Chapitre 5 : Ressemblances.
- Le sort. Je n'avais pas le droit. Alors, si tu veux, et seulement si tu veux, je peux le faire pour toi maintenant. Et accepter ton pacte. Même si pour moi ce serait plus qu'un pacte. »
Le jeune homme était surpris. Plus que surpris. Un sourire au coin des lèvres. Un sentiment bizarre. De plénitude ? D'allégresse ?
« Tu te lancerais un sort de fidélité envers moi, simplement pour être mon égal ? Pour te faire pardonner ? Qu'est-ce qui me donne tant d'importance à tes yeux ? »
Les yeux dans les yeux, deux adolescents qui devenaient hommes, changeaient, et commençaient seulement à s'en rendre compte. Une bouche ouverte par la surprise, un cœur défaillant, des questions dans sa tête. Harry était perplexe.
« Je ne sais pas… J'ai changé, crois-le ou non. J'ai réalisé que ta proposition n'était pas si bête et que pour une fois j'aurais du me la fermer. Malefoy, tu sais que tu as toujours été important à mes yeux ! On ne sous-estime jamais un ennemi. Seulement aujourd'hui, tu es avec nous, et ça se me force à faire tout ça. Parce que même si on se déteste, on va passer du temps ensemble, et tu te retrouves seul parmi tes ennemis : tu forces le respect, Malefoy.
- J'apprécie le compliment… Tu n'es peut-être pas si stupide que je ne le croyais, c'est bon à savoir ! Pour le sort, es-tu sûr que …?
- Je n'ai jamais été aussi sûr de ma vie.
- Alors j'accepte. »
Une lueur dans les yeux. Les deux étaient effrayés par ce lien, ce sort qui les rapprocherait encore. Effrayés mais déterminés. Harry s'approcha du blond.
« On fais ça où ? J'avoue que ce lieu ne m'inspire pas trop confiance, mais il est pas mal gorgé de magie. Ça peut être intéressant.
- Je suis pour. Je n'ai pas envi de retraverser la ville maintenant. Les habitants sont bizarres, tu as remarqué ?
- Oui… » Murmura Harry, le visage du vieillard toujours dans sa tête.
Ils allaient le faire. Une deuxième fois. Se lier. Leur relation devenait de plus en plus bizarre. Draco détourna les yeux et observa le manoir.
« On entre ? »
Harry acquiesça, et suivit le blond à l'intérieur. La porte ne posa pas de difficultés pour le jeune sorcier, ayant sortit sa baguette seulement quelques secondes. La pièce qu'ils découvrirent était sublime. Autant l'extérieur était délabré et presque en ruine, autant l'intérieur était plus qu'agréable, inondé du soleil matinal. Les murs étaient de couleurs claires, simples. Le mobilier inexistant. D'un commun accord, ils ne s'aventurèrent pas plus dans la maison, sentant déjà avoir troublé l'équilibre des lieux.
« Ne nous attardons pas. Je le sens moyen…
- Peur, Potter ? Je t'ai connu plus courageux !
- Pas peur, juste… Non, en fait si j'ai peur ! On y va ?
- Je n'attends que toi ! »
Harry haussa un sourcil à cette remarque. Le Serpentard l'étonnerait toujours décidément. Surtout maintenant qu'ils commençaient à se connaître…
D'un regard, ils se placèrent à un mètre l'un de l'autre, tenant leur baguette de leur main gauche et s'ouvrant la paume droite. Aucun signe de douleur, juste les yeux dans les yeux.
« Par ton sang et mon sang, je te fais le serment, Draco Malefoy, de ma loyauté immortelle et totale. Je ne pourrais ni te mentir ni te trahir, car ce serment sera ma loi. »
Leurs mains se serrèrent, leurs regards s'embrasèrent. Pour la deuxième fois, les ennemis étaient alliés.
Ils reçurent une légère décharge. La pièce s'obscurcit, l'atmosphère devint lourde, leurs mains se serrèrent un peu plus fort, leur respiration s'accéléra. Leurs regards étaient mêlés, et le temps semblait s'être précipité. Ils ne contrôlaient plus rien et le sentaient. Ils furent propulsés chacun de leur côté, retombant durement sur le sol. D'un commun accord, ils décidèrent de ne pas s'attarder plus en ce lieu.
Ils s'échappèrent en courant et ne se stoppèrent que devant leur hôtel, après avoir traversé tout le village. Draco éclata de rire. Son compagnon le regarda avec surprise, ne se souvenant pas avoir entendu le Serpentard rire auparavant. Son visage était totalement décontracté et ne ressemblait pas à son image habituelle. Il était plus nature, sauvage, beau. Les cheveux décoiffés par la course et tout ce qui avait précédé, il était beau tout simplement. Après ces constatations plus que surprenantes de sa part, Harry se laissa aller et partagea les émotions libératrices que lui apportait le blond. Toute la tension retomba.
Une complicité s'était établie entre eux. Et ils le savaient tous les deux. Ils ignoraient d'où cela venait, d'un sort, d'une quelconque magie ou de la vie naturellement. Toujours était-il qu'ils n'avaient plus pour seul de but de se tuer à présent.
Remontés dans la chambre, Harry s'allongea tranquillement sur le lit, dépassant Draco. Ce dernier se posta devant lui et le dévisagea, un petit sourire aux lèvres.
« Potter, s'il te plait, laisse-moi le lit !
- Non, chacun son tour !
- Potty chéri… J'ai si mal au dos !
- Ahhh ! Non pas Potty je t'en prie ! Tu peux trouver mieux ! Et je te ferais remarquer que j'ai aussi mal au dos, Dray !
- Si tu m'appelles Dray, je t'appelle Ryry je te préviens ! Pas de surnoms stupides ! Allez maintenant, donne moi le lit !
- Sinon quoi ?
- Sinon je m'affale sur toi !
- Tu vas me tenter…
- Ah ah ah ! T'es pas drôle comme gars ! Je vais le faire !
- Je n'attends que toi ! »
Harry défia le blond du regard, reprenant sa propre réplique. Celui-ci fit une petite moue boudeuse et se détourna… pour mieux se lancer sur le lit et Harry par la même occasion. Celui-ci se prit un violent coup d'épaule dans la tête et déchanta vite quand il vit qu'il ne pouvait plus bouger. Il allait finir étouffé !
Draco éclata de rire pour la deuxième fois de la matinée. Sauf que cette fois-ci, le brun ne trouvait vraiment pas ce qu'il y avait de drôle.
Le Serpentard fut interrompu par Ron, qu'ils n'avaient vu du matin, et s'inquiétait des bruits qui résonnaient dans la chambre. Il eut un véritable choc en découvrant son meilleur ami allongé sous le blond, celui-ci littéralement mort de rire. Sa petite amie ne tarda pas à le rejoindre et adopta un petit sourire, dévoilant encore un mystère dont elle seule connaissait la signification. Elle prit la parole, d'une voix enjouée :
« Et si nous allions déjeuner ? Il faudrait que l'on mette au point notre programme et que nous ayons certaines 'explications'. On y va ? »
Son petit ami acquiesça et la suivit, tandis que les garçons affalés sur le lit tentaient de se remettre. Draco, de son fou rire prolongé, et Harry de son écrasement prolongé. Ils se rhabillèrent correctement et retrouvèrent Ron et Hermione déjà installés à la table au dehors.
« On va nous apporter le menu du jour. Je propose qu'on commence à mettre au point certaines choses. Draco, es-tu d'accord pour nous répondre ? »
Le jeune homme prit subitement un air froid, son attitude habituelle. Ses yeux redevinrent glacials et sa voix menaçante.
« Oui. »
Harry était choqué. Il y a quelques minutes encore il entendait le son de son rire. Mais qu'est-ce qu'il avait pour être si lunatique !
« Draco, ce n'est pas contre toi, mais cela nous aiderait si tu nous expliquais les circonstances qui t'ont poussées à devenir mangemort et à accepter ta mission concernant Dumbledore. Peux-tu nous éclairer là-dessus ? »
Un haussement de sourcil, un air méprisant, l'attitude du Serpentard déroutait totalement ses compagnons.
« Non. Je n'ai rien à vous dire. »
Harry éclata :
« Mais enfin, à quoi joues-tu, Malefoy ! Souviens toi de notre marché ! Cela ne va pas te tuer ! Comment peux-tu être aussi égoïste ?
- Egoïste, Potty ? Non pas égoïste. Si toi, tout le monde connais ta vie, moi je n'ai pas envie de dévoiler la mienne. »
La conversation dérapait. Les vieilles querelles reprenaient. Hermione s'interposa une fois de plus.
« Arrêtez tous les deux. Draco, je t'en prie. On a besoin de savoir. »
Draco tourna son visage vers la brune. Elle força son regard et le fit un petit signe de tête pour le lancer. Le blond baissa la tête, et commença à parler, doucement, calmement.
« Je ne vous dirais pas que l'on m'a forcé. L'été dernier mon père était en prison et j'avais juré de le venger. J'ai accueilli le Seigneur des Ténèbres avec impatience cet été là. »
Il reprit sa respiration, passa sa langue sur ses lèvres, lentement. Sa tête était toujours baissée.
« Il n'est venu me chercher qu'à la fin du mois d'août. Je suis entré dans ses rangs sans test, alors que les mêmes y sont normalement soumis. Mais j'étais spécial. »
Sa voix était douce, et Harry ne le reconnaissait plus. Il l'écoutait attentivement, décelant ses failles, chose inédite dans l'histoire. Son arrogance transparaissait dans son discours, quelques points ne changeraient jamais.
« Il m'a confié une mission afin d'acquérir sa confiance et une marque future. Vous pouvez constater que mon bras n'a pas été sali. »
Il releva sa manche gauche et dévoila une peau pâle totalement nue. Harry fixa son avant-bras blanc et fin.
« Je devais tuer Dumbledore. J'avais un an pour réussir. Ca m'a surpris qu'il me confie cette mission, mais comme le petit con que j'étais à l'époque, j'étais plus que fier. »
Il soupira. Le suspens augmentait, et il en jouait. Il n'avait pas baissé sa manche et le brun avait toujours le regard porté sur lui. Il venait de montrer son changement de conscience, de but à travers ses paroles.
« J'ai donc passé cette année à essayer de trouver de multiples moyens afin de vaincre Le Seul Qu'il Ait Jamais Craint. Et j'ai réussi. Le moyen, vous le connaissez, pas besoin de m'étendre sur le sujet. Le fait est que je n'ai pas réussi à tuer Dumbledore. Quelque chose m'en empêchait. Et c'est là que j'ai découvert ma conscience. Si j'avais eu le temps, je crois que j'aurais épargné Dumbledore. Mais Rogue est arrivé. Croyez moi ou non, mais je regrette ce qu'il s'est passé. »
Il termina son récit et releva la tête, cherchant la compréhension et le soutien dans les yeux émeraude du brun en face de lui. Il le trouva, et celui-ci se permit un sourire.
Le silence s'installa alors que les deux 'ennemis' se cherchaient du regard. Le sort semblait avoir un effet spécial doublement répété, et la magie semblait couler en eux. Ils ne s'étaient pas interrogés sur les éléments de la cérémonie, préférant vider leur esprit. Mais maintenant qu'ils avaient les yeux comme soudés, ils en ressentaient tous les effets.
