Chapitre 5
Hermione avait écouté sans mot dire. Quand il eut terminé, elle resta partagée entre la compassion et la colère.
« Je comprends que tu aies souffert… Mais, Harry, te faire passer pour MORT ! Tu voulais punir Snape, je le conçois, mais tes amis, tous ceux qui t'aiment, tu en fais quoi ? »
« Je sais. Tu as raison. C'est très mal de ma part. »
« Si tu voulais te venger, on aurait pu trouver autre chose… »
« Ce n'était pas seulement une question de vengeance. Ne me regarde pas comme ça, bien sûr que j'espérais qu'il allait souffrir un peu, mais j'avais surtout envie de disparaître. De refaire ma vie ailleurs. »
« Tu aurais mieux fait de choisir le désert de Gobi, où personne ne t'aurait reconnu. »
« Les sorts d'Oubliettes, ça sert à ça. »
« Je te signale que ça a été un fiasco sur Bill. »
« Bill ! Mais c'était la semaine dernière ! Il y a longtemps que tu me cherches ? »
« Deux jours. »
Harry fit une grimace de dépit.
« Moi qui me croyais bien caché… »
Les deux jeunes gens restèrent silencieux un moment, jusqu'à ce qu'Hermione coule à Harry un regard sévère.
« Tu n'envisageais pas de nous envoyer une lettre, genre : hello, en fait je vais bien, et vous ça va ? »
« Je l'ai écrite, avoua Harry. Mais je n'ai pas eu le courage de l'envoyer. »
« Et le courage de revenir en Angleterre, tu l'aurais ? »
Harry parut très effrayé.
« Ah non, tu m'en demandes trop ! »
Hermione prit une grande inspiration, se pencha en avant et posa la main sur le bras de son ami.
« Il était dévasté après ton enterrement. Je l'ai vu de mes propres yeux. Il a souffert, plus que tu ne peux l'imaginer. Reviens. Je crois que ça peut tout changer. »
Harry baissait obstinément la tête. Quelle tête de mule, pensa Hermione. Elle soupira, à bout d'arguments.
« Je ne veux pas te forcer. Tu as besoin d'y réfléchir. Je vais repartir à Londres. »
« Quoi, déjà ? »
« On m'attend à Sainte-Mangouste. »
« Ils ont fini par comprendre et ils t'ont internée ? »
« Crétin ! Non, je suis médecin en apprentissage. Tu vas me dire que j'insiste lourdement, mais si tu veux voir Snape, il tient une herboristerie dans l'Allée des Embrumes. »
« Il n'est plus professeur ? »
« Même si son nom a été blanchi, personne n'accepterait que le meurtrier de Dumbledore enseigne à des enfants. »
« Quelle bande de… »
« Peut-être que toi tu peux les convaincre. Tu vois que le monde de la sorcellerie a besoin de toi ! »
Hermione se leva d'un mouvement souple. Harry lui saisit le poignet.
« Comment va Ron ? »
« Bien. Nous sommes fiancés et je lui mène la vie dure. Ne t'inquiète pas, je ne lui dirai rien. (Elle fit une pause pleine de menaces) Pour l'instant. »
HPHPHPHP
Harry fit ce qu'il n'avait pas fait depuis trois mois et demi: se regarder dans le miroir et réfléchir à son comportement. Il n'était pas fier de lui. Hermione avait raison: il avait très mal agi. Sa seule excuse, c'était que tout lui avait paru tellement insupportable...
Evidemment, c'était de sa faute. Il s'y était très mal pris avec Severus. Croyait-il vraiment que l'homme allait lui tomber dans les bras au premier mot? En fait, oui, il l'avait cru; et il avait eu tort. Il avait agi avec la subtilité d'un orang-outang. Que Severus l'ait repoussé était tout à fait compréhensible. Cependant il avait dit des choses très dures...
Pour la première fois, en y réfléchissant calmement, Harry se dit que Severus avait peut-être eu peur, tout simplement. Il avait réagi selon son caractère...
Et maintenant?
HPHPHPHP
Harry fit ses valises le lendemain et quitta la France.
L'Allée des Embrumes était toujours sinistre et pleine de dangers, en marge du monde de la sorcellerie. Ce n'était pas un endroit pour un héros de guerre comme Snape.
Ni pour le Survivant Harry Potter. Celui-ci s'était dissimulé sous une cape et un profond capuchon. Il n'avait prévenu personne de son retour. Il avait besoin de discrétion.
Il était là pour tester l'eau, d'une certaine manière. Si ça ne se passait pas comme il l'espérait, il aurait le choix entre repartir pour le continent ou se réfugier chez les Weasley pour y panser ses blessures.
Il vit l'enseigne de l'herboristerie et son cœur battit plus fort. Snape n'avait pas mis son nom sur la façade, comme s'il y avait motif d'en avoir honte. C'était plutôt aux autres d'avoir honte, pensa Harry. Scrutant l'intérieur de la boutique à travers la vitre, il constata qu'il n'y avait personne.
C'était le moment de vérité.
Harry poussa la porte. La clochette annonça son entrée.
Les étagères étaient couvertes de pots de faïence soigneusement étiquetés. Les jarres transparentes contenaient toujours des choses innommables, comme au bon vieux temps de Poudlard. L'impression générale était celle d'un commerce bien tenu, mais peu prospère.
Snape tournait le dos à la porte : il rangeait une étagère. Puis il s'essuya les mains et se retourna vers son visiteur. Il y eut quelques secondes de silence.
Harry contemplait son ancien professeur avec une affection qui le surprenait lui-même. Il le trouvait aussi ténébreux, aussi impressionnant, aussi beau que par le passé.
Snape dit ironiquement :
« Les Détraqueurs ne sont pas autorisés dans cet établissement. Retirez cette capuche, qui que vous soyez. »
La gorge sèche, Harry fit glisser la capuche.
(à suivre)
Merci à tous pour vos reviews et vos compliments! Je suis très touchée.
Je sais que ce chapitre est un peu frustrant... Ne m'en veuillez pas!
