi intime, il chercha du bout des doigts la localisation précise du mal et commença ses ministrations.

Si j'avais un instant espéré profiter de la concentration de Fred sur le massage et récupérer ma baguette, je perdis vite cette priorité, entre la tension de son contact, puis le délassement et le bien-être qui en ressurgit. J'avais apprécié mon rôle de grande sœur, mais à présent que c'était mon tour de me faire chouchouter, je n'aurais troqué ma place pour rien au monde.


Merci à Aliri, Tsahel, Shiri, Loukichou Lolo, The unsleepy faery, Sammy, BastetAmidala, Alana Chantelune pour la trace de leur lecture et leurs messages d'encouragement.

Angharrad, dernière modification le 30 octobre 2010
Première publication le 17 avril 2005