Chapitre deux : Reflet

L'oncle Vernon fit irruption dans la chambre d'Harry suivi de près par la tante Pétunia. Tous deux avaient la dure expression de ceux qui venaient d'être sortis d'un sommeil paisible par le son d'un cri. Vernon tapa alors violemment l'interrupteur jusqu'à ce que la chambre soit inondée de lumière.

"Que diable est tu en train de faire mon garçon ! As-tu seulement une idée de l'heure qu'il est ?" cria t-il. "Je ne laisserai pas ma famille se faire réveiller à n'importe quelle heure de la nuit !"

Harry ne répondit pas. Encore paralysé par la terreur de son cauchemar, il s'assit seulement sur son lit, regardant en face de lui d'un œil vitreux, tremblant et couvert de sueur. La tante Pétunia remarqua son état, et l'espace d'un instant, elle sembla prête à aller vers lui, et qui sait, peut être même le réconforter. Cependant, elle se reprit juste à temps, et la moue désapprobatrice qu'elle réservait uniquement à Harry apparut sur son visage. Elle croisa ses bras sur sa poitrine et laissa Vernon continuer de s'acharner sur leur neveu.

"Certaines personnes dans cette maison travaillent pour gagner leur vie, Potter. Si tu veux que je continue à mettre de la nourriture sur la table et des vêtements sur ton corps ingrat, tu ferais mieux de me laisser avoir une bonne nuit de sommeil ! Et ta fenêtre est ouverte ! Qu'est-ce que je t'ai dit à propos de ça, mon garçon ! Je ne veux pas que les voisins sachent ne serait-ce qu'une miette de ton…anormalité. Tu dois garder cette fenêtre fermée, tu m'entends ? Et de plus…"

Une autre porte s'ouvrit dans le couloir et Dudley, le cousin d'Harry, se traîna d'un air endormi dans la chambre. Bien que le cri d'Harry ne l'avait pas réveillé, les aboiements de son père étaient assez bruyants pour faire vibrer les fenêtres. Même à travers la brume présente dans ses yeux due au brusque réveil, Dudley comprit de quoi il s'agissait et sourit stupidement à Harry. Dudley adorait entendre son père s'acharner sur Harry.

"Je…je suis désolé, oncle Vernon." Dit Harry, calmement, en essayant de cacher les trémolos de sa voix. Il n'avait pas la force ou la volonté de se battre avec son oncle, et il ne voulait pas que l'Ordre ait une excuse pour essayer de venir à son aide. "Cela ne se reproduira plus."

"Et comment que cela n'arrivera plus, mon garçon !" cria l'oncle Vernon, son visage devenant violacé à mesure que sa colère augmentait. "Je me fiche de ce que tu as à faire pour étouffer ce hurlement, bâillonne-toi s'il le faut, mais je ne serais pas réveillé au milieu de la nuit encore une fois ! Hurler comme un fichu bébé ! Est-ce que tous les sorc…"

"Vernon !" siffla la tante Pétunia. "La fenêtre !"

Vernon s'arrêta au milieu de sa phrase. Personne dans la chambre n'arrivait à croire qu'il avait pratiquement dit "sorcier", un mot aussi interdit chez les Dursley que le pire des jurons imaginables.

Sans un autre mot, Vernon traversa la chambre à grands pas et ferma la fenêtre violemment. Il s'arrêta et se tourna pour faire face à Harry, ouvrant sa bouche furieusement comme s'il s'apprêtait à crier une nouvelle fois. A la place, il avança sa main et frappa Harry sur le côté du visage tellement fort qu'Harry tomba pratiquement de l'autre côté du lit.

Sans un autre mot, il lui tourna le dos, passa entre Pétunia et Dudley et retourna dans sa propre chambre. Maintenant que le spectacle était fini, Dudley sourie bêtement à Harry avant de regagner sa chambre lui aussi. La tante Pétunia jeta un dernier regard furieux à Harry et fut surprise de voir que, bien que le garçon n'avait produit aucun autre son, une larme unique s'échappa de son œil gauche et descendit le long de sa joue. Sans dire un mot, elle quitta la chambre, fermant la porte doucement derrière elle.

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Après que sa famille eut quitté sa chambre, Harry se leva finalement de son lit, essuyant les larmes de son visage. La tante Pétunia avait probablement pensé qu'il pleurait à cause du coup de Vernon, mais la vérité était que le cauchemar duquel il venait juste de sortir, après le choc initial, le laissa avec une grosse boule dans la gorge et une telle douleur dans la poitrine qu'il avait l'impression que son cœur allait exploser. Il fit la grimace, luttant contre le désespoir qui voulait tellement remonter à la surface.

C'est ma faute. Sirius est mort à cause de moi.

Harry savait au plus profond de lui que c'était vrai. S'il n'était pas allé au Département des Mystères cette nuit là, Sirius ne serait pas mort. Combien d'autres victimes y aurait-il encore ? Pas pour la première fois, Harry souhaita ne pas être le Garçon-qui-a-survécut. Depuis sa première année à Poudlard, il avait souvent souhaité que la célébrité de son statut de celui qui a vaincu Voldemort disparaîtrait simplement. Cette nuit, il ne souhaitait pas ça. Cette nuit, il souhaitait avoir succombé en même temps que ses parents. Il ne pouvait tout simplement plus supporter la souffrance liée à sa propre existence.

Contre sa volonté, plus de larmes de désespoir coulèrent de ses yeux verts sur ses joues rougies et humides. Il les essuya, trouvant la chambre sans air d'une chaleur étouffante. Ecoutant de manière à être sûr qu'il n'entendait pas les Dursley de l'autre côté de sa chambre, Harry se dirigea vers la fenêtre pour l'ouvrir une nouvelle fois. Il savait qu'il n'avait pas à s'inquiéter à propos des nouveaux cauchemars pour cette nuit, puisqu'il ne dormirait plus cette nuit.

Car aucun d'eux ne peut vivre tant que l'autre survit…

Lorsqu'il atteint la fenêtre, il vit dans la vitre, à la place de son propre reflet, un autre visage. Un visage horriblement familier. Un visage ressemblant plus à un serpent qu'à un être humain, un visage avec des yeux rouges, diaboliques, et des fentes étroites où le nez aurait dû être. Lord Voldemort regardait à travers la vitre d'Harry, son visage déformé par un sourire malveillant.

"Je te vois, Harry Potter. C'est seulement une question de temps. Tu es prêt à mourir, je peux le voir dans tes pensées. J'attend ce plaisir avec impatience…"

Le visage disparut. La cicatrice d'Harry explosa en une douleur inouïe et il tomba à genoux, agrippant son front. Il avait envie de vomir. Son corps, affaibli par le manque de repos et de nourriture tremblant et d'une teinte fantomatique, capitula finalement, et Harry tomba sur le sol, sans connaissance.

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Molly finit sa lettre pour Harry et l'attacha à la patte d'Errol, ouvrant la fenêtre du salon pour l'envoyer porter son message à Privet Drive dans la nuit noire. Pendant des années, elle avait apprit à s'inquiéter autant pour Harry que pour ses autres enfants, mais elle ne pouvait pas se rappeler un temps où elle avait été plus inquiète vis-à-vis des siens que vis-à-vis d'Harry en ce moment. Qu'est-ce que le pauvre garçon devait traverser…elle n'aimait pas penser à lui seul avec les Dursley quand il était dans un état sentimental aussi fragile.

Feraient-ils attention à lui ? Etre sûr qu'il mange, être sûr qu'il dorme ? S'assureraient-ils qu'il sorte au soleil ? Molly doutait beaucoup de ça, et elle savait que les Dursley ne feraient pas en sorte d'être disponible si Harry avait besoin de parler, mais Harry ne leur demanderait rien de toute façon. Elle le voulait loin de ces gens, elle le voulait ici, dans le monde auquel il appartenait, avec elle et le reste de la famille, et avec Rémus, le dernier ami de son père.

Qu'importe ce que disait Rémus, Molly avait planifié dans sa tête que si Harry ne répondait pas à sa lettre directement, ne donnait pas un compte rendu plus détaillé de ce qu'était sa vie cet été, n'était pas honnête avec elle, elle et Arthur visiteraient Privet Drive ensemble dans un futur proche. Dumbledore soit maudit. Personne n'y échappait lorsqu'il s'agissait des enfants de Molly.

"Maman ?" La plus jeune et unique fille de Molly entra dans la pièce juste après elle. Molly se retourna pour lui faire face, espérant que son inquiétude ne soit pas trop évidente sur son visage.

"Oui, Ginny ?"

"Est-ce qu'Errol porte une lettre à Harry ?" Ginny Weasley était très observatrice et elle avait vu que sa mère se tourmentait sur cette lettre plus tôt dans la soirée.

"Juste une petite lettre, chérie, pour lui faire savoir que nous sommes là en cas de besoin." Molly essaya vivement de ne pas transmettre son angoisse à sa fille, ils étaient déjà suffisamment inquiets sans qu'elle n'ajoute ses propres peurs à leur fardeau.

"Il est là-bas depuis cinq jours déjà et nous n'avons eu aucune nouvelle de lui, excepté cette courte lettre il y a deux jours. Je suis inquiète, maman. Harry a une chouette. Pourquoi ne répond-il pas à nos lettres ?"

Molly s'approcha de sa fille et l'enlaça fortement, répondant à sa question à travers son étreinte. "Harry a beaucoup de chagrin en ce moment, Ginny. Il a perdu le seul parent qu'il avait jusqu'ici. J'imagine qu'il n'écrit pas parce qu'il ne sait juste pas quoi dire."

"Pourquoi maman ? Pourquoi Harry ne peut il pas être ici ? Il a besoin de nous, et on a besoin…" Elle se tut, rougissant légèrement. Molly se dégagea des bras de sa fille et étudia son visage attentivement.

"Ginny, chérie…y'a-t-il quelque chose dont tu voudrais me parler ?"

Ginny soupira, baissant les yeux pour éviter le regard de sa mère. "Non maman…je suis juste inquiète, c'est tout. Ron aussi…même Fred et Georges sont inquiets."

"Je sais…je sais Ginny. Mais le professeur Dumbledore a dit que Privet Drive était le seul endroit où Harry peut être en sécurité en ce moment…il doit simplement y rester, pour son bien. Il n'y a plus que quelques semaines, chérie, jusqu'à son anniversaire."

"Est-ce que Harry viendra ici pour son anniversaire ?"

"C'est ce que nous avons prévu. J'ai une idée…pourquoi est-ce que toi, Ron, et Fred et Georges ne nous mettriez pas ensemble et prévoyiez une petite fête pour l'anniversaire d'Harry lorsqu'il arrivera ? Je suis sûre qu'il aimerait ça…"

"Maman, c'est génial !" dit Ginny joyeusement. "Bien sûr que nous allons prévoir une fête pour lui ! Est-ce que tu cuisineras et lui fera un gâteau ? Il n'a jamais vraiment eu de gâteau d'anniversaire avant, avec seize bougies ? Et nous pouvons inviter quelques uns de nos amis aussi, pour qu'ils soient là ?"

Molly sourit doucement devant l'enthousiasme de sa fille, et elle ébouriffa les cheveux de Ginny avec affection lorsqu'elle répondit, "Je serai ravie de faire un gâteau d'anniversaire pour Harry, chérie…mais j'ai bien peur que la fête ne puisse seulement réunir les membres de l'Ordre du Phénix, notre famille et Hermione…Nous ne pouvons tout simplement pas laisser trop de monde venir au quartier général, ce ne serait pas prudent." Ginny était finalement heureuse de cette réponse…si elle avait invité d'autres personnes, elle aurait du inviter son petit ami, Dean Thomas, et cela aurait pu être tendu…mais pourquoi, se demanda t-elle ? Ce n'était pas comme si elle ressentait encore quelque chose pour Harry…

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Harry se réveilla par le soleil éblouissant de l'été qui entrait à travers la fenêtre de sa chambre, et fut perplexe en premier lieu sur la manière dont il avait pu finir endormi sur le sol…et comment il avait bien pu faire pour dormir aussi longtemps. Le réveil sur sa table de nuit indiquait qu'il était presque midi ! Pourquoi sa tante ne l'avait-elle pas levé afin qu'il l'aide pour le petit déjeuner ? – même s'il n'était pas entièrement confiné dans sa chambre, il n'était jamais autorisé à ne rien faire et à se reposer-… et, par la barbe de Merlin, que faisait-il par terre ?

Sa cicatrice l'élança alors familièrement, et lorsqu'il leva la main pour la toucher, les évènements de la nuit dernière lui revinrent immédiatement. Harry sauta sur ses pieds, attrapant sa baguette sur sa table de nuit, se déplaçant plus vite qu'il ne l'avait jamais fait depuis son retour à Privet Drive. La maison était calme…trop calme.

Enfilant le même jean large qu'il avait porté le jour précédant et un tee shirt d'un vert vomi révoltant, Harry sortit de sa chambre à pas de loups et descendit les escaliers. Il s'effondra quasiment de soulagement quand il entendit de l'eau couler dans la cuisine et les rires préenregistrés venant de la télévision dans le salon. Il cacha sa baguette derrière son tee shirt et continua jusqu'à la cuisine réalisant que ce bref sursaut d'énergie l'avait rendu fatigué de nouveau.

La tante Pétunia était en train de nettoyer la cuisine, regardant comme d'habitude à travers la fenêtre pour espionner les voisins. Harry entra dans la pièce tranquillement et s'assit à la table de la cuisine, reposant sa tête endormie entre ses mains.

"Nous avons prit le petit déjeuner il y a des heures", dit la tante Pétunia d'un ton cassant. "Vernon a décidé que si tu n'étais pas assez responsable pour descendre toi-même, tu ne mangerais tout simplement pas. Il faudra que tu attendes pour le déjeuner."Harry ne répondit pas, il n'avait pas faim de toute façon. Son esprit continuait de penser à la vision de Voldemort le regardant à travers la fenêtre de sa chambre.

Harry savait maintenant que Voldemort n'avait pas pu être vraiment là…il avait du utiliser la légilimencie pour entrer dans l'esprit d'Harry. Encore une fois, ce souvenir était une autre chose qu'Harry pouvait ajouter à sa liste d'articles qui dérangeaient son esprit cet été. Et comment Voldemort était-il entré dans sa tête alors qu'il était à Privet Drive ? Cela n'était jamais arrivé avant.

Tu es prêt à mourir. Je peux le voir dans tes pensées. J'attends ce plaisir avec impatience…

Bien qu'il avait eu peur la nuit précédente, Harry ne pouvait même plus rassembler assez de volonté pour s'inquiéter de nouveau.

"Harry", dit la tante Pétunia abruptement. Harry tourna sa tête rapidement pour voir sa tante le regarder intensément, presque de manière inquiète. Il réalisa que c'était l'une des rares fois où elle s'adressait à lui par son prénom.

"Oui, tante Pétunia ?"

"Que…De quoi est-ce que tu rêvais la nuit dernière ? Que s'est-il passé ?"

Harry fut tellement abasourdi qu'il mit du temps à sortir de sa stupeur. "Je rêvais de…" Il ne pouvait pas lui parler de la prophétie. "Je rêvais de Sirius…et de comment il…comment il est mort", répondit Harry essayant de ne pas buter sur ses mots tandis que sa gorge se serrait de nouveau.

Pour il ne savait quelle raison, il vit un signe de soulagement définitif passer sur le visage étroit de sa tante. "Sirius", dit elle d'un ton cassant, ressemblant plus à l'image qu'elle donnait d'elle d'habitude. "Ton parrain est mort alors." C'était dit sans une trace d'émotion, ni aucune question vis-à-vis de ce qui s'était passé.

"Oui." Harry baissa les yeux. Il ne voulait pas parler de Sirius en ce moment. C'était d'ailleurs l'une des raisons pour laquelle il évitait de communiquer avec l'Ordre.

"Alors ce rêve, il n'avait rien à voir avec l'homme qui a tué tes parents ?"

"Pas directement, non."

"Donc nous sommes toujours en sécurité ici."

"Autant que je sache, oui." Harry, bien sur, n'allait pas dire à sa tante qu'il avait vu le visage du seigneur des ténèbres à travers sa fenêtre la nuit dernière.

"Bien. Remonte dans ta chambre et fais toi présentable pour le déjeuner." Et sans un autre regard, la tante Pétunia lui tourna le dos et reprit son nettoyage.

Lorsque Harry retourna dans sa chambre avec l'intention de rassembler ses affaires et d'aller prendre une douche, la première chose qu'il vit fut un hibou trempé et couvert de boue perché précautionneusement sur le rebord de sa fenêtre, un bout de parchemin attaché à sa patte. Harry traîna les pieds pour s'approcher de la vitre, se souvenant bien trop clairement de ce qui s'était passé la nuit précédente. En plus de ça, il n'avait vraiment pas envie de lire une autre lettre des Weasley. Il avait reçu une lettre de Ron et une de Ginny et ne leur avait pas encore répondu. Il savait qu'ils étaient probablement en colère contre lui, mais il n'avait pas la force de leur écrire.

Harry ouvrit la fenêtre pour laisser passer Errol. L'oiseau vola immédiatement vers son lit et tomba dessus, se retrouvant sur le dos. Harry déroula le parchemin et fut surprit de voir la petite écriture fluide de Mrs Weasley. Elle ne lui avait jamais envoyé de hibou avant.

"Harry, mon chéri,

Comment vas-tu jusqu'ici ? Nous sommes tous un peu inquiet pour toi. Tu as seulement envoyé cette courte lettre hier, et ça ne nous a pas donné beaucoup d'informations j'en ai peur.

Est-ce que les Dursley te traitent bien mon chéri ? Est-ce que tu manges bien ? Et dors bien aussi ? Harry, je sais que ça doit être le pire été de ta vie jusqu'à présent, et je connais la douleur que tu dois ressentir pour la perte de Sirius. Nous sommes là pour toi Harry. Nous tenons à toi. Et même si nous ne sommes pas en mesure d'être ensemble en ce moment, ce ne sera pas long. Merci de nous envoyer une réponse dès que tu peux et de nous laisser savoir comment tu vas.

Tu nous manques et nous te ferons sortir de là dès que nous le pourrons, je te le promets.

Affectueusement,

Molly Weasley."

Harry s'assit sur son lit à côté d'Errol et ferma ses yeux. Il pouvait presque entendre la voix maternelle de Mrs Weasley à travers le parchemin, et il ne le voulait pas. A cause de lui, son fils et sa fille avaient été blessés au Département des Mystères. A cause de lui, ils auraient pu mourir.

Celui qui a le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres naîtra lorsque mourra le septième mois…

A cause de lui, la famille entière de Mrs Weasley, elle incluse, était encore plus en danger que les membres de l'Ordre eux même. Mais elle ne le savait pas, bien sûr. Dumbledore avait promis qu'Harry n'aurait à parler de la prophétie que lorsqu'il serait prêt … et il ne le serait jamais, songea t'il.

C'est toi , Harry. Ca a toujours été toi. C'est toi, et encore plus de monde va mourir à cause de ça. Je suis mort à cause de ça. Je suis mort à cause de toi.

Il savait que Mme Weasley ne serait plu la même si elle savait. Il n'était pas son fils, après tout, et même si elle avait dit l'année précédente que c'était comme s'il l'était, Harry savait que ce n'était pas pareil. Si Ron ou Ginny étaient morts…S'ils étaient morts à cause de lui, Mrs Weasley ne lui pardonnerait jamais. Et Harry ne se le pardonnerait jamais. Il savait qu'il devait renvoyer Errol avec une réponse, ou les membres de l'Ordre se montreraient sur le palier de Vernon ; même si trois jours ne s'étaient pas écoulé . Il savait qu'il ne pourrait pas les regarder dans les yeux, alors il marcha jusqu'à son bureau et sortit un morceau de parchemin.

"Chère Mrs Weasley,

Merci pour cette lettre et votre attention, mais je vous promet que je vais bien. La tante Pétunia me nourrit comme il faut, et je me repose assez."

Harry avait envie de rentrer sous terre. Il n'avait jamais menti à aucun des Weasley. Mais cette fois, il savait qu'il devait le faire.

"Je passe le plus de temps possible dehors. Cet été n'est pas aussi chaud que le précédent, et cela est agréable à Little Winging. Faire de longues promenades m'aide à me sortir de mes pensées, comme ça l'a toujours fait.

Est-ce qu'il y a des nouvelles que je devrais savoir ? Dites à Ron et Ginny que je leur écrirai bientôt et qu'ils ne doivent pas s'inquiéter. Je promets, je vais bien.

Sincèrement,

Harry."

Harry regarda la lettre d'un œil critique. Son écriture était bizarre, comme s'il avait eu du mal à empêcher ses mains de trembler. Et presque tout dans cette lettre était un mensonge, mais il ne pouvait pas laisser l'Ordre venir. Il ne mettrait plus aucun d'entre eux en danger à cause de lui. Un été chez les Dursley était un prix faible à payer pour la sécurité de ses amis.

Harry enroula et cacheta le parchemin avec des mains tremblantes, l'attacha à la patte d'Errol et l'envoya à travers la fenêtre retourner au Terrier…ou bien au QG ? Ça ne faisait rien, Errol savait où il pourrait les trouver.

Harry s'allongea sur le dos dans son lit, complètement usé, et se concentra de nouveau sur la fissure présente au plafond, commençant à compter à reculons dans son esprit ne nouvelle fois. Mais à la place de le calmer comme ça le faisait d'habitude, à chaque fois qu'il comptait, un autre des visages de ses amis apparaissait dans sa tête, leurs yeux vides et ouverts, comme ceux de Cédric dans le cimetière.

999, Ron mort. 998, Hermione morte. 997, Ginny morte. 996, les jumeaux morts. 995, Mr et Mrs Weasley morts. 994, Lupin mort...

Harry commença à trembler sans plus pouvoir s'arrêter. Il n'entendit jamais le cri perçant de sa tante qui l'appelait pour manger, ou peu après, qu'il ferait mieux de descendre s'il voulait manger. Harry ne dormit pas, mais il ne bougea pas non plus de son lit pour le reste de la journée.